Histoire

Des traces d'occupation très anciennes aux alentours du village prouvent que le lieu est fréquenté depuis longtemps, sans doute dès l'époque du néolithique, plusieurs objets découverts sur le ban communal en témoignent: monnaies, pointes de flèches...

A l'époque gallo-romaine, la route reliant Reims à Metz traverse la commune. Quelques villas ont laissé des marques encore visibles sur les terres agricoles (tuiles, pierres travaillées).

Le nom de Graveium apparaît en 1137. Le village est plusieurs fois détruit puis reconstruit. Après les guerres incessantes du XIVème siècle, la noble famille messine de HEU s'attachera à la reconstruction de Gravelotte. On retrouve d'ailleurs les trois coquilles de cette famille dans le blason du village.

Lors du conflit franco-prussien de 1870, de violents combats ont eu lieu le 18 août: la bataille de Gravelotte (aussi appelée la bataille de Saint Privat) laissera un souvenir marquant dans toutes les mémoires, au point que l'expression "ça tombe comme à Gravelotte" passera dans le langage populaire pour désigner tantôt une hécatombe tantôt une pluie diluvienne.

Le village sera encore une fois détruit en septembre 1944 par des bombardements.

Gravelotte est maintenant une commune membre de Metz-Métropole.

Pilon en silex trouvé à Gravelotte, datant probablement de l'époque néolithique. Son usure témoigne d'une utilisation sur une très longue durée!

La voie romaine

Reliant Reims à Metz, le tracé de cette route est parfois incertain. Malgré tout, il reste établi que la voie traversait le ban communal au nord du village, passant les vallées du Fond de Loup et des Genivaux en profitant des pentes les plus douces.

Le tracé probable de la voie romaine sur le ban de Gravelotte.

La présence de la voie romaine a naturellement généré la construction de villas à proximité. Plusieurs emplacements d'habitations rurales de l'époque gallo-romaine sont identifiés sur le ban communal. En 1991, lors de travaux d'aménagement des nouveaux lotissements, une nécropole rurale datant du premier siècle de notre ère (entre 70 et 130 après JC) a été mise à jour et a fait l'objet de fouilles et de découvertes intéressantes.

C'est sans doute cette voie qu'avait suivi Attila, après le siège de Metz en 451, pour aller vers Reims. On dit même que lors de sa retraite vers l'Est, après sa lourde défaite lors de la bataille des Champs Catalauniques près de Troyes, il aurait établi un bivouac dans les bois des Génivaux...

La guerre de 1870 et la bataille de Gravelotte

En 1870, la prétention d'un prince prussien à la succession du trône d'Espagne crée dans le milieu politique français des désaccords qui vont aboutir à une déclaration de guerre de la France contre la Prusse, le 19 juillet. L'armée française se déploie aux frontières de l'Est, les premiers conflits ont lieu à Spicheren en Moselle et à Woerth en Alsace le 6 août. Les prussiens prennent l'avantage, obligeant les français à se replier sur Metz. Napoléon III, affaibli par la maladie, confie le commandement des armées à BAZAINE, qui décide d'un repli vers Châlons. Mais les prussiens, plus rapides dans leurs déplacements, occupent Mars la Tour et empêchent la progression des troupes françaises. Une violente bataille oppose les deux camps à Rezonville le 16 août, et BAZAINE décide alors de se replier sur le plateau entre Gravelotte et Rozérieulles.

C'est sur ce plateau que se déroulera le 18 août une des plus sanglantes batailles de la guerre, faisant plus de 30 000 morts. L'issue du combat est incertaine et BAZAINE décide néanmoins de se replier sur Metz. L'armée du Rhin y subira un siège jusqu'au 27 octobre, date de la capitulation.

L'armée prussienne continue sa progression vers la capitale, la ville de Sedan capitule début septembre, et le siège de Paris commence le 20 septembre. En décembre, l'armée de la Loire est battue, la guerre est perdue...

Le 18 janvier 1871, l'empire allemand est proclamé dans la galerie des glaces du château de Versailles, en mars, les troupes allemandes défilent sur les Champs Elysées, et le 10 mai est signé le traité de Francfort, cédant l'Alsace et la Moselle à l'état allemand.

Gravelotte est alors sur le territoire allemand jusqu'à la victoire de 1918. La Moselle redevient française jusqu'en 1940, elle sera de nouveau annexée par l' Allemagne en 1939 et retrouvera le sol français à la libération en 1945.

Gravelotte le 18 août 1870: défense de deux batteries du 13ème d'artillerie contre le 7ème cuirassiers et le 16ème Uhlans (dessin de Mr MERLAUD, d'après le croquis de Mr Dick de LONLAY, des guides de la garde).

