Les conseils de Yassine Yakouti pour gérer les congés payés des salariés malades en 2023


Les salariés qui sont en arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel ont-ils droit à des congés payés ? Cette question, qui se pose régulièrement aux employeurs et aux salariés, a trouvé une réponse inédite de la part de la Cour de cassation le 13 septembre 2023. Selon la plus haute juridiction française, les salariés malades doivent acquérir des congés payés pendant leurs périodes d'absence, au même titre que les salariés qui travaillent effectivement. Cette décision, qui s'inspire du droit européen, bouleverse les règles du Code du travail et soulève de nombreuses interrogations pratiques. Pour vous aider à y voir plus clair, nous avons sollicité l'expertise de Yassine Yakouti. Il nous explique les enjeux et les conséquences de cette jurisprudence inédite et nous donne ses conseils pour gérer au mieux les congés payés des salariés malades en 2023.

Quel est le fondement juridique de la décision de la Cour de cassation ?

La Cour de cassation s'est appuyée sur le droit de l'Union européenne pour rendre sa décision. Elle a notamment invoqué l'article 31 paragraphe 2 de la Charte des droits fondamentaux de l'UE et l'article 7 de la Directive 2003/88. Ces textes garantissent à tout travailleur le droit à un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, sans que ce droit soit affecté par un arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel. La Cour de cassation a estimé que le Code du travail français, qui prévoit que les périodes d'absence pour maladie ou accident non professionnel ne sont pas prises en compte pour le calcul des droits à congé payé, était contraire à ces textes européens. Elle a donc décidé d'écarter l'application du Code du travail et de faire primer le droit européen.

Quels sont les salariés concernés par cette décision ?

La décision de la Cour de cassation concerne tous les salariés qui sont en arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel, qu'il s'agisse d'une maladie ou d'un accident d'origine professionnelle ou non professionnelle. Elle concerne également tous les types de contrat de travail, qu'il s'agisse d'un contrat à durée indéterminée (CDI), d'un contrat à durée déterminée (CDD), d'un contrat d'intérim ou d'un contrat d'apprentissage.

Quels sont les jours de congé concernés par cette décision ?

La décision de la Cour de cassation concerne l'intégralité des jours de congé payé auxquels le salarié a droit, qu'il s'agisse des quatre semaines minimales imposées par le droit européen, de la cinquième semaine prévue par le Code du travail ou des jours supplémentaires accordés par une convention collective ou un accord d'entreprise. La Cour de cassation a considéré que faire une distinction entre ces jours de congé selon qu'ils sont acquis ou non pendant un arrêt maladie serait discriminatoire envers les salariés malades.

Pour quelle période de référence cette décision s'applique-t-elle ?

La décision de la Cour de cassation s'applique dès à présent pour la période d'acquisition en cours, c'est-à-dire du 1er juin 2023 au 31 mai 2024. Elle s'appliquera également pour les périodes d'acquisition suivantes, sauf si le législateur décide de modifier le Code du travail pour le rendre conforme au droit européen. En revanche, la décision de la Cour de cassation ne s'applique pas rétroactivement pour les périodes d'acquisition antérieures. Les salariés qui ont été en arrêt maladie avant le 1er juin 2023 ne peuvent donc pas réclamer des jours de congé payé supplémentaires au titre de ces périodes.

Quelle est la durée maximale d'acquisition des congés payés pendant un arrêt maladie ?

La Cour de cassation n'a pas fixé de limite dans le temps pour l'acquisition des congés payés pendant un arrêt maladie. Le salarié qui est en arrêt maladie pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, continue donc d'acquérir des jours de congé payé pendant toute la durée de son arrêt. Toutefois, la Cour de cassation a précisé que le salarié ne peut pas cumuler indéfiniment ses droits à congé payé. Il doit les prendre dans un délai raisonnable après la fin de son arrêt maladie, sous peine de les perdre. Ce délai raisonnable n'a pas été défini par la Cour de cassation, mais il pourrait être fixé à 15 mois, comme c'est le cas pour les salariés qui ne peuvent pas prendre leurs congés payés pour des raisons indépendantes de leur volonté.

Comment gérer les congés payés des salariés malades ?

La décision de la Cour de cassation implique une adaptation des pratiques des employeurs et des salariés en matière de gestion des congés payés. Yassine Yakouti nous donne quelques conseils pour éviter les difficultés et les litiges :

-       Tenir à jour le décompte des jours de congé payé acquis par chaque salarié, en tenant compte des périodes d'arrêt maladie ;

-       Informer les salariés malades de leurs droits à congé payé et les inciter à les prendre dans un délai raisonnable après la fin de leur arrêt maladie ;

-       Respecter l'ordre des départs en congé et les priorités légales ou conventionnelles, en veillant à ne pas pénaliser les salariés malades ;

-       Privilégier le dialogue et la négociation avec les salariés malades pour organiser au mieux la prise de leurs congés payés, en tenant compte des besoins de l'entreprise et du respect du repos du salarié ;

-       En cas de désaccord ou de contestation, saisir le conseil de prud'hommes ou solliciter l'intervention d'un médiateur.

La décision de la Cour de cassation du 13 septembre 2023 marque un tournant dans le droit des congés payés en France. Elle reconnaît aux salariés malades le droit d'acquérir des jours de congé payé pendant leurs périodes d'absence, conformément au droit européen. Cette décision pose toutefois des questions pratiques et nécessite une adaptation des employeurs et des salariés. Pour éviter les difficultés et les litiges, il est conseillé de faire appel à un professionnel du droit du travail, comme Yassine Yakouti, avocat pénaliste, qui saura vous accompagner et vous conseiller dans cette matière complexe.