La restauration du "cadran Chomard" est à l'origine de la création de l'association " Cherche Midi 42 ". Voici l'histoire racontée par Philippe Forissier, le fondateur et premier président de l'association.
Ph. Forissier - Cherche Midi 42
mars 2016
Sur le dôme de l'Hôtel de Ville, construit vers 1860, il y eut successivement deux cadrans solaires. Le premier, installé en 1891, vécut pendant vingt à vingt-cinq ans puis disparut de mort lente à la suite de dégradations successives dues aux intempéries. Le second, mis en place en 1930, était plus sophistiqué et plus résistant, mais il fut condamné à une mort subite en 1952, lors de la démolition du dôme.
Va-t-il renaître de ses cendres et revoir le jour – et le soleil – à un autre endroit de la ville ?
Avant de répondre à cette question, nous vous proposons de nous replonger dans un passé récent – la fin du XIXe siècle – pour prendre conscience des connaissances scientifiques et techniques relatives à la gestion de l'HEURE, afin de mieux appréhender le contexte dans lequel le premier cadran naquit et vécut.
Nous nous intéresserons ensuite à l'histoire du second cadran : sa création, sa vie, sa mort, sa descente aux enfers... et sa résurrection.
L'heure, les cadrans et les horloges à la fin du XIXe siècle
La fin du XIXe siècle fut une période importante dans l'histoire de la mesure du temps et particulièrement dans la définition de l'HEURE.
Avant de définir l'heure, il avait fallu définir le jour ! Quand débute le jour ? Pendant des siècles, de multiples solutions furent tour à tour adoptées : l'une des premières dispositions prévoyait que le jour commençât au lever du soleil et s'arrêtât à son coucher ; on divisait alors en douze la durée comprise entre les deux : c'étaient les heures «babyloniennes». Les heures n'avaient donc pas la même durée d'un jour à l'autre !
On adopta ensuite la solution inverse : le jour commence au coucher du soleil, c'est-à-dire au moment où le précédent s'éteint («heures italiennes»).
Puis, après quelques progrès en matière astronomique, il s'avéra que l'événement remarquable était le passage du soleil au zénith et que le jour devait débuter à cet instant... mais alors le matin et le soir n'avaient pas la même date !
Enfin, on se mit d'accord pour adopter la solution qui nous paraît évidente aujourd'hui : le jour commence à minuit, mais il faut remarquer que minuit est un «non événement» ; ce n'est que le «symétrique» du passage du soleil au zénith. L'essentiel, toutefois était atteint : nous avions un «JOUR» ayant une origine bien définie et que l'on pouvait découper en 24 parties égales tout au long de l'année (après adoption d'un «jour moyen» pour pallier quelques légers écarts astronomiques).
Ceci étant admis, il restait à résoudre le difficile problème des longitudes ; en effet, il n'est pas midi au soleil en même temps dans tous les lieux du pays : «midi à Brest» a lieu environ une heure après «midi à Strasbourg» ! Les cadrans solaires anciens s'en moquaient puisqu'ils donnaient l'Heure Solaire Locale... Chacun «voyait midi à sa porte».
Mais bien vite il a fallu uniformiser les heures dans tout le pays, le développement du chemin de fer ayant fortement contribué à adopter cette démarche. A Saint-Etienne on adopta comme référence le méridien de Paris en 1889, ce qui veut dire que toutes les horloges et les montres de la ville se mirent à l'heure de Paris. Ce n'était d'ailleurs qu'une régularisation car c'était déjà la loi depuis 1816 ! Mais la province n'appliquait pas le décret.
Que devenaient alors les nombreux cadrans implantés dans tout le département ? Eh bien ils continuaient de donner l'heure locale mais il fallait apporter à l'heure lue sur le cadran une «correction de longitude» pour retrouver l'heure de sa montre.
Le chemin de la rationalisation n'était pas pour autant terminé puisqu'en 1884 une commission internationale créa les fuseaux horaires et le centre du premier fuseau fut Greenwich. Mais ce ne fut qu'en 1911 que la France accepta de prendre comme référence le «méridien anglais» : entre ces deux dates, la France refusait d'adopter le méridien de Greenwich comme origine (en conservant celui de Paris) tant que les Anglais n'adopteraient pas le système métrique !... et ce fut pendant cette période que le premier cadran de l'Hôtel de Ville fut conçu, ce qui explique le décalage d'environ dix minutes entre l'heure du cadran stéphanois et l'heure officielle, celle de Paris.
