Montaigne et la présomption humaine

Séance ZOOM du 11 mars 2021- Lecture des Essais de Montaigne

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Nous poursuivons la lecture de l'Apologie de Raymond Sebon, Livre II, chapitre 12

(cf lecture du début du chapitre, vidéo- conférence du 16/02/2021 : Montaigne, la raison et la foi) .

1- Les conséquences du fidéisme de Montaigne :

Si la raison ne peut s'élever à Dieu, elle ne confère aucun privilège à l'homme. « Considérons donc pour le moment l'homme seul, sans secours étranger, armé seulement de ses armes... » (page 546)

2- La présomption humaine (page 549)

a- Elle est « notre maladie naturelle et originelle »

b- Elle engendre l'anthropocentrisme et le mépris de l'homme pour le reste de la nature

c- Comparaison entre Montaigne et Pascal (les Pensées)

d- « Se démettre de cette royauté imaginaire » que l'on s'attribue sur les autres créatures pour envisager la nature comme ce « palais » où les bêtes forment avec les hommes « une même famille » (Livre II chapitre 11, page 528)

3- Le bestiaire (pages 549 à 589)

a- Sa fonction : combattre la présomption humaine. Question : la raison est-elle le propre de l'homme et fait-elle de lui un être supérieur aux animaux ?

b- Le raisonnement conduit par Montaigne pour détruire la présomption humaine :

- le principe de méthode suivi par Montaigne (page 559) : « A partir de résultats semblables nous devons conclure qu'il y a des facultés semblables »

- la similitude des comportements animaux et humains conduit à l'alternative suivante : ou bien les animaux raisonnent comme les hommes (exemple du renard, page 560) ; ou bien la raison humaine n'est qu'un instinct (exemple des « armes naturelles », page 557)

- conclusion : il n'y a aucune hiérarchie objective entre les hommes et les animaux : l'observation de leur « parité » (page 550)

c- L'idée que la raison est le propre de l'homme conduit à affirmer contradictoirement qu'il est supérieur aux animaux et inférieur à eux (en ne le dotant pas d'instinct, la nature l'aurait démuni)

- on se refuse à parler de raison et on parle d'instinct pour caractériser des réalisations des animaux (exemple de l'araignée) qui dépassent l'habileté humaine (page 553)

- s'il s'agit d'instinct, les performances supérieures des animaux soulignent dans ce cas le dénuement des hommes (l'absence d'instinct montrerait que la nature les a négligés)

- Montaigne s'inscrit en faux contre la thèse de Protagoras (dans le mythe de Prométhée) selon laquelle la technique doit pallier l'insuffisance naturelle de l'homme (exemple du vêtement). Il affirme l'égalité naturelle des hommes et des bêtes : « Nature a enveloppé dans son affection toutes les créatures sans exception » (page 553)

d- Conclusion : L'homme est un animal dont la vraie différence d'avec les autres animaux n'est pas la raison, mais sa présomption qui le pousse à conclure de sa présence à sa supériorité sur « ses confrères et compagnons » et le conduit à en faire un usage déréglé (source des « maux qui l'accablent », page 559)

Notre lecture s'arrêtera au commentaire du bestiaire présenté par Montaigne. Il faudrait beaucoup d'autres séances pour commenter la suite de l'Apologie (qui est de loin l'Essai le plus long des Essais). On peut dire schématiquement qu'elle aborde les quatre questions suivantes :

1- Que nous apporte la raison ? La science qui en est le produit nous apprend-elle à bien vivre ?

2- La science nous apporte-t-elle la connaissance ? La raison est-elle un instrument fiable de connaissance ?

3- La réflexion de Montaigne sur les limites du savoir. Le rôle thérapeutique de son scepticisme inspiré de Pyrrhon : guérir du dogmatisme (présomption) et parvenir à une ignorance qui se connaît

4- Pourquoi la science s'avère impossible : « Rien de certain ne peut être établi (…), le jugeant et le jugé étant dans un changement et un mouvement continuels » (page 734)