La destruction de la Huronie

Relations des Jésuites (vol.2), 1650, p. 24.

Source (BAnQ 0000195694)

Domaine public

Texte (extraits)

<< ...le lendemain, ils (Les Hurons) se séparèrent d'avec nous, nous laissant tous leurs petits meubles, dont la plupart déclarèrent publiquement qu'ils nous faisaient leurs héritiers, voyant bien que leur mort n'était pas éloignée et qu'ils la portaient dans leur sein.

En effet, peu de jours s'écroulent que nous apprenons les nouvelles du malheur que nous avions prévu. Ce pauvre troupeau dissipé tombe dans les embuscades de nos ennemis Iroquois; les uns sont tués sur place, on traine les autres captifs, on brûle les femmes et les enfants; quelques-uns s'échappent du milieu de ces flammes, qui apportent l'effroi et la terreur partout. >>

ASPECT-T

Social

Les Wendats font partie de la famille des Iroquoiens. Ils utilisent donc la langue iroquoise. En 1609, ils s'allient avec les Français afin de se protéger contre les Iroquois, également membre de la même famille, avec qui ils sont régulièrement en conflit. À partir de ce moment, les Français les surnomment << Hurons >> en raison de la hure sur le dessus de leur tête (bande raide sur le dessus, cheveux rasés sur le côté).

Les Hurons vivent toujours sur leur territoire natal, nommé Huronie. À l'arrivée des Français, ils étaient plus de 20 000. Vers 1640, ils ne sont plus que 9000. Les maladies d'origine européenne (rougeole, grippe, variole) sont les principales causes de cette diminution démographique.

L'alliance avec les Français permet aux Hurons d'augmenter leur puissance militaire. Cependant, ils doivent accueillir des missionnaires français, les Récollets ou les Jésuites à partir de 1634, qui auront pour objectif de les évangéliser. La crainte d'être contaminé par des maladies européennes empêche certains Hurons de se convertir.

Politique

En 1609, Samuel de Champlain signe une alliance avec les Hurons. Cette alliance permet aux Français d'augmenter leur réseau commercial, alors que les Hurons se garantissent des alliés dans leur guerre contre les Iroquois.

Au fil des années, la situation n'évolue pas avantageusement pour les Hurons. Alors que ces derniers s'affaiblissent sous le coup des maladies d'origine européenne, les Iroquois bénéficient du commerce avec les Hollandais et prennent possession d'armes à feu. Les Français refusent de laisser des armes aux populations autochtones et seuls les Hurons convertis à la religion catholique peuvent mettre la main sur des armes à feu. Cela diminue donc le pouvoir de défense des Hurons, déjà divisés par la religion et diminués par les maladies. Ils ne peuvent donc faire face aux assauts des Iroquois lorsque ces derniers s'en prennent à la Huronie entre 1648 et 1650. La plupart des Hurons sont tués, quelques-uns se dispersent ou se réfugient chez leurs alliés français. Ceux qui s'opposent aux missionnaires catholiques vont rejoindre les Iroquois, chez qui ils sont adoptés.

Économique

Avant d'être décimés, les Hurons représentaient les plus grands fournisseurs de fourrure des Français. Les conflits entre les différentes nations permettaient d'obtenir le contrôle du réseau de fourrure et des territoires de chasse. En effet, les Iroquois étaient limités en raison du réseau commercial établi entre les Français et les Hurons. Les attaques contre les postes de traites et les convois permettaient aux Iroquois de s'accaparer les fourrures.

La destruction de la Huronie détruit donc le réseau de traite des Français, qui doivent trouver de nouveaux alliés parmi les populations autochtones.

Culturel

L'arrivée des Européens a engendré de nombreuses conséquences chez les populations autochtones. Avant 1640, c'est plus de la moitié de la nation huronne qui est décimée par les maladies d'origine européenne. Les épidémies touchent l'ensemble des populations autochtones, dont les Iroquois. Afin de remplacer les membres décédés, ils décident de s'en prendre aux autres nations, comme les Hurons-Wendats. Au-delà, ils espéraient former une seule et même nation. Après avoir détruit la Huronie, les Iroquois s'en sont pris aux Pétuns, Neutres, Ériés, Népissingues et Andastes.

Territorial

Technique

Critique interne -3QPOC

Qui?

Les Hurons, de leur vrai nom les Wendats, font partie de la famille des Iroquoiens. Ils vivaient en Amérique et avaient des alliances commerciales avec les Français.

