Le respect des obligations légales

Les obligations légales sont le fondement de la démarche. Dans cette section se trouvent les aspects juridiques les plus couramment utilisés pour guider les Services adaptés au collégial dans l'analyse de situations complexes. Les CCSI recommandent aux établissements de consulter attentivement les ressources juridiques présentées en cas de doute.


Grandes lignes des conclusions à retenir en ce qui a trait aux obligations d'accommodement

La Direction des affaires juridiques de la Fédération des cégeps rappelle aux établissements, dans son avis de 2011, les principales conclusions à retenir en matière d’obligation d’accommodement :

  • Les collèges sont soumis à la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale et à la Charte des droits et libertés de la personne qui interdisent la discrimination, notamment fondée sur le handicap ou le moyen pour pallier ce handicap.
  • La notion de handicap est large et inclut, entre autres, les limitations de nature psychologique, mentale et intellectuelle de même que certaines limitations de nature temporaire.
  • Les collèges sont tenus d’accommoder une personne handicapée lorsqu’il y a discrimination à son égard.
  • L’obligation d’accommodement commande la mise en œuvre de mesures raisonnables afin d’éliminer la situation de discrimination. Ces mesures peuvent prendre différentes formes visant à pallier le désavantage dont est victime la personne handicapée.
  • Un collège ne peut être tenu d’accommoder un individu handicapé si la mesure requise lui impose une contrainte excessive.
  • Les tribunaux qualifieront une mesure comme étant excessive si son application a pour effet d’imposer au collège un obstacle majeur et important, tant au plan pédagogique, administratif et financier. Ce sera également le cas si la mesure a pour effet de nuire de façon réelle et importante aux droits d’autrui, dont ceux des autres étudiants, des membres du personnel ou de la clientèle et du personnel issus des milieux de stages.
  • La situation de chaque étudiant est unique et doit être évaluée de façon spécifique et individualisée, en fonction des limitations qui lui sont propres et non en fonction de présumées caractéristiques de groupe.

Ellefsen, H. (2011). Les obligations d'accommodement envers les étudiants handicapés, directeur des affaires juridiques, Fédération des cégeps.

Le concept d'accommodement raisonnable

En ce qui a trait aux mesures d’accommodement raisonnable au collégial, la CDPDJ mentionne, à la page 38 de son rapport de 2012, que « les mesures d’accommodement raisonnable sollicitées par l’étudiant auprès de son établissement doivent toutefois être en lien avec le contexte d’enseignement collégial ». Plus précisément, « la demande doit porter sur le contexte d’apprentissage ou d’évaluation visant la réussite académique ». Le cas échéant, il « doit la traiter avec diligence et de bonne foi, et fournir les efforts nécessaires pour parvenir à un accommodement raisonnable avec l'étudiant ». Les différentes demandes d'accommodement doivent donc être traitées cas par cas.

Comme mentionné plus haut, la demande d’accommodement doit être évaluée en tenant compte des capacités personnelles de l’étudiant et non des caractéristiques présumées du groupe auquel il appartient. Ainsi, il faut évaluer les capacités personnelles de l’étudiant à satisfaire aux exigences générales du programme sollicité plutôt que de l’évaluer selon un profil préalablement établi. De son côté, l’étudiant doit collaborer et fournir suffisamment de renseignements pertinents qui permettront à l’établissement d’évaluer ses capacités et ses limitations (Rapport de la CDPDJ, mars 2012, p. 39; Rapport de suivi de la CDPDJ, avril 2015, p. 5).


À la suite de l'analyse de la demande d'accommodement, la solution retenue par l’établissement d’enseignement n’a pas à être parfaite et à correspondre à l’ensemble des mesures exigées par l’étudiant. Cependant, l’accommodement doit être accordé à moins que l’établissement d’enseignement démontre explicitement qu’il y a une contrainte excessive. Celle-ci se justifie en tenant compte de différents critères tels que l’organisation des services, les ressources financières et matérielles, la sécurité et les droits d’autrui. Une mesure d’accommodement peut être raisonnable pour un étudiant, mais s’avérer déraisonnable pour un autre étudiant compte tenu de ses besoins particuliers (Rapport de la CDPDJ, mars 2012; Avis juridiques de la Direction des affaires juridiques).

La mise en place d'un accommodement raisonnable n'implique pas nécessairement une obligation de résultat

Un autre des principes fondamentaux, c'est que l'accommodement raisonnable ne garantit pas une réussite ou un résultat positif. Les extraits suivants du Guide de référence sur les mesures d’accommodement pouvant être offertes aux étudiants en situation de handicap en contexte universitaire expliquent ce principe :

En ce qui a trait aux personnes souffrant d’un handicap, les chartes reconnaissent leur droit d’être traitées de façon égale, ce qui implique de tenir compte de leurs limitations particulières. C’est afin de donner application à cette volonté d’égalité de traitement que les tribunaux en sont venus à élaborer la notion d’obligation d’accommodements raisonnables. Nonobstant le fait que la jurisprudence évolue, l’obligation d’accommodements raisonnables établit que les établissements postsecondaires n’ont pas une obligation de résultat, mais bien une obligation de moyens. Ces établissements n’ont pas de responsabilités à l’égard de la réussite des étudiants en situation de handicap, mais la responsabilité de leur donner des moyens de réussite équivalant à ceux des autres étudiants, compte tenu de leur situation de handicap et à condition que ces moyens ne constituent pas une contrainte excessive.

