Au XIX siècle l’époque est déchirée entre catholiques conservateurs et socialistes laïcs, comme entre individu et société, cherchant aller vers une pensée nouvelle.
Après Hegel et Schopenhauer, arrive Kierkegaard avec « l’idéalisme contré ». Il tire l’idéalisme vers un individualisme et un subjectivisme.
Kierkegaard est le premier à donner une forme de l’existentialisme chrétien.
Au XIX siècle, l’on cesse de penser « le genre humain » pour penser « l’individu », l’essence, pour en revenir à la seule réalité L’existence. L’existence n’a d’autre histoire que l’histoire privée de chaque homme.
Kierkegaard pense l’homme d’une manière résolument nouvelle qui triomphe au XX siècle, on voit l’homme, l’individu, une existence hors de tout système.
Dans ce temps apparait le prolétariat, Marx avec sa vision du monde collective ; l’intérêt du prolétariat passe au-dessus de l’intérêt individuel.
Jean Brun philosophe protestant a écrit sur Kierkegaard.
Soren Kierkegaard est né en 1813 à Copenhague.
Son père Michael Pedersen était un gros commerçant de textiles, il a eu sept enfants.
Le philosophe est né du second mariage de son père.
Kierkegaard est élève dans une stricte croyance du luthéranisme. Il suit les cours d’une école privée.
Mais il ne s’intéresse pas beaucoup à ses études.
Il a eu toujours un conflit avec son père.
Comme fervent chrétien, brillant théologien il s’oppose à l’église danoise. Il souhaite retourner à un luthéranisme pur et originel.
Avec Grundtvig (réformateur du luthéranisme), adresse une critique qui dit ; « La vérité ne se situe pas dans un « quoi statique » mais dans un « comment dynamique ».
Du 1834 à 1838 il a eu une profond malheur ; sa mère, son père, trois sœurs et deux frères décèdent successivement d’où la source des angoisses existentielles dans ses œuvres.
Quand Hegel décède en 1831, Kierkegaard commence l’étude de théologie et la philosophie à l’université de Copenhague.
Paul. Martin. Möller (1794 à 1838), poète et philosophe de l’humanité, fut son professeur qui avait exercé sur lui une grande influence.
Kierkegaard s’intéresse à Aristophane, Platon, Shakespeare, Goethe et son contemporain Anderson.
Il va se fiançait avec Régine Olsen en 1840. Un an plus tard il rompt les fiançailles.
L’abandon féminin l’attire et le repousse
Même année il soutient sa thèse : « Le concept d’ironie constamment rapporté à Socrate ».
Il va à Berlin où il va suivre les cours de Schelling.
D’après Jean-Jacques Gateau, sa mélancolie est un héritage d’idées noires reçu du père et nourri d’échange silencieux dans sa vie avec son père.
Son orgueil intellectuel attribuait peu de valeur à une vie « immédiate ».
A un moment dans sa vie, le philosophe pense au suicide.
Pour un tel mal de l’âme, le christianisme était la guérison unique, mais au prix d’une foi qui semblait toujours hésitante.
Dès son retour chez lui il a un réveil sur la foi chrétienne chez l’individu. Une forme sérieuse du luthéranisme qui s’appuie sur les valeurs austères de souffrance. Il nous dit: « C’est dans la subjectivité que réside la vérité face aux concepts banalisant du type souffrance…il n’y a pas de système de l’existence ».
A ce sujet Max Stirner (1806 à 1856) son contemporain dit: « L’abstrait n’existe pas, ce qui existe, c’est l’individuel. Seul le particulier est constructif d’une vérité ; la vérité dans la subjectivité ».
« La subjectivité véritable, celle de l’éthique ; le penseur subjectif le fait exister dans la réalité ».
Ses œuvres se suivent en cascade entre 1843 et 1848.
Pour écrire Kierkegaard prend plusieurs hétéronymes.
Les premières œuvres sont ; « Journal du séducteur » où il présente la séduction d’une jeune fille Cordélia et nous montre ce qu’il y a de démoniaque et désespérant à l’attrait de la sensualité.
« La répétition » où « Reprise » nous montre où l’individu est dans une relation qui se rapporte à lui-même.
L’œuvre de Kierkegaard est vaste. L’Edition Lorante va sortir XVIII tomes traduits la première fois en 1841 à 1843.
Dans le tome XVI il nous explique le concept d’ironie de Socrate, sous le titre « Point de vue explicatif de mon œuvre d’écrivain ».
D’homme à l’homme être l’accoucheur est le suprême rapport dit Socrate, mais enfanter est réservé à Dieu proclame Kierkegaard, l’amour est celui qui enfante, pas celui que Socrate parle dans une fête.