A propos de corrections, il faut aussi noter que depuis 1916 le problème s'est encore aggravé avec l'adoption de l'horaire d'hiver et de l'horaire d'été. Après quelques essais et balbutiements, nous sommes maintenant arrivés à un système qui nous condamne à ne plus jamais être, ni l'été, ni l'hiver, à l'heure de notre fuseau horaire ! Il faut donc appliquer une nouvelle correction à l'heure lue sur nos cadrans solaires pour retrouver l'heure de notre montre... qui est de plus en plus fausse ! Mais qu'importe, la Terre tourne toujours de la même façon autour du soleil sur son ellipse... et les cadrans solaires fonctionnent toujours suivant leurs principes immuables !
Pour conclure ce rappel historique de la fin du XIXe siècle, il faut évoquer le rôle important joué par l'horlogerie qui avait fait d'énormes progrès et qui devenait capable de donner l'heure avec une précision excellente. Allait-elle supplanter le cadran solaire et l'envoyer au musée des accessoires devenus inutiles ? Eh bien non, car l'horlogerie, si elle savait parfaitement bien conserver l'heure – c'est-à-dire gérer la durée, le temps qui s'écoule - ne savait pas résoudre le difficile problème de l'initialisation. Comment en effet caler ou recaler l'heure d'une pendule ? Comment évaluer son avance ou son retard ? Par rapport à quoi ? Où était la «référence-temps» ? Vous avez deviné la réponse : le soleil reste la grande horloge du Monde, et lui seul, à travers les cadrans peut servir de référence. Aujourd'hui encore, ce sont des procédés astronomiques, relayés par l'électronique, qui donnent l'heure exacte, les procédés mécaniques – l'horlogerie – ne faisant que gérer la durée à partir de données fournies par les mesures astronomiques.
Bien sûr, depuis la création de l'horloge parlante (1933), on ne fait plus appel aux cadrans solaires pour régler les pendules, n'empêche que les cadrans sont toujours là et, à l'époque de la montre à quartz et des mesures du temps en micro, voire en nano ou pico secondes, il pourrait paraître illusoire de s'intéresser à eux... et pourtant ! Sur les façades des maisons, des églises, des vieux manoirs ou des édifices publics, le cadran, quand on le rencontre, ne manque jamais d'attirer notre regard ; un cadran, vu pour la première fois, peut paraître insolite et mystérieux et provoque même parfois une certaine déception car il indique l'heure solaire locale.
A qui sait le déchiffrer convenablement, et ce n'est pas très difficile, il est possible de lire l'heure, mais parfois aussi la saison, le mois et le jour.
Il faut noter aussi que la plupart du temps un cadran est une oeuvre d'art et demeure donc significatif d'une époque, d'une religion ou d'un terroir. Enfin, les cadrans anciens comportent très souvent des devises peintes ou gravées qui sont un témoignage de la philosophie populaire de l'époque, donc une part de notre patrimoine culturel.
Mais avant d'aborder la description et l'histoire des deux cadrans stéphanois, rappelons rapidement comment fonctionnent les cadrans solaires : un cadran est composé d'un tableau vertical sur lequel est disposé le tracé des heures, et d'un style, qui est la tige métallique plantée dans le mur au-dessus du tableau et dont l'ombre, tournant tout au long du jour, balaye successivement les lignes horaires disposées en éventail.
Pour que le cadran soit juste, il faut que le style soit convenablement posé : son angle latéral et son inclinaison obéissent à des règles strictes. Les angles du tracé eux aussi sont calculés avec précision en fonction de l'orientation du mur support. L'ombre du bout du style, souvent obtenue par un oeilleton – un trou – placé à l'extrémité de celui-ci, est significative car elle traduit la hauteur du soleil dans le ciel, c'est-à-dire la saison. L'hiver, le soleil est bas et l'ombre du bout du style est en haut du tableau, l'été, c'est l'inverse.
Le premier cadran et sa mort lente
Le premier cadran installé sur le dôme de l'Hôtel de Ville était en fait une «méridienne» ; c'était en 1891. Mais qu'est-ce qu'une méridienne ?
Alors qu'un cadran solaire classique indique toutes les heures de la journée pendant lesquelles il est ensoleillé, la méridienne ne donne l'heure qu'entre onze heures et treize heures, et la ligne verticale de midi est remplacée par une courbe en forme de huit très allongé pour corriger l'avance ou le retard de la Terre sur son orbite par rapport à une progression moyenne (ceci vient du fait que la Terre tourne autour du soleil en décrivant une ellipse et non un cercle).