L’obligation d’accommodement raisonnable vise à assurer à l’étudiant en situation de handicap, la possibilité de démontrer l’atteinte des exigences et objectifs relatifs aux cours ou aux stages sans être désavantagé par sa situation de handicap, le tout, sous réserve que cela ne crée pas une contrainte excessive pour l’établissement. Par définition, l’accommodement est un moyen différent d’atteindre le but recherché. Ainsi, l’obligation d’accommodement raisonnable ne signifie jamais qu’un établissement doive mettre en place un accommodement qui compromettrait l’atteinte des exigences académiques. L’obligation d’accommodement raisonnable ne signifie pas non plus que les mesures retenues doivent correspondre exactement à celles demandées par l’étudiant. En toute circonstance, il demeure de la responsabilité de l’établissement d’assurer l’atteinte des exigences essentielles du cours ou du stage, et les moyens d’y parvenir ne doivent pas imposer de contraintes excessives pour l’établissement d’enseignement.

Les propos de l'avis juridique de 2008, émis par la Direction des affaires juridiques de la Fédération des cégeps, vont dans le même sens :

Un collège ne pourrait être tenu responsable de discrimination si, malgré le fait qu'une mesure d'accommodement est consentie à un étudiant, il échoue un ou plusieurs cours mettant ainsi en péril l'obtention de son diplôme. En effet, l'obligation d'accommodement ne va pas jusqu'à obliger le collège à faire réussir un étudiant, et ce, même s'il n'atteint pas les objectifs du programme auquel il est inscrit.

L'obligation de l'établissement lors d'une demande d'accommodement

La Direction des affaires juridiques de la Fédération des cégeps affirme que « l’obligation d’accommodement existe si une demande est faite par un étudiant ou par ses parents (dans le cas où l’étudiant est mineur) ». Or, la personne requérant un accommodement qui vise à corriger une situation discriminatoire doit collaborer avec l'établissement afin de trouver un accommodement raisonnable.

Lorsque une demande d’accommodement est analysée par le collège, plusieurs éléments doivent être considérés. Ainsi, on doit tenir compte, par exemple, des besoins de l’étudiant, de la nature du programme d’études ou des effets d’une telle demande sur les droits d’autrui, dont ceux des autres étudiants. La situation du collège peut également être considérée, notamment sur le plan financier ou administratif. Cependant, il est important de noter que l’argument des coûts n’est généralement pas, à lui seul, un argument valable permettant de refuser une demande d’accommodement (Chaussé, M. (2008), Les obligations des collèges à l’égard des étudiants handicapés, Affaires juridiques, Fédération des cégeps).

La personne requérant un accommodement qui vise à corriger une situation discriminatoire doit collaborer avec l'établissement afin de trouver un accommodement raisonnable. Or, « malgré le fait que l'étudiant a l'obligation d'informer le collège de ses besoins justifiant un accommodement, si l'étudiant déclare sa situation et ne fait pas de demande d'accommodement, le collège aurait tout de même l'obligation d'initier les discussions sur de possibles mesures d'accommodement » (Rapport de la CDPDJ, mars 2012, p. 41), et ce, surtout dans les circonstances où l'étudiant éprouve des difficultés dans son programme d'études. Ainsi, c'est dans ce contexte, entre autres, que la détection et le dépistage prend tout son sens.

Finalement, il demeure important de souligner que, si les discussions ont été initiées par l'établissement, l'étudiant a l'obligation de collaborer à la détermination des mesures d'accommodement nécessaires. « En l'absence de collaboration, le demandeur ne pourra prétendre avoir été victime de discrimination liée à son handicap. » (Rapport de la CDPDJ, mars 2012, p. 41).

Distinguer une demande d'accommodement d'une simple demande

Le guide virtuel orientant le traitement d'une demande d'accommodement offert par la CDPDJ indique les informations suivantes : « (...) assurez-vous qu’il s’agit d’une demande d’accommodement. Une mesure d’accommodement raisonnable tente de corriger une situation de discrimination intentionnelle ou non. À cette étape, vous devez pouvoir faire un lien entre la demande et l’un des 13 motifs de discrimination interdits par la Charte. »

La CDPDJ ajoute également dans le même guide : « Attention : toutes les demandes ne sont pas des demandes d’accommodement. Par exemple, les préférences pour un horaire de travail qui permet l’exercice de certains loisirs ne reçoivent aucune protection en vertu de la Charte. Il n’est donc pas question d’un accommodement. »

Par ailleurs, nous vous conseillons fortement de lire ce court guide qui offre de nombreux repères et outils, dont la feuille de route (p. 26-27).

De manière générale, pour approfondir vos connaissances sur les sujets discutés dans cette section, nous vous recommandons le guide virtuel de la CDPDJ et les avis juridiques disponibles auprès des CCSI. Au besoin, et dans le cas de situations plus complexes, la Direction des affaires juridiques de la Fédération des cégeps et la CDPDJ offre également du service-conseil.

Guide_virtuel_accommodement.pdf