Annie Le Brun Il était une fois, il y aura une fois


Pourquoi les contes plaisent-ils tant aux enfants et pourquoi en gardons-nous après un souvenir enchanté? Sans doute parce qu’en donnant forme à ce qui inquiète ou terrifie, ils montrent à chacun le moyen d’affronter ce qui lui paraît insaisissable et même de le conjurer, à travers le désir de ne plus se laisser arrêter par rien. C’est ainsi qu’ils nous ouvrent les portes du merveilleux.

Mais alors pourquoi, les romans, les films qui disposent en principe des mêmes arme de l’imaginaire, n’ont-ils pas ce pouvoir?

Je dirais que le secret des contes est de commencer par “Il était une fois”. Car, à toujours débuter par cette phrase, ils affirment la singularité des êtres et des choses comme une donnée intangible de l’univers. Et, du même coup, ils nous disent, à vous, à moi, à quiconque, la possibilité de recommencer pour son propre compte. Comme si entre “il état une fois” et “il aura une fois”, chaque être pouvait soudain entrevoir la folle perspective de son devenir singulier. Comme si, avant même que nous en soyons conscients, se dessinait au cœur de chacun la perspective à perte de vue de la poésie. L’aurions-nous oublié, il n’est pas de grande poésie qui ne nous ramène à cet infini singulier. 


Annie le Brun (1941). Poeta e ensaísta francesa, com trabalhos voltados tanto à crítica da cultura quanto à interpretação de autores como Alfred Jarry, André Breton, Raymond Roussel, Michel Leiris e Aimé Césaire, entre diversos outros. Publicou importantes estudos sobre Sade, entre os quais Soudain un bloc d’abîme, Sade, lançado como volume de abertura da edição crítica das Obras Completas do marquês, que organizou com o editor Jean-Jacques Pauvert. Traduzida em diversas línguas, sua extensa obra vem sendo reeditada pela Gallimard desde meados dos anos 1990, incluindo a reunião de seus livros de poesia (Ombre pour ombre), o ensaio Les Arcs-en-ciel du noir: Victor Hugo, e Radovan Ivsic et la forêt soumise, em homenagem ao poeta croata, morto em 2009, com quem foi casada. Em 2014, assinou a curadoria da exposição Sade – Attaquer le soleil que teve lugar no Musée d’ Orsay em Paris e resultou em livro homônimo. Entre seus últimos títulos, destacam-se Ce qui n’a pas de prix (Stock, 2018) e La vitesse de l’ombre (Flammarion, 2023).