Il me faut laisser ma conscience s'initier à un plongeon au plus profond de la toile. Dans la transpiration de son épiderme se graveront indélébiles les instants privilégiés du sillage de mes pulsions.

Chaque voyage dans la matière picturale est un immense parcours intemporel au travers des limites de la folie. Ce chemin est fascinant, les rencontres insoupçonnées y sont multiples et merveilleuses, mais l’issue du retour est incertaine. Les âmes trop lourdes à remonter des abysses à la lumière encombrent mes gestes, au risque de ne plus pouvoir reprendre mon souffle en restant à jamais sous la surface de la réalité.

Désormais, épuisé de bonheur, les yeux ouverts et mouillés, je peux enfin voiler d’un vernis translucide, les traces trop voyantes des ébats entaillés dans les couches successives de la toile souillée.

Pour moi la peinture n'a de sens que pour l'émotion qui remplit l'espace se situant entre la toile et celui qui la regarde. Le plus surprenant est que cet espace est mesurable, et que sa pertinence varie en fonction de la force de l’oeuvre et de l’âme de celui qui ose la regarder.

Ligondès