Les Orques du détroit de Gibraltar
Les Orques du détroit de Gibraltar
Les Orques sont des habitants emblématiques du détroit de Gibraltar, aux côtés de nombreuses autres espèces de dauphins et baleines. Les membres d’un groupe, ou plus précisément une sous-population de 39 individus répertoriés en 2011, peuvent être observés toute l’année dans le détroit et les zones alentours. Leur présence est très clairement en lien avec la migration du thon rouge, leur proie principale, qui emprunte le détroit pour aller pondre en Méditerranée. La présence des Orques dans le détroit et leur lien avec les thons est décrite depuis plusieurs siècles. Au premier sciècle, l’Orque était décrit comme l’ennemi des baleines dans le Golfe de Cadiz parce qu’ils chassaient les baleineaux et attaquaient les femelles ‘enceinte’. Au XVIeme siècle, il a été rapporté que les thons pouvaient entrer dans une rivière proche de Cadiz pourchassés par des Orques. Il a fallu attendre la fin du 20ème siècle pour qu’on s’intéresse à l’écologie de ce groupe particulier.
L’orque (Orcinus orca) est le plus gros des dauphins et avec leur corps à la couleur noire parsemé de tâches blanches, leur tête au front arrondi sans museau proéminent, ils ne peuvent être confondus avec une autre espèce. Les mâles se distinguent des femelles par un aileron dorsal beaucoup plus développé qui peut atteindre 1.8 m. Les femelles atteignent une taille maximale de 8.5 m pour 2 tonnes et les mâles 9.8 m pour 2.6 tonnes. Les nouveaux nés mesurent entre 2 et 2.4 m et pensent autour de 140 kg.
Photos prise dans le détroit de Gibraltar par Circe.info
Les Orques du détroit sont distincts génétiquement des autres groupes, y compris ceux des Canaries, pourtant proches géographiquement. Ce groupe d’une quarantaine d’individus est suivi depuis plus de deux décennies par une équipe de chercheurs espagnols appartenant à une structure non gouvernementale (Circe.info). Les individus ont tous une sorte de carte d’identité à l’aide de laquelle ils peuvent être reconnus, cela grâce à la photo-identification. Ce groupe a une structure sociale stable et se compose de cinq cellules (‘familles’) qui montrent des comportements distincts en terme de déplacement et d’alimentation. Leur proie principale demeure le thon rouge à l’égard duquel ils ont développé une technique particulière de chasse.
Le thon se dirige de l’Atlantique vers la Méditerranée au printemps pour s’y reproduire, en empruntant le détroit, et effectue le chemin inverse en été. Au printemps, les Orques sont observés à l’entrée Ouest du Détroit où ils chassent le thon en utilisant une technique de chasse à l’épuisement. Les thons peuvent avoir des vitesses de pointe élevées mais qu’ils ne peuvent maintenir longtemps. Les orques se postent en file par groupe de maximum 7 individus distants de 100 à 150m et utilisent leur sonar pour détecter les thons. A l’approche d’un banc ils le prennent en chasse à tour de rôle pendant près de 30 minutes jusqu’à épuisement des thons qu’ils peuvent facilement capturer par la suite. Cette technique marche surtout pour des thons de 0.8 à 1.5 m car les plus gros sont plus endurants et arrivent à leur échapper. Au printemps, ils se retrouvent tous dans la partie Ouest du Détroit de Gibraltar pour chasser le thon, alors qu’en été certains se déplacent vers la partie centrale du détroit où les membres de deux cellules ont appris à dans les années 1990 à happer les thons capturés par les pêcheurs avant qu’il ne soit remonté à bord des bateaux (déprédation). Cela leur donne accès à des thons plus gros et leur permet de mieux s’occuper des nouveaux nés avec un meilleur succès dans la survie des jeunes orques.
Les Orques sont considérés en danger critiques d’extinction en Méditerranée et les zones Atlantiques adjacentes et sont de ce fait protégés dans le cadre d’accords régionaux (ACCOBAMS) et internationaux (CMS, CITES), auxquels adhère le Maroc. L’Espagne a mis en place en 2017 un plan de conservation de cette population d’orques, une démarche dont le Maroc est très éloigné.