1582, Honno-Ji. Kyoto
Les flammes d'Amaterasu commençaient a lentement quitter le ciel, perdant de vigueur minutes après minutes tandis qu'elle prêtait enfin son royaume céleste à son frère. Un a un, les astres lointains se mirent a peupler le ciel, l'illuminant tout en sublimant l'éclat supérieur de la Lune, fièrement placardée a la voûte céleste. Sous le regard bienveillant de Tsukuyomi, les Hommes s'apprêtaient à aller rejoindre le royaume des rêves pour la majorité, les enfants les premiers. Cependant tous les esprits ne sont pas encore aux sommeils, les ivrognes vont à leurs verres, les infidèles à leurs amants, les traitres, à leurs complots.
Quelques crépitements distincts laissaient deviner un feu, que les ténèbres tentaient désespérément d'engouffrer. Ardûment, les pointes de ses flammes, comme mille sabres repoussaient l'obscurité, tandis qu'un homme y perdait son regard. Sa peau aux couleurs de la nuit, il était aisé de comprendre qu'il n'était pas du pays du Soleil Levant, cependant, il y avait trouvé sa place ou presque. Lentement, ses doigts se dressèrent, un par un. Depuis combien d'années était -t'il ici ? Trois. Oui, trois uniquement, et pourtant il avait accompli tant, appris tant, plus qu'il n'avait appris de toute sa vie. Un léger soupir amusé s'échappa de ses lèvres, signe spirituel de reconnaissance envers les astres pour la situation dans laquelle il se trouvait aujourd'hui.
"Tu peux filer Yasuke, c'est a mon tour de monter la garde. " - S'écria une voix enivrée quelques mètres derrière lui.
Promptement, ledit Yasuke se releva alors, révélant l'entièreté de sa tenue a son interlocuteur, celle d'un samurai. Gradé en plus de cela, seuls son casque et son masque se son révélé êtres aux abonnés absents, posés a côté du feu. Son armure cependant, se révélait impeccablement entretenue, même si portant toujours les marques de ses anciennes batailles. Deux sabres a sa ceinture, l'un long, l'autre plus court en cas d''urgences. Face a lui, un autre guerrier, plus jeunes, et bien évidemment d'origine nipponne. Une coupe de saké a moitié vide a la main, il ne semblait pas à même de mener une garde efficace, et ça, le basané l'avait compris. Un léger sourire s'empara de ses lèvres tandis qu'il remua simplement de la main pour lui faire comprendre son erreur.
"T'as trop bu Ranmaru. Oublie." -Lui répondit-il simplement.
"J'ai de l'eau salée pour me faire vomir.. Et de toute façon le daimyo veut te voir. Cependant si tu veux récupérer ma garde juste après ça me gêne pas." - Plaisanta alors le jeune homme.
En un léger ricanement, les samouraï échangèrent de brèves tapes amicales sur l'épaule tandis qu'ils échangeaient leurs rôles. Entrant lentement dans le temple du Honno-ji, notre protagoniste prit quelques instants afin d'ôter son armure, ne se retrouvant finalement qu'en simple assemblement qui serait décrit par la plupart comme kimono. Désormais, il se devait de retrouver son chemin parmi les couloirs. Il ne se rappelait jamais d'avoir visité ce temple auparavant. Ils étaient en route vers la province de Bitchu, l'une de leurs armées avaient besoin de renforts contre le clan Mori. L'unification du Japon était un rêve fou, un rêve de grandeurs, et un rêve que seul un homme pouvait accomplir. Oda. Celui qui lui avait offert une nouvelle vie. Une dernière guerre pour les terminer toutes.
Enfin, Yasuke arriva au niveau des chambres d'invité, se dirigeant instantanément vers la plus grande afin de toquer et d'annoncer sa présence. Un radieux "Entre !" fût alors sa réponse, tandis qu'il fera coulisser la porte qui le séparait de son interlocuteur. Un homme, assis au fond de la salle, deux coupes de saké devant lui. Il semblait sans âge, ayant clairement laissé sa jeunesse derrière lui sans être ne serait-ce que proche de ses dernières heures, souriant radieusement, il aura fait signe a son samouraï de s'asseoir. Yasuke s'exécuta, se positionnant devant lui a une distance tout de même respectable. Oda Nobunaga, le daimyo. C'était un grand homme aux yeux du basané, et sans doute de nombreux autres. Celui qui aura su secouer le Japon, et sans doute même l'unir. Celui qui moquait les traditions et embrassait le progrès. Et c'était cette figure légendaire qui se tenait devant lui, souriant, une coupe d'alcool a la main. Une sorte de rêve éveillé. Leur discussion aura cependant été.. Des plus classiques étrangement, détendues , deux hommes traitant de tout et de rien, plaisantant tandis que l'alcool coulait dans leurs veines. Jusqu'a ce qu'elle change, abruptement.