Les Jésuites sont des religieux faisant partie de la Compagnie de Jésus, fondée à Paris en 1534. Fervents disciples de la religion catholique, ils seront reconnus pour leur rôle d'éducateur. En 1634, les Jésuites arrivent chez les Hurons, ce qui leur permet de débuter le travail d’évangélisation et de relater leur expérience auprès des Autochtones.

Pourquoi?

Depuis 1609, les Hurons sont associés aux Français pour commercialiser leurs fourrures. Cela engendre des répercussions sur les territoires et les réseaux de chasse, nuisant ainsi au commerce des Iroquois.

De plus, des maladies sont transmises aux Autochtones par les Européens entraînent une forte diminution démographique chez les Autochtones. Pour remplacer leurs membres décédés et pour récupérer ou s'accaparer des territoires de chasse, les Iroquois attaquent les autres nations autochtones. Les nombreux conflits résultent par la destruction de la Huronie en 1850.

D'autres raisons expliquent la destruction de la Huronie. D'abord, la division interne causée par l'évangélisation des populations, alors que certains Hurons refusent de se faire baptiser. Aussi, l'interdiction d'offrir des armes aux Hurons. Cela désavantagera cette nation qui se retrouvera sans défense face aux armes des Iroquois.

Le document raconte cet épisode, témoigné par les Jésuites.

Quoi?

La destruction de la Huronie est un épisode important de la Nouvelle-France.

Dans l'extrait présenté, les Jésuites rapportent la destruction de la Huronie par les Iroquois. Entre 1648 et 1650, la plupart des Hurons sont tués, quelques-uns se dispersent, se réfugient chez leurs alliés français ou sont adoptés par les Iroquois.

Où?

À leur arrivée, les Français ont trouvé des nations de la famille iroquoienne installées dans la région des Grands Lacs.

La Huronie était le territoire natal des Hurons-Wendats. La position de ce territoire était à l'Est du Lac Huron, en Ontario. Les Iroquois étaient quant-à-eux installés sous le Lac Ontario, plus au nord-est. Les échanges commerciaux et les réseaux de traites de fourrures entraînent de nombreux déplacements sur les territoires et mettaient donc en contact différentes nations.

Quand?

Les Jésuites sont arrivés en Nouvelle-France en 1611. Ils vivront de façon très intime la destruction de la Huronie, puisqu'ils étaient installés notamment auprès des Hurons. La destruction de la Huronie se produira entre 1648 et 1650.

Comment?

Dans leur conflit contre les autres nations, les Iroquois tuent, enlèvent ou adoptent leurs ennemis. Lorsqu'ils s'en prennent aux Hurons, ils brûlent les maisons et détruisent les installations jésuites. Cela entraîne la destruction totale du village et la dispersion des quelques survivants.

Le document est un extrait tiré d'un texte écrit. Ces textes sont des journaux compilés, écrits aux XVIIe et XVIIIe siècles par des Jésuites, portant le nom << Relations des Jésuites>>. Ces ouvrages sont des sources documentaires non négligeables pour l'histoire de la Nouvelle-France. Ils ont été publiés entre 1632 et 1672 par un éditeur catholique. Ils permettent de retracer les modes de vie et traditions des populations autochtones, documentent l'évolution du projet de conversion et apportent un regard plus rapproché sur les événements survenus en Nouvelle-France aux XVIIe et XIXe siècles. Cette discipline d'écriture leur est acquise depuis la création de la Compagnie de Jésus et fait partie de leur tradition religieuse. Ils doivent donc rendre compte de tout ce qui se produit et de tout ce qui les entoure.

Il s'agit aussi d'un outil de cohésion identitaire et de propagande religieuse (Paschoud, 2012). Les événements sont donc dramatisés et racontés de façon subjective. La lecture des textes nous en apprend beaucoup autant sur les événements historiques que sur les auteurs de ces lignes. De plus, les textes sont souvent retouchés avant l'impression et peuvent contenir des informations fausses ou inexactes. Notamment, lors d'une attaque, les lettres sont détruites, ce qui force le procureur des Jésuites du Canda à improviser et proposer de faux rapports (Desbarats, 2014).

Cependant, ces textes nous décrivent finement la destruction de la Huronie et les malheurs qu'ont subis les Hurons. Les textes nous révèlent aussi la nature des relations entre les populations autochtones et les missionnaires. L'extrait ci-dessus permet de voir à quel point les Jésuites étaient proches des Hurons et qu'ils leur accordaient une importance. On peut ainsi saisir que les missionnaires avaient une vision positive de leurs camarades autochtones. Cependant, ces textes nous révèlent également l'acculturation des peuples autochtones, par la disparition des populations et par la perte de leur culture.