AVIS
Avis n° 317279 du 19 novembre 2008
"Le Conseil d'Etat, statuant au contentieux (section du contentieux, 2e et 7e sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 2e sous-section de la section du contentieux,
Vu le jugement du 22 mai 2008 enregistré le 17 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat par lequel le tribunal administratif de Grenoble, avant de statuer sur la demande présentée pour la société Sahelac, dont le siège est La Croix d'Aiguebelette à Aiguebelette (73390), et Mme Danielle Juventin, demeurant Le Centre équestre à Sainte-Hélène-du-Lac (73800), tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 octobre 2007 par lequel le maire de la commune de Sainte-Hélène-du-Lac a délivré un permis de construire à M. Chevray et Mme Begay, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier au Conseil d'Etat en soumettant à son examen la question suivante : Les dispositions de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme ont-elles pour effet d'empêcher le délai de recours contentieux de courir en cas d'absence de la mention de l'obligation de notification de la requête prévue par l'article R. 600-1 de ce code ou ces dispositions ont-elles pour seule conséquence de priver d'effet les dispositions de l'article R. 600-1 ? ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;
Après avoir entendu en séance publique :
― le rapport de Mme Catherine Chadelat, conseiller d'Etat ;
― les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, commissaire du Gouvernement ;
Rend l'avis suivant :
L'article R. 600-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'article 12 du décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme, qui était en vigueur à la date de l'arrêté du 26 octobre 2007 par lequel le maire de la commune de Sainte-Hélène-du-Lac a délivré un permis de construire à M. Chevray et Mme Begay, dispose que : Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15.
L'article R. 424-15 du même code, issu de l'article 9 du décret précité du 5 janvier 2007, dispose que : Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. / Cet affichage n'est pas obligatoire pour les déclarations préalables portant sur une coupe ou un abattage d'arbres situés en dehors des secteurs urbanisés. Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable (...). / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage.
Enfin, l'article R. 600-1 du même code dispose que : En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation (...). / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux.
Il résulte de ces dispositions que, depuis l'entrée en vigueur du décret précité du 5 janvier 2007, le point de départ du délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire est le premier jour de l'affichage sur le terrain, pendant une période continue de deux mois, du permis assorti des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme. Si l'article R. 424-15 indique que doit également être affichée sur le terrain l'obligation prévue à peine d'irrecevabilité de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis, cette mention, destinée à mieux informer les éventuels requérants de leur obligation de notification et des risques d'irrecevabilité qu'ils encourent à ne pas l'accomplir, n'est pas au nombre des éléments dont la présence est une condition au déclenchement du délai de recours contentieux. Cette mention concerne en effet une règle de procédure qui doit être accomplie postérieurement à l'introduction du recours. Elle ne peut, par suite, être assimilée aux éléments substantiels portant sur la nature et la consistance de la construction projetée ou sur les voies et délais de recours, dont la connaissance est indispensable pour permettre aux tiers de préserver leurs droits et d'arrêter leur décision de former ou non un recours contre l'autorisation de construire.L'absence, sur l'affichage, de la mention de cette condition procédurale fait, en revanche, obstacle à ce que soit opposée à l'auteur du recours l'irrecevabilité prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme.
Par suite, l'absence de mention dans l'affichage de l'obligation de notification du recours a pour seul effet de rendre inopposable l'irrecevabilité prévue à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, mais n'empêche pas le déclenchement du délai de recours contentieux mentionné à l'article R. 600-2 du même code.
Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Grenoble, à la société Sahelac, à Mme Danielle Juventin, au maire de la commune de Sainte-Hélène-du-Lac et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Il sera publié au Journal officiel de la République française."
