Mercredi 18 mars, La Belgique passe en mode confinement général à partir de 12h.
Xavier, un membre du Groupement Territorial mobilise les travailleurs du secteur associatif mais aussi des services publics sérésiens et propose la création d’un espace virtuel organisé par le Groupement, où chaque service laisserait trace de son activité du moment.
Quelques membres du Groupement décident alors de se rencontrer en visioconférence et installent ensuite de telles rencontres sur un mode hebdomadaire.
Un site internet est créé qui rassemble des informations fournies par chaque association membre ou autre, et qui rassemble aussi des liens vers d’autres secteurs (comme la culture,…), vers des actions (ex. la distribution de masques, enquêtes vers les citoyens, vers les intervenants) et des informations et lectures qui ouvrent à une compréhension sur ce qui se passe là et au-delà.
A partir de ces échanges hebdomadaires, nous nous confrontons à cette notion du Bricolage face à la complexité du moment et aussi à la complexité des situations que nous rencontrons de plus en plus dans notre ordinaire. Naît aussi progressivement le ressenti et l’idée du Collectif comme d’un lieu sur la marge et nous projetons alors l’ouverture d’une journée de rencontre autour de l’idée de Bricolage sur la marge, la marge du confinement, la marge des organisations dans la rencontre de la complexité du réel…
Didier Vrancken : « la complexité des situations auxquelles les travailleurs sociaux sont confrontés n'a cessé de croître et ceux-ci se retrouvent bien souvent contraints de bricoler des réponses. Mais bricolage ne veut pas dire qu'ils font un peu n'importe quoi mais qu'ils accomplissent un travail difficilement formalisable, difficilement balisé, posant d'emblée la question de son évaluation et celle de ses limites. » in Politique sociale d’intervention. Accompagnement sans fin et pratiques prudentielles, Revue l’Observatoire, n° 103, 2020
En quoi le Collectif plutôt que le réseau institutionnalisé peut-il nous aider à aborder les situations de fragilité(s) sur un territoire ? Décloisonnement des regards, des interventions et des responsabilités, souplesses quant au cadre institutionnel. Évitement de la violence institutionnelle tant pour le public que pour les travailleurs. Comment les liens sur la marge entre professionnels peuvent-ils impacter leur pratique ?
La question du Collectif comme moteur, porteur d’une pratique du travail social émancipateur tant pour le travailleur que pour son public.
Le Collectif peut-il apporter un sentiment de sécurité au travailleur qui sort parfois nécessairement du cadre structurellement hiérarchisé de son organisation et s’ouvre au travail dans les interstices, et parfois aussi dans des pratiques qui se voudraient « altératrices » (M. Bellhasen, La révolte de la psychiatrie. Les ripostes à la catastrophe gestionnaire, La Découverte, 2020) ? Le Collectif est un processus qui se développe dans le temps grâce à des vécus communs. Il tient compte des individus qui le composent tout en ne donnant pas la priorité à l'individuel mais à la construction commune. Il va à l'encontre de la vision néolibérale qui pousse à ce que chacun prenne surtout "Sa place dans la communauté" Il s'agit, par le Collectif, de prioriser quelque chose de plus grand que soi....
Mathieu Bellhasen : « … le Collectif […] classiquement perçu comme une menace pour l’intégrité de l’organisation. » (Mathieu BELLHASEN, op.cit.)
Jean Oury : « Le Collectif, ce serait peut-être une machine à traiter l’aliénation, toutes formes d’aliénation, aussi bien l’aliénation sociale, chosifiante, produit de la production, que l’aliénation psychotique » (Le Collectif, Le Séminaire de Sainte-Anne, Champ Social éd., 2005).
Que nous soyons travailleurs du secteur psycho-médico-social, usagers de ces services, ou de simples citoyens, nous portons tous une responsabilité quant aux liens que nous voulons développer dans la communauté. Nous avons à participer à la définition de ces liens et à une forme d'hospitalité pour tous. En dehors des questions de statuts, de conditions de vie, de fragilités diverses nous voulons nous entendre pour accéder à des communs satisfaisants pour tous. C'est dans cette optique que nous avons créé le Groupement Territorial pour la Santé Mentale à Seraing et que nous poursuivrons ce travail collectif par la création d’un asbl qui le soutiendra au-delà de notre rencontre de ce 14 octobre.