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A PROPOS DES STAGES DE SENSIBILISATION A LA SECURITE ROUTIERE : rôle du psychologue.

Le comportement de l'usager de la route est dans la plupart des cas la cause des accidents de la circulation. De plus il existe un lien direct entre le comportement infractionniste et l’accidentalité. Le stage de sensibilisation à la sécurité routière mis en œuvre dans le cadre du permis à points choisit un mode d’intervention visant à initier un processus de changement chez le conducteur et la conductrice infractionniste. 

Dans le cadre du stage de sensibilisation à la sécurité routière prévu à l'article L. 223-6 destiné à éviter la réitération des comportements dangereux, j'anime en binôme pendant deux jours des groupes constitués de personnes infractionnistes volontaires ou sous injonction judiciaire. L'objectif est d'impulser un processus de changement d'attitudes et de comportements chez les conductrices et conducteurs, qu’ils ou elles puissent s’interroger sur leurs comportements. Une moindre réitération des infractions à venir serait ainsi susceptible d’entraîner une amélioration de la sécurité routière de tous. La capacité auto-évaluative peut être une dynamique de changement dans leurs attitudes et comportements. Le processus de changement vise la personne comme sujet réputé autonome et aussi comme sujet social. Il ou elle est libre de, ou de ne pas changer. Changer veut dire que les conducteurs et des conductrices deviennent plus agissants qu’agis. Initier ce processus est l’objectif que l’animateur a en tête quand il est face aux stagiaires. La base théorique qui est l'ossature de l'animation du  stage de sensibilisation s’appuie largement sur la psychologie sociale ainsi que sur les théories des addictions. 

L’animateur d’un stage de sensibilisation à la sécurité routière même s’il est choisi en partie parmi les psychologues n’est alors pas à mon sens le psychologue classiquement autonome et libre de ses moyens mais travaille dans le cadre de cette profession réglementé. 

La base théorique qui est l'ossature de l'animation du  stage de sensibilisation s’appuie largement sur la psychologie sociale ainsi que sur les théories des addictions.

L’intention est explicite : il s’agit de faire changer le comportement des conducteurs et des conductrices infractionnistes, qu’ils ou elles puissent s’interroger sur leurs comportements. En effet la capacité auto-évaluative peut être une dynamique de changement dans leurs attitudes et comportements. Le processus de changement vise la personne comme sujet réputé autonome et aussi comme sujet social. Il ou elle est libre de, ou de ne pas changer. Changer veut dire que les conducteurs et des conductrices deviennent plus agissants qu’agis. Initier ce processus est l’objectif que l’animateur a en tête quand il est face aux stagiaires.

Selon Belisle et Weber (2016), les problématiques récurrentes sont:

La législation encadre certes sévèrement l'association de l'usage de produits psychoactifs avec la conduite automobile mais la société est aussi très addictogène en promettant au consommateur plus de plaisirs immédiats et éphémères, dans une injonction insatiable à faire de plus en plus vite (Rosa, 2013).  Cette injonction paradoxale entraîne évidemment de nombreux dysfonctionnements individuels s'exprimant par le stress, l'agressivité et la consommation de substances psychoactives. 

Le stage de sensibilisation offre un temps de réflexion qui permettra une possible prise de conscience à un niveau personnel. Ceci autorisera ensuite un changement puis l'élaboration de stratégies ciblées pour atteindre des buts de vie plus en accord avec ses propres valeurs.

Bibliographie:

Belisle, C.; Weber, L. (2016). Photolangage :Comprendre ce que conduire suppose. De la sécurité routière vers l'éducation à une mobilité citoyenne consciente. Lyon : Chronique sociale.

Rosa,  H. (2013). Accélération. Une critique sociale du temps . Paris : La découverte

Quelques notes de ce que j'ai compris de Serge Ciccotti, Docteur en psychologie, expérimenté en stage de  sensibilisation à la sécurité routière et qui répondent à la question : Comment faire pour ne pas continuer à perdre ses points inlassablement ?

Levy, J., & Pashler, H. (2008). Task prioritisation in multitasking during driving: Opportunity to abort a concurrent task does not insulate braking responses from dual-task slowing. Applied Cognitive Psychology, 22(4), 507–525. 

