Le 2 avril 2025
Le chemin de l’excès…
Au-delà des chemins de brindilles,
Respirer comme on danse,
Avec le cœur en plus des pieds
En se rappelant que tout commence,
Par quelques chances saisies à la volée.
Alors, flirtons avec les dissonances,
La part de folie que tout être sensé devrait porter.
Oui, dansons jusqu’à l’ivresse,
Car mieux vaut une gueule de bois après la liesse
Qu‘un sinistre chemin de bois mort avant d’être né.
Le 2 avril 2025
Les lunes
La lune de septembre bien trop sérieuse,
Roule sur elle-même jusqu’à se pendre,
Au-dessus des cœurs fébriles
Et des dimanches accablant les enfants les veilles de reprise.
La lune de décembre et de mélancolie,
Joue les capricieuses en silence au moment du solstice,
Jalouse des autres étoiles aguicheuses,
Tellement pressées d’en découdre avec l’année écoulée.
La lune d’avril un peu frivole,
Cherche le soleil à travers tout le ciel.
Elle parade en rentrant son ventre,
En brillant de son mieux pour attirer son amoureux.
La lune de juillet sur la dune,
Voit fourmiller tant de monde à ses pieds.
Elle valse avec les marées comme un soir de fête,
Comme on s’oublie dans le doux duvet du creux de l’été.
Le 22 janvier 2025
J’entends ses pointes en suspension dessiner mille arabesques,
Contourner la facilité et faire mentir le reste.
Le reste des illusions tenant en confort la raison,
La poussière qui s’accumule sur le grand cahier de la séparation.
J’entends ses pointes de pieds sur le plancher le jour du départ,
Avant de voir nos rires rebondir sur le sol froid,
Comme la pluie parfois dissonante sur les ardoises des maisons,
L’art d’anéantir les espoirs et de travestir la raison.
Tombent les masques, tombent les cœurs du ciel à la tombe.
Et en chemin sentir ses cheveux caresser mes joues,
Inonder le crépuscule jusqu’à ce que vienne un nouveau matin
Où l’on s’enivrera de ces heures où l’on se réjouissait encore.
Petit animal blessé dans son orgueil, abandonné par la chance,
Je fixe le canon du chasseur et la blanche gelée.
Usé par la traque, spectateur de mon impuissance,
C’est pourtant le soulagement après les larmes qui va l’emporter.
Oui, la chaleur d’un fantôme étreindra bientôt mon âme nue.
Je vais mourir de ses mains pour naître à nouveau à la vie.
La douleur en amour s’invite toujours en bourreau au grand soir,
Car mourir une seule fois serait ne jamais avoir vraiment vécu.
Le 01 décembre 2024
Le train
Comme une flèche
Dodeline la machine
Une carcasse de rails et d’os
Coupant l’horizon en deux
Mille postérieurs engourdis
Et autant de rêveurs collés aux fenêtres
Mille immobiles à grande vitesse
Avec leurs corps mis au repos forcé
Déjà les esprits se perdent ou vagabondent
Là vers les souvenirs
Là vers les projets
Et parfois même
Le voyageur se contente du moment
De la place qui est la sienne
Aussi maigre soit son assise
Aussi longue soit l'expédition
Le 31 octobre 2024
Joyeux Halloween
Effrayez-moi pour que je me sente vivant.
Réchauffez mon sang, distillez un peu d’urgence.
J’aimerais faire semblant d’y croire,
Trembler autrement que de froid.
Et si l’on jouait avec la mort pour fêter nos disparus,
Car bien que partis avec un morceau de nos cœurs,
Ceux-là souhaitent des sourires à n’en pas douter
Plutôt que de voir nos joues inondées.
Alors, convoquons les esprits et autres fantômes,
Les monstrueuses trouilles de nos primes naïvetés.
Vite, redevenir cet enfant qui avait peur du noir,
Ce garnement qui aimait jouer des tours,
Tendre les bras vers papa après les cauchemars.
Des bonbons ou un sortilège.
Un petit déguisé tambourine à ma porte.
S’il savait combien le temps s’enfuit,
Combien il adore charrier des tragédies !