"Yasuke, sait-tu pourquoi tu es mon valet favori ?" demanda le daimyo.
"Je ne le suis pas monseigneur, en tout cas je refuse de le croire, vous disposez de nombreux talents a votre service, je ne brille pas plus que les autres." Aura alors répondu le serviteur.
"Ton humilité fait partie des raisons en effet, mais ce n'est pas la seule." Déclara alors l'homme en un ricanement.
"Dites moi donc quelles sont les autres ?"
" Tu apprends vite. Cela ne fait que trois ans que je t'ai pris sous mon aile et tu es déjà l'un de mes meilleurs guerriers, tu parle un japonais presque parfait et a appris beaucoup sur le pays. Tu as déjà assimilé la majorité de notre culture et nos traditions, certaines vieilles bourriques sont plus négligentes que toi tu le sais ?"
"Je fais simplement de mon mieux."
"Et c'est incroyable. Mais tu sais ce qui est le plus impressionnant chez toi ? C'est ta pureté. Non, ce n'est pas le mot exact, c'est plus complexe. Tu es incorruptible, car tu sais pertinemment que tu n'as rien a gagner ou perdre, tu es bon car tu n'as rien a gagner a être mauvais. Tu n'as pas d'ambition car tu n'as pas de terre qui te reviendraient de droit a conquérir et tu n'as pas l'orgueil de vouloir voler celles ou tu pose les pieds. Tu n'es même pas accepté par beaucoup de mes hommes, Ranmaru est peut-être ton seul honnête ami et pourtant tu ignore toute cette hostilité. C'est ta force d'esprit qui m'impressionne Yasuke. Tu n'as rien et pourtant tu agis comme si tu avais tout." - Expliqua alors le seigneur, comme perdu dans ses pensées sur ses derniers mots. "Pourquoi... Ressentez vous le besoin de souligner tout cela aujourd'hui ? " - Demanda alors le guerrier , confus par le discours de du daimyo.
"Te souviens tu des cours sur la religion qui t'ont été donné ? Te souviens tu de Susanoo ?""Oui mon seigneur, le Kami de la mer et des vents , pourquoi ?"
"Je suis ce Dieu Yasuke. Et je t'ai choisi pour être me succéder dans ce rôle."
Un rire éclata, d'entre les lèvres du basané. Mais ce rire n'aura pas survécu longtemps, quand le samouraïs aura remarqué l'air parfaitement sérieux qui arborait le visage de son maître. Était-il sérieux ? Cela expliquerait bon nombre des étrangetés entourant son personnage. Mais c'était.. Impossible. Pourquoi un dieu, s'ils existaient foulerait la terre ? Quittant ses pensées, le serviteur soupira, incrédule, tandis qu'il se relèvera lentement, tournant les talons, comme s'apprêtant a sortir.
"L'alcool vous est monté a la tête seigneur, vous devriez vous reposer. Je m'en vais monter la garde, Ranmaru n'est pas en état. Alors que le son de son premier pas en direction de la porte sonnait sur le bois du sol, Nobunaga haussa soudainement la voix.
"Mitsuhide va me trahir cette nuit Yasuke. Il va revenir et m'assassiner dans ce temple. J'ai intercepté un courrier qu'il échangeait avec Hashiba, cette histoire de renfort n'est qu'une mascarade." - Déclara alors le chef de guerre tandis qu'il s'empara de, puis jettera cette dite lettre en direction de son vassal.
En un long soupire, le basané se sera retourné, s'accroupissant alors afin d'observer cette dernière. Après la lecture de quelques lignes, il ne put que constater que... C'était la réalité. Silencieux, presque sous le choc, l'homme se sera assis, lisant la lettre en détails, chaque recoin de cette histoire de trahison, relevant finalement un regard ébahi vers son maître qui lui, se contentait de se resservir de l'alcool.
"Pourquoi ?"
"Pour que tu comprenne que j'ai encore toute ma tête et que-"
"Non ! Pourquoi être entré dans leur piège ? Et vôtre rêve ? Et l'unification du Japon ? Ils ne devraient plus tarder à arriver... Et s'ils avaient déjà encerclés le temple ?! Merde... Il va falloir que je porte Ranmaru, tentons de fuir par l'arrière et de longer la rivière peut-être que..;"
Instinctivement, lorsque son seigneur aura levé et fermé le poing, Yasuke se sera tût. De sa main libre, Oda aura soulevé sa coupe, puis bu une gorgée de saké. S'éclaircissant la gorge, il reprendra la parole.
