Extraits de POJAR 1
Feu aux artifices
Les manèges tournent
avec leurs carrosses de plâtre doré,
les sirènes aux cheveux jaunes soufflent
de leurs grandes poitrines creuses,
le malheur entre dans la ville,
parmi les palais bâtis par des fous,
le malheur entre dans les châteaux de cartes,
dans les carcasses de plâtre des maisons,
dans les manèges dorés.
Mettons le feu à la cité,
les sirènes du manège flambent,
les couleurs de leurs joues se rehaussent,
le malheur, main de fer, demeure,
parmi les rires de braises,
et l'odeur du carton verni
qui brûle rose.
La main de fer demeure
plus brûlante et plus sûre,
beau malheur luisant dans les cendres,
dernière certitude, que caches-tu dans ta paume ?
ouvre les doigts, main dure mais solide,
que je pose mon front brûlé
dans ta chair vive et ferme,
saignante de soleil tueur.
René Daumal
***
Jour
Nuit
Soleil
Étoile
Soudure de lèvres
En fils barbelés.
Sandrine Davin
Sacha Jarachewski
Extraits de POJAR 2
Les amants de la solitude
Combien dans les chambres nocturnes
Écartent de leurs mains fragiles
Les draps de plomb
L’œil de la pendule est aveugle
La solitude
S’est pendue à l’espagnolette
Et le volet
Bat comme l’aile d’un ange blessé
Ceux qui ne dorment pas attendent
Ils attendent le vent
Ils attendent la fin du monde
Ah voici l’aube aux couleurs de framboise:
La vie reprend le goût âcre du sang
Yvan Goll
sel de vos yeux
gelé
joues et poils
partout
les cheveux sont devenus gris comme de l’acier
tu n'es pas le seul
tu n'es pas le seul
Irina Kaplin (traduit du russe)
Eisenstein Ivan le Terrible