RESTAURATION CIBOT NEO-TELE55


Ce CIBOT modèle NEO-TELE55 est un téléviseur du milieu des années 50. Livré en KIT prêt à monter, comme beaucoup d'autres dont leurs réclames garnissaient les premières pages des magazines d'électronique de l'époque.

Quelle fierté pour le chanceux amateur de l'époque d'avoir pu réussir à réaliser lui-même sa propre télé !


Réclame tirée du magazine Le Haut-parleur. Différentes versions du NEO-TELE



La bizarrerie qui me laisse assez dubitatif est ce curieux filtre violet/rose qui semble parfaitement d'origine et que j'ai trouvé posé sous le poste. J'en ai déjà vu sur quelques rares TV anglais de la fin des années 40, en parcourant le web, et je m'interroge sur l’intérêt d'un tel filtre, si ce n'est de voir la vie en rose ?


Quelques images du châssis de l'intérieur.



Les téléviseurs CIBOT sont simples, aucune sophistication à l'horizon, mais une conception éprouvée.


À noter, les condensateurs marqués CIBOT et un très beau haut-parleurs AUDAX.




La platine FI et les blindages marqués CICOR


Le piège à ions et la bobine de concentration ne sont pas d'origine, ces pièces étaient manquantes.


La bobine est montée en série avec la haute tension et fait donc office de self de filtrage.



Le transformateur THT entièrement enrobé de cire et le gros transfo d'alimentation.

Le châssis est bien isolé du secteur et les lampes sont de la série E, bien plus sûre pour l'amateur.


Le dessous.

Le câblage semble avoir été modifié pour le 625 L, il y avait d'ailleurs un tuner UHF rajouté sur le côté gauche de l'ébénisterie.



Le tuner VHF avec sa barrette modifiée pour l'adaptation du tuner UHF 2 ème chaîne et son fil de commutation.


Des images de la remise en marche finalisée.

Comme d’habitude, le remplacement de plusieurs condensateurs papiers dont l'intégralité de ceux situés dans le balayage trame, cause de mauvaise linéarité verticale. Les chimiques de filtrage HT CIBOT étaient également complètement HS.

Le passage en 625 L n'a posé aucun problème, juste la retouche du potentiomètre de fréquence horizontale (plutôt large en plage) et l'adjonction d'une résistance de polarisation insérée à la cathode de la lampe de puissance ligne EL81. En fait, j'ai repris en partie les modifications déjà effectuées mais je n'ai pas conservé le tuner dont l'intégration n'était pas très académique.

Sinon, la plus grande difficulté a été l'adaptation de la nouvelle bobine de concentration. Modèle PHILIPS prévu pour un montage en parallèle sur la haute tension en remplacement de l'ancienne câblée en série. J'ai pas mal tâtonné afin de trouver la bonne valeur de résistance série à intercaler dans la HT, n'ayant pas toutes les caractéristiques de l'ancienne bobine.




Finalement, la qualité de l'image est vraiment sensationnelle ! Pas évident de retrouver le rendu réel en photographie mais je peux vous dire que l'état du tube image est exceptionnel. Le spot est d'une très grande finesse et la luminosité est impressionnante.


Voici d'autres images, cette fois avec ébénisterie.

C'est l'occasion de revenir sur ce fameux filtre dont je pense avoir compris l’intérêt.

Je ne suis pas calé en colorimétrie mais il s'agit bien d'une histoire de couleur complémentaire. Sauf que ce n'est pas au niveau de la luminosité bleutée produite par le tube, que le filtre est destiné à agir, c'est plutôt sur celle réfléchie par la surface interne de l'écran. Je veux parler de la couleur gris/vert de la substance luminescente visible à travers la verrerie frontale du tube, où la réflexion de la lumière incidente ( produite par le soleil ou une lampe par ex.) sera alors plus particulièrement bloquée par ce filtre violet.

