corancy(nièvre)

CORANCY

(Nièvre)

Accueil

-Cartes IGN 1/25000e 2724 est Château-Chinon et 2824 ouest Arleuf – Haut Folin.

- Accès: depuis Château-Chinon, à la sortie ouest de la ville, sur la D978, prendre en direction du nord la D156 puis, à l'Huis Gaudry, vers la droite la D37 (direction Montsauche) et à l'Huis l'Abbé vers la gauche la D12 (direction Ouroux) jusqu'à Corancy (distance depuis Château-Chinon 5 km).

La commune de Corancy, bordée au nord-est par l'Oussière et le ruisseau de Griveau, s'étend sur de nombreuses collines boisées jusqu'à la vallée de l'Yonne. Un peu en aval du village, l'Yonne s'élargit progressivement par l'effet du barrage de Pannecière dressé 8 km plus loin.

L'église située tout en haut du village, au nord, est placée sous le vocable de Saint Euphrone, huitième évêque d'Autun, mort à la fin du Ve siècle. Cette église a été bâtie au XVe siècle, sur l'emplacement d'une église plus ancienne, du Xlle siècle, dont peut-être certains éléments demeurent dans la travée sous clocher. L'édifice comporte une nef de plan rectangulaire, voûtée en arc segmentaire, suivie d'un avant-chœur supportant la tour-clocher, puis d'un chœur à chevet plat, composé de deux travées. L'avant-chœur et les deux travées de chœur sont flanqués de chaque côté de chapelles, voûtées en berceau brisé dans l'avant-chœur et à gauche de la première travée de chœur, voûtées d'ogives, dont les nervures reposent sur des culots pour les trois autres chapelles. La variété des styles laisse à penser à une construction de plusieurs étages, par adjonction au cours des XVe et XVIe siècles d'éléments disparates sur un édifice primitif. Le mobilier comprend une statue de St Euphrone en bois et surtout une très belle statue de Ste Marguerite, en pierre, XVIe siècle (ISMH). Elle viendrait, selon la tradition, de Faubouloin. Sainte Marguerite, qui porte des traces de polychromie, est ici représentée mains jointes, dominant un dragon couché à ses pieds.

Faubouloin :

Sur une butte rocheuse dominant le confluent des ruisseaux de la Montagne et de Griveau qui forment l'Oussière, se trouve le site de Faubouloin. Il est séparé de l'éperon barré de Verdun (commune de Lavault-de-Fretoy) par la gorge profonde et étroite du ruisseau de Griveau. On y accède à partir de la D37 (route de Château-Chinon à Planchez) par un chemin de terre qui s'en détache à la cote 516, au nord du hameau de Lorien (carte IGN Arleuf-Haut Folin). Il s'agit d'un lieu de culte rural très ancien autour d'une chapelle, de trois fontaines et de deux arbres sacrés. Des pèlerinages, attestés depuis plusieurs siècles, s'y rendaient en dévotion, curés en tête, depuis toutes les paroisses voisines, notamment les lundis de Pâques et pour la fête de la Nativité de la Vierge. La chapelle actuelle aurait été construite en 1558 sur une pierre "druidique" et consacrée à "Trois Dames Sœurs". Pour le choix du lieu, selon la légende, on aurait eu recours au rite du "jet du marteau" dont on ne connaît pas avec certitude la signification, et qui se retrouve à l'origine de nombreuses constructions d'églises très anciennes[1]. L'évocation de trois "dames" rappelle peut-être le souvenir d'un culte topique à des déesses-mères celtiques. Ces trois dames se retrouvent dans les trois fontaines auxquelles on se rendait, avant ou après les prières à la chapelle, pour des ablutions ou pour boire de l'eau. On n'allait pas aux trois fontaines, car elles avaient trois fonctions différentes. La fontaine Sainte-Marguerite (on passe devant en venant directement de la D37 ; elle se trouve sur la gauche et à quelques mètres du chemin, un peu avant d'arriver à la chapelle) a un bassin et un encadrement en granit. Une croix en métal est scellée sur la pierre. C'est une fontaine guérisseuse. Elle guérit les "bavous" et les "bitous", c'est-à-dire les malades atteints de stomatite ou de conjonctivite (ces affections devaient être fréquentes autrefois). La fontaine Sainte-Marie avait une fonction oraculaire. Elle est située au nord-ouest de la chapelle, dans un amas de rochers, en amorçant la descente sur l'Oussière. Elle est entourée d'une structure en pierre très rudimentaire. Elle pronostiquait aux parents la guérison ou la condamnation de leur enfant malade. On jetait le bonnet de l'enfant dans l'eau : s'il flottait, c'était signe de guérison, s'il coulait, il fallait attendre une issue fatale. La fontaine du Frêne est située au sud-ouest de la chapelle, beaucoup plus loin que les deux précédentes. Son emplacement est indiqué par des panneaux, mais elle est cependant assez difficile à trouver (environ à 700 mètres). Comme son nom l'indique, elle est à peine christianisée. Le frêne, qui n'existe plus, était un arbre sacré dans le tronc duquel les jeunes filles cherchant un mari venaient planter des épingles après avoir bu l'eau de la fontaine. La légende dit qu'on aurait trouvé la statue de l'une des trois dames dans le tronc de cet arbre. On venait aussi à la fontaine demander la pluie par temps de sécheresse, en faisant des offrandes de monnaies. Cette fontaine était donc consacrée au culte de la fécondité, fécondité humaine et fécondité du sol. Un sondage effectué autour de la fontaine a permis d'y trouver une coupe en céramique noire d'époque gallo-romaine, preuve de sa fréquentation très ancienne.

