N21 - Anthracnose

Certain d’ARBORESCO ont signalé l’importance de l’anthracnose sur saule en début d’année 2009. Suite à une discussion avec Frédéric Tailler, à propos de sa nocivité sur platane, j’ai mis le phénomène en correspondance avec le climat que nous avons subi en ce début d’année : alternance de périodes plus froides que la normale et de périodes plus chaudes que la normale. Dans le même mois, on passait du bikini à l’écharpe : le 15 avril 2009 première période de miellat sous tilleul, puis 2 mai, 15 mai, 24 mai, 28 au 30 mai et 2 juillet, canicule du 19 et 23 août : des feuilles grillées, celles de certains marronniers réduites aux nervures principales, plus de limbe, etc…

L’anthracnose se développe sur jeunes feuilles, provoquant leur chute ; les autres feuilles restent intactes. Pour moi, il s’agit d’une façon, pour le platane, d’ajuster sa surface foliaire aux variations du climat, de réduire sa surface d’assimilation (photosynthèse) que sont les feuilles, s’il n’ a pas l’eau nécessaire pour l’évapo-transpiration. Il faut se souvenir que le carbone du CO2 s’arrête dans l’écosystème (la biomasse elle même) tandis que l’eau le traverse d’ou la notion de SPAC ou Continuum Sol Plante Atmosphère. Seule une infime proportion de l’eau qui traverse la plante est utilisée dans la fabrication de matière organique et l’énergie nécessaire à l’évaporation d’un gramme d’eau est énorme.

Il est facile de mettre en évidence la corrélation entre l’importance de l’anthracnose et le climat : sous un platane, délimiter 3 ou 4 parcelles de 1m2 dans lesquelles journellement toutes les feuilles sont ramassées ; passer ensuite à la tondeuse l’ensemble de la surface sous couronne. Les feuilles ramassées sont comptabilisées en nombre, poids global et longueur de la nervure principale. Ces données journalières (ou cumulées par semaine) seront mises en corrélation avec les données climatiques (pluies, températures, vents d’est…) à défaut de données sur l’humidité du sol et de l’atmosphère (source d’eau pour le végétal) ! Les corrélations avec retards variables mettront en évidence la vitesse de réaction de la plante arbre et indirectement les réserves (eau et sucre) de départ.

Il est facile de vérifier la corrélation entre un stress pour manque d’eau et l’anthracnose : sur un même site, ayant 2 exemplaires de même espèce, mesurer l’humidité du sol avec une sonde tensiométrique (le premier outil nécessaire à un expert de l’arbre). Sous l’un des exemplaires, arroser afin de tenir cette humidité constante quelque soit le climat, sous l’autre exemplaire rien. Mesurer l’effet de l’anthracnose par la même méthode que ci-dessus. Mesure de l’arrosage : des fûts de 200 litres, d’où émergent des tuyaux « goutte à goutte ».

Mesure des périodes de miellat : parquer votre véhicule sous un arbre : dépôt de miellat. Il vous suffit d’un demi litre d’eau pour nettoyer le pare-brise et pouvoir rouler en toute sécurité !

Il est urgent lorsqu’on s’occupe d’arbres, de tenir compte du climat en utilisant d’autres critères que ceux retenus pour la betterave ou la plage. La stratégie de la plante pour s’adapter aux variations de son environnement passe par une capacité à savoir attendre, à faire des réserves, à croître et décroître… et par sa chimie. Non, l’anthracnose n’est pas « une maladie de l’arbre », n’en déplaise aux fabricants de produits chimiques, mais un allié des arbres dans les limites de tolérance de tout système complexe.

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