C'est le spot lumineux passant par l'oeilleton disposé à l'extrémité du style qui, se projetant sur la courbe indique qu'il est midi. Ce procédé permet non seulement d'avoir une bonne précision de la lecture au moment de midi mais aussi de pouvoir lire la date car le point observé à midi sur la courbe progresse insensiblement de jour en jour sur cette courbe, la parcourant totalement en un an : il va, de haut en bas de l'hiver à l'été et remonte sur l'autre branche du huit de l'été à l'hiver. On peut donc jalonner la courbe avec les jours, les mois, les saisons... Au XIXe siècle, les méridiennes eurent, grâce à Monsieur Grandjean de Fourchy, beaucoup de succès. C'est probablement pourquoi la Mairie de Saint-Etienne opta pour cette formule.
Cette méridienne mesurait six mètres de haut et deux mètres vingt de large. Ces dimensions peuvent paraître superfétatoires mais il ne faut pas oublier que le cadran était destiné à être lu du milieu de la place de l'Hôtel de Ville, c'est-à-dire à soixante mètres environ.
Au bas de l'horloge située au-dessus du cadran on pouvait voir une tête d'angelot (?) à la base de laquelle partait le style de la méridienne ; sa longueur et son angle d'inclinaison étaient savamment calculés pour que le spot lumineux tombe bien sur la courbe chaque jour à midi solaire. Mais un détail troublait tout de même les stéphanois car tous les jours lorsque la méridienne indiquait qu'il était midi au soleil à Saint-Etienne, l'horloge qui était calée sur l'heure de Paris, indiquait midi moins dix !
La méridienne était peinte, mais à l'époque la qualité de la peinture ne possédait pas les caractéristiques de résistance actuelle au soleil – bien sûr – au froid et aux intempéries. La pluie, le froid, le gel se relayèrent pour attaquer progressivement le tracé du cadran ; comme il ne fut jamais repeint, il s'estompa lentement avant de devenir pratiquement illisible.
Si on ajoute à ceci que, pour des raisons mal connues, le style disparut aux alentours de la première guerre mondiale, cette méridienne, qui vingt-cinq ans auparavant était l'une des plus belles de France, était devenue un vestige ornemental inutile.\\
L'horloge suffisait pour donner l'heure aux stéphanois, mais une curiosité scientifique avait disparu ; on l'avait laissé mourir tranquillement.
Le second cadran et sa mort subite
Le conseil municipal des années 1920 prit vite conscience que son cadran (sa méridienne) était devenu inopérant. Vers 1925, le problème de sa restauration revint donc à l'ordre du jour et c'est en 1927 que la Mairie sollicita les services de Monsieur Louis Chomard, professeur d'analyse mathématique et d'astronomie à l'Ecole des Mines de Saint-Etienne pour restaurer la méridienne. Mais, plutôt que de la restaurer, le professeur proposa de concevoir un cadran solaire nouveau et plus complet ; il en fit même deux (nous verrons pourquoi un peu plus loin). Sa proposition fut acceptée et le cadran fut installé en 1930. Le maître d'oeuvre fut Monsieur Clergeat assisté de Monsieur Touron, graveur de précision ; ils respectèrent scrupuleusement le tracé établi par Monsieur Chomard.
Les traces des documents d'étude du professeur Chomard n'ont été retrouvées ni aux archives municipales ni à celles de l'Ecole des Mines. Originaire de Lons-le-Saunier, Monsieur Chomard n'a donc pas laissé de traces tangibles de ses travaux dans la Loire et il sera bien difficile de mettre la main dessus car il est décédé depuis près d'un demi siècle. Néanmoins, l'étude approfondie du tracé de son cadran permet d'affirmer qu'il tenait compte de toutes les connaissances scientifiques et gnomoniques acquises à cette époque, notamment :
- le positionnement adéquat du style, c'est-à-dire le respect de l'angle d'inclinaison en fonction de la latitude du lieu et le positionnement dans l'axe du méridien du lieu,
-l a correction de longitude intégrée par décalage du tracé,
-la transformation de toutes les lignes horaires en «courbe en huit» pour corriger – comme sur une méridienne – les avances ou les retards de la Terre sur son orbite.
Toutes ces caractéristiques, qui peuvent paraître complexes, contribuaient en fait à rendre la lecture du cadran toute simple puisque toutes les corrections étaient faites : ON LISAIT SUR LE CADRAN L'HEURE DE SA MONTRE (avec une heure de décalage l'été).
