Appel à communication

Argumentaire scientifique

La notion de verbe parenthétique a été introduite par Urmson (1952) pour qualifier un ensemble de constructions verbales que l’on peut trouver soit en position initiale, suivie ou non de que (cf. exemples 1 et 2), soit en position médiane, interrompant temporairement la construction en cours (cf. exemples 3 et 4), soit en position finale, rejetée à la fin de l’énoncé (cf. exemples 5 et 6):

(1) je crois que c'est passé au four [pfc]

(2) je pense Ø les enfants sont encore aujourd’hui malheureux [unine]

(3) je parle je pense assez bien [pfc]

(4) nous avons attendu je crois sept ou huit heures dans la gare [pfc]

(5) ça doit être un négociant je pense [crfp]

(6) elle est trop chère cette école je trouve [crfp]

Récemment, les verbes parenthétiques ont connu un regain d’intérêt notoire, comme en attestent les nombreuses publications les concernant, qu’il s’agisse de travaux sur les langues germaniques (Dehé & Kavalova 2007 ; Brinton 2008 ; Van Bogaert 2009 ; Newmeyer 2010) ou romanes (Blanche-Benveniste & Willems 2007 ; Schneider 2007 ; Avanzi & Glikman à par.). Devant une telle profusion de publications, l’heure semblait venue de proposer un colloque dédié à l’étude de ce phénomène, afin de croiser les différents points de vue en présence et d’établir une synthèse aussi complète que possible concernant l’avancée de nos connaissances sur le fonctionnement linguistique de ces items en discours. Les chercheurs intéressés aborderont, sans s’y limiter, l’un des aspects suivants :

- Dans une perspective pragmatique, il s’agira de rendre compte des fonctions associées aux verbes parenthétiques. Urmson (1952) disait que leur rôle était notamment de modaliser le contenu propositionnel de la construction qu’ils accompagnaient. Depuis, de nombreux auteurs ont montré que leurs fonctions en discours étaient beaucoup plus variées. Si des inventaires ont été proposés, aucun n’est encore clos à l’heure actuelle.

- D’un point de vue syntaxique, le but sera de questionner la nature de la relation qu’entretient le verbe parenthétique avec la construction à laquelle il s’accole. Doit-on parler de rection, de non rection ou d’un degré de rection intermédiaire ? De quels tests dispose-t-on pour trancher en faveur de l’une ou l’autre analyse?

- Au niveau prosodique, les chercheurs sont invités à rendre compte de la façon dont les parenthétiques se rattachent ou non intonativement à la construction hôte. Forment-ils obligatoirement un groupe intonatif enchâssé dans une construction de rang supérieur, ou la façon dont ils s’insèrent dans la structure prosodique est-elle plus complexe ?

- La diachronie de ces structures a fait l’objet de peu d’analyse. Or celles-ci sont fondamentales, si l’on veut saisir le fonctionnement de ces structures en synchronie. Quelle est l’origine sémantique des verbes parenthétiques ? Quand et comment ont-ils commencé à être utilisés en parenthèse ? Comment leur signifié a-t-il changé pendant ce développement ? Ces verbes sont-ils en train de se transformer en adverbiaux ?

- Enfin, on pourra se pencher sur le rapport qu'entretiennent les verbes parenthétiques avec d’autres items, qui partagent des propriétés pragmatiques et/ou syntaxiques similaires, à l’instar des verbes de discours rapporté :

(7) maintenant il a dit qu’il repartait pas sur Noirmoutier aujourd'hui [pfc]

(8) et la et la droite dites-vous n’a pas pu apporter une réponse satisfaisante aux aux données il y a quelques années [crfp]

(9) un journaliste sur France-Info me disait vous allez souffrir une fois il me disait [radio]

des verbes de perception, qu’on dit généralement plus « pragmaticalisés » :

(10) tu vois que j’invente pas ce que je dis [pfc]

(11) tu vois y a des gens ils appellent de temps en temps [gre03]