Le mémorial de Gravelotte

Après les évènements de 1870 marquant la naissance de l'empire allemand, une imposante tour du souvenir (Aussicht Turm) est érigée en 1895 sur le plateau de Rozérieulles en mémoire de l'armée allemande et de ses soldats morts au combat. La position de la tour, stratégiquement trop proche du fort Jeanne d'Arc, oblige l'état allemand à la détruire à peine six ans après sa construction. Un mémorial (Gedenk Halle) est alors édifié à Gravelotte en remplacement de la tour. Il est inauguré par l'empereur Guillaume II en 1905. Plusieurs monuments funéraires occupent le cimetière militaire qui entoure le mémorial. Certains d'entre eux ont été placés là suite à des regroupements.


La Tour du Point du Jour, sur le territoire de Rozérieulles.
Le mausolée de Gravelotte, en face de l'actuel musée.

A l'intérieur du mausolée, des plaques de marbre mentionnent les régiments et dénombrent les victimes des affrontements du 18 août. Une plaque française a été ajoutée en mars 2012, lors de la pose de la première pierre du nouveau musée de la guerre de 1870 et de l'annexion par le ministre des armées, Gérard LONGUET.

Pose de la première pierre du musée par Gérard LONGUET.
Plaque posée en 2012 au mausolée.

La stèle de Guillaume 1er

Entre le village de Gravelotte et le hameau de la Malmaison, en face de la ferme de Mogador, on peut voir une grosse pierre, comme une sorte de menhir, marquant la position de l'empereur Guillaume 1er et de son état major lors de la sanglante journée du 18 août 1870. Cette stèle a été érigée en 1894, un tilleul a été planté à côté. A l'origine, des obus et une chaîne massive marquaient l'espace, il n'en reste presque rien.

La stèle de Guillaume 1er.
L'inscription précisant la fonction du monument.

Le quartier de Napoléon III

Au soir du 15 août 1870, Napoléon III arrive à Gravelotte, dans une auberge située au carrefour du village. Les armées françaises se replient lentement, trop lentement, vers Châlons, où BAZAINE espère effectuer un regroupement. Les troupes prussiennes veulent lui couper la route en passant plus au Sud par Gorze, freiner sa retraite et livrer une bataille décisive en repoussant les français sur Metz.

L’empereur est malade, des calculs rénaux le font souffrir violemment, ses généraux se jalousent, la situation est difficile pour les soldats, les prussiens sont plus rapides que les français, l’armée du Rhin campe ce soir là sur un front de plus de 20 km de large : les plus avancés sont à Vionville alors que d’autres n’ont pas encore quitté Metz. Il s’agit alors de protéger la retraite de l’empereur, pour éviter qu’il ne soit pris par l’ennemi.

La suite de l’empereur s’ébranle à 4h30 le matin du 16 août. Elle quitte Gravelotte et emprunte la route d’Etain pour rallier Verdun. Napoléon III abandonne la Lorraine et l’armée du Rhin pour ne plus jamais les revoir…

La maison choisie par Napoléon III pour ses quartiers.(collection particulière François DONVAL)
Plaque apposée en 2013.
Napoléon III, par A.CABANEL.
«Et cet empereur misérable, ce pauvre homme qui n’avait plus de place dans son empire, allait être emporté comme un paquet inutile et encombrant, parmi les bagages de ses troupes, condamné à traîner derrière lui l’ironie de sa maison impériale, ses cent gardes, ses voitures, ses chevaux, ses cuisiniers, ses fourgons de casseroles d’argent et de vin de Champagne, toute la pompe de son manteau de cour, semé d’abeilles, balayant le sang et la boue des grandes routes de la défaite…»Emile ZOLA, La débâcle
«L’empereur sort de la mauvaise auberge où il a passé la nuit ; son visage porte l’empreinte du chagrin et de l’inquiétude, les larmes semblent y avoir tracé de profonds sillons, son regard est plus voilé encore que d’habitude, sa démarche dénote l’affaiblissement moral qui l’accable ; dans son entourage, on voit la tristesse sur tous les visages, la désillusion dans toutes les pensées.»Colonel D’ANDLAU, Metz, campagne et négociations

Le Musée

L'ancien musée

Le premier musée de Gravelotte, le Kriegs Museum, a été créé en 1875 par Elisabeth ERPELDINGER et son frère Viktor. Il présentait une abondante collection d'objets souvent récupérés par eux-mêmes sur les lieux des combats. Une association allemande en devient propriétaire en 1910. Redevenue française en 1918, la municipalité de Gravelotte en récupère la propriété.