"Je.. Je n'unifierais pas le Japon. Pas dans cette vie, ni dans les précédentes ni dans les futurs, j'ai essayé des centaines de fois et la méthode est toujours la mauvaise. Les Hommes sont trop belliqueux. Attachés a des traditions qui ont plus de valeur que le sang a leurs yeux. Ils refusent de changer. Combien de clans, ont refusés l'unification ? Combien de clans as-t'on dû annihiler Yasuke ? Le sais-tu ? Trop. Oda Nobunaga est déjà un tyran et je n'ai pas envie de recommencer. Je suis fatigué mon ami."
Un silence pesant envahi la pièce, Oda n'avait pas fini, Yasuke l'avait compris, et quand bien même il aurait voulu parler, les mots lui auraient manqués. Silencieux, il était à l'affût des prochaines paroles de son maître.
"Toi cependant. Tu es plein de ressources. Et tu ne les as jamais dédiées que pour mes rêves, il est temps que cela change. Je dois mourir ce soir. Si je continue a vivre et que j'élimine Mitsuhide, je serais un tyran. Si je meurs assassiné ou en combat, je serais un héros. Ainsi, je veux t'offrir mon immortalité et l'ensemble de mes pouvoirs. Yasuke. Offre moi ton sabre."
Confus, le samourai ne pût qu'accepter cette demande. Il comprenait la majorité des dires de son maître, en tout cas en partie. Et il ne pouvait que respecter son désir de mourir. Devenir une légende. Peut-être était-ce ce a quoi il faisait référence en prétendant être un Dieu ? Ôtant son sabre de sa ceinture, toujours dans son fourreau, il le tendis de ses deux mains a son seigneur.
"Comment se nomme-t'il ?"
"Kuni no nai ha."
"Tu as le mal du pays ?"
"Vous aviez vu juste plus tôt, je n'en ai pas vraiment."
"Je sais, merci, j'accepte ton cadeau."
Déclara alors Oda tandis qu'il posa le sabre en face de lui, attrapant alors un autre sabre qui était dissimulé derrière lui, lui aussi toujours dans son fourreau. L'expression faciale du vassal laissait aisément comprendre qu'il avait reconnu l'arme de son maître, et surtout compris ce qu'il souhaitait en faire. Alors, Oda tendis son sabre en direction de son vassal, de ses demain, et, alors, lui partagea son ultime requête.*
"Il s'appelle Totsuka no tsurugi. S'il te plaît. Accepte mon cadeau."
C'était la demande d'un homme mort. Avait-il réellement un autre choix ?
"Oui, je l'accepte. Aussi, je mourrais a vos côtés."
Un léger sourire hanta les lèvres du Daimyo.
"Ce ne sera pas nécessaire. Tu as accepté bien plus que tu ne l'imagine."
D'abords, une expression inquiète s'empara du visage de Yasuke, ne comprenant pas réellement ce que Nobunaga voulait dire par cela, puis, un sentiment de chaleur s'installa dans ses mains, provenant du sabre. Puis, il sentait ses mains et ses veines brûler, comme si du métal chaud envahissait son corps et ses veines. Un instant de torture, pourtant, sa bouche était scellée, le rendant incapable de hurler afin de relâcher la douleur. Finalement, une vague de puissance s'empara de son corps, la houle et le zéphyr se rencontraient en son cœur tandis qu'une bourraque émana de son corps, éteignant chaque lampe a huile de la pièce ou ils se tenaient, brisant les fenêtres.
Quelques secondes furent nécessaire pour que la première étape du choc passe après les bourrasques. Yasuke n'était plus Yasuke désormais. Il savait qui il était, son coeur et son corps le lui avait hurlé : Susanoo. Ce qui signifiait que l'homme en face de lui, ne venait que seulement de devenir Nobunaga Oda a l'instant. Auparavant, il avait toujours été autre. Le nouveau Dieu entrouvrit les lèvres comme pour parler, mais ne pût qu'observer son bienfaiteur silencieusement se lever, attraper son nouveau sabre, se dirigeant lentement vers la sortie de la salle.
"Félicitations Susanoo. Je sais, tu as joué mon jeu car tu ne me croyais pas. Mais les tempêtes sont imprévisibles. Tu devrais partir maintenant. Si un Dieu participe a ce combat, cela risquerait de nuire a ma légende. Alors.. Je ne te demanderait plus qu'une chose..."
La nouvelle divinité se leva alors lentement, toujours ébahi. Il avait mille et unes questions désormais. Il venait d'être jeté dans un monde dont il venait tout juste d'apprendre l'existence, et qu'allait devenir son maitre désormais ? Que devrait-il faire ? Ou devait-il aller ? Qu'allaient-dire les autre dieux ? Avant que ses idées ne puisse s'ordonner, l'ancien Dieu repris parole.
"Veille sur le Japon et unifie le. Et ne me dit pas que tu ne peux pas me le garantir, débrouille toi mon ami."