Les « Miettes philosophiques », Le concept de l’angoisse » et « Le traité du désespoir » sont les œuvres de Kierkegaard où le philosophe se penche sur le christianisme, c’est tout le problème de sa existence avec un doute profond qu’un aucun autre.
Mais en même temps, s’il avait pu l’accepter, il était décidé à vouer au christianisme toute sa vie.
En 1844 il sort « Le concept d’angoisse », où il décrit le privilège de l’homme avoir la prise de conscience de soi. L’homme est seul capable d’angoisse, il est libre d’agir selon le Bien et le Mal.
Dans « L’angoisse » il y a le vertige du passible.
« Le concept d’angoisse » est traité sur V chapitres ; l’angoisse du péché héréditaire en remontant à son origine ; évolution de l’angoisse ; l’angoisse conséquence du péché ; l’angoisse du péché dans l’individu ; et il finit par l’angoisse sauvant par la foi. « Celui qui au sujet de la faute, se mettra à l’école de l’angoisse, ne trouvera le repos que dans la rédemption ».
Le péché ne relève absolument d’aucune science.
Le péché ne relève de l’éthique que dans la mesure où elle échoue sur ce concept grâce au repentir.
La science où le péché aurait d’abord sa place serait assurément l’éthique, mais l’éthique est une science idéale, elle veut faire passer l’idéalité dans la réalité ; par contre, elle ne tend pas à élever la réalité à l’idéalité.
« Le péché est entré dans le monde par le péché d’Adam »
L’homme est une synthèse d’âme et de corps établie et portée par l’esprit.
D’après Kierkegaard l’angoisse subjective dérive de réflexion de l’individu qui se sent coupable.
L’angoisse objective c’est l’angoisse de la création.
L’angoisse objective s’oppose à l’angoisse subjective par une distinction que l’on ne saurait invoquer dans l’état d’innocence d’Adam. La distinction est donc à sa place quand on considère le monde et l’état d’innocence du descendant d’Adam.
L’angoisse offre l’ambiguïté ; non de devenir coupable, mais d’être tenu tel, l’individu devient coupable.
Dans l’innocence, l’esprit est présent, mais d’une manière immédiate, à l’état de rêve. Il trouble constamment le rapport de l’âme et du corps.
L’innocence dispose du langage et peut aussi exprimer tout ce qui est d’ordre spirituel.
« L’école du christianisme », « L’essence du christianisme » et « La maladie et la mort » sont réuni dans le tome XVII.
Ecrit entre 1849 et 1852, le volume XVIII présente un profond lieu sur la valeur de la foi vraie, sous le titre « deux discours pour la communion du vendredi ».
« Crainte et tremblement » sorti en 1843, est consacré à l’épisode biblique du sacrifice d’Isaac, en prenant la parole d’Abraham.
Il nous dit ; « La foi est un miracle, un don de Dieux ».
Dans le X tome on trouve « Post-scriptum définitif » sur quatre chapitres : l’écriture sainte (le problème du christianisme), de l’église – le protestantisme ; la spéculation qui vit dans le christianisme ; un problème historique ; tel qu’à la fin le christianisme est la pensée éternelle.
Dans « Post-scriptum aux Miettes philosophiques » paru en 1846 nous avons trois parties.
Première partie en deux chapitres ;
Christianisme vue historique
Vue sur la spéculation.
Deuxième partie ;
Gratitude envers Lessing
Thèses possible de Lessing où il conclut ; « Il peut y avoir un système logique ; mais il ne peut y avoir de système de l’existence ».
Troisième partie ;
Devenir subjectif ; comment la pensée devient subjective
La vérité subjective
Le tome finit par un appendice où il annonce la venir du « Alternative » un autre live où il y a une réflexion sur le religieux.
« Miettes philosophiques » un livre publié le 13 juin 1844.
Knud Ferlov traduit le livre et écrit son introduction dans le livre à la sortie en 1948.
Jean Brun philosophe protestant, fait un résumé très intéressant et concis sur « Miettes philosophiques ».
Kierkegaard va s’attacher à la personne de Socrate qui dans son livre occupe une place absolument centrale.
Il trouvait chez Socrate, plusieurs choses capitales, d’abord un refus de la foule comme instance de la vérité, et sa recherche d’une confrontation d’individu à l’individu même.
Kierkegaard suit les dites de Socrate et les présocratiques pour expliquer et aller plus loin dans ses pensées.
Suite à l’étude de Socrate et Prodicos sur la vérité il fait une démonstration en trois paragraphes ;
Comment peut-on chercher la vérité
Le maître doit permettre au disciple de se souvenir de ce qu’il sait la vérité et la non-vérité
Le disciple étant la non-vérité devient un homme nouveau car il a été dans la non-vérité par sa conscience. Sa conscience le détermine à une conversion, un changement dans la non-vérité et ce passage on l’appelle nouvelle naissance qui l’amène à la vérité.