L'ancien musée à ses débuts (Collection particulière François DONVAL)

En 1944, les bombardements n'épargnent pas le musée, et il faudra toute la volonté de l'association des amis du musée de Gravelotte et du Souvenir Français pour mettre en place un musée provisoire et entreprendre les importants travaux qui s'achèvent en 1958. La façade devient classique, elle est encore en place. En 1992, le Parc Naturel Régional de Lorraine crée un syndicat intercommunal pour tenter d'en équilibrer le financement.

Le musée reconstruit en 1958. Un projet de "Mur des Noms" y avait été envisagé en 2004, il a été abandonné, le département a rétrocédé le bâtiment à la municipalité.

Pendant l'été 1978, le musée sera l'objet d'un acte de vandalisme peu commun, de la part d'un obscur groupe dénommé "Matra": un obus de 105 explose et cause de nombreux dégâts. La municipalité décide d'en assurer les réparations, et le musée pourra rouvrir ses portes en automne 1979. Il restera ouvert jusqu'en 2000, date à laquelle le Conseil Général de la Moselle acquiert les locaux et les collections. Un nouveau musée est alors envisagé : nouvel emplacement, nouveau bâtiment, nouvelles techniques muséographiques...

L'ancien musée, redevenu propriété de la commune de Gravelotte, est maintenant en travaux en vue d'abriter un centre médical et une crèche pour enfants.

Le Musée de la Guerre de 1870 et de l'Annexion

En 2010, le choix du Conseil Départemental se porte sur le projet de l'architecte Bruno MADER. Un bâtiment d'apparence métallique, aux lignes brisées évoquant les dégâts des obus, les déchirures et les cassures de la guerre, dans un milieu agricole paisible...

Le musée actuel vu depuis la rue de Metz...
...ou l'arrière, vu depuis les champs.

Le nouveau musée, inauguré en avril 2014, présente des collections enrichies et de nombreuses sources d'informations numériques. Deux salles sont particulièrement originales et émouvantes:

  • la salle consacrée à deux poèmes, le "Dormeur du val" d'Arthur RIMBAUD et la "Trompette de Vionville" de Ferdinand FREILIGRATH, où d'entrée, le visiteur plonge dans la terrible vérité d'une guerre violente.

  • la salle du panorama de Rezonville, qui présente des fragments de la peinture monumentale peinte par Edouard DETAILLE et Alphonse De NEUVILLE, dans un espace ovale où l'ensemble de la scène est magnifiquement reconstitué.

Musée d'histoire, il fait partie des sites "Moselle Passion" du Conseil Départemental de la Moselle.

L'église Saint Léonard

L'ancienne église Saint Léonard datait du XVème siècle. Elle a été détruite pendant les conflits de 1870. Reconstruite en style néogothique en 1881, elle subira de violents bombardements en septembre 1944. En voyant leur église sans toit, les cloches à terre, le clocher décapité, les habitants mesurent l'ampleur du désastre.

L'église bombardée.
La nef de l'église en ruine.
Les cloches tombées sur le sol.

Grâce à la détermination et à la ténacité du curé BLANCHEBARBE, de gros travaux de réfection seront entrepris dès 1946, et en 1950, l'église sera de nouveau un lieu de culte. Un orgue du facteur ROETHINGER sera posé en nid d'hirondelle au fond de l'église, et les nouveaux vitraux de UNTERSTELLER seront installés.

L'orgue ROETHINGER.
Détail de deux chapiteaux : croix de Lorraine, chardon lorrain et céréales…

Un évènement d’importance a lieu à Gravelotte en 1951 : les nouvelles cloches sont arrivées ! Charlotte POUILLEUX et Marguerite MOINIER en sont les marraines, tandis que les parrains sont Ernest SAINI et Prospère GRENOUILLET.

L'arrivée des cloches sur la place du village.
Les nouvelles cloches.
L'église actuelle

Auguste ESCOFFIER et "le lapin à la Gravelotte"

Né en 1846 près de Nice, Auguste ESCOFFIER, celui qu’on appelait “le roi des cuisiniers et le cuisinier des rois”, créateur de la pêche "Melba" et de la poire "Belle-Hélène", est un soldat de presque 24 ans, chargé de la cuisine des officiers quand il arrive à Gravelotte, en août 1870. Pendant cette époque, il écrit les “Mémoires d’un cuisinier de l’armée du Rhin” qu’il publiera plus tard. On y trouve une anecdote étonnante, alors que les armées se préparent à un combat très rude et que la nourriture commence à manquer cruellement.

