Formation et carrière académique
Après des classes préparatoires aux Lycées La Bruyère de Versailles et Henri IV à Paris, il réalise une maîtrise de philosophie sur « Spinoza et Rouseau : la norme et l’existant » sous la direction d’Etienne Balibar (2002) à Paris Nanterre. Il entre ensuite en DEA d’études politiques à l’EHESS et travaille sur « la notion de contrat dans le droit social » sous la direction de Pierre Rosanvallon (2003). Il effectue sa thèse à l’EHESS sur « l’injonction à l’autonomie. Sociologie des politiques d’insertion » (2008) avec Serge Paugam avec qui il co-rédige, pendant sa thèse, un ouvrage de dialogue[1].
Il est recruté comme Maître de conférences en sociologie à l’Université Paris Descartes et rattaché au Centre d’Etudes et de Recherches sur les Liens Sociaux à partir de 2009. Il collabore ensuite avec le Laboratoire Interdisciplinaire d’Evaluation des Politiques Publiques de Sciences Po. A partir de 2015, il devient professeur de sociologie à l’Université Paris 8, rattaché au CRESPPA au sein de l’équipe LabTop.
Recherche
Sa thèse étudie les mécanismes de responsabilisation à l’œuvre dans les politiques sociales à partir du début des années 2000. Elle fait apparaître les logiques sociales d’investissement biographique qui s’y déploient, thématique étudiée séparément dans un ouvrage dirigé avec Isabelle Astier[2]. Cette approche croise une sociologie de l’action publique et des normes sociales avec une sociologie de la stratification et des inégalités sociales. Une première série d’ouvrages et d’articles porte sur cette question de la réception des politiques d’insertion, mettant tantôt l’accent sur les différenciations sociales[3], tantôt sur la dynamique de l’action publique et des rapports sociaux[4].
Sur ce dernier aspect, il développe une réflexion sur la place des politiques de solidarité dans le système de protection sociale. Au moment de la réforme du RMI et de la création du RSA, il coordonne une « coalition de cause scientifique critique » du tournant vers l’activation de la protection sociale[5]. Il collabore ainsi avec Robert Castel dans le premier ouvrage de la collection Vie des idées.fr/Presses Universitaires de France[6] et prolonge par différentes manifestations, notamment une journée d’études sur le Revenu de Solidarité Active et la Prime pour l’Emploi au LIEPP et des publications régulières sur la Vie des idées.fr. Il développe un plaidoyer en faveur de la nationalisation du financement du RSA pour éviter les inégalités territoriales et l’ouverture aux moins de 25 ans de ce dispositif. Après la pandémie COVID-19, il a synthétisé cet ensemble de prescriptions dans une note pour le think tank Terra Nova.
Visiting Scholar au département de sociologie de l’Université Harvard en 2012-2013, il rédige son Habilitation à Diriger des Recherches (avec Olivier Schwartz comme garant) à partir d’une enquête ethnographique réalisée à Boston sur plusieurs associations et fondations philanthropiques. Après avoir enseigné sur « les représentations de la pauvreté et de l’exclusion dans le monde anglo-saxon » en master de sociologie à l’EHESS (2007-2013), il s’intéresse aux enjeux du réinvestissement de la culture dans les sciences sociales et l’étude de la pauvreté, aux Etats-Unis, mais aussi en France. Présentée dans le livre Les oubliés du rêve américain[7], la recherche ethnographique menée à Boston donne lieu à plusieurs articles qui abordent la question du genre, des émotions dans la recherche ethnographique et des enjeux pour l’action publique en comparaison internationale.
Il se spécialise progressivement dans l’étude de la philanthropie et mène différentes études en France. Il coordonne un ensemble de travaux qui révisent la chronologie et la compréhension des relations entre pouvoirs publics et acteurs privés en France. Il organise une journée d’étude, « Une philanthropie à la française » à la Sorbonne en 2014 et coordonne un séminaire de recherche au LabTop (2015-2016) sur cette question. Il mène des enquêtes auprès de différentes fondations et crée, en 2019, le Philanthropy and Social Sciences Program en partenariat avec la Fondation de France, la Fondation Caritas France, la Fondation Daniel et Nina Carasso et le Philab du Québec.
