HOPE est l’un des « grands programmes de recherche » sélectionnés par l’Université de Bordeaux à l’issue d’une évaluation internationale en deux étapes. Le programme bénéficie d’un financement de 4 millions d’euros sur une période de huit ans de la part de l'IDEX ("Initiative d'Excellence") de Bordeaux. HOPE désigne : “understanding Human well-being and behaviOr for better Policies & SociEties” (car l’espoir est dur à trouver!). En français : « Comprendre le bien-être humain et les comportements pour de meilleures politiques et sociétés. ». HOPE est un programme interdisciplinaire réunissant une soixante de chercheurs en économie, psychologie, gestion, droit et santé publique. Son objectif est d’étudier les déterminants des comportements humains et du bien-être dans le contexte de grands phénomènes contemporains (terrorisme, pandémies, réchauffement climatique, crise migratoire, inégalités, etc.). HOPE vise également à produire une recherche fondée sur des données probantes, en s’interrogeant sur le rôle des politiques publiques dans la transformation des comportements et du bien-être, ainsi que sur la conception optimale de ces politiques lorsque les réactions comportementales aux interventions publiques sont prises en compte. Compte tenu de la nature de ses recherches et de la pertinence de ses outils empiriques, le programme HOPE entend contribuer aux débats de société et favoriser une interaction fructueuse avec les décideurs publics, les médias et la société civile dans son ensemble. L’ambition est de replacer les sciences humaines et sociales au cœur du débat public, tout en renforçant l’influence de la recherche bordelaise en SHS grâce à une articulation interdisciplinaire originale.
HOPE is one of the ‘Large research programs’ selected by Bordeaux University following a two-step international evaluation. The program has been allocated 4 million euros of funding over an 8-year period, funded by IDEX Bordeaux. It stands for “understanding Human well-being and behaviOr for better Policies & SociEties”. HOPE is an interdisciplinary program gathering 60 researchers in economics, psychology, management, law and public health. Its objective is to study the determinants of human behaviors and well- being in the context of major contemporary phenomena (terrorism, pandemics, global warming, migration crisis, inequalities,…). HOPE also aims at evidence-based research reflecting on the role of public policies in changing behavior and well-being, as well as on the optimal design of such policies when behavioral responses to public interventions are taken into account. Given the nature of its research and the relevance of its empirical tools, the research program HOPE aims to contribute to societal debates and provide fruitful interaction with policy makers, the medias and the civil society at large. The ambition is to bring social and human sciences back at the center of the public debate while increasing the influence of Bordeaux’s research in SHS through an original interdisciplinary articulation.
Dans le cadre de HOPE et des activités de la Welfare and Policy society, WAP, mes propres recherches s'orientent vers l'étude des mesures de bien-être - souvent en lien avec l'impact de politiques publiques - ainsi que l'étude d'attitudes ou états mentaux tels que la confiance et l'espoir.
Les raisons de s'intéresser à la confiance sont connues: la confiance (envers autrui ou envers les institutions et les représentants politiques) est une pierre angulaire de la vie sociale, facilitant la coopération, les échanges et ainsi la croissance économique et le bien-être (Algan et Cahuc, 2010); elle stimule aussi l’engagement civique et la participation électorale (Devine, 2024); elle est encore plus cruciale en temps de périls: ciment de la cohésion sociale, elle permet une gestion plus efficace des crises et assure l’adhésion des citoyens aux politiques vitales. Ce dernier point est illustré par le lien entre confiance et confinement pendant la pandémie (Bargain et Aminjonov, 2020 - voir plus bas) ou les conséquences désastreuses du déclin de la confiance en France et Europe sur la difficile adoption de mesures environnementales (Algan et al., 2017, 2019; Douenne et Fabre, 2022),
L’espoir est un objet d’étude ancien en philosophie et psychologie, mais plus récent en économie. Il associe les notions d'optimisme, d'espoir dans le futur, et de sentiment de contrôle / capacité à agir. L'espoir est donc tout aussi essentiel pour la stabilité sociale que la confiance, car il capture une dimension du bien-être tout en incarnant un sentiment de pouvoir d’agir: c'est une croyance porteuse de force qui favorise la résilience individuelle et collective (Snyder, 1994). Des données récentes montrent que son absence, ou le désespoir, a de lourdes conséquences sur la santé et la survie individuelle, mais aussi des répercussions sociétales majeures. La "crise de désespoir" documentée aux Etats-Unis (Graham et Pozuelo, 2023) a été identifiée comme un catalyseur de troubles civils, de vulnérabilité face aux théories du complot et au populisme (Young et McGrath, 2020), de propension à la radicalisation (Graham, 2023b), de résistance aux interventions politiques (Franko et Pacheco, 2024), et en particulier de non-respect des politiques sanitaires ou environnementales (Van Zomeren, Pauls et Cohen-Chen, 2019 ; Schornick et al., 2023).
Dans des travaux récents, nous étudions l'impact de phénomènes de court-terme, comme des chocs (catastrophes naturelles, acte terroriste, etc.), sur la confiance et l'espoir. On s'intéresse notamment au rôle potentiellement médiateur des émotions de base (tristesse, colère, dégoût, peur, joie, bonheur), qui peuvent expliquer en partie la malléabilité de court-terme de la confiance et de l'espoir (cf. Astruc-Le Souder et al, 2025 - voir le résumé à droite - et travaux interdisciplinaire en cours avec le laboratoire de psychologie de Bordeaux, LABPSY).
Un autre pan de nos recherches regarde donc ce qui découlent de la confiance et de l'espoir en termes comportementaux. Les premiers travaux ont concerné les comportements d'adhésion aux politiques sanitaires pendant la pandémie. En utilisant des données Google sur la mobilité humaine et d'autres données sur la confiance, au niveau régional en Europe, nous avons montré que le respect des politiques de confinement dépend du niveau de confiance envers les responsables politiques avant la crise; les régions où la confiance est élevée réduisent beaucoup plus leur mobilité liée aux activités non essentielles, avec en conséquence une baisse substantielle du taux de croissance de la mortalité (Bargain et Aminjonov, 2020, voir à droite) .
D'autres recherches étudient le rôle de la confiance envers les différents niveaux de gouvernement (local, national et supranational) et l’influence d’une défiance politique intense, enracinée dans les mouvements de protestation de type Gilet Jaune (Bargain & Ric, 2025, voir à droite - et travaux en cours avec Florence Jusot, Dauphine Université, et collègues du LABPSY). S'appuyant sur deux enquêtes originales menées à différentes phases de la pandémie de COVID-19, ce travail met en évidence les effets différenciés des diverses formes de confiance/défiance sur les comportements de santé. En particulier, ils révèlent la défiance spécifique envers l’OMS (notamment en raison de ses recommandations initiales sur le port du masque), le rôle central des autorités locales dans l’adhésion aux confinements, et un effet cumulatif de plusieurs niveau de défiance (locale, nationale, anti-système) sur l’hésitation vaccinale.
How Everyday Threats Undermine Trust and Hope: Experimental Evidence
Forms and degrees of political (mis)trust and its association with compliance to COVID-19 health measures
Trust and Compliance to Public Health Policies in Time of COVID-19