Utilisant des ruses de sioux, ESCOFFIER et son aide BOURNIOL réussissent à capturer un lapin dans un champ voisin, persuadés qu’il s’agit du dernier de la région, tant le gibier est devenu rare, et il l’appellent le lapin de Gravelotte. D’autres témoignages prétendent qu’ils l’auraient pris à un paysan.

ESCOFFIER le fera sauter à la poêle, avec du saindoux, sel et poivre, des oignons hachés et un verre de cognac et autant de vin blanc. Il sera servi aux officiers, accompagné de pommes de terre frites dans la graisse de porc, le soir du 15 août 1870, la veille de la fuite de l’empereur Napoléon III vers Châlons et des terribles affrontements contre les armées prussiennes.

Auguste ESCOFFIER (1846-1935)

Sorte de lapin à la soubise, avec ses oignons réduits en purée, le “lapin sauté à la Gravelotte” restera dans les mémoires, comme l’ensemble de l’œuvre de cet immense cuisinier. Auguste ESCOFFIER meurt en 1935, laissant plus de dix mille recettes en héritage.


"Ce lapin, qui figure dans le menu, mériterait assurément une place dans les mille et un petits faits de cette campagne sous le nom de "Lapin à la Gravelotte" aussi bien parce qu’il était peut-être le seul qui restât dans la région, que par la façon dont il fut accommodé. Pour nous le procurer, il nous fallut déployer une sagacité de Peaux-Rouges en chasse. Restait maintenant à trouver la façon de l’apprêter. Je fis donc sauter à la poêle mon lapin dépecé, avec du saindoux ; six gros oignons finement hachés, sel et poivre, je l’arrosai ensuite d’un verre de cognac, autant de vin blanc, et en avant la cuisson !Vingt minutes après, le "lapin sauté" que l’on pourrait tout aussi bien appeler "à la soubise" puisque l’oignon réduit en purée en formait le principal condiment, était prêt à servir. J’ajouterai que nos officiers le trouvèrent délicieux. Ce fut ainsi que le soir du 15 août 1870, jour de la fête de la Vierge, patronne de la France, dînèrent les premiers officiers de l’état major de l’armée du Rhin, la veille de cette bataille de Gravelotte qui restera dans l’histoire comme l’une des plus grandes du siècle." Auguste ESCOFFIER Mémoires d’un cuisinier de l’Armée du Rhin 1883

Palmyr LANQUETIN

Issu d'une famille paysanne du Jura, Palmyr LANQUETIN est un simple soldat de l'armée du Rhin, du 8ème régiment d'infanterie de ligne. Dès le début des hostilités, il participe à la bataille de Spicheren le 6 août. Puis son régiment se replie sur Borny, où une bataille a lieu le 14 août. Toute l'armée du Rhin se regroupe alors à Metz, c'est là que Palmyr écrit à ses parents une lettre émouvante dans laquelle il raconte sa vie de soldat.


Metz le 14 août 1870Mes chers parentsJe m’empresse de vous écrire pour vous dire que je ne suis ni tué ni blessé mais je nen nai pas passé bien loin car je vous assure que cetais une bataille sanglante sa a commencer a neuf heure du matin jusqua neuf du soir nous nétions que vingt a trente mille contre centcinquante mille nous avons eu beaucoup dhommes hor de combat mais aumoins quatre fois moins que les Prussiens on croit quils ont perdus trente mille hommes mais que pouvions nous contre tant de monde il a fallu déjà bucher pour ne pas les laisser marcher plus vite car nous les avons mainttenu sur les Frontieres seulement ils etais cacher dans les bois et nous nous etions dans la plaine je t assure que cetais terrible de voir tout celaColisson de la Cluse a été bien abimé seulement il n’est pas mort desuite il a encore vecu quarante huit heure il avais des bales partout a la tete a la poitrine dans les bras et dans les jambes seulement je vous recomende de nen pas parlez car l on ne dira pas a ses Parents ce quil a eut et s’il le savais ils serais trop peineril y en a un qui etais coucher a coter demoi quand nous sommes arriver au feu son bras touchais ma cuisse il arrive une bale qui lui travaerse le bras cela ma fait un petit mouvment car les bales pleuvais comme la grelle l’on aurais dis des bourdons qui volais a coter de nousL on voyagais jour et nuit nous n’avons put trouver a manger pas meme du pain l’on alais mendier chez le Paysans mais l’on ne pouvais pas trouver a manger cart il y avais deja passé un corps d’armée avant nous je vous assure que l’on etais fatigué quand nous somme arriver prs de Metz je vous dirai que maintenant je suis abitué a coucher sur la terre l’on dort la dessus comme dans un bon lit seulement quand arrive le matin l’on a un peu froid Je crois que l’on va doner une bonne raclée aux Prussiens ce jour sa ne dois pas tarder car il ne sont pas loing sa pourais bien arrivé pour faire le quinze AoutJe n’ai put vous ecrire plus vite je n’ai recu ta lettre que hier soir cart dans des moments comme cela l’on ne recois pas les lettres sa est retarder toutes les fois quil y a un combatRecevez toutes les amitier de votre devoueP.Lanquetin

Palmyr LANQUETIN est mort le 16 août 1870, sans doute entre Gravelotte et Rezonville.

