La conscription de 1917

Les ‘‘porteurs’’ sont trouvés 

E. Vézina, Le Nationaliste, 6 janvier 1918,
p. 1. 

Source (BAnQ 0000082804 )

Texte accompagnatif: 

<< LE QUATUOR: Vas-y Baptiste, nous restons... pour le jour des funérailles >>.

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Utilisation éducative et non commerciale.

ASPECTS

Social

Lors de la Première Guerre mondiale, le Canada parvient à fournir des soldats pour soutenir l'effort de guerre en Europe, du moins jusqu’en 1917. Ces soldats sont volontaires et s'enrôlent dans le Corps expéditionnaire canadien. En 1917, le volontariat est quasi épuisé au Québec: peu de Canadiens s'engagent dans la guerre. Parmi les volontaires (330 000 Canadiens), seuls 5% à 15% d'entre eux sont francophones. Cela s'explique pour plusieurs raisons (Richard, O., n.d.) :

Depuis plusieurs années, les minorités françaises du Canada doivent faire face à des mesures assimilatrices provenant du gouvernement fédéral ou des gouvernements provinciaux. Cela n'encourage guère les francophones à appuyer l'Empire britannique et les anglophones du Canada dans l'effort de guerre.

De plus, les Canadiens français réclament que la participation demeure volontaire de la part des Canadiens et la plupart considère que la guerre en Europe ne concerne pas le Canada. Aux yeux des nationalistes, le pays ne devrait pas s’impliquer dans les guerres de l’Empire.


La population canadienne-française n'accepte pas facilement l'imposition de la conscription. Du 28 mars au 1er avril 1918, la population se rassemble dans la ville de Québec. Une émeute entraîne le décès de 5 civils, lorsque l'armée doit intervenir.

Plus de 100 000 Canadiens sont conscrits, mais environ 24 000 participent au combat en Europe avant que le conflit ne prenne fin.

Politique

Au pays, l’engouement pour le volontariat diminue au moment où le gouvernement conservateur prévoit le recrutement de 500 000 nouveaux soldats. À son retour de la Conférence impériale de Londres, au printemps 1917, le premier ministre Robert L. Borden est convaincu que l’appui du Canada est essentiel à la réussite des alliés. Le 24 juillet de la même année, le Parlement accepte l’Acte de milice. Le 29 août, c’est au tour du Sénat. 


La Loi sur le service militaire obligatoire, obligeant les hommes célibataires et sans enfant entre 20 et 45 ans à se présenter aux autorités, est mise en application le 1er janvier 1918. 

Économique

Culturel

Le conflit sur la conscription exacerbe l'opposition déjà existante entre les Canadiens français et les Canadiens anglais. Il augmente également leur différence culturelle.

Les francophones, fortement nationalistes, considèrent que leur devoir et leur loyauté sont envers le Canada. Ils jugent que leurs minorités font face à de plus sérieuses menaces, notamment par l’imposition du Règlement 17 en Ontario en 1912, ou par le compromis Laurier-Greenway de 1896 qui n’avait satisfait personne. En retirant les troupes du Canada pour les envoyer en Europe, les nationalistes croient que les politiciens fédéraux ont failli à leur devoir. 

À l'inverse, les Canadiens anglais, impérialistes, sont fiers d'appartenir à l'Empire britannique et de soutenir humainement l'effort de guerre de l'Angleterre. Au-delà, ils jugent que le Canada devrait en faire davantage et offrir un soutien financier à l'Empire.  

Plusieurs Canadiens français demanderont d'être exemptés du service militaire. Devant le désengagement des Canadiens français face à la participation canadienne, les Canadiens anglais seront très déçus et jugeront que les francophones ne sont pas loyaux.

Territorial

Scientifique & Technique

Extraits

Henri Bourassa

«La politique du ministère menace directement la sécurité nationale et la liberté des citoyens. (... Une) preuve de l'absence de préoccupation nationale chez nos parlementaires, c'est leur négligence criminelle des répercussions économiques de la guerre et de la dépopulation du pays par l'enrôlement volontaire ou forcé. » (Source, p. 1)

Robert Borden: https://parl.canadiana.ca/view/oop.debates_CDC1207_03/57 (p. 55-57)

Critique externe -3QPOC

Critique interne -3QPOC

Qui?