Et sur ces mots, Oda ouvrit la porte, s'apprêtant a partir tandis qu'une ferme poigne attrapa son épaule avant qu'il ne puisse sortir. Yasuke.
"Si vous mourrez. Mourrez en vainqueur."
"Je ne lui laissera pas le privilège de me voir passer l'arme a gauche voyons." répondit- alors Nobunaga, souriant.
Et c'est ainsi que leurs chemins, et mondes se séparèrent finalement.
Ce n'est que bien plus tard cependant, que Yasuke appris que Ranmaru et Oda n'étaient pas morts au combat, mais par seppuku.
Peu après la mort de Nobunaga Oda, et surtout le renversement de son ère, Yasuke, toujours confus , n'ayant toujours pas entièrement accepté ni enregistré sa nouvelle condition aura fait en sorte de retrouver le fils de son maître, désormais pourchassé par Mitsuhide Akechi et les armées révolutionnaires. Le nouveau dieu parvînt non sans difficulté à confier l'enfant aux quelques derniers corps d'armée toujours fidèles à son défunt maître avant de se faire retrouver puis capturer car l'escouade personnelle de Mitsuhide. Bien que désormais divin, le nouveau Susanoo n'avait aucune idée de comment utiliser son héritage, le laissant alors aussi vulnérable que l'homme qu'il avait toujours été. Un fier guerrier certes, mais un simple homme. Cependant, autant il était incapable de contrôler ou d'utiliser volontairement ses capacités, les tempêtes le suivaient, attirant l'attention d'une inattendue invitée.
Alors qu'il était toujours enchainé et emprisonné, le nouveau Dieu aura entendu Mitsuhide discuter, avec une voix féminine, ferme et autoritaire, comme s'il s'agissait d'une supérieure, ce qu'il trouvait étonnant à cette époque. Il lui ne fallut que quelques instants pour découvrir qu'il s'agissait d'Amaterasu, la déesse du soleil.
Ayant découvert qu'Oda n'était que Susanoo sous couverture afin de procéder à ses folies, Amaterasu aurait été celle ayant causée la trahison de Mitsuhide, ce dernier étant l'un de ses plus fervent serviteur. Usant de cela , elle souhaitait ramener son frère aux cieux afin de le châtier pour avoir tant interféré avec les hommes. Cependant, la découverte de Yasuke, de la mort de son frère et du partage de ses pouvoirs fût des plus choquant. Promptement, elle mena le nouveau Dieu aux cieux, afin que son sort soit décidé.
Un tribunal fût mené, comportant tous les plus grandes divinités du panthéon nippon afin de juger du sort de Yasuke. Ils ne pouvaient pas l'éliminer, l'absence d'un Dieu des Mers et du Vent pouvant causer le chaos, l'idée de faire de Mitsuhide le prochain Susanoo a la place avait été soulevée par Amaterasu, cependant, nul ne savait comment Susanoo s'y était pris pour léguer son immortalité a un humain. Ainsi, la déesse du Soleil fût jugée comme responsable de l'incident, ayant prise trop de temps pour interrompre les foies du Susanoo originel, alors, elle devrait former Yasuke afin qu'il puisse occuper la place de Susanoo, en l'espérant moins incontrôlable que son prédécesseur.
Ainsi, cela fût décider, sous les lamentation de la déesse Solaire. Yasuke , comme toujours cependant, s'avérera apprendre rapidement les nouvelles compétences dont il était pourvu sous les explications de sa nouvelle mentor. Il lui était difficile de causer la destruction lorsqu'elle était nécessaire, mais il était des divinités les plus consciencieuse et sérieuses du panthéon désormais.
Le temps passait, le monde changeait, et Yasuke étaient en perpétuel conflit entre son humanité et sa divinité, ne sachant plus réellement a quel monde il appartenait s'il appartenait même a l'un d'entre eux. Finalement, c'est Amaterasu qui l'aura invité a rejoindre Aldébaran, entreprise divine pour laquelle elle travaillait déjà. Les deux étaient d'ailleurs devenus amis entre temps, étant essentiellement devenu les deux divinités les plus responsables du Panthéon nippon.
Ainsi, le pseudo-Dieu aura commencé à officier à Aldébaran bien que restant éloigné de la majorité des affaires du mon divin, n'étant même pas au courant de l'existence de nouveaux Dieux, il mènera ses propres projets, se surprenant même récemment à lancer sa propre marque de streetwear "Nobunaga ®", et acceptant une place de professeur a la Cour de Chiron. 500 ans s'étaient déjà passé, et malgré tout cela, il n'était toujours pas réellement une divinité. Pas spirituellement encore. Ignorant la majorité des problèmes divins, sont regard était toujours porté sur les hommes quand il le pouvait, observant leur développement. Cependant, cela allait bientôt changer. Qu'il le veuille ou non.