Les auteurs ont cherché à vérifier ce qui arriverait si on demandait expressément aux conducteurs de se concentrer sur le freinage aussi vite et sûrement que possible  en abandonnant toute tâche supplémentaire si elle se produisait au milieu de l'action. Or même si le conducteurs laissaient tomber la tâche supplémentaire, leur freinage était considérablement ralenti. Quoi qu'il en soit l'action de freiner est ralentie.

Cet article montre donc que nos actions au volant (et réactions) peuvent s'embrouiller avec d'autres. Parler avec un passager, comme au téléphone (même mains-libres) est dangereux. L'automobiliste concentré sur la conversation  ne sait pas qu'il augmente considérablement les risques d'avoir un accident. Même si nous nous considérons un conducteur chevronné, avec la sensation d'être en maîtrise, "en pilote automatique" parfois, avec la possibilité de faire des tâches supplémentaires à notre conduite, bien au contraire, cette situation même est extrêment dangereuse pour nous-même et les autres.

Résumé de l'article du Journal International de Médecine article du 24/05/2023  Nicolas barbet :  "Sécurité routière: comment combattre l'alcool et les stupéfiants au volant ? ".

"Près de Lille en mai 2023,  un véhicule  roulant à contre-sens en a violemment percuté un autre entraînant la mort de trois personnes . Le conducteur, mort aussi dans l''accident, âgé de 24 ans, « présentait un taux d’alcool dans le sang de 2,8 grammes par litre et était par ailleurs positif au cannabis » et avait été plusieurs fois condamné pour des faits de consommation de cannabis et d’outrages.

Or, les les associations spécialisées dans la sécurité routière, estiment que les sanctions théoriques existantes sont  suffisamment lourdes, mais qu’elles ne sont pas suffisamment appliquées. Certains dénoncent une trop grande importance du lobby de l’alcool qui frênerait des mesures gouvernementales plus strictes.

Cette tolérance susciterait la colère de ceux qui ont été victimes de chauffards alcoolisés car l’alcool est impliqué dans 1 000 accidents routiers mortels par an alors que les stupéfiants le seraient dans 600 d’entre eux."

L'article complet est ici.

Organisation mondiale de la Santé & NHTSA (‎U.S.)‎. (‎2011)‎. L'utilisation des téléphones mobiles : la distraction au volant, un problème qui s'aggrave. Organisation mondiale de la Santé. 

Selon l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé), l'utilisation des téléphones mobiles représente un problème qui s'aggrave :  la distraction au volant : (p.45)

"Il ressort des études réalisées que l’utilisation d’un téléphone mobile en conduisant – qu’il soit tenu à la main ou qu’il s’agisse d’un appareil mains libres – entraîne un taux d’accidents supérieur à ce qu’il serait si le conducteur s’abstenait de téléphoner. Il est clair en tout cas que si l’impact relatif de la distraction sur l’aptitude à la conduite peut varier selon le type de téléphone, l’âge ou le sexe du conducteur, l’utilisation d’un téléphone mobile en conduisant accroît le risque absolu d’accident pour tous les conducteurs. 

D’après un nombre croissant d’études, le fait d’échanger des messages texte entraîne aussi une distraction considérable tant sur le plan physique que sur le plan cognitif et réduit la performance au volant. Les jeunes conducteurs sont plus susceptibles que les autres d’utiliser des téléphones mobiles en conduisant et semblent être particulièrement sensibles aux effets de la distraction qui en résultent. Échanger des messages texte semble aussi avoir un impact particulièrement négatif sur le comportement au volant et c’est là un problème qui risque de prendre de l’ampleur compte tenu du fait que ces messages reviennent généralement moins chers qu’une conversation par téléphone mobile"

Voir le rapport OMS complet ici

COCAINE ET CONDUITE AUTOMOBILE

Alvarez, J.C. ; Boyer,J.C.;  Verstraete,. Pelissier-Alicot, A.L. (2015). Conduite automobile et cocaïne : bases bibliographiques pour un consensus de la Société française de toxicologie analytique. Toxicologie Analytique et Clinique,  Vol.27( 3).p. 165-183.

