HGGSP Th3 Objet de travail conclusif
Jalon 3
Le génocide dans la littérature et le cinéma
Le génocide dans la littérature et le cinéma
La vidéo comprend l'introduction + le Jalon 1 + le Jalon 2 + le Jalon 3
Shoah : des dessins et une bande dessinée pour raconter l'histoire, Actualitté Les univers du Livre, 7 août 2023
« Holocaust » ou l’« américanisation » de la Shoah, Le Monde, 21 août 2023
ENTRETIEN. "Adieu Birkenau" : "Il n'y a aucun mot qui puisse expliquer ce qu'on a subi", témoigne Ginette Kolinka, 98 ans, rescapée d’Auschwitz, France Info, 26 septembre 2023
« Endosser au cinéma le rôle d’un juif sans être juif : cette appropriation culturelle serait un péché », Le Monde, 6 octobre 2023
« Shoah » sur France 2 : Réaction à l’actualité et devoir de mémoire, la diffusion du documentaire n’est jamais anodine, 20 minutes, 30 janvier 2024
« Shoah », sur France 2 : un film titanesque sur l’extermination des juifs, Le Monde, 30 janvier 2024
La Shoah à l'écran : quatre films controversés qui ont questionné notre regard, France Culture, 8 février 2024
Raconter l’Holocauste : les œuvres de fiction prennent-elles trop de place ?, Courrier International, 3 avril 2024
Le génocide dans la littérature
L’œuvre de mémoire du génocide et sa transmission ne relève pas seulement de la mémorialisation des lieux mais aussi de son évocation dans la littérature et le cinéma. Les premiers écrits sont produits par les rescapés du génocide. Des manuscrits retrouvés dans les camps de la mort ou dans les ghettos racontent le processus d’anéantissement en cours. Ils sont conservés pour la plupart à Yad Vashem.
Parmi les témoignages édités, on trouve Le Journal d’Anne Franck. Cette jeune fille juive allemande décrit son quotidien à Amsterdam entre 1942 et 1944 où elle se cache avec sa famille en exil. Elle meurt à Bergen-Belsen en 1945. L’ouvrage est publié par son père en 1947. A ce jour, il a été traduit en 70 langues et plus de 30 millions d’exemplaires de son livre ont été vendus. Depuis 2009, il est inscrit au registre international de la « Mémoire du monde ».
Parmi les témoignages de rescapés, l’œuvre de Primo Levi connaît un destin singulier. Primo Levi est un juif italien arrêté en tant que membre de la résistance italienne au fascisme. Dans son livre « Si c’est un homme », il relate son emprisonnement au cours de l'année 1944 dans le camp de concentration et d'extermination d'Auschwitz-Monowitz jusqu’à à la libération du camp, le 27 janvier 1945. Publié en 1947, son livre n’est tiré qu’à 2 500 exemplaires et sombre dans l’oubli avant une réédition en 1958 qui en fait un ouvrage de référence. Le livre s’est aujourd’hui vendu à plusieurs millions d'exemplaires dans le monde et a été traduit dans près de 60 langues.
Parfois les rescapés mettent du temps avant de vouloir et/ou de pouvoir témoigner. Parmi ceux-ci, Chil Rajchman. Juif polonais, Chil est l’un des 57 survivants du camp d'extermination de Treblinka où au moins 750 000 juifs ont été assassinés. Après son évasion du camp, caché jusqu’à la fin de la guerre par un ami, il décrit dans un manuscrit les 10 mois qu’il a passé à Treblinka. A sa demande, sa famille fait publier après sa mort son témoignage. Son manuscrit s’intitule : Je suis le dernier juif - Treblinka.
D’autres auteurs n’ont pas été touchés directement par le génocide. En 2006, un roman fait polémique : Les bienveillantes de l’écrivain franco-américain Jonathan Littell. S’il reçoit le prix Goncourt, il fait couler beaucoup d’encre et est critiqué pour son voyeurisme ou son immoralité. En effet, le narrateur n’est pas une victime de la Shoah mais un nazi qui participe à la mise en œuvre du génocide. A contrario de l’expression d’Annette Wieviorka sur « l’avènement du témoin », l’historien Denis Peschanski s’interroge de son côté sur « l’ère du bourreau ».
