Dublin - 2018

Marathon de Dublin

J’hésite à diffuser ce CR. Depuis la fin du marathon, je suis partagé entre la fierté d’avoir terminé cette course et le petit côté honteux d’avoir quelque peu jouer avec les règles d’inscription…Allons, ne nous arrêtons pas ici : voici quelques détails :

Tout commence en 2017. Au moment de faire le choix d’un marathon à l’étranger, les avis sont partagés. La majorité souhaite aller à Venise. Pour ma part, les infos récoltées ne m’emballaient pas du tout : hébergement coûteux, marathon pas terrible (sauf l’arrivée place St Marc bien entendu) alors que la réputation du marathon de Dublin avait aiguisé ma curiosité. Pensez donc, le marathon le plus convivial du monde qu’ils disaient !!! Ça a de quoi faire saliver non ??? Bref, personne ne s’inscrit à Dublin. Je choisis quant à moi de maintenir mon choix initial malgré les défections du reste du groupe. A défaut de courir, je pourrai passer du temps en couple avec Emilie là-bas. Le programme est presque aussi salivant non ? Et puis quelques mois plus tard, toute la troupe finit par changer d’avis et me foutre en l’air mon week end en amoureux. Venise, c’est niet ! changement de cap pour Dublin. Nous finissons donc par prendre les résa pour la capitale irlandaise. Malheureusement, c’est sold out. Plus aucun dossard dispo. Qu’à cela ne tienne ! On ne fera pas le marathon, on ira juste s’imprégner de l’ambiance. Quitte à revenir une fois prochaine…ouai…c’était sans compter sans nos motivations de runners désabusés.

Avec Sylvain, en pleine préparation du trail d’Hambers de 53Km, nous décidons dans la semaine qui précède le départ, d’emmener nos affaires de course. Pour lui : « sait on jamais, on est pas à l’abri d’une revente de dossard » pour moi : « je veux juste faire le 2nd semi ».

Arrivés sur Dublin le samedi, on commence à avoir franchement un gros sentiment de frustration. Tous les runners qui se sont rendus au village marathon se baladent dans les rues avec leur beau bonnet. Pas en reste, nous nous baladons avec Tanguy déguisés en chat. Pas de pression, puisque pas de marathon…enfin pas de pression…si mais en pinte…rando de 15 kilo, 2-3 bières/Guiness, un coucher tardif,…un samedi veille de marathon pas franchement idéal pour se mettre en (bonne) condition de course. Mais puisqu’on ne court pas le marathon…

Le matin, toute la troupe se lève. Sylvain et moi sans nous presser, avalons un petit déj light et partons tranquillement pour rejoindre la zone de départ…en entretenant le secret espoir d’avoir un désistement avant l’entrée dans les SAS. Mais non…à ce stade, plus d’abandon. Il aurait surement fallu se rendre sur le village la veille pour obtenir un dossard. Tant pis ! Le marathon vient de partir et nous décidons de rejoindre le cortège un peu plus loin. Nous ne connaissons pas le parcours exact. En se fiant à notre instinct d’oiseau migrateur, nous finissons rapidement par le rattraper. À la vue des premières bornes kilométriques, nous n’avons rien raté. Il fait frais et certains marathoniens sont au chaud sous leur bonnet…C’est tout heureux que je trouve un 1er bonnet bleu à pompon sur le bas-côté…il ira orner la tête de mon binôme qui lorgnait dessus depuis la veille. 1 autre puis encore un autre…nous finissons par en récolter 6 qui viendront remplir nos poches pendant toute la durée de la course. Ce sera l’occasion de coiffer gratis toute notre équipe à la fin de la journée !