Dès l'époque protohistorique le site de Faubouloin est intimement lié à celui de Verdun. Les pèlerins de Faubouloin se rendaient d'ailleurs, après leurs dévotions à la chapelle et aux fontaines, auprès du "Fou" de Verdun, où les cabaretiers de la région installaient leurs tréteaux et où la fête profane - repas et danses - succédait à la fête religieuse. Le "Fou" (de fagus : hêtre) est le mot patois qui désigne l'arbre impérial des forêts morvandelles. Le Fou de Verdun, planté et replanté de générations en générations, marquait l'entrée de l'oppidum.

La présence humaine à l'époque protohistorique n'est pas seulement attestée à Verdun, on la retrouve à Corancy en deux autres points de la commune:

- à l'Huis l'Abbé (1 km au sud de l'église de Corancy), un peu au-dessus de la D37, où un habitat rural de tradition gauloise a été fouillé en 1965 par le Dr Olivier. Il a révélé une occupation probablement continue de l'époque du bronze final jusqu'au Haut Moyen Age ;

- aux Montiaux, hauteur située à 2 km à l'ouest du bourg de Corancy, aménagée en défense à l'époque protohistorique, et occupée semble-t-il à l'époque gallo-romaine. Les vestiges n'en sont pas perceptibles, mais le site mérite néanmoins une visite, pour son belvédère rocheux d'où l'on jouit d'une vue splendide ;

- Maison-Comte, à 3 km 500 au nord de l'église de Corancy, est un hameau situé sur un mamelon dominant l'Yonne à l'ouest et l'Oussière au nord. Depuis le chemin menant de Corancy à Maison-Comte, on peut accéder à Faubouloin par un chemin forestier qui s'embranche sur la droite, dans le prolongement de celui qui part vers la gauche au hameau de Denault (distance 2 km pour aller à Faubouloin). A environ 600 mètres de Maison-Comte, à l'extrémité du plateau (lieu dit la Métairie), on trouve les vestiges d'une maison forte, ruinée, quelques pans de murailles et un morceau de donjon. Cette forteresse, qui dépendait de la seigneurie de la Tournelle, est attestée au XIVe siècle.

© Roland Niaux, 09 février 1994

Publication électronique : 2006-2007

[1] Selon cette légende, la construction commencée de l'église est systématiquement contrariée par des évènements irrépressibles jusqu'à ce que le personnage responsable de la construction (maître d'œuvre, saint...) décide de chercher un autre terrain et s'en remette pour le choix à l'emplacement où tombera le marteau qu'il jette au hasard devant lui.