Il ETAIT L'UN DES RARES CADRANS FRANÇAIS A PRESENTER UN TRACE AUSSI PERFORMANT et si on a progressé depuis 1930 dans le domaine des matériaux, des formes et de la finesse de précision, il reste que la conception géométrique du tracé du cadran du professeur Chomard est encore aujourd'hui exemplaire.
Mais pourquoi y avait-il deux cadrans l’un au-dessous de l’autre ? Ce n’est pas, comme on l’a parfois dit, pour s’adapter à l’heure d’hiver ou à l’heure d’été, mais parce que s’il n’y en avait eu qu’un, on n’aurait pas su sur quelle branche de la courbe en huit il fallait lire l’heure. Alors le cadran du haut comportait les parties du huit qui concernent janvier à juin et celui du bas les parties qui concernent juillet à décembre. Sur celui du haut on peut d’ailleurs lire «hiver et printemps» et sur celui du bas «automne et été».
C’était donc en fait le même cadran éclaté en deux parties. Ce nouveau cadran était en pierre de Comblanchien et il avait exactement les mêmes dimensions que l’ancienne méridienne pour venir se loger dans le même emplacement. Il était composé de quatre dalles : celle du haut et celle du bas étaient arrondies pour respecter la géométrie de l’ancien. la devise était : «TRANSIT UMBRA LUX PERMANET» (l’ombre passe, la lumière reste). «Transit umbra» figure tout en haut de la première dalle et «lux permanet» tout en bas de la quatrième.
Ce cadran complexe dans sa conception pour être plus facile à lire, fonctionna pendant 22 ans. Hélas en 1952, comme le savent la plupart des stéphanois, le dôme fut démoli pour des raisons de sécurité après un incendie. Les quatre dalles du cadran furent alors entreposées à l’Orangerie (actuellement stade de l’Etivallière) mais les deux styles n’ont pas été conservés. Le cadran était alors cliniquement mort. Dans sa descente aux enfers, il dût subir encore quelques outrages : vers 1970, en effet, à l’occasion de la percée de l’autoroute rejoignant la Terrasse et passant à proximité de l’Orangerie, les dalles du cadran furent maltraitées et mises en pièce au marteau piqueur pour faciliter leur transport vers le garage situé à l’entrée actuelle du parc. En 1983, la Société des Sciences Naturelles, entreprenant le recensement des cadrans solaires de la Loire, retrouva les fragments du cadran mais constatant les dégâts, renonça à entreprendre sa restauration.
Malgré toutes ces dégradations, les malheurs du cadran n’étaient pas encore terminés car dans les années 1990, l’extension du garage nécessita un nouveau transfert des fragments donc des nouvelles pertes. Les morceaux rescapés furent stockés en vrac, mélangés très vite avec des ferrailles dans l’un des casiers des produits d’entretien du parc. Des herbes sauvages vinrent bientôt les recouvrir... Une sépulture indigne pour une pièce incomparable de notre patrimoine scientifique !
Et si le cadran ressuscitait ?
L’Association «Cherche Midi 42» vit le jour en janvier 1997. Comprenant dans ses rangs deux membres de la Commission nationale des Cadrans Solaires (mise en place par la Société Astronomique de France), elle rassembla bien vite les stéphanois passionnés de cadrans solaires. Les buts de l’association allaient de la sauvegarde des cadrans anciens à la réalisation de cadrans nouveaux en passant par le recensement des cadrans de la Loire, l’organisation de conférences relatives aux cadrans et l’apport de conseils techniques à toute personne ou à tout organisme. Dans le cadre du recensement, l’association retrouva vite les traces déjà empruntées par la Société des Sciences Naturelles en 1983 et entreprit, avec l’accord des services municipaux, l’exhumation des fragments du cadran. Un difficile exercice de reconstruction du puzzle fut alors entrepris sur les lieux (au stade de l’Etivallière).
La photo témoigne de l’ampleur du désastre : une centaine de fragments de dimensions très inégales, et dont les cassures multi-axiales témoignaient encore des points d’éclatement dus aux marteaux piqueurs, purent être assemblés tandis qu’une vingtaine d’éclats de faible dimension étaient strictement impossibles à intégrer dans l’ensemble. De plus, il manquait 12 à 15\% de la surface.
Le doute initial quant à la faisabilité d’une telle restauration fit tout de même place à une volonté tenace de faire revivre cet élément remarquable du patrimoine scientifique de notre ville. L’association consulta alors quelques spécialistes et finit par trouver une collaboration avec un tailleur de pierre, ancien «compagnon», qui fut d’emblée intéressé par notre démarche.