La fiction est aussi utilisée pour recréer cette mémoire. Dans la bande dessinée Maus publié entre 1980 et 1991, l’américain Art Spiegelman raconte l’histoire de son père, juif polonais déporté à Auschwitz et rescapé. Il représente les juifs sous la forme de souris et les Allemands sous la forme de chat. Ce roman graphique a été récompensé par le prix Pulitzer
Dans la catégorie des BD, on trouve aussi les dessins de Cabu, datant de 1967, qui illustrent la rafle du Vel d’Hiv qui a eu lieu à Paris les 16 et 17 juillet 1942. Plus de 13 000 juifs ont été raflés par des policiers et des gendarmes français avant d’être déportés.
Le génocide des tsiganes est un « génocide oublié » selon l’expression des historiens. Les tsiganes eux-mêmes ont refusé de s’exprimer et de témoigner. Dans ce silence, l’œuvre de Ceija Stojka est d’autant plus importante. Rescapée des camps de concentration d'Auschwitz, de Ravensbrück et de Bergen-Belsen, elle s'est lancée dans la peinture dans les années 1990. L'essentiel de son œuvre est découvert de manière posthume. Ecrivaine, elle a aussi publié un livre de poèmes intitulé Auschwitz est mon manteau et des romans dont Nous vivons cachés. Récits d’une Romni à travers le siècle.
Le génocide au cinéma
La rafle du Vel d’Hiv a donné lieu à la réalisation d’un film sorti en 2010 : La Rafle. Les critiques sont partagées entre émotion, utilité d’un tel sujet dans le cadre du devoir de mémoire et le côté artificiel de la réalisation qui insiste lourdement sur le pathos. Aucun film sur la Shoah ne peut sortir sans déclencher de débats et un concert de critiques ou de louanges. La représentation du génocide au cinéma pose problème : comment représenter l’indicible sans faire du voyeurisme ? Comment sortir un film au cinéma sur un tel thème sans en faire un spectacle sur une des plus grandes tragédies du XXème siècle ?
Le film référence pour relater la Shoah est le film de Claude Lanzmann sorti en 1985. Le film documentaire, considéré comme un chef d’œuvre, est tourné dans les années 1976-1981 et dure près de dix heures. Il est composé d'entrevues de témoins de la Shoah et de prises de vues faites sur les lieux du génocide. Le film est couvert de récompenses, y compris un César d'honneur décerné au Festival de Cannes en 1986.
La comédie dramatique de l’italien Roberto Benigni sorti en 1997 fait aussi polémique. Sa fable « La vie est belle » relate la déportation d’une famille juive italienne et le combat du père pour que son fils ne se rende pas compte de l’horreur des camps. Pour certain, le parti pris décalé est profondément dérangeant et « rend le génocide méconnaissable ». Peut-on rire de la Shoah ? Pour Roberto Benigni, « Le rire est une arme, c'est un moyen d’échapper à sa condition, c'est la liberté ».
Peu de films sur la Shoah sont exempts de polémique. Que les critiques portent sur le thème, l’esthétique, la crudité ou l’artificialité, chaque film sur le génocide juif génère un flot de critiques. Comme le résume Claude Lanzmann en 1994 : « La fiction est une transgression, il y a un interdit de la représentation de la Shoah ». Le Fils de Saul, film dramatique hongrois de László Nemes sorti en 2015, est une exception dans ce contexte. Il reçoit le Grand prix au Festival de Cannes et l'Oscar du meilleur film en langue étrangère.
Malgré ces polémiques, le cinéma a contribué à ancrer le génocide juif dans la mémoire collective. A contrario, peu de films traitent du génocide des tsiganes.