A côté de ces travaux, il développe, après avoir rédigé un Que-sais-je ? sur les inégalités sociales aux Presses Universitaires de France, une approche quantitative de la stratification et des inégalités. En collaboration avec Adrien Papuchon, il réinvestit notamment les travaux de Pierre Bourdieu sur l’Algérie et en particulier l’article « Avenir de classe et causalité du probable » pour renouveler la compréhension de la structure sociale. Les variables subjectives sont considérées comme des indicateurs synthétiques de la position sociale et comme étant en relation étroite avec la position objective, tant du point de vue des ressources économiques et sociales. La projection temporelle dans l’avenir constituant un point d’ancrage empirique pour enrichir l’analyse des données en coupe transversale. L’article « Qui se sent pauvre en France ? Pauvreté subjective et insécurité sociale » paru en 2018 dans la Revue Française de Sociologie a fait l’objet d’un débat dans cette revue en 2020[8]. L’analyse s’est ensuite déployée dans un renouvellement de la sociologie des inégalités en réintégrant la question de la temporalité à partir de la prise en compte de la propriété dans la structure des classes sociales. Elle est complétée par le développement d’analyses longitudinales coordonnées au sein du Ministère des Solidarités et de la Santé à partir de 2019.
Edition et direction scientifique
Nicolas Duvoux est rédacteur en chef de la Vie des idées.fr depuis 2007. Il est directeur de la collection de livres La vie des idées/Presses Universitaires de France depuis 2017. Editeur aux Presses Universitaires de France, il y publie des recherches en sociologie et en science politique.
Il est, depuis 2019, directeur du Philanthropy and Social Sciences Program, créé au sein du CRESPPA, un programme qui vise à fédérer, en collaboration étroite avec les acteurs du secteur, les recherches pluridisciplinaires en sciences humaines et sociales sur la philanthropie. Le programme conduit des séries de conférences et de publications, sous forme de Working Papers[9].
Evaluation de politiques publiques
Depuis ses premiers travaux sur les politiques d’insertion, Nicolas Duvoux a été impliqué dans des activités d’évaluation de politiques publiques, à différents niveaux. Membre du comité national d’évaluation du RSA (2009-2011), il a été nommé personnalité qualifiée au titre des membres du collège universitaire de l’Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale (2014-2020). Suite à la fusion de cet organisme avec le Conseil National de Lutte contre l’Exclusion, il intègre ce dernier organisme à partir de 2020.
En 2016-2017, il a fait partie du comité de pilotage du séminaire partenarial, « L’investissement social, quelle stratégie pour la France ? ». En 2018, il a été Président du Comité d’évaluation du Fonds d’Appui aux Politiques d’Insertion[10]. Au sein de l’ONPES, il a animé le séminaire « Trajectoires et parcours des personnes en situation de pauvreté et d’exclusion sociale » et coordonné le programme scientifique de l’organisme sur la question des trajectoires et parcours. Il est également membre du Comité d’évaluation de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté à France Stratégie (depuis 2019) et du Comité d’évaluation du RSA de la Cour des comptes (depuis 2020). Il a été nommé en janvier 2021 président du comité scientifique du CNLE, instance rattachée aux services du Premier ministre.
Distinctions
Les travaux de Nicolas Duvoux ont été salués par différents prix de recherche. Sa thèse a été récompensée par le premier prix de recherche de la Fondation Caritas France à l’Institut de France (2010). Il a reçu le premier prix de recherche senior de la Fondation Croix-Rouge à l’Institut de France (2015).
[1] Serge Paugam, Nicolas Duvoux, La régulation des pauvres, Paris, PUF, 2008.
[2] Isabelle Astier, Nicolas Duvoux (dir.) La société biographique. Une injonction à vivre dignement, Paris, L’Harmattan, 2006.
[3] Nicolas Duvoux, L’autonomie des assistés. Sociologie des politiques d’insertion, Paris, PUF, 2009.
[4] Nicolas Duvoux, Le nouvel âge de la solidarité. Pauvreté, précarité et politiques publiques, Paris, Seuil/La République des idées, 2012.
[5] Clara Deville, « Les chemins du droit. Décentralisation du RSA et distance à l’Etat des classes populaires rurales », thèse pour le doctorat de sociologie, 2019, p.205 ; voir https://laviedesidees.fr/Reformer-les-minima-sociaux-1495.html
[6] Robert Castel, Nicolas Duvoux (dir.), L’avenir de la solidarité, Paris, PUF/La vie des idées, 2013.
[7] Nicolas Duvoux, Les oubliés du rêve américain. Philanthropie, Etat et pauvreté urbaine aux Etats-Unis, Paris, PUF, 2015.
[8] Nicolas Duvoux, Adrien Papuchon, « Qui se sent pauvre en France ? Pauvreté subjective et insécurité sociale », Revue Française de Sociologie, 2018/4, p.607-647.
[10] https://onpes.gouv.fr/rapport-de-l-onpes-premiere.html