Environnement : le Royaume-Uni soutient un moratoire à l'extraction minière sous-marine, France Info, 30 octobre 2023
Environnement : le Parlement norvégien donne son feu vert à la prospection minière des fonds marins, France Info, 9 janvier 2024
Les États-Unis viennent de croître d’un million de kilomètres carrés, SciencePost, 12 janvier 2024
Comment le Japon tente d'étendre son périmètre surinsulaire, Marianne, 30 janvier 2025
Une septième « limite planétaire » vient d’être franchie, « nous faisant entrer dans des conditions dangereuses », HuffPost, 27 septembre 2025
La conception de la souveraineté sur les océans a évolué depuis la période moderne. Au XVIIème siècle, Hugo Grotius, juriste et philosophe néerlandais, développe dans son ouvrage Mare liberum, publié en 1609, le concept de liberté des mers. A ses yeux, la liberté de naviguer doit être totale car les océans sont un bien commun. Au XXème siècle, les hommes conçoivent l’espace maritime comme une prolongation de leur espace terrestre et s’emploient à ériger des frontières afin de délimiter ces interfaces. Cette projection de souveraineté leur permet d’exercer un contrôle et une surveillance sur ces espaces.
En 1982, la Convention des Nations Unies sur le Droit de la mer (CNUDM) est signée à Montego Bay en Jamaïque sous l’égide de l’ONU. Si 60 Etats adhèrent aux termes de cette convention en 1994, on en dénombre aujourd’hui 168. Certains Etats, parmi lesquels les États-Unis, la Turquie, le Pérou et Israël, n’ont pas ratifié cette convention. Cette Convention met en place une territorialisation des espaces maritimes, c’est-à-dire l’appropriation de certains espaces maritimes par les Etats dans des buts géopolitiques et/ou économiques. En effet, parmi les 320 articles de la Convention figurent les articles en lien avec la création des Zones économiques exclusives (ZEE). Une ZEE est une bande de mer ou d'océan située entre les eaux territoriales et les eaux internationales, sur laquelle un État dispose de l'exclusivité d'exploitation des ressources dans un rayon de 200 milles marins soit 370 km à partir de la ligne de côte. La Convention prévoit l’extension possible de la ZEE d’un Etat par une extension jusqu’au début du plancher océanique n’excédant pas 648 km à partir de la ligne de base.
Une ZEE représente un outil de puissance. En effet, le contrôle d'une ZEE donne des droits, comme celui d'en exploiter les ressources, mais également des devoirs, parmi lesquels la préservation de l'environnement et les opérations de recherche et de secours en mer. En outre, la Convention proclame la liberté de circulation en haute mer. Les Etats-Unis sont à la tête de la plus vaste ZEE au monde avec 11.3 millions de Km2. La France se range à la deuxième place avec 11 millions de Km2 au travers de ses DROM-COM.
Compte tenu des droits d'exploitation exclusifs des ressources qu'elles contiennent, les ZEE sont un enjeu géopolitique majeur pour de nombreux pays, et une source de conflits pour leur contrôle. D’autant plus que toutes les limites des ZEE ne sont pas fixées. Dans de nombreux cas, les deux pays riverains n'ont pas trouvé d'accord fixant définitivement la limite séparant leurs deux zones. En cas de désaccord, les pays concernés peuvent saisir le Tribunal international du droit de la mer (TIDM), organe judiciaire indépendant créé par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Ce tribunal est compétent pour tous les différends relatifs à l’interprétation ou à l’application de la Convention. Par exemple, les Chinois et les Japonais sont en concurrence depuis des années pour le contrôle des îles Senkaku. On peut aussi citer les désaccords entre la France et l’Espagne : les délimitations entre les ZEE de ces deux pays ne sont pas définies. En octobre 2012, la France délimite sa ZEE tandis que l’Espagne fait de même en 2013. Néanmoins, ces deux ZEE se chevauchent sur plusieurs centaines de km2. De même, en mars 2014, le parlement des Comores a autorisé la délivrance de permis d'exploration pétrolière sur une aire de 6000 kilomètres carrés empiétant sur le périmètre théorique de la ZEE de Mayotte.
Les océans subissent de nombreuses menaces et se dégradent rapidement face au réchauffement climatique et à l’action humaine. Les eaux se réchauffent, s’acidifient voire se désoxygènent dans certaines aires. De nombreuses populations de poissons sont surexploitées. Les pollutions sont multiples telles les pollutions plastiques et les pollutions chimiques. Les pollutions plastiques sont à l’origine de ce que l’on appelle « le 7ème continent ». Les rejets de sacs, de bouteilles, d’emballages se concentrent sous l’effet des courants marins. Découvert en 1997, le 7ème continent situé au Nord-Est de l’océan Pacifique, atteint désormais une superficie équivalente à 3 fois celle de la France. D’autres amas de déchets sont formés sous l’action des gyres océaniques. On en dénombre actuellement 4 supplémentaires : un dans le pacifique Sud, 2 dans l’Atlantique et un dans l’océan Indien. Les pollutions chimiques sont générées par des fuites d’hydrocarbures, des rejets d’eaux usées, d’engrais et de pesticides, mais aussi par les crèmes solaires et les résidus de médicaments présents dans les urines. A cela s’ajoute la construction d’infrastructures qui perturbent la biodiversité et érodent les littoraux : construction de digues, creusement de ports, pose de câbles sous-marins et chalutage.
Face à ces menaces sur les océans, bien commun de l’humanité, les Etats entreprennent de collaborer. En 2022, 78 pays ont intégré la Coalition pour la Haute ambition pour la Nature et les Peuples, créée un an plus tôt, qui a pour objectif de protéger au moins 30% des terres et des océans du monde d’ici 2030. Ces 78 pays sont répartis sur tous les continents et représentent 28 % des zones prioritaires de la biodiversité océanique et plus d'un tiers des réserves de carbone océanique.
En parallèle, sous l’égide de l’ONU, les Etats s’investissent dans le cadre du BBNJ (Biodiversity Beyond National Jurisdiction) pour la protection de la biodiversité dans les zones situées au-delà des juridictions nationales. Ce processus vise à élaborer un accord juridiquement contraignant en ce qui concerne la haute-mer. En effet, les décisions prises dans le cadre des ZEE ne sont pas suffisantes dans la mesure où la haute-mer représente 64 % des mers et des océans. Le 4 mars 2023, António Guterres, secrétaire général de l’ONU, s’est félicité de l’aboutissement de plus de deux décennies de travail après la signature d’un traité contraignant afin de protéger au mieux les espaces maritimes et leur biodiversité. Ce traité permet la création d’aires marines protégées en haute mer, et l’obligation pour les États d’évaluer l’impact environnemental des nouvelles activités qu’ils projettent en haute mer. De même, ce traité constitue la base d’une dynamique de coopération internationale dans la mesure où il est prévu un partage juste et équitable des bénéfices des découvertes faites dans les océans. António Guterres salue « une victoire pour le multilatéralisme et pour les efforts mondiaux ».