Palmyr LANQUETIN (1848-1870)

Voulant rendre hommage à tous ces soldats morts au combat, la commune de Gravelotte a donné son nom à une rue du village en 2012. Le chemin de mémoire qui mène de Gravelotte à Rezonville lui consacre également un panneau d'information.

La lettre de Palmyr LANQUETIN

Armand BLANCHEBARBE

Curé de Gravelotte de 1931 à 1942 et de 1945 à 1950, Armand BLANCHEBARBE a fait preuve de beaucoup de détermination et d’énergie dans la reconstruction de l’église. Bravant les interdictions préfectorales, il célèbre la confirmation en 1946, dans une église sans toit, dont les murs sont criblés de trous d'obus.

Cérémonie de la confirmation en 1946, dans une église presque en ruine.

Pendant la deuxième guerre mondiale, Armand BLANCHEBARBE a joué un rôle actif pour la protection des civils. Il a été décoré en 1950 de la croix de guerre pour avoir courageusement aidé le passage de prisonniers en zone libre. En juillet 1957, il se rend en Angleterre avec Joëlle JANSON, âgée de 14 ans au moment des faits, afin de recevoir une distinction pour leurs actes courageux en faveur des aviateurs alliés. Pendant deux semaines, ils auront l’occasion de faire connaître le petit village de Gravelotte à Londres et à toute la population.

Armand BLANCHEBARBE et Joëlle JANSON à Londres en 1957.

Une rue du village porte maintenant son nom, en hommage à tout ce qu'il a pu faire pour son église et ses paroissiens...

Nicolas UNTERSTELLER (1900-1967)

Peintre né en Moselle à Stiring-Wendel, Nicolas UNTERSTELLER fait son apprentissage artistique à l’école des arts décoratifs de Strasbourg, avant de partir pour l’école des beaux-arts de Paris. Lauréat en 1928 du Prix de Rome, il passe cinq ans en Italie avant d’ouvrir un atelier à Metz.

Les années Trente sont pour lui l’occasion de nombreuses commandes de peinture décorative, fresques ou vitraux en Moselle et en Lorraine : Boulange, Ban-Saint-Martin, Amnéville, Crusnes, Ste Thérèse à Metz, Gravelotte, Etain…

Son activité mosellane n’empêche pas d’autres commandes prestigieuses à Paris : décor de l’église du Saint-Esprit, de Saint-Pierre de Chaillot…

Nicolas UNTERSTELLER
Toile marouflée Conseil Départemental de la Moselle.

Il quitte ensuite la Moselle pour Paris et entre comme professeur à l’école des beaux-arts. Après la guerre, tout en continuant à enseigner, prenant même la direction de l’école, il travaille à de nombreux décors d’édifices publics (hôtels de ville, chambre de commerce, lycées, écoles…) partout en France. Il intervient également sur des paquebots.

Le décor de la salle du Conseil Général de la Moselle s’inscrit dans le cadre des travaux d’agrandissement de la Préfecture, conduits en 1935. UNTERSTELLER est alors prié de fournir un ensemble de toiles destinées à être marouflées sur les murs. Le thème général est une illustration des paysages et des activités de la Moselle. On y voit, selon la tradition, des allégories du fleuve et des rivières traversant le territoire ainsi que plusieurs représentations des activités économiques de la Moselle des années 1930 : la sidérurgie, la verrerie, le travail du bois et de la terre.

Fragments des vitraux de l'église de Gravelotte, montrant la vie d'un résistant pendant l'occupation nazie.

Réalisateur des vitraux de l'église de Gravelotte en 1950, il fait preuve d'audace et n'hésite pas à représenter les épisodes de la vie d'un résistant en les comparant à la vie du Christ. D'une grande qualité symbolique, esthétique et technique, ces vitraux font souvent l'occasion de visites commentées.

Henri Olivier Jean DE SAILLY

Sous officier du 44ème Régiment d'infanterie, Henri Olivier Jean DE SAILLY est mort près de la ferme de Moscou le 18 août 1870 lors de la bataille de Gravelotte. Une plaque de souvenir rédigée en latin est fixée sur une habitation près de la maison des quartiers de Napoléon III. Son nom est également cité sur une plaque de l'église commémorative de Mars la Tour.

