05 - Et maintenant...

Comment ne pas citer à nouveau, ici, la conclusion de l'un des derniers courriels de Martine, où elle redit ce qu'elle a exprimé de vive voix aux trois enfants accourus à son chevet après son coma :

"[...]Nous avons beaucoup parlé et nous sommes dit de choses qu’on ne se dit pas parfois durant toute une vie. Comment veux tu que je ne sois pas inondée de bonheur. [...]

Et maintenant, comme je l’ai dit aux enfants et à la famille, je veux que la vie soit légère pour vous tous, vous savoir joyeux et profitant des belles choses, même les plus infimes. Rien ne me fait plus plaisir que de savoir que vous venez de passer un bon moment. J’ai le bonheur d’avoir des enfants qui sont des bons vivants comme mes parents.

Cette parenthèse qui aurait pu être une tragédie m’a procuré les moments de bonheur les plus intenses de ma vie."

"Je veux que la vie soit légère pour vous" !

Au sortir du coma, et à de nombreuses reprises ensuite, elle nous a répété cela, comme un testament. Elle l'a même écrit en rouge, au bas de l'une des nombreuses pages de carnet qu'elle a remplies lors de son hospitalisation, et encore quelque temps à la maison (en hospitalisation à domicile), lorsqu'elle tentait de rassembler ses esprits et noter ses idées, alors qu'elle luttait contre l'encéphalopathie...

"Pas d'amour peut tuer - Trop d'amour étouffant peut 'bouffer' une vie."

"Je veux qu'elle soit légère, joyeuse, normale, pour tous ceux que j'aime".

Cinq mois après le décès de Martine, je ne parviens toujours pas à imaginer son départ autrement que comme une absence temporaire ou un voyage. Sa pensée ne me quitte pas, et elle me manque terriblement mais, d’une certaine façon, je la sens vivre en moi, et mes larmes ne la satisfont pas. Ayant vécu avec elle pendant trente ans, je sais très bien ce qu’elle veut : je dois vivre, veiller sur nos enfants et sa famille, construire avec eux une vie heureuse et légère, et être comme elle aurait voulu que je sois : meilleur.

Nîmes, 23 novembre 2009

Michel Dauzat