Lettre de papa à maman 1983

Lettre de papa à maman

Hôpital Marie-Clarac 1983


Une atmosphère de souffrances humaines, un mélange de misère physique et morale. Chaque

patient peut te raconter 20 fois par le détail son histoire qui est toujours pire que celle des

autres. À force d’en entendre, tu es dans le bain. Il faut lutter contre cet envahissement car le

bon moral, la volonté de s’en sortir, c’est les ¾ de la guérison. Alors, un regard en arrière et tu

réalises que la vie a été bonne pour toi et qu’en somme la Providence nous a comblés.

Les premiers colons de la Nouvelle-Angleterre, aujourd’hui Cape Cod, les pèlerins comme ils

s’appelaient, avaient le Thanksgiving-Day pour remercier Dieu des récoltes. Au lieu de ressasser

les ‘’bads lucks’’ de l’année, ils s’encourageaient par leur hymne. ‘’Count your Blessing’’,

racontez toutes les bénédictions dont le Seigneur vous a comblés.

Alors moi aussi, je revois mon enfance à Saint-Casimir, les vacances libres chez les grands-

parents, le collège et les belles années d’études chez les Frères, les quelques années

d’enseignement remplies que de bons souvenirs.

Puis en 1936, j’accepte à Rosemont un travail de vacances en attendant un poste d’enseignant.

Je rentre chez S. Joly, marchand de bois et charbon sur la 6 ème avenue et j’y suis resté 33ans,

période féconde et heureuse. C’est aussi à cette époque que des voies providentielles ont mis

sur mon chemin Alice, fille merveilleuse qui et devenue la compagne de ma vie depuis 43 ans.

Nous sommes de caractère différent. Elle traditionnaliste, prudente, patiente, la femme forte

de l’Évangile, en même temps d’une grande féminité et très amoureuse.

Moi, aventureux, indépendant, nous nous complétons et les décisions qui sortent de nos

concessions se sont toujours avérées les bonnes. Avec le recul du temps, voir se dérouler ces 43

années dans un backround d’hôpital, c’est comme visionner un film d’amour où 9 beaux enfants

qu’elle m’a donnés et si bien élevés sont comme des enfants de l’amour.

C’est peut-être pour cela qu’ils sont si beaux !

Alice, je remercie Dieu à genoux de t’avoir rencontrée cette fin d’été ’37 sur le balcon de

Madame Cantin. Et surtout, toi je te remercie de m’avoir aidé dans les moments difficiles, nous

en avons eus comme tout le monde. Tu as toujours été l’épouse forte et aimante sur qui je peux

toujours compter.

Ton amoureux de 37 qui t’aime encore plus en 1983,

Gérard


Note : Transcription à partir de la lettre originale manuscrite conservée par maman.