Plaque DE SAILLY, rue de Metz

ANNO DOMINI MDCCCLXX DIE AUGUSTI XVIII Sub noctem propè Moscou Vicesimum et secundum annum agens, Invictus praelio cecidit animi constanus armiger, HENRI-OLIVIER-JEAN DE SAILLY Habitu scientia litteris, eximia facie praestans, Centuriae primae cohortis I.peditum legionis XLIV sublegatus.

En l’an 1870 le 18 août A la nuit tombante, près de Moscou, Agé de vingt deux ans, Invaincu dans la bataille, rendit l’âme, encore armé, Henri-Olivier-Jean DE SAILLY Maîtrisant les sciences et les lettres, se distinguant par son allure exceptionnelle, Sous-lieutenant du 44ème régiment de légionnaires fantassins de la première centurie.

Eglise commémorative de Mars la Tour: la plaque où figure le nom du sous-lieutenant DE SAILLY.
Un extrait de la liste des victimes des combats du 18 août 1870.

Francis WEILL

Né le 2 octobre 1923 à Strasbourg, d’une famille issue de la Communauté Israélite alsacienne, Francis WEILL s’était réfugié à Marseille et poursuivait ses études en classes préparatoires du Lycée Thiers. Dès l’arrivée des troupes allemandes en zone sud, la famille rentre en résistance fin 1942. Au cours au début de l’été 1943, les membres de la famille sont intégrés au Réseau GALLIA-RPA.

Francis WEILL

Le 6 février 1944, la famille a été arrêtée par la Gestapo à Marseille, vraisemblablement à la suite d’une dénonciation et internée pendant plusieurs semaines aux Baumettes. La Libération de Paris est survenue et Françis s’est mis à la disposition du PC opérationnel situé place Denfert Rochereau. Il a participé en tant que combattant à la libération de la Cité Universitaire et s’est mis à la disposition du Colonel Fabien qui organisait un régiment d’infanterie. Ce régiment sous le nom de Groupement Tactique de Lorraine a servi d’infanterie d’accompagnement à l’armée Patton.

Françis WEILL est tombé à Gravelotte le 26 septembre 1944, dans les premiers combats de la libération de Metz. Son corps, repéré par les villageois dès l’automne 1944, n’a pu être récupéré, en raison du froid intense de cet hiver et des dangers des champs de mines, qu’en début d’année 1945 où le curé BLANCHEBARBE l’a enterré et prévenu la Croix Rouge. C’est ainsi que ses parents n’ont été informés de son sort qu’en juin 1945, alors qu’ils conservaient l’espoir de le revoir.

Plaque posée en 2014 près de la station de la Mance.

Le 23 novembre 2014, un hommage militaire a été rendu à ce jeune juif de 20 ans, qui n’avait pas hésité à donner sa vie pour la France, alors qu’il venait juste, avec ses parents, son frère, sa sœur et une cousine, d’échapper à la déportation, après six mois d’enfermement à Drancy où il avait vu partir d’autres membres de sa famille moins chanceux (sa grand-mère, un oncle, une tante, deux cousins et une cousine).

Déjà son père, Paul WEILL, avant la première guerre mondiale, avait été un ardent défenseur de la culture française comme peut en témoigner une lettre de 1910 de Raymond POINCARÉ, qui remercie le secrétaire du "Cercle des Étudiants Alsaciens-Lorrains" pour sa défense de la culture française dans une Alsace-Lorraine annexée depuis 1870.

1870 où, ironie de l’histoire, c’est à Gravelotte justement que de terribles combats ont eu lieu faisant perdre à la France cette Alsace-Lorraine pour laquelle, sept décennies plus tard, le sous-lieutenant Francis WEILL donnait sa vie.

Article du Républicain Lorrain, le 24 novembre 2014.

La voie de la Liberté

La voie de la Liberté est une voie commémorant la victoire des Alliés et la libération de la France, de la Belgique et du Luxembourg pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle est matérialisée par une série de bornes kilométriques le long du réseau routier entre Sainte-Mère-Église (borne 0) et Utah Beach (borne 00) en Basse-Normandie et Bastogne dans la province belge du Luxembourg, marquant l'itinéraire suivi par la 3e armée américaine commandée par le général PATTON.

Le colonel Guy de la VASSELAIS, ancien chef de la Mission militaire française de la liaison tactique près le XXe Corps de la IIIe Armée U.S, concevait, dès juin 1944, de réaliser un souvenir grandiose de la Libération de la France. De retour d'un voyage aux États-Unis avec le maire de Metz, ils décident de commémorer la progression des armées alliées en créant une voie de la Liberté.

