Tous les lundis de 14H à 16h, un souffle de fraîcheur emplit le gymnase du Canal gracieusement mis à la disposition de l’association Handi Multi-Sports par la commune d’Illzach. On s’y réunit autour d’une passion commune que l’on ne manquerait pour rien au monde : la pratique de la sarbacane. Ils sont 14 au total tous licenciés auprès de cette toute jeune association. Ils viennent du Moulin, du foyer d’accueil de jour Alister et de Marc Duval. Qu’importe le handicap moteur ou intellectuel : derrière la sarbacane : plus aucune différence car aucun ne souhaite se faire souffler son titre ou sa perf ! Car, ils sont tous compétiteurs et pour beaucoup d’entre eux, se distinguent sur les plans régional et national et ne s’en laissent pas compter ! A voir leur enthousiasme et leur concentration à l’extrême, on ne s’y trompe pas ! Car, tout le monde peut pratiquer, des classements par équipe ont d’ores et déjà été établis avec des binômes handi/valides. Le tout est de savoir maîtriser son souffle et de viser dans le mille bien au centre de la cible !
Mais au fait, qu’est-ce au juste que la sarbacane, ce sport bien particulier et mal connu du grand public ?
La sarbacane autrefois pratiquée dans les régions minières du Nord de la France et de la Loire, était un loisir fort répandu consistant à lancer des petits projectiles par la force du souffle.
La sarbacane dite sportive est constituée d’un tube en aluminium d’une longueur de 122 cm, pourvue d’une embouchure et d’un viseur. Le tir de projectiles ou fléchettes sur des cibles dont la distance varie selon l’âge, le degré de mobilité et le handicap : 1 ,30 mètres en hauteur et 2,50 mètres de distance pour les personnes pouvant se maintenir debout et respectivement 1,30 mètres et 1,60 mètres pour les personnes en fauteuil.
Un blason figuré par 4 couleurs (noir au centre, jaune, rouge et bleu sur les côtés) permet de comptabiliser les points au vu des tirs exécutés par le tireur (le maximum étant de 10 en plein centre de la cible d’un diamètre de 18 Cm’. Le calcul des points est identique à celui ayant cours pour le tir à l’arc. Lors des compétitions, les tireurs utilisent les tripotes. Il s’agit de 3 petites cibles de 10 cm chacune. Chaque tireur a le droit d’envoyer 10 volées de 3 flèches chacune pour un score maximum de 300 points. A l’heure actuelle, le record de France est de 283 unités.
Les personnes ayant l’usage des bras, soutiennent la sarbacane et tirent debout. Les personnes en fauteuil tirent en position assise : la sarbacane étant fixée sur un trépied également dénommée potence.
La force du souffle envoie la fléchette en métal dans la cible. Le score réalisé dépend de l’orientation de la sarbacane et de la force du souffle. Les différences peuvent être infinitésimales : tout est affaire de précision et de concentration.
Tous les lundis après-midi, Jean-Paul Greth et son ami Claude gagnent le gymnase du Canal à Illzach. L’entraînement débute à 14H, il ne faut pas tarder. L’installation de la salle et la mise en place du matériel s’apparente à un véritable protocole. Les 14 postes de tir doivent être installés avant l’arrivée des premiers tireurs. « La sarbacane, c’est un monde à part » explique Jean-Paul. « Il faut fixer les trépieds pour ceux qui en ont besoin, les cibles toutes alignées le long du mur ainsi que la pose des sarbacanes ».
A 14H, l’entraînement peut commencer dans une ambiance bon enfant et conviviale. On vient pour s’amuser, passer un bon moment entre copains mais surtout pour performer et tenter de battre le record de points affiché lors du dernier entraînement.
Jacqueline 79 ans, pratique depuis 14 ans. Elle a découvert la sarbacane lors des journées « sport et handicap » organisées au centre socioculturel Wagner. « Essayé c’est adopté » affirme-t-elle sans sourciller. « C’est un sport intéressant en termes de concentration et de précision. Lorsque je m’entraîne, je suis dans ma bulle et rien ne peut m’en extraire » aime t-elle à rappeler. Grande sportive, Jacqueline a pratiqué le tennis, la voile et le canoë et a pu à ce titre encadrer à plusieurs reprises des colonies de vacances. Aujourd’hui, elle se consacre pleinement à la sarbacane et a pris part à de multiples reprises aux championnats de France et a terminé à la 6e place lors de la dernière édition à Nantes en mars 2023. Elle tire avec potence à une distance de 2,50 mètres et son score maximal au tripote est de 270.
Espoir prometteur de la sarbacane, Jordan 25 ans pratique depuis près de 4 ans. « Grâce au soutien de Jean-Philippe mon éducateur sportif à Marc Duval, j’ai pu participer à plusieurs compétitions départementales et régionales » rappelle-t-il. « Je m'entraîne tous les lundis et je pratique aussi d’autres sports : handbike et basket fauteuil » , précise-t-il. Mais, sa préférence va clairement à la sarbacane et compte bien figurer au tableau des prochains Jeux Paralympiques de 2028. Jordan confie avoir « un agenda de ministre » car entre la sarbacane, la préparation des courses en handbike (sur route et sur piste) et le basket fauteuil, il s’éclate, il est inarrêtable !
Animateur de vie partagée au sein du service Alister, Julien coordonne et anime toutes les activités mises en place pour les personnes vivant en habitat inclusif : sarbacane, gymnastique douce, fléchettes, pétanque, activités culturelles et conviviales. « Les jeunes que j’encadre, sont en capacité d’être performants » indique-t-il. « Tout le monde est sur le même pied d’égalité ; ils prennent du plaisir et progressent rapidement et de manière régulière ».
Educatrice sportive au Moulin (association des Papillons blancs ADAPEI), Delphine encadre plusieurs ateliers autour de l’équilibre et la coordination de parcours et de la marche. Elle a créé une petite salle de sport où les résidents peuvent s’adonner au vélo adapté ou vélo semi-assis. « J’ai travaillé dans le handisport et animé plusieurs sessions en terme de sport adapté pour personnes en situation de handicap mental »» confie-t-elle. « La sarbacane est une aide formidable pour ces jeunes plus aptes à se concentrer dans une ambiance calme et sereine. La cohésion d’équipe est primordiale pour eux. J’ai vu des jeunes en situation de stress progresser très rapidement et retrouver de l’aisance dans leurs mouvements. Le fait de prendre part à des compétitions, constitue un formidable challenge ».
Alors, n’hésitez pas à venir découvrir ce sport tous les lundis de 14H à 16H au gymnase du Canal d’Illzach. Venez partager ces beaux moments de convivialité et prenez le temps d’échanger avec Jonathan, Catherine ou Jean-Luc ; vous aussi, vous serez convaincus !
Compétition de Sarbacane handisport
Podium du Championnats d'Alsace de Sarbacane Handisport