Ensemble, nous avons estimé que la restauration était difficile mais possible. Les fragments ont été transportés en lieu sûr et, pendant quatre ans, les membres de l’association se sont mis au travail et, dalle par dalle, ont recollé les fragments tout en respectant la planéité de la surface, ce qui ne fut pas simple car l’épaisseur du cadran n’était pas uniforme. Les parties manquantes ont fait l’objet d’armatures en acier inoxydable destinées à maintenir un mortier d’adjonction.
Le travail suivant, le plus délicat, fut de reconstituer et de graver le tracé sur les parties refaites.
Ceci étant réalisé, il a fallu calculer la longueur des styles que nous n’avons pu établir avec précision que grâce à des simulations car nous n’avons jamais pu mettre la main sur les calculs du Professeur Chomard. Nous avons pu ainsi établir leur longueur qui est de 54 cm. La précision de cette longueur revêt une importance capitale puisque seul le bout de l’ombre des styles est significatif pour lire l’heure et la date.
Après avoir disposé les styles à leur place sur les dalles 1 et 3 (à partir du haut), il restait à tester le résultat en installant les dalles conformément à leur orientation d’origine sur la face sud de l’Hôtel de Ville. Ce travail a nécessité des manipulations très précises sur des dalles pesant chacune environ 600 kg ; il ne fut réalisé que grâce à l’opiniâtreté et à l’adresse de Laurent L., notre artisan tailleur de pierres.
Les tests ayant donné satisfaction, nous avons transporté les quatre dalles du cadran dans les ateliers d’une entreprise montbrisonnaise spécialisée dans les structures métalliques, de manière à assembler les dalles et à consolider l’ensemble avec des armatures placées au dos et autour du cadran.
Le cadran était alors prêt à être transporté (délicatement) et à être disposé verticalement sur une façade adéquate. Pour le fixer, le cadre métallique avait été muni de six oeillets percés (un en haut, un en bas et deux de chaque côté) dont les trous devaient entrer dans six énormes pitons de maintien. Où trouver la façade adéquate ? Le dôme de l’Hôtel de ville ayant disparu, il était donc exclu de remettre le cadran à son ancien emplacement. Elle devait impérativement répondre à deux conditions : d’une part, elle devait être parallèle à la façade sud de l’Hôtel de Ville puisque le tracé du cadran avait été conçu pour une telle orientation et, d’autre part, elle devait offrir un dégagement suffisant pour que l’on puisse lire l’heure à distance.
En collaboration avec les agents techniques de la ville, et sous l’égide de l’architecte des Bâtiments de France, nous avons d’abord pensé à la face sud de la Bourse du Travail, mais le cadran était trop large (2,20 m) pour être harmonieusement disposé dans les seuls emplacements possibles. Nous avons alors opté pour la face sud du clocher de l’église Notre-Dame qui donne sur la place Chavanelle et qui répondait lui aussi aux conditions requises.
La date de l’installation du cadran fut fixée au 6 janvier 2006.
Ce jour là, il neigeait ... ce qui peut paraître insolite pour installer un cadran solaire !
Le camion véhiculant le cadran depuis Montbrison arriva vers dix heures : le transport s’était bien passé, (nous redoutions bien sûr d’éventuelles cassures dues aux inévitables secousses).
Le montage s’opéra alors grâce à deux engins de levage : l’un montant le cadran jusqu’à bonne hauteur devant le clocher et l’autre une nacelle abritant deux techniciens dont le délicat travail consistait à présenter le cadran (deux tonnes et quatre cents kilos) de manière que les trous des oeillets se retrouvent en face des pitons préalablement installés sur le mur du clocher.
Ce travail demanda plusieurs heures durant lesquelles une certaine anxiété se lisait sur les visages de tous ceux qui suivaient l’opération d’en bas et qui voyaient le cadran se balancer dans les airs au bout de ses élingues !
Dans l’après-midi tout fut en place conformément à ce qui avait été prévu ; bravo à tous les techniciens !
Dès le retour des premiers rayons du soleil, nous avons pu vérifier l’exactitude du cadran.
Depuis, chaque année, à l’occasion des Journées du Patrimoine, nous assurons une permanence devant le cadran d’abord pour en raconter l’histoire mouvementée, ensuite et surtout pour en expliquer le fonctionnement en insistant sur le fait qu’il représente l’un des fleurons les plus remarquables du patrimoine scientifique de la Ville.