Nous voilà donc partis sur le circuit, sans dossard. Nous enchainons les kilos à bon rythme et toujours sans stress…de toute façon, vu qu’on s’arrête au semi…et puis le milieu de la course arrive. Qu’est ce qu’on fait ? Rapide check-list : jambes OK, tête OK, motivation OK. Allez c’est parti pour aller plus loin. A ce moment dans ma tête, je ne suis pas encore sur un mode marathon et encore moins disposé à le finir. Sauf qu’à courir sans pression, on finit par enchainer les kilomètres sans difficulté. On décide par ailleurs de marcher dans toutes les côtes ou dès qu’on est sur une longue période de plat. Nous voyons avec un certain scepticisme le meneur d’allure des 3h30 nous passer juste après le semi…Plus les kilo passent plus l’envie de le terminer, de franchir la ligne grandit. Et merde, finalement je la veux cette médaille. Sylvain lui est plus motivé par le T-shirt finisher. Il va falloir néanmoins franchir la ligne et on imagine aisément que l’organisation ne va pas nous laisser faire aussi facilement ! 20ème miles. Il en reste 6. Je crois que c’est en prenant la photo devant la flamme du 20ème miles (33ème kilo) que j’ai pris conscience que non seulement, j’allais le terminer mais qui plus est sur une base d’un sub 4h aussi inattendue qu’incroyable. Pensez donc : on marche dans toutes les montées depuis 10 kilomètres, on s’arrête régulièrement prendre des photos, on se freine mutuellement car bon, faut pas déconner…on prépare la 53…. ! dans une montée je récupère une ceinture porte dossard jetée par terre (c’est fou ce que le marathonien dublinois peut jeter…) avec ma petite idée en tête pour franchir la ligne avec cet accessoire. Depuis maintenant le 2ème semi, la foule est plus dense de chaque côté de la route. L’ambiance est vraiment incroyable. A certains passages, on a même l’impression d’être au sommet d’un col du tour de France. Il n’y a pas de ravito solide sur ce marathon mais les habitants proposent biscuits, bonbons, quartiers d’orange tout le long du circuit. Les sourires se succèdent aux sourires, les encouragements redoublent à chaque virage. Nous sommes littéralement portés par la rue. Je n’ai jamais vu ça !

Dernière ligne droite. C’est maintenant que ça va se jouer. Nous voyons les bénévoles au loin qui vérifient les dossards…aïe, il va falloir la jouer filou. Je crie à Sylvain (qui, une fois n’est pas coutume est légèrement derrière moi) de se planquer derrière un coureur officiel et d’accélérer pour passer le contrôle…quelques mètres, « put your bib in front of you », « get your bib visible »….oulà, ça sent pas bon…allez mon gars Sylvain, c’est le moment d’accélérer !!!! ET…..CA PASSE, il ne reste plus qu’une centaine de mètres à parcourir pour lever les bras…nous avons réussi !!!!

Je propose à Sylvain de pas s’éterniser sur la ligne. Hop ! Direction la médaille. On nous félicite en nous accrochant autour du coup la belle médaille de finisher. On sort du rang et on en profite pour enfin se congratuler mutuellement. Sachant que mon binôme était intéressé par le T-shirt, je lui dis que je vais tenter le coup. Audiard le disait : « un con, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnait ! » Je vise le gamin qui est là en tant que bénévole. Il me demande mon dossard…ma réponse ressemble à un « don’t speak english » et je lui fais signe que je ne comprends rien…il appelle un adulte qui me demande où est mon dossard. « Brave homme, en 10’’ je n’ai pas appris la langue de shakspeare…et je ne comprends tjs pas ce que tu cherches à me dire »…il insiste le bougre…je finis par comprendre et lui montre que ma ceinture porte dossard se trouvait bien nue…j’avais bêtement perdu les 2 bloqueurs qui empêchent le dossard de choir…bon, en vrai ils étaient au chaud dans ma poche…Avec ma tête d’innocent, me voyant fort dépourvu devant l’événement malheureux, le vieux monsieur conciliant lance au jeune garçon « no it’s Ok for him »…et hop là, en voilà d’un beau Tshirt !!! Je donne la ceinture à Sylvain qui se dirige vers un autre gars qui lui tendra son gain sans chercher d’autres explications.

Nous voici donc le chef couvert par un joli bonnet, alourdis d’une jolie médaille à l’encolure et habillés d’un beau T-shirt tout bleu de finisher…bande d’escrocs !

L’histoire retiendra que pour nous faire pardonner de notre forfait, nous avons ramené à nos amis un bonnet pour chaque famille. Des Robins des bois modernes…en quelque sorte. Pauvres irlandais, c’est encore des anglais qui les ont volés !

Fanch