Articles / L'évolution du port / Plan de 1756
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Plan de 1756 - plan dressé par Mr Chocat de Grandmaison
Le Dimanche 3 Décembre 1752, les États de Bretagne se tiennent à Rennes. Monsieur de Quilen présente une requête de la communauté de Saint-Brieuc, ses négociants et armateurs qui demandent que l'on fasse couper deux angles de terre dans le port du Légué; l'un sur Plérin vis à vis des magasins Rohannet et l'autre sur Cesson au-dessus de la corderie. Cette requête est renvoyée à la commission du commerce.
Le Lundi 18 décembre 1752, sur la requête de la communauté de Saint Brieuc et sur le rapport qu'à fait la commission, elle a entendu le sieur Chocat (ingénieur) qui a été sur les lieux et qui a confirmé tout ce qui était exposé dans la requête touchant la nécessité et l'utilité des travaux en question.
Les états ont, conformément à l'avis de la commission, ordonné qu'il sera fait fonds dans la présente tenue de la somme de 25 000 livres, à quoi le sieur Chocat a estimé que pourraient monter les réparations des ports de ladite ville appelés les ports du Légué.
En 1756, l'ingénieur Chocat de Grandmaison établit le plan du Légué qui servira pour ces travaux. Il est aujourd'hui visible aux archives départementales d'Ille-et-Vilaine. Le 10 Février 1757, les états accordent encore pour le port du Légué, ce dit jour, une nouvelle somme de 10 000 livres. Le sieur Magin, ingénieur de la marine, est désigné pour la direction des travaux suivant le plan dressé par Chocat de Grandmaison.
Dix milles livres furent accordées en 1754 et la même somme en 1757 pour permettre au sieur Magin d'achever l'ouverture et le creusement du canal. L'année suivante, le duc d'Aiguillon, gouverneur de Bretagne, et l'évêque de Saint-Brieuc posent la première pierre des quais. Il fallut allouer 18 000 livres pour l'achèvement de l'ouvrage en 1767 1
Plan dressé par Mr Chocat de Grandmaison en 1756 (dimensions: 2 m 58 / 0 m 54) 2
Le plan représente la totalité de l'estuaire du Gouët, des faubourgs de St-Brieuc à la pointe à l'Aigle
Examinons les détails:
En raison de méthodes de topographie de l’époque, il convient de noter que le plan n’est pas superposable avec les plans cadastraux qui lui sont postérieurs.
A noter l'échelle en "toises", une toise équivalent à 1 m 80.
Entre 1731 et 1733, le chemin de la vieille côte conduisant de St Brieuc au port fut amélioré et élargi et il fut à cette époque désigné sous le nom de Chemin Neuf.
Venant de St Brieuc, on remarque le tracé de ce qui sera la vieille côte donnant l’accès au pont du port Favigot. Celui-ci n’était plus en relation avec la mer depuis la construction d’un pont de charpente bois comprenant deux travées reposant sur une pile avec culées en maçonnerie (1731-1733). De fait, le port Favigot ne pouvait plus recevoir de bateaux!
Ces améliorations des conditions de liaison entre la ville de St Brieuc et le village portuaire du Légué-Plérin mirent aussi en évidence la nécessité d’avoir un port avec un quai.
Une solution de facilité eut été de créer un quai au Bas du Chemin , sur la rive droite, côté St Brieuc , mais la configuration ne s’y prêtait pas du tout en raison de la falaise escarpée que constituait la butte de Rohannec'h . Ainsi fut choisi la solution d’utiliser le port d’échouage du Légué côté Plérin. Celui-ci fonctionnait depuis longtemps et avait déjà des installations et de la main d’œuvre qualifiée qui y logeait.
Pour y créer sur le domaine maritime royal, les extensions souhaitées, fut étudié par l’ingénieur Chocat de Grandmaison la création du quai sur le bord du chenal du Gouët juste devant la partie principale du village portuaire existant .
L’accès au village ancien du port du Légué se faisait uniquement par le chemin qui s’appelle actuellement la rue du Port Favigot. Il n’y avait pas de passage sur le rivage entre le pont et la chapelle, il est marqué sur le plan : « levée à construire pour le chemin ». Il y avait à passer une zone marécageuse avec écoulement du ruisseau des Noées et de la fontaine. Cet écoulement a été canalisé lors de la construction du quai. Il se fait désormais en orifice noyé depuis la mise en bassin à flot N° 2 du Gouët canalisé. (photo ci-dessous à gauche)
Un autre orifice similaire existe face au Tabac des Mouettes pour permettre l'écoulement du ruisseau du Bois de la Violette mais celui-ci n'a été réalisé qu'en 1914 lors du comblement de la cale de carénage après le passage de la ligne de chemin de fer départemental. (photo ci-dessous à droite)
C’est à l’aval de la fontaine du village que se trouvent les anciennes maisons. La mer venait donc jusque le pied de la chapelle St Julien, et devant le grenier à sel.
C’est devant ce grenier à sel que pouvaient être aménagées les souilles pour les bateaux, notamment dans l’écoulement du ruisseau du Bois de la Violette.
Mais le point principal était le projet de quai :
Le projet de quai est situé le long du chenal de la rivière à marée basse , ce qui permettra une hauteur d’eau de trois brasses tel qu’indiqué de part et d’autre de ce chenal. Cette construction de quai permet de disposer d’un espace nouveau assez important devant le village depuis la chapelle St Julien jusqu’au Grenier à Sel.
La profondeur d’eau au niveau du coude du chenal dans le secteur du Merdrain (four à Chaux) face au débouché du ruisseau de Gouédic est de cinq brasses ; c’est ce qui motivera la création de la longue canalisation en ligne droite du cours du Gouët selon l’alignement du nouveau quai dit d’Aiguillon, terrassement qui était en partie achevé dès 1774 ainsi que nous le verrons sur d’autres documents.
Dans la période qui a précédé 1756, il n'était possible d'atteindre ou de sortir du port d'échouage du Légué que durant les heures qui entourent le plein, et ceci, en louvoyant entre les collines de l'estuaire. Le cours de la rivière Le Gouët à marée basse était très sinueux. Aussi, le réel tirant d'eau utilisable pour louvoyer sur le plan d'eau était limité par la présence des bancs d'alluvions dont nous n'avons pas l'altitude mais qui étaient très certainement assez hauts et notamment dans le secteur du confluent du Gouédic face au secteur du Merdrain en Plérin. Ceci ne permettait la navigation qu'avec des bateaux de faible tonnage et de faible tirant d'eau. Remonter au vent d'Ouest avec de tels bateaux devait être assez difficile, et de toute façon limité. Ainsi que nous en avons déjà parlé, le but de créer un quai en 1756 au Légué-Plérin était bien de disposer d'un mur de quai avec cales de déchargement au bord du chenal et qui permettait à la fois, une profondeur d'eau pour y avoir des navires plus importants, des surfaces de terrain au sec pour le stockage, et une activité portuaire déjà fonctionnelle dans le village dans lequel exerçaient déjà des armateurs.
Paul OLLIVIER
1 Annuaire des ports maritimes de France, tome III, Imprimerie Nationale, 1878, P.430, notice Pelaud, BM St-B M3247 .
2 Archives départementales d'Ille et Vilaine Réf: C FI 2396-01 et C FI 2396-02.