Deux courges balafrées devant la maison
Avec leurs flammes qui taillent le bout de gras.
Elles semblent attendre le verdict avec malice.
Va pour les sucreries, assez de sorts jusqu’ici.
Le 28 octobre 2024
Thelonious Monk
Sur le piano les notes dansent, volent, tombent jusqu’à l’oreille. Oublie le thème, laisse. Révolution absconse, drogue sublime. De respirations en errances, les notes dansent. Les doigts frappent comme des marteaux. Les doigts cognent les touches meurtries. Sur de violentes dissonances les notes dansent et s’écrasent éparpillées. Ecoulement obsédant. Evasion d’un possédé. Sphère titubante qui gronde.
Le 18 octobre 2024
En ce moment, je préfère éteindre la télé trop anxiogène. Alors j’écoute de la musique...
Petite poésie sur l'actualité.
En fond sonore : Eastern Sounds, de Yusef Lateef (1962)
Eastern Sounds
La pluie perle sur cette foutue vitre embuée,
Dessine mille traînées fricotant avec la gravité.
Et dehors tout est désespérément triste.
Mon thé s’en fiche, fumant au-dessus de ma tasse
Comme un cratère un peu énervé.
Alors je glisse un CD dans la platine,
En attendant que l’eau brûlante vire au calme.
Ce sera Yusef Lateef et ses douces complaintes cuivrées.
Le magicien me donne tout à coup envie de fermer les yeux,
Pour mieux voir danser les notes orientales,
Les imaginer se réconcilier avec nos occidents déboussolés.
Je suppose un instant que toute colère à un dénouement,
Que tous les errements finissent un jour par se détourner.
Mais non, la musique ne suffit pas à attendrir les cœurs,
Pas plus qu'elle permet de faire cesser la pluie,
Car les terres sacrées ne se partagent pas sans difficulté
Et les hommes préfèrent haïr la différence plutôt que de l’embrasser.
Alors, claque une sombre vérité au fond de mon palais:
Si les frustrations ont des ailes,
Elles reportent leur envol sur le tarmac de nos impuissances à rêver.
Le 4 octobre 2024
Marathon
Courir et tenir la distance. Résister aux kilomètres paresseux, aux douleurs se donnant la main pour mieux briser. Etat second. Torture que l'on s'inflige. Flottant dans un bain d’hormones, c’est un autre qui s’affaire à pourchasser les secondes perdues, celles qui ne se rattrapent pas vraiment. Les semelles fondent à présent dans le bitume. Equilibre précaire d’os empilés en brindilles. Le spectre du renoncement chuchote à l’oreille. Plutôt crever que de l'écouter.
Le 18 septembre 2024
Les capsules de joie
En ces saisons mornes et grises,
Les capsules de joie plus que jamais se cultivent,
Un peu comme au jardin où la vie,
Demande de l’attention avant de livrer ses fruits.
Alors je fais le choix parfois contre nature
De croire encore malgré le feu et les braises,
De sourire sous les coups et les ratures,
De danser sous les torrents qui soulèvent.
En ces saisons mornes et grises,
Les capsules de joie plus que jamais se cultivent.
Alors je fais le choix de la lumière,
Car chaque nuit a son matin qui la renverse,
Chaque chagrin a son espoir qui en chasse le parfum
Et les bleus à l’âme, quelle qu’en soit l’ardeur,
Prouvent que même dans la détresse la couleur existe.
Au moment de redresser ma carcasse cabossée,
De me déplier pour accueillir les vents compliqués,
Je me répète à l’infini d’en louer les morsures,
Car chaque nuit cède à l’empressement du matin,
Chaque nuit cède à l’empressement du matin…
Et finalement,
Les petits comme les grands malheurs
N’ont d’emprise que sur les surfaces tristes,
Les surfaces offrant la primeur aux entailles du destin.
Le 9 septembre 2024
Les deux sœurs
Deux sœurs se chamaillent. L’une n’est que joie et rires, l’autre rancœur et morosité. Chacun de nous a en lui ces deux sœurs opposées. Laquelle l’emporte ? La morosité grandit quand on lui résiste. La joie ne tarde pas à pointer le bout de son nez lorsqu’on accepte sa sœur telle qu’elle est. Après tout, une sœur reste une sœur !
