Bien avant que les échecs modernes ne se structurent autour de tournois internationaux et de titres officiels, des joueurs passionnés ont jeté les bases de tout ce que nous connaissons aujourd’hui.
Ces pionniers — souvent autodidactes, parfois nobles, parfois artistes — ont exploré le jeu, inventé des idées nouvelles, consigné leurs analyses et façonné les premières théories d’ouverture et de stratégie.
À une époque où l’ordinateur n’existait pas, où les livres étaient rares et où chaque découverte relevait de l’intuition, ils ont posé les fondations sur lesquelles reposent encore les principes contemporains.
Leurs idées, leurs parties et leurs manuscrits ont traversé les siècles et influencent toujours notre façon de jouer.
Voici les figures majeures parmi ces bâtisseurs historiques.
Gioachino Greco, dit Il Calabrese, est considéré comme le premier théoricien moderne des échecs.
Né en Calabre autour de 1600, il parcourt l’Europe (Italie, France, Angleterre, puis probablement les Antilles) en vivant de son talent : il consigne ses analyses, joue pour de l’argent et rédige plusieurs manuscrits qui circuleront largement après sa mort.
Ses écrits ne sont publiés qu’au XVIIIe siècle, mais deviennent rapidement la référence incontournable pour tous les joueurs sérieux.
Greco est le premier à consigner des parties modèles, organisées, annotées, et destinées à montrer des thèmes tactiques : pièges d’ouverture, sacrifices, attaques contre le roi.
On lui doit les premiers embryons de ce qu’on appellera plus tard la théorie des ouvertures.
Première approche systématique de l’analyse d’ouverture.
Création de nombreuses lignes tactiques encore jouées dans des variantes ouvertes.
Démonstration de principes fondamentaux : développement rapide, attaque de la colonne f, utilisation des sacrifices.
Parties “modèles” toujours étudiées aujourd’hui pour apprendre les idées tactiques de base.
Greco a compris avant tous les autres l’importance de l’initiative.
Sacrifier un pion (ou plus) pour ouvrir des lignes et attaquer est un thème récurrent de ses manuscrits.
Il n’a pas officiellement donné son nom à une ouverture, mais beaucoup de pièges ou séquences tactiques portent l’étiquette “Piège de Greco”, notamment dans l’Italienne, la Défense Philidor et les débuts ouverts en général.
Pourquoi il est incontournable ?
Parce qu’il a été le premier à organiser la pensée échiquéenne, en passant d’un jeu pratiqué à un jeu analysé, expliqué, transmis.
Sans Greco, pas de base théorique pour Philidor, Staunton ou Steinitz un siècle et demi plus tard.