La cocaïne se situe au deuxième rang des produits illicites les plus consommés en France après le cannabis. Elle est absorbée essentiellement par voie sniffée (sous forme chlorhydrate) ou fumée (sous forme base). Elle est fortement métabolisée dans l’organisme, ses principaux métabolites étant la benzoylecgonine (BZE) et l’ecgonine methylester (EME). Les méthodes de dosage reposent sur des techniques séparatives, soit liquide, soit gazeuse, couplées à une détection par spectrométrie de masse. Il est fortement conseillé de doser la cocaïne ainsi que la BZE et l’EME. En effet, la cocaïne est relativement instable in vitro, et peut se dégrader en ses métabolites sous l’action d’estérases érythrocytaires et plasmatiques. Un prélèvement sur fluorure de sodium à 2,5 % permet de diminuer cette instabilité. Pour les mêmes raisons, la conservation des prélèvements doit se faire à –20°C plutôt qu’à +4°C, température à laquelle apparaît une dégradation après 48heures. Dans le cadre de la circulation routière, certains pays quantifient dans le sang total, d’autres ont choisi le plasma ou le sérum. Dans des conditions optimales de conservation, la cocaïne va persister environ 3 à 8heures dans le sang, et jusqu’à 24heures dans les urines. Ces délais peuvent être prolongés chez les consommateurs chroniques. La BZE est retrouvée classiquement jusqu’à 24heures dans le sang et entre 40 et 60heures dans les urines. Les seuils limites appliqués sont variables en fonction des pays, correspondant à des seuils analytiques et non de dangerosité. Certains pays ont un seuil imposé uniquement pour la cocaïne, comme la France (50μg/L), alors que d’autres ont également un seuil imposé pour la BZE, comme la Belgique ou la Finlande. Il est actuellement admis que la cocaïne perturbe la capacité de conduite automobile, mais il ne ressort pas clairement de seuil de dangerosité de l’étude de la littérature. Des experts de différentes nationalités ont proposé des seuils sanguins au-delà duquel le risque d’avoir un accident ou une conduite perturbée est significativement augmenté, variant de 2 à 50μg/L, associé ou non à des valeurs seuils pour la BZE. En France, la SFTA a proposé un seuil de 10μg/L pour la cocaïne. Dans la plupart des études, les concentrations salivaires de cocaïne sont plus élevées que dans le sang, mais il n’existe pas de corrélation entre ces deux milieux. Les effets de la cocaïne dépendent de la quantité consommée, de la voie d’administration, de la sensibilité du sujet et des substances associées. Le craving est une composante majeure de l’addiction. Les complications peuvent être nombreuses, essentiellement de type cardiovasculaire, mais également pulmonaire, ORL, neurologique et psychiatrique.

PHOTOLANGAGE®

J'ai aussi été formé au photolangage®  qui permet de travailler sur les représentations, et d’organiser un espace de parole et d’écoute, aidant les personnes à se (re)construire.

Après la présentation explicite des règles et des consignes, la méthode photolangage® consiste à poser une question, à partir d'un thème choisi préalablement, à tous les participants en ajoutant "dites le avec une photo".  Le choix individuel de sa photo se fait d'abord par le regard et dans le silence parmi 50 photos étalées sur une table, dans un temps limité puis chacun, animateur compris, présente au groupe sa photo, en en parlant ou pas. Chacun peut ensuite en parler au groupe ou pas. C'est un moment de plaisir dans l'échange et le respect de chacun. La séance se clôture après avoir dit au groupe ce que cela a évoqué pour chacun et comment cela s'est passé pour tous. Le  photolangage® permet ainsi aux participants de prendre conscience de leurs ressentis, des images qui les habitent, des représentations qu'ils ont forgées, des habitudes qu'ils ont construites.

Le dossier Comprendre ce que conduire suppose  est un outil de communication s’inscrivant dans des actions de formation pouvant susciter une prise de conscience de ce que la conduite automobile suppose et implique en vue d’améliorer les comportements au volant et de les rendre plus sûrs ou moins dangereux. Il est plus particulièrement destiné à l’animation des Stages de sensibilisation à la sécurité routière constituant le volet éducatif du permis à point, stages centrés sur l’éducation et les changements de comportements des conducteurs commettant des infractions à répétition.

C'est le fruit d'un travail avec un groupe d'une dizaine d'animateurs de stage de sensibilisation à la sécurité routière formés à la méthode "photolangage". Il a été coordonné par Claire Belisle, docteure en psychologie, consultante et co-inventeure de la méthode Photolangage® et Laurence Weber, psychologue, spécialisée dans le traitement des risques routiers, coordinatrice pédagogique pour l'INSERR.

Belisle, C.; Weber, L. (2016). Photolangage :Comprendre ce que conduire suppose. De la sécurité routière vers l'éducation à une mobilité citoyenne consciente. Lyon : Chronique sociale.