Le résultat, des noirs plus profonds et une image plus contrastée à l’intérieur d'une pièce très ensoleillée.

Démonstration en image :

En complément, le schéma complet du téléviseur ainsi que la feuille de caractéristiques fournis avec le kit.

Également quelques autres informations concernant l'histoire de ce téléviseur...

J'ai aussi récupéré la facture d'achat :

Pour information, ce modèle était donc équipé de la version longue distance de la platine FI et la facture mentionne la barrette du rotacteur au canal de Bourges. Ce téléviseur serait le premier à avoir fonctionné à Niort en 1957, au moment où l'émetteur de Melle Maisonnay n'était pas encore construit. Donc rien d'étonnant concernant cet équipement, d'autant plus qu'il était possible d'y adjoindre un préamplificateur d'antenne optionnel.

Ci-dessous la carte de couverture TDF de1958:

A cette époque, Niort n'était donc pas encore desservie et la réception de l'émetteur de Bourges ne devait certainement pas être évidente, c'était déjà du DX TV !

J'ai également retrouvé une facture du 11-9-1958 pour une barrette canal 2 Limoges et une autre du 10 -11-1958 pour le canal 7 futur Maisonnay.

J'ai retrouvé aussi ces articles de la presses régionale concernant l'émetteur de Maisonnay dont l'arrivée assez tardive (1960) dans la région Poitou-Charentes était attendu avec une certaine impatience.

Et enfin, cerise sur le gâteau…

...en petit témoignage historique et émouvant de cette glorieuse époque, des photos de capture d'écran intéressantes prises par le constructeur amateur lui-même.

Passionné également par la photographie (d’ailleurs propriétaire de son propre labo de développement) il n'a pas manqué d'immortaliser quelques scènes télévisuelles. Voici donc un petit florilège d'émissions d'époque, probablement prises juste après l'achèvement du téléviseur.

Les photos n'étaient ni datées ni légendées, peut-être pourrez vous identifier les différents personnages et émissions capturées?

Cette dernière image nous montre ce téléviseur en situation, il est resté à la même place jusqu’à ce que je vienne le récupérer. Il était posé au même endroit et sur la même table que sur la photo prise à l'époque !

Il n'y avait aucune annotation au dos des photos, il est donc difficile de dire quel émetteur était reçu.

Les images les plus neigeuses ont probablement été reçues par l'émetteur de Bourges, le plus lointain.

J'ai aussi remarqué la petite zone sombre sur le coin supérieure droit de l'écran, présent sur toutes les photos, comme si le piège à ions était mal positionné.

J'avais constaté ce phénomène dès les premiers essais et j'ai eu bien du mal à l'atténuer. Impossible de trouver le bon réglage, j'ai du faire un compromis avec la position de la bobine de concentration et le cadrage. J'avais mis ça sur le compte de ces éléments de récupérations et finalement 60 ans avant il avait déjà le même problème !

Pour finir, j'ai aussi retrouvé une fiche de redevance, elle date de 1965 et concerne sûrement ce téléviseur. Je me demande d'ailleurs si CIBOT établissait des déclarations de redevance pour ces TV vendus en Kit, comme tous les magasins revendeurs de produits finis.

J'ai également retrouvé cet ouvrage sur le dépannage TV, il a surement été très utile à notre constructeur amateur pour la mise au point de son téléviseur.

Au final, j'ai été agréablement surpris par la qualité d'ensemble de ce téléviseur, tant par sa fabrication robuste et soignée que par les performances et l'image produite. Certes, aucun raffinement technique n'est présent (CAG, comparateur de phase, antiparasites image, etc..) comme sur les appareils de marque tel que PHILIPS ou La Voix de son Maître par exemple, mais pour le prix et pour peu que le kit fut correctement monté il n'avait pas grand-chose à leur envier, avec le plaisir et la satisfaction de la réussite en plus.

Alors un grand bravo à CIBOT.