Ma vocation... mode d'emploi (par Père Paul csc)
Ceci est un article qui se veut aider des jeunes à prendre une décision dont peut-être leur vie dépendra... Cela peut paraître un peu ambitieux mais quelques constats que j'ai faits et que je fais toujours en rencontrant des jeunes s'imposent quand même... Alors voici quelques trucs si vous cherchez à discerner votre vocation et si vous vous demandez si Dieu vous appelle à lui donner votre vie en vous consacrant... Prenez-les comme ils viennent...
1. Tous appelés...
D'abord, la vocation n'est pas qu'une affaire de sacerdoce ou de vie religieuse... En gros, hors de question de dire que seuls les prêtres et les bonnes soeurs ont un appel !
NOUS SOMMES TOUS APPELES par Dieu : certains à fonder un foyer sur un mariage solide où l'amour humain aura toute sa place (mais l'amour divin aussi je vous rassure !), d'autres à imiter le Christ pauvre, chaste et obéissant, en se consacrant comme religieux, religieuse, moine, laïc consacré etc... (de côté, il y a tellement de choix qu'on peut en être désemparé), enfin des jeunes hommes reçoivent l'appel particulier au sacerdoce, à travers lequel le Christ continue sa mission sur terre.
Dans cette optique, il y a donc à faire un effort de conversion pour se sentir CONCERNE par "la vocation", c'est à dire l'appel de Dieu au sens large. La question unique à se poser, c'est "comment vais-je devenir un saint, une sainte ?"...
Car il s'agit bien de SAINTETE ! La vocation est le chemin par lequel j'arriverai à devenir un saint. Et la sainteté, c'est clair, nous y sommes tous appelés :
- "Soyez saints, car moi, le Seigneur, je suis saint" (Lv 19, 2)
- "Vous donc soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait" (Mt 5, 48)
- "Ayant donc de telles promesses, bien-aimés, purifions-nous de toute souillure de la chair et de l'esprit, en achevant notre sanctification dans la crainte de Dieu" (2 Co 7, 1)
2. J'ai beau chercher, je ne sais pas si Dieu m'appelle. C'est normal ?
Une chose est sûre : Dieu ne veut pas nous torturer avec des questions et des incertitudes... Il veut notre joie, notre bonheur, notre bien-être !
J'ai rencontré pas mal de jeunes qui se demandent si Dieu ne leur aurait pas "réservé" une petite vocation sacerdotale par ci, ou un appel à la vie monastique par là... L'expérience montre que lorsque Dieu a eu un message à faire passer, il a toujours su s'y prendre avec nous... La Bible en est pleine d'exmples, d'ailleurs.
Dieu ne laisse personne se fourvoyer ou se tromper de chemin.
Par contre, certains ne se posent pas même la question... et là c'est grave ! Et surtout tellement dommage ! Que de temps perdu, que de déceptions, d'impressions d'avoir gâché sa vie... C'est pas le but, quand-même !
L'attitude juste est donc la DISPONIBILITE. On ne peut entendre un appel (que ce soit à la vie consacrée ou au mariage) que lorsqu'on est totalement disponible. Si mon portable est éteint, on aura beau m'appeler, j'entendrai jamais. Ouvrez-donc votre portable spirituel !!! Si Dieu a quelque chose à vous dire, il vous le dira. Assurez-vous simplement d'être à l'écoute (voir plus bas dans cet article sur "comment discerner les signes de ma vocation ?").
Dernière chose : Dieu n'appelle pas toujours au moment où on s'y attend. Nous avons un regard étriqué, étroit sur notre propre vie. Dieu, lui, choisit toujours le meilleur moment, même si nous ne voyons pas toujours pourquoi c'est le bon moment... Il faut parfois lui laisser du temps...
Si au cours d'une veillée ou d'un temps de prière tu demandes à Dieu : 'vas-y, appelle-moi, je suis prêt à découvrir ma vocation !', ne t'étonne pas s'il ne te répond pas sur le champ. Rends grâce en te disant que le moment de la "révélation" sera toujours meilleur que celui où tu es.
3. La vocation, rencontre de deux libertés
Il y a des jeunes qui voudraient à tout prix que Dieu les appelle dans telle ou telle voie. Et d'autres qui au contraire ne voudraient surtout pas être appelés à devenir religieuse ou prêtre !