Quatre individus sont cachés derrière une clôture et observent un homme. Cet homme porte une arme et a le dos arqué sous le poids d'un sac sur lequel il est inscrit conscription.

Sur le chapeau des quatre hommes, des inscriptions nous indiquent un nom ou un pays: Pat Pooney, Australie, Afrique, Inde.

Pourquoi?

Cette caricature du journal Le Nationaliste est une dénonciation de la mise en place de la conscription. L'auteur démontre que l’Empire britannique a trouvé le porteur de la conscription : le Canada français.

Peu de dominion impose la conscription, la plupart reste en retrait. Cette caricature illustre que les autres dominions de l’Empire britannique laisseront les Canadiens aller mourir au front. Cette caricature dénonce donc, d’abord la conscription, ensuite la position du reste de l’Empire britannique. Cela sous-entend également que les autres dominions ont rejeté la conscription, alors qu’elle est imposée de force sur le dos des Canadiens français. 

Quoi?

La caricature est publiée dans le journal Le Nationaliste. Ce journal, petit frère du Devoir, est fondé en 1904 par Olivar Asselin. Il s'agit de l'organe officiel de la Ligue nationaliste canadienne, dont l'un des leaders est Henri Bourassa. La caricature illustre le sort des Canadiens français, soumis à la conscription.

Où?

La conscription est établie partout au Canada. Cette caricature cible les Canadiens français.

Quand?

La conscription est mise en place le 1er janvier 1918. Cette caricature est publiée 5 jours plus tard, le 6 janvier.

Comment?

Un extrait du texte présent dans Le Nationaliste, permet de mieux saisir le contenu de la caricature; 

<< Sans doute, en 1914, l'Angleterre n'a point affiché en accourant au secours de la civilisation, le désir d'étendre sa domination, mais n'en ayant pas moins poursuivi sa politique traditionnelle de s'installer partout où elle pose ses pieds non moins traditionnels, elle ne veut pas, aujourd'hui, (...) céder à l'Allemagne (...). Donc, (...) cette fois-là ce furent les Indes, le Canada, des terres d'Afrique et des îles d'Amérique qui furent enlevés à l'ennemi >> (Luc Varennes, Comme aux jours de 1763, Le Nationaliste, p.1 ).

Si cet extrait ne parle pas directement de la conscription, il mentionne tout de même la domination de l'Angleterre sur certains territoires, tous dominions de l'Empire. Il s'agit d'une critique de l'impérialisme et de la mainmise de l'Angleterre sur le sort des dominions.

En relation avec cet extrait, les mots sur le chapeau des personnages donnent un indice sur l'identité de ces derniers. Le premier, Pat Pooney, est le plus difficile à trouver. Cependant, si on observe les trois autres (Australie, Afrique, Inde), nous pouvons constater que ces personnages représentent les dominions mentionnés dans l'extrait. Pat Pooney peut représenter les îles d'Amérique, puisque le poney est un animal symbolisant Terre-Neuve.

Le personnage à l'avant, Baptiste, représente quant à lui le Canada français, puisque Jean-Baptiste est le Saint des Canadiens français. Cette association sera souvent reprise. L'individu est représenté comme étant surchargé d'un poids: la conscription. Les nationalistes considèrent que la conscription ne devrait pas être appliquée, car elle vise principalement les Canadiens français. L’évocation des funérailles laisse sous-entendre que  la conscription mènera les Canadiens français à la tombe.

Documents à télécharger

Pour aller plus loin...

Richard, 0. Introduction historique. 14e législature, 2e session (4 décembre 1917 au 9 février 1918). Assemblée nationale du Québec [En ligne], http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-%20nationale/14-2/introduction-historique.html?retourVersHistoire=oui, (consulté le 29-08-2019)

Loi sur le service militaire, 1917

 SHM4,S4,D13, Archives de Montréal.

Source


Sir Wilfrid et les extrémistes

Doc.1-96/45

1942

Caricature, 1942, Robert William Chambers, Halifax Herald. Archives nationales du Canada, C-24354.

Défilé anti-conscription
Photographie, n.a., mai 1917.

Source.