So Many Letters

Pour aider les étudiants qui le souhaitent à maintenir le lien avec la communauté HEC au-delà des murs qui nous sont imposés, un "fil de mots" est mis à votre disposition sur cette page. Chronique personnelle ou exercice d’introspection et de réflexion à propos de votre cheminement au sein de l’école, cet espace vous est ouvert... Envoyez-nous vos contributions : somanyletters.hec@gmail.com

Beyond the walls that surround us, we offer HEC students a place to exchange letters with the rest of their community. To enrich this "thread of words", please submit your writings, your personal chronicles and your thoughts about your own journey within HEC. This space is open to you ... Send us your contributions to: somanyletters.hec@gmail.com


L’Exil et le Royaume


“On ne sait jamais précisément quelle place on occupe dans la vie des gens”, disait F. Scott Fitzgerald. Mais aujourd’hui, on ne sait surtout jamais précisément lorsque nous les retrouverons. Pire encore, pour certains nous ne savons même pas si nous les reverrons. Je profite donc de cette page pour adresser mon soutien à tous ceux pour qui la situation est particulièrement terrible. Je mesure la chance que j’ai en comparaison... Cependant, il ne faut pas s’en cacher : les souffrances et les difficultés de beaucoup d’entre nous sont bien antérieures. L’acuité de cette crise les démultiplie et les exacerbe à l’échelle de l’humanité. Elle nous aide à en prendre conscience, mais elle n’en est pas l’aurore, loin s’en faut.


Le confinement nous sépare physiquement. Physiquement seulement en principe puisque, avec les nouvelles technologies, la géographie des relations s’est depuis longtemps transformée en archipel. Dépasser cette séparation requiert néanmoins de renouveler nos relations. L’inédit réside à présent dans l’absence de tout contact physique, l’île centrale au coeur de l’archipel s’étant drastiquement réduite. Assurément, tout échange virtuel n’est pas condamné à être artificiel et superficiel. Loin de là. Si rien ne remplace la présence physique d’un être cher, il est heureux que ces déchirements soient, pour la plupart, temporaires.


Nous sommes donc enjoints à un retour à l’essentiel. Relationnel mais aussi personnel. Très délicat. En effet, “l’essentiel est sans cesse menacé par l’insignifiant” (René Char). Mais fondamental. La première et la plus grande liberté, c’est celle vis-à-vis de soi-même. Celle que l’on ne peut trouver que dans ce qui est primordial, élémentaire, capital. Pour autant, il ne faut pas se faire d’illusion : nous ne pouvons nous en sortir que tous ensemble. Le retour à l’essentiel, consiste peut-être aussi à vivifier à nouveau la conscience du fait que notre humanité, l’égalité de chacun en humanité, est notre dénominateur commun. Notre essentiel.


Paradoxalement, cette égalité pourrait être mise en lumière alors que la crise rend patentes et aiguise nombres d’inégalités. Il est notamment déroutant et accablant que certains soient confrontés à l’ennui alors que d’autres, au contraire, souffrent d’une considérable surenchère de leur charge de travail. Inégalité encore insoutenable. A défaut de parvenir à leur être utile, mettons ce temps à profit. Refusons que tout cela ne soit « que du temps déchu, pauvre présomption d'un passage que l'avenir refuse, quelque chose dans le devenir qui est irréparablement moins que l’histoire » (Michel Foucault). Si l’enfermement spatial nous est imposé dans une certaine mesure, l’enfermement temporel ne l’est pas nécessairement. “Nous devrions essayer d’être heureux, ne serait-ce que pour montrer l’exemple”, disais-tu, peu avant que nous quittions abruptement le campus. A six milles kilomètres de distance, j’entends encore tes mots et tu sais à quel point j’estime qu’il faille les faire vivre.


Alors, dans la gravité du moment, à nous d’aménager notre confinement en espace de liberté. A nous d’en faire une évasion et de cette évasion, une guérison. A nous de transformer notre Exil en Royaume.


Nous sommes dans l’inconcevable, mais avec des repères éblouissants. - René Char



Publié sous l'alias "Léo" (Etudiante HEC Paris)

We are all learning so much about our very deep emotions, feelings, reactions, that come to the surface of our minds, and that we never faced before. Some may avoid them, some may ignore, some may fight them, some may use them and so on. This is not a question of right or wrong: that would probably be too rational, or binary. At least, let them come.

Learning to deal with our collective or individual limits, without judgment, and to deal with our imperfections, our doubts, our fears, and yet discovering that, after all, we’re only human.
This is what we share, our unfailing treasure.

In a world where we are often taught to be so strong, to be the best, to plan, to anticipate, to control, we may ask ourselves: what should I be doing right now?
Trying to foresee beyond tomorrow is quite an exercise. Facing the uncertain, brushing against the unknown, flirting with an invisible threat, leaves us powerless forced to dive into some unexplored sides of ourselves and consider new options. How will we cope as humans and as individuals?

So many questions.
Plainly, time will pass, and “things” will never be the same anymore, that is for sure and we hear it all over the place, every day.

Yet, the only thing I can decide today is to assume my humanity.
πR