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Produire de la connaissance scientifique : recherche et échanges
des hommes et des femmes de science
sur la question de la radioactivité
de 1896 aux années 1950
Produire de la connaissance scientifique : recherche et échanges
des hommes et des femmes de science
sur la question de la radioactivité
de 1896 aux années 1950
Sud Ouest, Nucléaire : « l’humanité ne peut survivre à une suite à Oppenheimer », alerte le chef de l’ONU, 18 mars 2024
A. La découverte de la radioactivité
En 1895, le physicien allemand Wilhelm Röntgen découvre les rayons X et réalise la première radio. Il reçoit le prix Nobel de physique en 1901. Cependant, c’est le physicien français Henri Becquerel qui est le premier à découvrir le phénomène naturel de la radioactivité en 1896 en travaillant sur les fameux rayons X mis en évidence par l’expérience de Wilhelm Röntgen. Il découvre que l’uranium émet des rayonnements invisibles se comportant comme les rayons X.
En 1898, Pierre et Marie Curie découvrent le polonium et le radium, deux éléments radioactifs (radioéléments) inconnus, présents dans le minerai d’uranium. Avec Henri Becquerel, ils reçoivent le prix Nobel de physique en 1903.
Irène Curie, la fille du couple Curie, et son époux Frédéric Joliot découvrent par la suite la radioactivité artificielle qui leur vaut le prix Nobel de chimie en 1935. La radioactivité artificielle est une radioactivité provoquée par des activités humaines au moyen d’un accélérateur de particules ou d’un réacteur nucléaire. La radioactivité artificielle est présente dans l'environnement depuis le début du XXᵉ siècle.
Les radioactivistes sont peu nombreux en ce début du XXème siècle mais forment une communauté scientifique soudée qui échangent une riche correspondance et se rencontrent lors de congrès. Il faut souligner la forte proportion de femmes chez ces radioactivistes, fait assez rare dans la communauté scientifique à cette époque : entre 1906 et 1934, les travaux de 45 femmes représentent entre le quart et le tiers des chercheurs l’Institut du radium dirigé par Marie Curie.
B. Les applications civiles de la radioactivité
Le radium étant un élément rare et cher, l’apport des travaux d’Irène et Frédéric Joliot-Curie sur la radioactivité artificielle en 1934 est particulièrement important. L’imagerie fonctionnelle se développe et permet le début de grands progrès pour le diagnostic de cancers, de maladies cardiaques ou thyroïdiennes.
Durant la Première Guerre mondiale, Marie Curie met la radiologie au service de la santé des soldats. Les « Petites Curie », camions équipés d’unités de radiologie, se déplacent sur les théâtres du conflit et permettent, grâce aux radios réalisées, de localiser avec précision les balles de mitrailleuses, les éclats d’obus ou les shrapnels dans les chairs des soldats. Les opérations chirurgicales sont facilitées et les soins aux soldats plus rapides. La radioactivité est donc pensée dans la première moitié du XXème siècle comme bienfaisante, avec des effets positifs à faible dose.
En effet, on l’utilise via l’utilisation d’aiguilles au radium dans la brachythérapie qui consiste à mettre une substance radioactive au contact d'une tumeur maligne pour la détruire.
Mais le radium trouve aussi des utilisations qui nous paraissent aujourd’hui surprenantes : il est utilisé en cosmétique dans des pommades, des rouges à lèvres, de même qu’en horlogerie pour fabriquer de la peinture luminescente utilisée sur des aiguilles de montre ou de réveil. On trouve aussi du radium dans la conception des premiers détecteurs de fumée et de paratonnerres. Le radium est alors à la mode, dans tous les sens du terme. Dans les années 20 et 30, de nombreuses publicités vantent la composition au radium des laines ou des tissus utilisés. Les laines au radium doivent apporter de la chaleur tandis que les gaines au radium sont censées stimuler les chairs et les rajeunir.
Il faut attendre 1937 pour que le radium soit interdit pour des utilisations non médicales. De même, en 1976, le radium est officiellement abandonné pour des raisons de radioprotection. Il est remplacé par l’Iridium-192 et le césium-137 en radiothérapie.
C. Usage militaire de la radioactivité
Dès 1935, dans son discours lors de la remise de son Nobel, Frédéric Joliot, anticipe et avertit de la dangerosité de la radioactivité dans ses possibles applications. L’exploration de la matière et l’utilisation des atomes peut mener selon lui « au déclenchement d’un cataclysme ». La physique nucléaire est un objet de recherche qui met en concurrence les laboratoires du monde entier. Durant la Seconde guerre mondiale, l’étude de l’atome et de son noyau prend un tournant décisif dans l’affrontement des puissances de l’Axe et des forces alliées. En août 1942, les Américains lancent le « projet Manhattan » qui a pour objectif de développer la première bombe nucléaire. Cependant, ce projet est validé et financé dès 1941 avant même Pearl Harbor.
Le physicien Robert Oppenheimer est nommé directeur de l’opération en 1943. Avec un budget de 2 milliards de $, il s’emploie à recruter les meilleurs physiciens américains et britanniques de l’époque. Pour mettre fin à la guerre du Pacifique face au Japon qui refuse la défaite malgré les pertes terribles qu’il subit, les étasuniens décident de faire la démonstration de leur puissance de feu. Le 6 août 1945, la première bombe atomique, « Little Boy », est larguée sur Hiroshima provoquant la mort instantanée de plus de 80 000 personnes et en blessant 130 000 autres.
3 jours plus tard, le 9 août, la seconde bombe atomique, « Fat man », est larguée sur Nagasaki, faisant 100 000 victimes dont 23 000 morts. A ce jour, il s’agit des deux seules bombes nucléaires jamais utilisées dans l’Histoire. La démonstration de leur capacité de dévastation place les Etats-Unis comme la première puissance militaire mondiale.
La course aux armements durant la guerre froide couplée à la stratégie de l’équilibre de la terreur pousse certains pays, URSS en tête, à se doter de l’arme nucléaire : L’URSS l’acquiert en 1949, suivie du Royaume-Uni en 1952 et de la France en 1960.
A leur suite, d’autres pays, principalement des pays dits du Sud, se dotent de la bombe afin de se protéger ou d’exister sur la scène internationale : la Chine en 1964, Israël en 1967, l’Inde en 1974 et le Pakistan en 1998. La Corée du Nord est le dernier pays à accéder à cette technologie, la dynastie des Kim voulant à tout prix se maintenir au pouvoir face à des puissances étrangères qui souhaitent la renverser. A ce jour, héritage de la guerre froide, les deux pays qui sont à la tête du plus vaste armement nucléaire sont les Etats-Unis et la Russie.
Si en 1945 et durant la guerre froide, l’arme atomique est vue comme un facteur d’équilibre qui empêche les guerres, force est de constater que la prolifération nucléaire est plutôt vue aujourd’hui comme un danger pour l’humanité. En mars 2024, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est alarmé d’un risque de guerre nucléaire face aux tensions géopolitiques actuelles. « L’humanité ne peut survivre à une suite à Oppenheimer qui a donné vie à la dure réalité de l’apocalypse nucléaire ». Il déplore lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU sur la non-prolifération nucléaire que « Les instruments de guerre font l’objet d’investissements bien plus importants que les instruments de paix ».