Morosité
Remplir ses poumons et fermer les yeux. L’air est tiède. Le cœur s’arrête un moment, le temps d’y voir un peu plus clair quant à ces dénouements faussement heureux mentant aux enfants devenus vieux.
Le souffle turbulent d’un début de soirée devant la télé s’agite en dedans comme les coups de vent vous refilant un rhume ou une vilaine insomnie. En apnée, repasser le film de ces dernières semaines. Et puis sortir la tête de l’eau pour prendre une vague pire encore, une massue fendant les crânes et cultivant les migraines.
Cœur lourd et corps léger en partance pour les profondeurs. Se faufiler dans les ténèbres. Se cogner fort contre les récifs jusqu’à sentir advenir la chaleur d’un nouvel été. Sous la surface des choses, chercher quelques espérances, celles aptes à se frayer un chemin en terres provisoirement stériles.
Joie
Ça palpite comme une pulsation au bal vous poussant à danser. Ça crépite comme une flamme de désir ne demandant qu’à se propager. C’est chimique, une magie blanche rechargeant les batteries en vue des retours de pendule guettant la moindre occasion de prendre leur revanche sur les bons moments. Un état de grâce donnant la force d’inviter les autres sur la piste de ses enjeux. Un soleil dans la rétine transperçant les pluies passagères, révisant les humeurs à leur juste place, celle d’un marchepied pour se hisser à hauteur des bonheurs simples.
Un sourire qui chasse les peurs. Une main tendue pour avancer à deux. Les traces éphémères des pas de son enfant le long d’une plage infinie. L'insouciance.
Le 6 septembre 2024
Les creusets
Des rangées dévalant vers la piste. Devant moi, quatre collègues plus jeunes d’une génération et devant eux un groupe d’enfants. Le stade se décline ainsi, comme un passage de relais aux allures de pari sur l’avenir. Hannah Arendt parlait si bien des ferments nouveaux poussant dans un monde ancien… La culture se transmet et se réinvente à chaque étage. Le jeu s’étend jusqu’à la piste, boucle infinie du ciel au terrain et du terrain au ciel. Un véritable creuset qui bourdonne et siffle dans mes oreilles. Les creusets... Celui d’où l’on naît. Celui à sa mort. Entre les deux, quelle que soit sa place dans le stade, le creuset collectif où vivre au mieux en célébrant les moments prêtés.
Le 2 septembre 2024 (Jeux paralympiques)
Question de calendrier
Une piste ovale et violette, anneau sans fin pour se dépasser.
La surface n’est plus tout à fait vierge, les valides l’ont déjà foulée.
Les appuis en carbone ne changent pourtant rien à l’affaire,
Les huit alignés au départ, comme plus tôt leurs coreligionnaires,
Se sont préparés à la guerre, rivaliseront par couloirs interposés.
Coup de feu à blanc, c’est parti pour sprinter la vie,
Sous les encouragements d’un stade comblé et rempli.
Athlètes courants d’air aux foulées parfaites.
Vague silencieuse, élégance de la vitesse.
Toutes ces prothèses comme des virgules invisibles,
Ponctuant l’effort de maintes délicatesses.
Lors de ces cent mètres martelés de magie,
Je n’ai vu que des coureurs magnifiques
Et à l’arrivée sept malheureux pour un ravi.
La vérité est donc pour tout le monde identique,
Quelle que soit sa constitution et ses appuis.
Alors fusionner les jeux en une même compétition ?
L’inclusion se heurte toujours à la hiérarchisation des deux.
Pattes pareilles ou dissemblables, entières ou prolongées,
À quoi bon séparer les héroïsmes et distinguer les passions ?
Quand l’olympisme entrelace ses anneaux en guise de vision
Les catégories permettent de s’affronter à chances égales,
Et si elles séparent, ce devrait être pour mieux rassembler
Les émotions en un même lieu, en un même événement
Mais pour l’heure les uns continuent de passer en premier,
Les autres étant relégués à quelques regrettables intervalles,
Érigeant les différences au lieu de créer des temps partagés