(12) on comprend tout ce qu’elle veut dire tu vois [pfc]

(13) c'était tu vois jobs [pfc]

ou encore des adverbiaux dont la nature grammaticale reste à préciser :

(14) heureusement que j'étais pas déguisée [cfpp]

(15) certainement il va passer en jugement [pfc]

(16) une plus grande capacité probablement d'adaptation [pfc]

(17) j'me balade donc vers Montparnasse sûrement [cfpp]

Un intérêt tout particulier sera accordé aux études s’inscrivant dans une approche typologique et aux études comparatives. Enfin, si les langues de travail du colloque seront le français et l’anglais, la description des phénomènes pourra porter sur n’importe quelle langue.

Langues du colloque

Les langues du colloque sont l'anglais et le français

Mode de participation

Les propositions de communication (20 min. de présentation + 10 min. de discussion) se feront sous la forme d’un résumé anonyme de 6000 signes espaces compris (deux pages max.), incluant références bibliographiques et figures éventuelles. Elles seront envoyées par e-mail en fichier PDF joint à l’adresse <parenthetiques12@gmail.com>, avant le 15 juillet 2011. Le corps du message contiendra le nom et l’affiliation du ou des auteurs ainsi que le titre de la communication. Les propositions seront examinées par le Comité scientifique. Les auteurs seront informés de l’acceptation ou du refus de la proposition avant le 31 décembre 2011.

Publication des actes

Sur la base de la décision du comité scientifique, une sélection des articles sera faite en vue d’être publiée dans les actes du colloque. Le manuscrit, une fois assemblé, sera soumis pour publication en vue de constituer un numéro thématique de revue.

Conférenciers invités

- Nicole Dehé (Konstanz)

- Frederick Newmeyer (Washington)

Comité d’organisation

- Mathieu Avanzi (Neuchâtel/Paris Ouest)

- Julie Glikman (Lattice/Paris Ouest)

- Sophie de Pontonx (Modyco)

- Stefan Schneider (Graz)

Dates importantes

15 juillet 2011 – Date limite de soumission des propositions de communication

31 décembre 2011 – Notification d’acceptation des propositions de communication

24-26 mai 2012 – Colloque

Comité scientifique

Anne Abeillé (Paris VII) ; Hanne Leth Andersen (Copenhague) ; Denis Apothéloz (Nancy II) ; Deborah Arteaga-Capen (Las Vegas) ; Lluïsa Astruc (Open University, UK); Mathieu Avanzi (Neuchâtel/Paris Ouest) ; Annie Bertin (Paris Ouest) ; Isabelle Charnavel (Los Angeles) ; Bernard Combettes (Nancy II) ; Benoît de Cornulier (Nantes); Denis Creissels (Lyon) ; Liesbeth Degand (Louvain-la-Neuve) ; Elisabeth Delais-Roussarie (Paris VII) ; Patrick Dendale (Anvers) ; Sandra Döring (Leipzig) ; Joseph E. Emonds (Visitig Professor at Tomas Bata University, located in Zlin, Czech Republic, and at University College, London) ; Werner Frey (Zas Berlin) ; Catalina Fuentes Rodríguez (Seville) ; Frédéric Gachet (Fribourg/Neuchâtel) ; Alessandra Giorgi (Venice) ; Julie Glikman (Lattice/Paris Ouest) ; Sylvain Kahane (Paris Ouest) ; Gunther Kaltenböck (Vienne) ; Elise Kärkkainen (Oulu) ; Yordanka Kavalova (University College, London) ; Christiane Marchello-Nizia (ENS Lyon) ; Paola Pietrandrea (Roma 3) ; Claus Pusch (Fribourg-en-Brissau) ; Stefan Schneider (Graz) ; Lene Schøsler (Copenhague) ; Markus Steinbach (Göttingen) ; Dan Van Raemdonck (Bruxelles) ; Mark de Vries (Groningen) ; Anne Wichmann (Lancashire) ; Dominique Willems (Gent).

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