Albert Terken et Maguy Hoebeke
Avec les yeux de l’Intime…
par Gigi
Un souvenir… Non, des souvenirs plein la tête.
L’atelier. Les toiles. Mon enfance…
Je me revois, tendre bébé dans la petite baignoire à côté du vieux poêle ou encore blottie dans les bras de mon père tandis qu’il peignait. Le coin de feu comme on l’appelait, était un petit salon avec une cheminée ouverte, un de ces endroits où s’éparpillait une myriade d’objets : les pigments de terre de sienne, ocre, rouge, brune pour fabriquer de la couleur, le bois pour faire les châssis et les grandes toiles de lin, la vieille scie à onglet pour les angles des cadres, coins pour le collage, outils, pinceaux, couteaux…
Je me rappelle aussi, les moments féériques lorsque mes parents mettaient de la dorure sur les cadres. J’avais le droit de les épousseter et des milliers d’étoiles volaient tout autour de moi.
Il y avait des boites à couleurs de toutes sortes, de toutes grandeurs et de toutes essences de bois.
Une quantité de petits trésors pour les yeux.
Et tout ce décor est encore à Lesve dans leur atelier.
Leur œuvre a commencé très tôt, avant même les années 40. Deux vies consacrées à la peinture, la justesse du dessin, la beauté des formes, la profondeur de l’horizon. Ils m’ont transmis ce plaisir du regard, l’harmonie des couleurs. Jamais je ne me lasse, c’est comme une fenêtre ouverte sur le Beau.
Quand je suis entouré des peintures de ma mère, je ressens un réel apaisement, le calme, la douceur parfaite des éléments. Ses toiles sont à l’image de son jardin : le printemps fleuri de jonquilles et tulipes et l’été quantité de roses…
Quant aux peintures de mon père, j’y puise une force incomparable dans une lumière transcendante, telle une tempête en mer ou un sommet en montagne qui m’attire et me fascine.
Quand je suis dans leur atelier, je sens leurs âmes présentent. Chaque dessin, chaque tableau, chaque objet rayonnent à leur image et j’y éprouve de la plénitude. C’est grâce à la personnalité exceptionnelle de mes parents que je suis parvenue à embrasser la vie, que j’ai réussi à devenir ce que je suis aujourd’hui.
Tous ces souvenirs qui vivent encore dans leur atelier, cette passion de l’art. C’est tout cela que je voudrais partager avec vous.
Gigi Terken ép. Garigliany