"Vu, 1 , sous le n 97LY01951, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour les 4 août et 21 octobre 1997, présentés pour la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE, représentée par son maire en exercice, par Me A... ;
La COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 21 mai 1997, par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé, à la demande de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., de la S.A. X..., de M. X... et de Mme B..., l'arrêté du 16 décembre 1994, par lequel le maire de la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE a délivré aux ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN un permis de construire pour l'extension d'un bâtiment à usage industriel sur un terrain sis dans la zone industrielle "Les Taillas" ;
2 ) de rejeter la demande présentée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., la S.A. X..., M. X... et Mme B... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
3 ) de condamner la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., la S.A. X..., M. X..., Mme B... à lui verser une somme de 6 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu, 2 , sous le n 97LY02072, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 juillet 1997, présentée pour la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN, dont le siège est zone industrielle des Taillas, 43600 SAINTE SIGOLENE, par Me Y... ;
La société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 21 mai 1997, par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé, à la demande de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., de la SOCIETE X..., de M. X... et de Mme B..., l'arrêté du 16 décembre 1994, par lequel le maire de la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE a délivré aux Etablissements COLLY-MARTIN un permis de construire pour l'extension d'un bâtiment à usage industriel sur un terrain sis dans la zone industrielle "Les Taillas" ;
2 ) de rejeter la demande présentée par la société civile immobilière C.F.P.O., la SOCIETE X..., M. X... et Mme B... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
3 ) de condamner la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O. et les consorts X... à lui verser une somme de 5 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2001;
- le rapport de M. du BESSET, président ;
- les observations de Me A..., représentant la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE, de Me C..., représentant la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN et de Me Z..., représentant la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., la S.A. X..., M. X... et Mme B...;
- et les conclusions de Mme LASTIER, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE et de la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête de la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-39 du code de l'urbanisme: "Mention du permis de construire doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de la décision d'octroi et pendant toute la durée du chantier ... En outre, dans les huit jours de la délivrance expresse ou tacite du permis de construire, un extrait du permis ... est publié par voie d'affichage à la mairie pendant deux mois" ; qu'aux termes de l'article R. 490-7 du même code : "Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire court à l'égard des tiers à compter de la plus tardive des deux dates suivantes : a) le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées, selon le cas, au premier ou au deuxième alinéa de l'article R. 421-39 ; b) le premier jour d'une période continue d'affichage en mairie des pièces mentionnées au troisième alinéa de l'article R. 421-39" ;
Considérant que, si la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE et la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN soutiennent que mention du permis de construire en date du 16 décembre 1994 a été régulièrement affichée sur le terrain au plus tard en janvier 1995, il ressort des pièces du dossier que l'affichage dont elles se prévalent a été effectué non sur le terrain d'assiette de la construction mais sur un terrain voisin ; qu'alors qu'il n'est pas établi et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué qu'un affichage n'aurait pas pu être réalisé sur le terrain d'assiette de la construction de manière visible de l'extérieur, ainsi que l'exigent les dispositions précitées du code de l'urbanisme, la publicité ainsi effectuée n'a pu faire courir le délai de recours contentieux ; qu'ainsi la demande présentée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., la S.A. X..., M. X... et Mme B... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand n'était pas tardive ;
Considérant qu'aux termes de l'article UI 7 du règlement annexé au plan d'occupation des sols de SAINTE SIGOLENE : "Toute construction doit être édifiée à une distance des limites séparatives au moins égale à la moitié de sa hauteur et jamais inférieure à 5 mètres" ; qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire du 16 décembre 1994 prévoit l'extension d'un bâtiment jusqu'à la limite parcellaire ; qu'une telle dérogation à la règle susmentionnée ne saurait constituer, compte tenu de son importance, une "adaptation mineure" au sens de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE et la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé le permis de construire en date du 16 décembre 1994 ;
Sur les conclusions présentées au titre des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant d'une part que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui reprennent celles de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, font obstacle à ce que la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., la S.A. X..., M. X... et Mme B..., qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnés à payer à la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE et à la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN les sommes que celles-ci demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Considérant d'autre part qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE et la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN à payer chacune à, ensemble, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., la S.A. X..., M. X... et Mme B... une somme globale de 5 000 francs au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes de la COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE et de la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN sont rejetées.
Article 2 : La COMMUNE DE SAINTE SIGOLENE et la société ETABLISSEMENTS COLLY-MARTIN verseront chacune à, ensemble, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., la S.A. X..., M. X... et MME B... une somme globale de 5 000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C.F.P.O., la S.A. X..., M. X... et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté."
"Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 et 25 janvier 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION DES ASSOCIATIONS DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA NATURE DES COTES D'ARMOR, dont le siège est ... ; la fédération demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 23 novembre 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du 24 mai 1995 par lequel le tribunal administratif de Rennes a ordonné qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêté du 16 décembre 1997 par lequel le maire de Binic a délivré un permis de construire à la S.C.I. du Corps de Garde, rejeté la demande de la fédération requérante et condamné celle-ci à verser à la S.C.I. du Corps de Garde et à ladite commune la somme de 2 000 F chacune sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) de prononcer le sursis à exécution de l'arrêté du 16 décembre 1997 ;
3°) de condamner la S.C.I. du Corps de Garde et la commune de Binic à lui verser chacune la somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural modifié notamment par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Errera, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Brouchot, avocat de la FEDERATION DES ASSOCIATIONS DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA NATURE DES COTES D'ARMOR (F.A.P.E.N.), de Me Parmentier, avocat de la S.C.I. du Corps de Garde et de Me Capron, avocat de la commune de Binic,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 252-1 du code rural dans sa rédaction issue de la loi du 2 février 1995 : "Lorsqu'elles exercent leurs activités depuis au mois trois ans, les associations régulièrement déclarées et exerçant leurs activités statutaires dans le domaine de la protection de la nature, de l'amélioration du cadre de vie, de la protection de l'eau, de l'air, des sols, des sites et des paysages, de l'urbanisme, ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances et, d'une manière générale, oeuvrant principalement pour la protection de l'environnement, peuvent faire l'objet d'un agrément motivé de l'autorité administrative. (...) Ces associations sont dites "associations agréées de protection de l'environnement." (...) Les associations exerçant leurs activités dans les domaines mentionnés au premier alinéa ci-dessus et agréées antérieurement à la publication de la présente loi sont réputées agréées en application du présent article." ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 252-4 du même code : "Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci" ; qu'aux termes du deuxième alinéa du même article "Toute association agréée au titre de l'article L. 252-1 justifie d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec son objet et ses activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément" ; qu'enfin aux termes de l'article 2 de ses statuts, la FEDERATION DES ASSOCIATIONS DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA NATURE DES COTES D'ARMOR, agréée par le préfet en 1981 dans le cadre départemental au titre de l'article L. 160-1 du code de l'urbanisme "a pour but de susciter ou de participer à toutes actions ou interventions visant à préserver ou à améliorer la qualité du milieu naturel et de l'environnement en général, terrestre, maritime ou aérien. Sont donc concernés notamment : l'eau, la faune, la flore, l'occupation du sol, les sites et monuments historiques et préhistoriques, les bois et forêts, le littoral y compris le domaine public maritime, l'intérieur, les problèmes routiers, les mines, l'aménagement rural, l'urbanisme, le bruit, l'usage de produits chimiques et antiparasitaires, les installations à nuisance les déchets, etc ... tout ce qui concourt au maintien des équilibres biologiques à tous les niveaux et tout ce qui est susceptible d'y porter atteinte" ;
Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du tribunal administratif de Rennes du 24 mai 1995 ordonnant, à la demande de cette fédération, le sursis à exécution de l'arrêté du maire de la commune de Binic en date du 16 décembre 1994 accordant un permis de construire à la S.C.I. du Corps de Garde ; que ladite cour s'est fondée, d'une part, sur ce que l'agrément précité était par lui-même sans incidence sur la recevabilité de la demande de la fédération requérante tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté précité et, d'autre part, sur la circonstance que ladite fédération était, eu égard à son objet statutaire, sans intérêt et par conséquent sans qualité pour contester la légalité de l'arrêté susmentionné ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la décision contestée tendait à autoriser la restauration de deux bâtiments abandonnés pour y réaliser neuf logements dans une zone non urbanisée du littoral, et que la fédération requérante était agréée notamment au titre de la protection du littoral, mentionnée à l'article 2 de ses statuts ; qu'en se fondant sur ce que l'agrément prévu par les articles L. 252-1 et suivants du code rural était par lui-même, sans incidence sur la recevabilité de la demande de la fédération requérante, sans tenir compte de la portée des dispositions susrappelées introduites par la loi du 2 février 1995 au deuxième alinéa de l'article L. 252-4 du même code et, notamment de celles selon lesquelles l'intérêt conféré à une association par ces dispositions vaut pour "tout ou partie du territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément", la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas justifié légalement sa décision, et a fait une inexacte application des règles régissant la recevabilité des actions en justice des associations agréées ; que la fédération requérante est, dès lors, fondée à demander, pour ce motif, l'annulation de cet arrêt ;