Que les uns et les autres se rassurent ! Je n'imagine pas que Dieu vous appelle à faire le contraire de ce qui vous rendrait heureux ! Encore une fois, il veut faire notre joie et notre bonheur avant tout !
Deux réactions face à ces situations :
- la première : ne pas s'affoler ! La vocation est la rencontre de ma liberté et de celle de Dieu. Personnellement je ne me suis pas senti "obligé" de devenir prêtre. J'aurais pu dire non. Je ne l'ai pas fait parce que j'ai bien senti que mon vrai bonheur serait de répondre positiviement à l'appel de Dieu. Mais ma vocation ne s'est jamais présentée à moi à l'impératif. Plutôt du genre : "Voudrais-tu devenir prêtre ?" Dieu respecte ma liberté.
- la seconde : savoir se laisser surprendre... Qu'est-ce qui vous dit que vous ne seriez pas heureux comme prêtre, religieux, religieuse ? Qu'est-ce qui vous dit que vous seriez plus heureux marié ? Le monde d'ajourd'hui est orienté vers les loisirs, le plaisir... parfois au détriment du VRAI BONHEUR... Et puisque nous vivons en plein dedans, il est bien normal de se laisser parfois séduire par les attraits de notre société post-moderne... Il faut savoir se poser la question en vérité : est-ce que vraiment cela me rendrait aussi malheureux que je l'imagine ? Je ne connais pas de vocation qui n'ait sa part de renoncement... Mais les difficultés et les renoncements ne valent-ils pas le coup ? A vous d'y réfléchir !
4. Comment discerner les signes de ma vocation ?
Toute vocation est unique, elle a sa propre histoire, elle est la rencontre entre un Dieu souverain et libre et un homme ou une femme souverains et libres... Mais il y a des constantes dans la multitude de ces histoires... J'essaie ici d'en dégager quelques unes...
La Parole de Dieu est le premier critère de discernement : il faut savoir se référer souvent à l'Ecriture pour discerner. Dieu se révèle en elle. L'Evangile est vraiment riche en histoires de vocations : les Apôtres, le jeune homme riche, mais aussi les noces de Cana etc... Bien sûr ce n'est pas toujours facile de comprendre tout cela, et l'Ecriture a une portée universelle : elle s'adresse à tout le monde, les gens mariés aussi bien que les prêtres ! Comment faire alors pour se servir de la Bible dans le "processus" qu'est le discernement d'une vocation ?
Eviter, à mon sens, d'ouvrir une page "au hasard" et de se dire qu'elle s'adresse à nous comme une réponse instantanée... Mais plutôt, avoir une bonne pratique de la Bible, la lire chaque jour, même si c'est un petit peu... Et laisser remonter des profondeurs de ma mémoire et de mon coeur les versets qui m'ont marqué, à travers lesquels Dieu a peut-être voulu me parler, me dire quelque chose de plus précis.
Mes goûts sont aussi importants ! Ce que j'aimerais faire, ce qui me plairait... pensez à ce qui vous a fait rêver dans votre enfance, votre adolescence. Dans ces différents métiers dans lesquels vous vous êtes sans doute projetés, quels aspects particuliers ont retenu votre attention, et vous ont plu ? Etait-ce la rencontre avec les autres ? L'intimité d'un foyer ? La fraternité d'une vie communautaire ? Pouvoir assurer une vie bonne à vos enfants ? L'éducation de jeunes ? La célébration de sacrements ? L'accompagnement de malades, de familles en deuil ? Etc...
Les personnes que j'ai rencontrées sont aussi importantes ! Quel prêtre, quel couple m'ont marqué ? Qui a eu une influence importante sur ma vie ? Dans quelle mesure les personnes que je côtoie m'ont permis de me projeter ? Quels sont les exemples que j'aimerais suivre ?
De manière plus rare, les sentiments que j'ai éprouvés, certains ressentis, sont aussi des signes que Dieu utilise pour me faire sentir sa présence. Mais attention ! Tout ne peut pas être réduit à une affaire de sentiments ! Il y a aussi un discernement entre les bons et les mauvais sentiments ! Lorsque les sentiments relèvent du trouble, de l'angoisse, ils ne sont pas à prendre comme signes de l'action de Dieu. L'action de Dieu laisse d'abord une grande paix et une joie intense. N'ayons pas peur de lui demander de se faire "sentir" dans notre vie. Il saura le faire, toujours lorsque nous en avons vraiment besoin.