Le tracé de la Voie de la Liberté, du Cotentin à Bastogne.

Ils choisissent pour cela un des itinéraires les plus glorieux, le parcours triomphal de la troisième armée américaine de PATTON, de son débarquement en Normandie, sa percée dans le Cotentin puis sa célèbre chevauchée historique qui l'amènera en 54 jours de la Normandie à Metz. Elle sera symbolisée par des bornes marquant chaque kilomètre du trajet de l'armée victorieuse. En mars 1946, l'association Belgo-américaine proposent aux Français de la prolonger jusqu'à Bastogne et le 5 juillet 1947, a lieu la pose officielle de la borne terminale à Bastogne. Le 16 septembre de la même année, c'est au tour de la borne originelle à Sainte-Mère-Église. L'inauguration de la voie a lieu le 18 septembre 1947 à Fontainebleau. Un Timbre postal d'une valeur faciale de 6 francs augmenté d'une surtaxe de 4 francs au profit du Comité Voie de la Liberté a été émis en 1947.

Voie de la Liberté à Gravelotte: devant l'ancien Musée, près du monument des chasseurs prussiens, sur la route de Rezonville.

Le modèle de la borne est dû au sculpteur François COGNÉ. À l'origine, c'est une borne de ciment rose d'environ 1 mètre de hauteur mais en France, le long des grands axes routiers, de très nombreuses bornes d'origine ont été remplacées par des copies en matériaux légers, moins dangereuses en cas d'accident de la route. Il subsiste quelques modèles originaux, notamment à Champillon dans la Marne, à Frisange au Grand-Duché de Luxembourg (sans numéro), ainsi que toutes les bornes longeant la route nationale N4 en Belgique depuis la frontière luxembourgeoise au Rosenberg jusqu'à Bastogne. Les bornes représentent une flamme de la liberté, sortant des flots, symbole de l'arrivée par la mer des troupes libératrices. Elle rappelle la flamme de la statue de la Liberté de New York.

La voie de la liberté traverse le village de Gravelotte, entre Verdun et Metz.

Le timbre édité en 1947.

Les chemins de mémoire

Toute la campagne du plateau de Gravelotte est parsemée de monuments dressés en souvenir des combats de 1870. La plupart d'entre eux sont prussiens, quelques uns, souvent les plus modestes, sont français. Cela a conduit un groupe de bénévoles et d'élus à établir des itinéraires de randonnée pour mieux faire connaître l'histoire locale et les grands bouleversements qui ont suivi les conflits de 1870.

Les communes de Rezonville, Gorze et Vionville ont mis en place dès le début des années 2000, une série d'itinéraires commentés montrant un grand nombre de monuments et de lieux historiques.

Un prolongement de ce chemin de mémoire a été mis en place en 2013, faisant la jonction entre les itinéraires existants et Gravelotte.

Le tracé du chemin de mémoire sur la commune de Gravelotte. Les numéros correspondent aux emplacements des panneaux pédagogiques.

Ce chemin a été inauguré le 17 août 2013 lors d'une grande manifestation, par Michel TORLOTING, maire de Gravelotte, Marielle PAYEN, maire de Rezonville, Jacques HOFFMANN, maire de Gorze et Jean Luc BOHL, président de Metz Métropole. Plus de 400 randonneurs ont participé à la marche inaugurale, commentée par plusieurs historiens et spécialistes.

Le repas en compagnie des figurants.

Par une belle journée d’été, un long cortège de marcheurs est parti de Rezonville vers Gravelotte, empruntant le nouveau chemin de mémoire, en compagnie de soldats de 1870 qui ont simulé une attaque surprise à la sortie du bois… Lors de la dernière station, Mr Georges LANQUETIN a évoqué comment il avait pu retrouver la lettre de Palmyr, ce pauvre soldat mort à Gravelotte pendant les combats, et dont une rue de notre village porte maintenant le nom. Avec beaucoup d’émotion, chacun a pu voir la lettre, et aussi en écouter une version sonore très poignante enregistrée par Yannick ONISTO. Plus loin, sur le stade, Renée THOUAND avait colorisé avec les enfants du village, une épreuve géante du fameux "panorama de Rezonville", cette oeuvre démesurée peinte par Edouard DETAILLE et Alphonse de NEUVILLE, dont de nombreux fragments sont visibles au musée de Gravelotte. Enfin, un délicieux "lapin à la Gravelotte" avait été préparé suivant la recette d’Auguste ESCOFFIER et servi à plus de 250 personnes.

Colorisation d'une copie du Panorama de Rezonville, et démonstration de tir au canon par les Arquebusiers de l'Est.