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 11 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif : "S'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, le Conseil d'Etat peut ... régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; qu'il y a lieu, en l'espèce, de faire application de ces dispositions ;
Considérant que si les dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article L. 252-4 du code rural subordonnent la recevabilité de l'action en justice des associations agréées à l'existence d'un rapport direct entre, d'une part, les décisions administratives attaquées et, d'autre part, l'objet et les activités statutaires de ces associations, la décision accordant un permis de construire à la S.C.I. du Corps de Garde pour la rénovation et la reconstruction d'un bâtiment comprenant 9 logements et situé à proximité immédiate du littoral, présentait un rapport direct avec l'objet statutaire de la fédération requérante, lequel inclut la préservation du littoral ; que par ailleurs, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le deuxième alinéa de l'article L. 252-4 du code rural dispose que l'intérêt conféré par ces dispositions à une association agréée vaut pour "tout ou partie" de territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément ; qu'ainsi la requérante justifiait d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire litigieux ;
Considérant, par ailleurs, que la fédération requérante a notifié sa requête à la S.C.I. du Corps de Garde et à la commune de Binic, conformément aux dispositions de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme ; que si la S.C.I. du Corps de Garde a apposé sur le terrain d'assiette des constructions projetées un panneau mentionnant le permis de construire litigieux, ce panneau était situé à 170 mètres environ de l'entrée d'un chemin signalé comme "privé" et n'était, dès lors, pas visible de la voie publique, contrairement aux prescriptions des articlesR. 421-3° et A. 421-7 du code de l'urbanisme ; qu'ainsi le délai de recours contentieux n'a pas couru à l'encontre de la fédération requérante ; que celle-ci ne saurait être regardée comme ayant eu connaissance de l'arrêté attaqué à la date de l'introduction par une autre association d'un recours contre le même arrêté ; qu'enfin, le président de ladite fédération était habilité à ester en justice en son nom en vertu de l'article 10 de ses statuts ;
Considérant que le préjudice dont se prévaut la fédération requérante et qui résulterait pour elle de l'exécution de l'arrêté attaqué présente un caractère de nature à justifier le sursis à exécution de cet arrêté ; que l'un au moins des moyens invoqués par la fédération requérante à l'appui de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre ledit arrêté et tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article ND1-II du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Binic en tant qu'il fixe la surface maximale d'extension des habitations existantes paraît de nature, en l'état du dossier, à justifier son annulation ; qu'il résulte de ce qui précède que la S.C.I. du Corps de Garde et la commune de Binic ne sont pas fondées à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rennes du 24 mai 1995 ordonnant le sursis à l'exécution de l'arrêté précité ;
Sur les conclusions de la fédération requérante tendant à ce que la S.C.I. du Corps de Garde et la commune de Binic soient condamnées à lui verser chacune 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ces conclusions ;
Sur les conclusions de la S.C.I. du Corps de Garde et de la commune de Binic tendant à ce que la fédération requérante soit condamnée à verser à chacune d'elles 15 000 F au titre des mêmes dispositions :
Considérant que lesdites dispositions font obstacle à ce que la FEDERATION DES ASSOCIATIONS DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA NATURE DES COTES D'ARMOR, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à verser à la S.C.I. du Corps de Garde et à la commune de Binic les sommes qu'elles demandent ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 23 novembre 1995 est annulé.
Article 2 : Les requêtes présentées devant la cour administrative d'appel de Nantes par la S.C.I. du Corps de Garde et la commune de Binic sont rejetées.
Article 3 : La S.C.I. du Corps de Garde et la commune de Binic verseront 5 000 F à la FEDERATION DES ASSOCIATIONS DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA NATURE DES COTES D'ARMOR au titre des frais irrépétibles.
Article 4 : Les conclusions de la S.C.I. du Corps de Garde et de la commune de Binic tendant au versement d'une somme par la FEDERATION DES ASSOCIATIONS DE PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA NATURE DES COTES D'ARMOR au titre des frais irrépétibles sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION DES ASSOCIATIONS DEPROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA NATURE DES COTES D'ARMOR, à la S.C.I. du Corps de Garde, à la commune de Binic et au ministre de l'équipement, des transports et du logement."
"Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 11 août 1998 et 9 décembre 1998, présentés pour M. et Mme Augustin X... ; M. et Mme X... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 26 mai 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté leur demande tendant à l'annulation du jugement du 14 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande d'annulation du permis de construire accordé le 25 août 1993 à Mme Y... par le maire de Biot ;
2°) d'annuler le permis de construire délivré le 25 août 1993 à Mme Y... ;
3°) de condamner la commune de Biot à leur verser de 20 000 F sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Challan-Belval, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Cossa, avocat de M. et Mme X... et de la SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de Mme Mireille Y...,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme : "En cas de déféré du préfet ou du recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un document d'urbanisme ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol ( ...) La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours" ; qu'aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme, "La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux." ;
Considérant que la requête de M. et Mme X... a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 29 mars 1996 ; que le délai de quinze jours imparti au requérant pour notifier son recours à l'auteur de la décision et à son titulaire, étant, comme il est expressément dit à l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme précité, un délai franc, il expirait le 13 avril 1996, à minuit ; que le 14 avril 1996 étant un dimanche, la date d'expiration du délai se trouvait donc reportée au lundi 15 avril 1996 ; qu'ainsi que le précise l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme il est satisfait à la formalité de la notification dès l'instant que l'envoi lui-même a été effectué dans le délai franc de quinze jours ; que si l'article R. 600-2 dispose que la date d'envoi est attestée par voie de lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que puissent être admis des modes de preuve présentant une garantie équivalente ;
Considérant, dès lors, que M. et Mme X..., qui établissent avoir déposé auprès des services postaux à la date du lundi 15 avril 1996, deux plis "Chronopost" adressés respectivement à Mme Y... et à la commune de Biot sont fondés à soutenir que la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit en rejetant leur requête comme irrecevable au regard des dispositions de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 490-7 du code de l'urbanisme : "Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire court à l'égard des tiers à compter de la plus tardive des deux dates suivantes : a) le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées, selon le cas, au premier ou au deuxième alinéa de l'article R. 421-39 ; b) le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage en mairie des pièces mentionnées au troisième alinéa de l'article R. 421-39" ;
Considérant en premier lieu, que le permis de construire délivré à Mme Y... par le maire de la commune de Biot, le 25 août 1993, a fait l'objet d'un affichage en mairie pendant deux mois à compter du 25 août 1993 ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte des pièces du dossier, et notamment des attestations d'un nombre élevé de personnes, dont il n'est pas établi qu'elles auraient, comme le soutiennent les requérants, des liens avec le bénéficiaire du permis de construire attaqué, que, d'une part, mention dudit permis a été affichée de manière visible de la voie publique, à partir du mois de septembre 1993 et pendant une durée d'au moins deux mois, sur un portillon situé au droit du chemin de l'Ibac, en bordure du terrain sur lequel devait être édifiée la construction, et d'autre part, l'affichage sur le terrain comportait des indications précises notamment la date de délivrance du permis, son numéro, la nature des travaux, la surface hors oeuvre nette et la hauteur du sol au faîtage, permettant d'identifier le permis de construire en cause, d'en prendre connaissance à la mairie et de le distinguer d'un autre permis délivré à Mme Y... le 18 juin 1991 ; que, dès lors, la circonstance alléguée que Mme Y..., bénéficiaire du permis serait mentionnée à tort comme étant propriétaire du terrain, et que la superficie du terrain ait été inexacte, ne fait pas obstacle à ce que cet affichage ait été suffisant pour faire courir à l'égard des tiers le délai de recours contentieux ; qu'ainsi M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur requête comme tardive ; que, par suite, leur requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions de M. et Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la commune de Biot qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. et Mme X... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 26 mai 1998 est annulé.
Article 2 : La requête présentée devant la cour administrative d'appel de Lyon par M. et Mme X..., ensemble le surplus des conclusions de leur requête devant le Conseil d'Etat, sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Augustin X..., à Mme Y..., au maire de la commune de Biot et au ministre de l'équipement, des transports et du logement."