Enfin, mes facultés et mes talents sont aussi un signe évident de ce que peut être ma vocation particulière. Inversement mes handicaps, mes défauts, mes limites peuvent aussi me fermer des portes, comme c'est d'ailleurs le cas pour certains métiers (par exemple on ne peut pas devenir pilote de chasse avec une mauvaise vue)... Ne soyez pas tristes si vos limites vous ferment des portes que vous auriez aimer ouvrir... Ce n'était sans doute pas votre vocation... vous pouvez vous sentir un peu malheureux sur le coup, mais dites-vous que Dieu a un bonheur encore plus grand en réserve pour vous ! Ce n'est pas un lot de consolation, c'est le gros lot, qui ne vous avait tout simplement pas sauté aux yeux dès le début !
5. Ne pas se perdre en questionnements fumeux...
C'est le dernier mais le plus important et le plus sérieux des points que je voudrais aborder.
Il est d'usage de dire aux jeunes : tu dois chercher à trouver un équilibre, tu dois te poser, t'épanouir...
C'est drôle, on n'ose plus dire aux jeunes : tu dois trouver le vrai bonheur, tu dois parvenir à la sainteté !
La source de toute vocation c'est la recherche conjointe du bonheur et de la sainteté.C'est une certitude qui devrait nous sauter aux yeux à tous ! Sinon, il n'y a pas de vocation, pas d'appel de Dieu.
Bon, alors maintenant, je laisse de côté le "politiquement correct".
Un objet équilibré, ce n'est rien d'autre qu'un objet immobile. Sans mouvement. Une fleur épanouie, ce n'est rien d'autre qu'une fleur prête à se faner et à mourir. Vous les jeunes, ne cherchez pas l'équilibre, cherchez plutôt à bien positionner votre centre de gravité. S'il est dans le ciel, vous irez au ciel, irrémédiablement attiré par les "réalités d'en-haut". Si vous placez votre centre de gravité sur la terre, vous serez assuré de ne pas tomber, car vous ne quitterez pas le sol d'où vous avez été tirés...
Combien de vocations se perdent parce que des jeunes se demandent pendant des années beaucoup trop longues s'ils ont bien raison de tout quitter pour le Christ ? Si ils trouveront leur équilibre dans cette communauté ? S'ils vont s'épanouir en devenant prêtre ou religieux ?... Résultat des courses, ils prennent tellement de temps pour prendre une décision qu'ils sont déjà devenus trop âgés, indépendants, et incapables de s'adapter à une nouvelle vie... QUEL DOMMAGE ! Il y en a tant !!! Ca me rend malade, je vous l'assure.
Jésus, dans l'Evangile, n'appelle pas les Apôtres à le suivre en leur disant : "Suivez-moi, si vous voulez être des gars épanouis, équilibrés et biens dans leur peau"... Jésus les appelle simplement à TOUT DONNER : "Vends tous tes biens, donne-les aux pauvres, puis viens, et suis-moi" (Mt 19, 21). Il manque à notre monde occidental, vieux et égocentrique, un peu de cette folie évangélique.
Suivre Jésus en renonçant à tout pour lui... Un truc de malades, c'est clair ! Mais "Cherchez d'abord le Royaume de Dieu et sa justice et tout le reste vous sera donné par surcroît " (Mt 6, 33)... Pourquoi s'inquiéter ?
Pour conclure, une petite exhortation...
Si vous vous sentez au fond de vous-mêmes appelés à donner votre vie à la suite du Christ,
NE GARDEZ PAS CELA POUR VOUS... L'appel de Dieu se taira au fur et à mesure que vous l'ignorerez ! Et vous risquez de vivre bien, mais moins bien que si vous aviez prêté l'oreille de votre coeur !
PARLEZ-EN à un prêtre, un frère, une soeur, un laïc consacré, un ami, une personne de confiance, vos parents...
L'appel de Dieu vient sans prévenir (même si il y a des familles et des évènements qui peuvent nous y disposer), mais tout ne se fera pas tout seul. C'est à vous de prendre votre vie en main... Tous les diocèses de France ont des Services des Vocations. Les communautés maintenant ont aussi presque toutes des sites web... ALORS BOUGEZ-VOUS... N'attendez pas d'avoir 30 ans, et d'être terrorisé à l'idée de changer radicalement de vie... Dieu saura vous rendre tout ce que vous laisserez sur le bord de la route pour le suivre. Au centuple ! Et j'en connais, des exemples !
Paris, le jeudi 6 octobre 2011