HGGSP Th4 Objet de travail conclusif
Jalon 1
La gestion du patrimoine français : évolutions d’une politique publique
La gestion du patrimoine français : évolutions d’une politique publique
Église démolie en Mayenne: « Contrairement aux politiques, les Français demeurent viscéralement attachés aux églises », Le Figaro, 4 août 2023
Églises, châteaux, abbayes, on vous explique pourquoi le réchauffement climatique met en péril notre patrimoine et comment le sauver, France3 Régions, 30 août 2023
Emmanuel Macron va annoncer des aides pour la préservation du patrimoine religieux, Europe 1, 12 septembre 2023
Grève à la tour Eiffel : "Le monument est en train de rouiller et c’est irréversible", France 3, 22 février 2024
Le Loto du patrimoine 2024 dévoile les 18 sites sélectionnés pour sa nouvelle édition, Huffington Post, 20 mars 2024
Coût de la reconstruction de Notre-Dame de Paris : qui a payé pour aider à rebâtir la cathédrale ?, Huffington Post, 30 décembre 2024
Le Louvre, un musée victime de son succès, Courrier International, 19 février 2025
A. Des points de vue paradoxaux sur le patrimoine
La Révolution française est un moment charnière dans la vie politique et sociale du pays mais aussi dans sa façon de considérer la culture et le patrimoine. Le violent sentiment antimonarchiste et anticlérical aboutit à des dégradations et des destructions volontaires envers le patrimoine, à tel point que l’abbé Grégoire dénonce et condamne le vandalisme révolutionnaire. En 1792, la statue équestre de Louis XIV sur la place Vendôme est abattue tandis que l’année suivante, les tombes des rois de France reposant dans la basilique Saint-Denis sont profanées et font l’objet de déprédation sur ordre de la Convention. D’autres monuments sont pillés afin de réutiliser les matériaux.
Paradoxalement, durant cette période révolutionnaire, apparaît aussi une volonté chez certains de préserver le patrimoine. Des inventaires sont réalisés et une Commission des monuments puis une commission des arts sont créées. L’ancien palais royal du Louvre accueille dès 1793 le Museum des Arts. Victor Hugo publie en 1825 une note intitulée « Guerre aux démolisseurs » dans laquelle il réclame une loi pour la protection des monuments. « Il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté. Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde, à vous, à moi, à nous tous. Donc, le détruire c’est dépasser son droit » affirme-t-il.
B. L’évolution de la protection du patrimoine depuis 1830
L’œuvre réconciliatrice de la nation française profondément divisée entre républicains, légitimistes, bonapartistes et orléanistes passe sous la Monarchie de Juillet (1830-1848) par une politique patrimoniale. En 1830, François Guizot, ministre de l’Intérieur, crée le poste d’inspecteur général des monuments historiques tandis qu’en 1837, est décidée la création de la commission des monuments historiques. La première liste répertoriant 934 monuments historiques est publiée en 1840 et l’année suivante, une instruction est donnée aux préfets de classer par ordre de priorité les monuments de leur territoire, pour leur attribuer des aides de l’État en vue de leur conservation.
La IIIème République (1870-1875) poursuit cette œuvre patrimoniale. En 1887, le Parlement décide de légiférer pour donner à la protection des monuments historiques un cadre légal et en 1907, le corps des architectes en chef des monuments historiques est créé. En 1909 et 1912, le législateur décide d’étendre la possibilité de classement à tous immeubles et objets dignes d’intérêt public au point de vue de l’histoire ou de l’art. Les destructions causées par la Première guerre mondiale sensibilise les législateurs à une définition plus large de la notion de patrimoine. La liste dressée en 1920 par l’administration montre qu’il peut concerner tous types d’édifices, de la bergerie à l’abbaye, et même être employé pour protéger « un village entier ayant conservé son caractère primitif ».
Sous la Vème République (1958- ?), le ministère de la Culture est créé afin de rendre accessibles au plus grand nombre les œuvres capitales de l'humanité et d'assurer le rayonnement de la culture française. A partir de 1962, la Loi Malraux élargit la protection du patrimoine à des quartiers ou à des villes. A partir de 1993, la protection patrimoniale s’étend au paysage.
Si le patrimoine préservé est désormais très diversifié, l’architecture religieuse et domestique représentent 60% du patrimoine répertorié et protégé en France. Les parcs et jardins (7%), l’architecture militaire (6%), les réalisations du génie civil (6%), l’architecture funéraire (5%), agricole (4%), commerciale (2%) et industrielle (2%) ne représentent individuellement qu’une faible part de ce patrimoine avec un pourcentage compris entre 2 et 7%.
C. Des questions budgétaires
Le quart du budget du ministère de la Culture est consacré au patrimoine, soit environ 1 milliard d’euros. A cet investissement financier de l’Etat, s’ajoute dans le cadre de la décentralisation le financement d’une partie des coûts d’entretien aux collectivités territoriales. Les mécènes sont aussi mis à contribution. Leurs dons ont été multipliés par deux entre 2010 et 2017, atteignant 2 milliards d’euros. Mais seul un quart de cette somme est consacré au patrimoine.
L’entretien des biens historiques est négligé en France, s’accordent à dire de nombreux spécialistes et historiens de l’art. En 2019, on estime qu’environ 2000 monuments historiques sont en péril ou partiellement en péril. Face au manque de moyens, certaines collectivités engagent, ces dernières années, des procédures de destruction plutôt que de restauration de leur patrimoine religieux. L’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris a suscité un élan d’émotion qui a débouché sur de nombreux dons de particuliers français et étrangers. Cette situation est révélatrice du fait que les Français ont compris que l’Etat n’était pas le seul à devoir protéger le patrimoine, mais aussi que l’Etat manquait de moyens pour le faire.
Le manque criant de moyens est encore souligné par la création en 2017 du Loto du Patrimoine. Il consiste en deux opérations : Le tirage du Loto du Patrimoine le 14 juillet et un jeu de grattage mis en vente pour les Journées européennes du patrimoine. Depuis 2018, année de sa mise place, plus de 4 800 édifices signalés à la mission « Patrimoine en péril » ont été recensés sur la plateforme dédiée. Sur un total de 745 projets sélectionnés, 460 projets sont démarrés ou achevés en 2022.