Séance du 18.10.2022

Le Châtiment

1/ Enregistrement de la séance du 18.10.2022

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       enregistrement séance du 18.10.2022

2/ Plan du cours séance du 18.10.2022

C'est notre 2ème séance sur la question. Après une réflexion d'ordre général, nous abordons la lecture de l'Orestie, grande tragédie d'Eschyle qui se déroule en 3 pièces et est représentée en – 458 à Athènes. Nous aurons probablement à la poursuivre lors de la 3ème séance du 24 novembre.

 

Pourquoi cette lecture ? En nous confrontant à l'existence d'un autre mode de régulation des conflits que celui du droit pénal, elle permet de dégager la singularité de ce dernier et de réfléchir aux raisons qui ont conduit à l'adopter. Quand et comment le droit pénal apparaît-il ? Quand le jugement proprement juridique, - celui qui évalue la culpabilité d'un criminel et se prononce sur son châtiment- , apparaît-il comme l'expression de la souveraineté collective d'une Cité ? Ce sont les questions que suscite cette lecture.

L'Orestie met en scène le grand pas qui conduit de l'enchaînement sans fin de la violence procédant d'une loi archaïque et sacrée de Vengeance, à l'avènement de la justice de la Cité qui s'exerce dans un tribunal. La 1ère partie de l'Orestie est Agamemnon du nom du général en chef des armées grecques qui a vaincu Troie, et est assassiné par son épouse Clytemnestre à son retour dans la Cité d'Argos. La 2ème est Les Choéphores qui traite de l'assassinat de Clytemnestre par son fils Oreste pour venger son père. La 3ème, Les Euménides, montre comment l'institution de l'Aréopage par la déesse Athéna permet de sortir du cycle infernal de la vengeance qui régnait jusque là.

 

1- Le cycle infernal de la vengeance dans Agamemnon et Les Choéphores

Le châtiment comme paiement en retour du crime commis.

 

a- Le retour d'Agamemnon à Argos et son assassinat par Clytemnestre. Pourquoi ce meurtre ?

b- L'ambiguïté tragique de la « faute » :

-         Les interprétations apparemment contradictoires du crime de Clytemnestre (relève-t-il de sa seule responsabilité individuelle, ou est-elle l'instrument du destin qui s'abat sur la famille des Atrides?)

-         La faute comme « souillure » contagieuse (voir les analyses de JP Vernant dans Mythe et tragédie dans la Grèce des Anciens)

c- De la vengeance de Clytemnestre à celle d'Oreste

-         La loi de Vengeance comme loi sacrée : « Une loi doit régner, tant que Zeus régnera : « Au coupable le châtiment » (p- 287)

-         L'aporie à laquelle est condamné Oreste : ou venger son père et tuer sa mère, ou préserver celle-ci et laisser son crime impuni.

-        Le début d'une interrogation sur la légitimité de la loi de Vengeance (« Où donc s'achèvera, où s'arrêtera, enfin endormi, le courroux d'Até ? », p-337)

 

2- Comment rompre avec le cycle infernal de la vengeance ? Qu'en sera-t-il du sort d'Oreste ?

Alors que l'attention se portait jusqu'ici exclusivement sur les victimes non vengées (elle exigent leur « dû »), elle se déplace maintenant sur le criminel : on s'interroge sur sa culpabilité.

 

a- La solution du dieu Apollon (il a ordonné à Oreste de venger son père et s'est engagé à le protéger) : le sacrifice (voir les analyses de René Girard dans La violence et le sacré). Cette solution échoue du fait de la division qui affecte dorénavant le monde divin (les anciennes divinités vengeresses que sont les Erinyes reprochent aux jeunes dieux comme Apollon d'avoir « déchiré l'antique partage » (p- 355)

b- La question du sort d'Oreste devient l'enjeu d'un conflit opposant deux puissances divines, et avec elles, deux formes de justice. Le problème central est dès lors celui de savoir ce qui est vraiment juste (la loi de Vengeance est-elle vraiment légitime?) Quelle justice doit prévaloir ? Selon la réponse à ces questions, Oreste sera irrémédiablement exposé au châtiment, ou disculpé.

 

3- Athéna et l'institution de l'Aréopage

 

a- L'apparition de la déesse Athéna transforme l'atmosphère de la tragédie : elle abandonne la justice religieuse traditionnelle et sa pratique rituelle du « serment » au profit d'une justice qui délibère du cas du criminel et évalue son acte

b- Athéna institue l'Aréopage, tribunal chargé de juger des affaires criminelles (p- 365-366)

 

Notre lecture n'ira sans doute pas plus loin lors de cette séance, afin d'éviter qu'elle soit trop longue. Lors de la séance suivante, nous montrerons pourquoi l'institution de l'Aréopage permet de sortir de l'impasse tragique à laquelle mène le conflit des dieux, comment se déroulera le vote qui permet l'acquittement d'Oreste, et comment enfin Athéna devra s'y prendre pour apaiser la colère des Erinyes à l'annonce de ce verdict. Notre réflexion s'interrogera alors sur la spécificité de l'ordre politique de la Cité, et sur le rôle essentiel qu'y joue le théâtre.