Olivier Héroux

Mon projet comporte plusieurs dessins et une nouvelle littéraire, le tout réalisé pendant cette session. Mes dessins sont tracés tout d’abord au crayon à mine. Les esquisses sont toujours basées sur des formes géométriques qui se transforment en sujet. J’utilise un compas et une règle pour tracer les formes. Après le sujet dessiné, j’utilise des crayons graphiques qui varient entre H à B pour la tonalité. J’utilise aussi une estompe pour nuancer l’ombrage.

Mes dessins ne sont que des personnages venant de mon imagination. Certaines sont inspirées de personnages connus, d’autres venant de mes rêves. Mon intention n'est pas vraiment de susciter une émotion mais simplement d'interpréter mon imagination sous la forme d’art dessiné quitte à ce que le téléspectateur y trouve son compte. L’expression des dessins n’est majoritairement pas prévisible, j’y vais souvent à l’improviste. Néanmoins, n’empêche que parfois mes personnages dessinés suscitent à chacun des émotions différentes. Certains adorables, d’autres malaisantes. L’apparence de chacun de mes personnages est soit ultra détaillée ou soit sous forme de cartoon.

Mon premier dessin est un rat réaliste. C’est un animal qui m’a intéressé récemment. Une créature adorable pour certains ou horrifiante pour d'autres. Ce dessin m’a surtout donné l’idée d’écrire un texte littéraire en lien avec ces créatures.

Il était immobile dans son lit d’hôpital, ses deux jambes fracturées et immobilisées par une ceinture de maintien. Son regard vide fixait le plafond. La chambre baignait d’une lumière maladive des néons qui lui donnait un mal de tête. Ses yeux étaient légèrement pesants mais le sommeil n’était guère présent. Il croyait n’avoir jamais dormi depuis qu’il était ici. Il aimait fantasmer sur cette infirmière à la belle poitrine, celle qui venait à chaque repas pour lui donner ses gélules. Mais cette fois-ci, pour une quelconque raison, il ne sentit plus aucune excitation pour elle. Il n’était réduit qu’à passer son temps à chercher des petits détails sur toutes les surfaces: des trous, des fissures, des tâches, n’importe quoi, sans rien trouver d’intéressant à observer dans cette chambre désertique. Son regard se mit intensément à fusiller les deux bouteilles qui pendaient de chaque côté de sa tête, l’une d’un liquide clair, l’autre d’un liquide rouge sombre, puis ses yeux se refermèrent lentement.


Il les ouvrit aussitôt lorsqu’il entendit des grattements sur le sol. Il se redressa difficilement de son lit en sentant une brusque douleur parcourir ses jambes couvertes de plâtre. Lorsqu’il fut assis, il vit quelque chose qui le fit faiblement sursauter. Quelque chose de velu qui bougeait au bout du plancher. Il reconnut immédiatement que c’était un rat. Un rat au pelage gris brunâtre qui trottinait en restant collé au mur du fond. Les yeux du malade suivirent les mouvements de l’animal à la fois lent et rapide. Il souria, éprouvant une sorte de fascination pour cette bestiole. Après quelques secondes, le rat resta immobile. Son museau s’agitait sans arrêt. Hésitant, le rongeur se dirigea hâtivement sous le lit. Le malade s’affola, pensant qu’il allait le perdre de vue. Il ne vit durant que durant un court instant sa longue queue torsadée qui ondulait comme un serpent avant de disparaître dans l’ombre.


En détournant la tête, il vit deux autres rats. Deux rats sortant d’une épaisse fissure située dans un des angles du plancher. Les deux s’approchèrent puis se séparèrent rapidement.


L’un deux fonça sous le lit. L’autre restait sur place, le museau agité. Puis, tel un écureuil, il se redressa sur ses deux pattes arrières. Ses yeux noirs, ressemblant à des boutons de bottines, rencontrèrent ceux du malade. Ce dernier avait l’impression qui lui faisait un sourire en montrant ces deux paires d’incisives jaunâtres. Le patient garda toujours son sourir et fit coucou d’une main au rongeur. Après de longues secondes, le rat se remit sur ses quatres pattes et contourna le lit.


D’autres rats apparurent. Plusieurs avaient une fourrure noir. Il en distingua quelques-uns qui avaient d’abondants de poils blancs qui piquaient leurs corps foncés. Tous se dispersèrent. Aucun ne couinait. Le seul son qu’il entendait était le crépitement de leurs pattes griffues sur les lattes du plancher.


Le malade fut abasourdi de plaisir et d’étonnement par ce spectacle. Son sourir cessa lorsqu'il vit la porte de la salle de bain s’entrouvrir laissant place à une horde de rats sautillants.


Cinq minutes plus tard, le plancher était envahi de ces vermines qui trottinaient partout. Beaucoup avaient un corps visqueux. Le crépitement s’intensifiait au point que le patient sentait le sol vrombir. Il n’osait plus regarder le plancher. Son regard se fixa sur les murs d’où s’agitaient des ombres dansants et grouillants. Son cœur lui montait à la gorge et des frissons lui agitèrent sa chair et ses os. Il ne sentit réellement la peur que lorsque les rats s’immobilisèrent, formant un demi-cercle autour de lui. La chambre retrouva son silence.

Son cœur qui cognait dans sa poitrine était le seul bruit perceptible dans la pièce. Tous les rats se redressèrent sur leurs deux pattes arrières et observèrent le haut du lit avec un regard rempli d’avidité. Il voyait leurs yeux sortir de leurs orbites et se rétracter. Leurs incisives sortaient de leurs petites bouches.


Il arriva alors ce que le malade craignait. L’un d’eux fit un bout et arriva à monter sur le lit. Le malade sursauta. Il s’empara de la poire électrique et se mit à sonner. Il appuya frénétiquement dessus à plusieurs reprises. Mais en vain, aucun son ne se produisit. Les rats avaient prévu ce geste. Ils avaient rongé les fils...


Auteur: Olivier Héroux