16 août 1870: un régiment prussien particulier

Le 7ème Régiment des Cuirassiers de Magdebourg a laissé dans l'histoire une trace particulière, appelée "la chevauchée de la mort" et marquée par un monument en forme d'obélisque, situé entre Gravelotte et Rezonville. Lors de l'attaque de cavalerie menée par le général von BREDOW le long de la voie romaine, les huit cents cavaliers du Régiment des Cuirassiers de Magdebourg et du 16ème Régiment de Uhlans se lancent au galop à l'assaut du camp français, réussissent à traverser les lignes de l'infanterie... avant de devoir reculer devant la cavalerie du général de FORTON, placée en embuscade derrière le bois de Villers. Voyant son offensive vouée à l'échec, von BREDOW fait sonner la retraite. Les pertes sont considérables, il ne reste que 77 survivants au 7ème Régiment de Cuirassiers de Magdebourg.

Attaque de Bredow, riposte de Forton et situation du monument.
Le monument des Cuirassiers de Magdebourg.Au loin, on aperçoit le clocher de l'église de Gravelotte.

Plusieurs soldats de ce régiment provenaient de la région de Halberstadt, et sur le monument figurent le nom et le village des victimes du combat. Encore aujourd'hui, des habitants de cette région viennent régulièrement visiter les lieux des combats. En 1994, une délégation de la commune de Gravelotte, dont le maire de l'époque Léon MULLER, s'était amicalement rendue à Halberstadt et avait noué des liens avec la municipalité.

Inscriptions sur le monument.

Après l'offensive prussienne, et voyant que l'assaut était vain, von BREDOW ordonne la retraite. Auguste BINKEBANK, le trompettiste du régiment, veut alors sonner le repli, mais son instrument a été perforé par une balle et ne produit qu'un son pitoyable, image tragique de cette "chevauchée de la mort", sans doute un des derniers grands combats de cavalerie de l'histoire. Conservée au musée de Halberstadt, cette trompette avait été prêtée momentanément au musée de Gravelotte, où elle figurait en bonne place accompagnée du célèbre poème de Ferdinand FREILIGRATH...

La trompette d'Auguste BINKEBANK,prêtée par la ville d'Halberstadt au Musée de Gravelotte.

Une mine de fer à Gravelotte ?

Voilà une idée étonnante ! Pourtant, c'était bien une éventualité, pendant la période d'annexion après le traité de Versailles signé en 1871...

A partir des années 1890, August THYSSEN (1842-1926) se constitue un véritable empire industriel. Dans le but de fournir en minerai de fer, les hauts-fourneaux de la Ruhr, il convoite plusieurs concessions minières en Lorraine (Pierrevillers, Batilly, Jouaville...). En 1911, il achète la concession VINCENT, entre Gravelotte et Amanvillers, et récupère aussi les concessions MOSEL entre Ars et Gravelotte. Un projet voit alors le jour en 1913: construire un puits de mine de 5 mètres de diamètre et de plus de 160 mètres de profondeur près de la ferme Mogador, entre Gravelotte et La Malmaison....

Une partie de la concession Mosel,indiquant l'emplacement prévu pour le puits.

Mais à cette époque, le souvenir des combats est encore vif, ces lieux de bataille ont été à l'origine de l'unité allemande et sont encore comme le berceau du nouveau Reich. Les autorités militaires et politiques ne sont pas favorables à la transformation de ces paysages où tant de soldats sont morts pour leur pays. Les démarches pour obtenir les autorisations de construire des ensembles industriels sont longues, âprement discutées et l'empereur Guillaume II y prend souvent part.

Stèle de Guillaume 1er, indiquant sa position pendant les combats du 18 août 1870. (Collection particulière François DONVAL)

Or, l'emplacement prévu pour le puits de mine est très proche de la stèle de Guillaume 1er, rendant les négociations encore plus délicates! Voilà ce qu'en dit un courrier rédigé en 1913 par un chef de cabinet: "Sa Majesté a été péniblement touchée par la possibilité que le paysage des champs de bataille puisse être détruit de cette façon. Elle souhaiterait instamment que les installations du puits ne soient pas aussi proches du monument Roi Guillaume". Aussitôt, THYSSEN se déclare prêt à éloigner les constructions de plus de 500m, mais les autorités militaires resteront opposées à son idée.

Le patrimoine minier d'Auguste THYSSEN connaîtra encore bien d'autres difficultés, la partie mosellane finira par être rachetée après la première guerre mondiale, laissant dans l'oubli les projets d'implantation minière sur le site de Gravelotte...

Borne de concession minière en forêt, territoire d'Ars sur Moselle.