Si l’homme possède l’originellement la condition nécessaire à l’intelligence de la vérité, du fait qu’il est, il pense que Dieu est.
« Certes un homme peut beaucoup pour l’autre, mais, lui donner la foi, il ne peut pas », nous dit-il.
Dans « Traité du désespoir » Kierkegaard nous dit:
« Le désespoir est une maladie de l’esprit, une maladie du moi, et peut prendre ainsi trois figures : le désespoir inconscient d’avoir un moi (ce que n’est pas du véritable désespoir) ; le désespoir qui ne veut pas être lui-même ; et celui qui veut l’être ».
Le philosophe nous dit aussi que son livre est une acceptation du désespoir car pour lui le désespoir est une maladie, sur laquelle il ne nous donne pas le remède.
Il nous fait penser à Epictète qui dit : « La maladie, ou elle passe ou on meurt ».
Dans le « Traité du désespoir » sur trois livres et plusieurs chapitres, Kierkegaard nous explique de son point de vue, le désespoir.
La personnification du désespoir ; le désespoir possible avec ou sans nécessité ; désespoir vu sous les catégories de la conscience ; le désespoir du péché où il introduit Dieu ; le péché socratique ; le péché de désespérer de son péché ; le péché de le nier (l’abandon positif du christianisme).
On voit comme ce traité critique la tradition et ses principes les mieux établis et prépare l’arrivée de la critique nietzschéenne.
Après Stuart et Comte les opposants à hégélien arrive Kierkegaard avec une nouvelle voie à une réflexion existentielle.
La pensée de Kierkegaard est beaucoup plus qu’un moment de l’histoire, elle est un témoignage devant l’histoire (J. Brun).
Kierkegaard dénonce la dialectique hégélienne qui cherche à opérer la synthèse et la réconciliation du contraire en même temps que le dépassement de toutes les oppositions
« Il pense concevoir l’être comme existence et non comme essence ».
La doctrine de Kierkegaard est une quête toute personnelle de l’existence qui passe par le rejet de l’objectivité et l’esprit de système né chez Hegel.
« Le système hégélien oublie complètement de parler de ma singularité et de l’appel qui m’est propre » nous dit-il.
La « Phénoménologie de l’esprit c’est la révélation de l’Esprit à lui-même » nous dit-il.
Pour Kierkegaard « instant » passe du décisif nommé « plénitude du temps » à l’instant de la condition et celui de la nouvelle naissance.
Dans « Miettes philosophiques » il dit ; « je découvre que j’ai eu la vérité sans le savoir, du même coup dans le instant caché dans l’éternel, accueilli par lui, ainsi qu’il m’impossible de la trouver (la vérité), même si je la cherche, parce qu’il n’y a ni « ici » ni « là », mais uniquement « partout et nulle part ».
« Que l’on définisse de façon plus empirique la vérité l’accord de la pensée avec l’être, ou la façon plus idéaliste comme l’accord de l’être avec la pensée ».
Kierkegaard ne parlera pas des vérités de raison appartenant à la logique, mais il fera appel aux vérités de révélation auxquelles l’homme ne peut accéder que lorsque Dieu lui a donné la foi.
« Ce n’est pas l’homme qui s’élève à la vérité mais la vérité qui, par Dieu descend vers l’homme ».
« Le malheur du monde moderne tient qu’il a supprimé le « je », le je personnel ». Car la vérité éthico-religieuse se rapporte essentiellement à la personnalité ; elle ne peut être transmise que par un Je à un Je.
« L’objectivité est l’erreur » nous dit le philosophe. C’est dans la subjectivité que réside la vérité ; ce qui existe, en effet, ce n’est pas le concept de souffrance qui n’est pas qu’en nom, mais bien des hommes qui souffrent ».
« Subjectivement, la façon dont on le dit, le COMMENT.
Cette distinction s’applique déjà en esthétique où elle a sa formule précise ; « ce qui est vrai dans la bouche de l’un peut devenir faux dans bouche de l’autre » ».
Dans le Post-Scriptum, le philosophe nous donne la définition de la vérité ainsi; « l’incertitude objective, maintenue dans l’appropriation de l’intériorité la plus passionné, est la vérité - la plus haute vérité qui soit pour un existant. Cette vérité implique la sagesse socratique dont le mérite immortel est justement d’avoir pris garde à l’importance essentielle de l’existence, au fait que le sujet qui connaît est existant ».
Kierkegaard affronte Hegel au sujet de la religion.
« La vie religieuse ne se laisse réduire à aucune formule ; il n’y a pas de science du christianisme.
Le christianisme n’est pas une religion objective.
C’est une religion du salut personnel, pour sa propre béatitude éternelle ».
« Le christianisme ne saurait être ramené à une philosophie ».
Dans les Miettes philosophiques, il dit ; « Dieu n’est pas un nom, mais un concept ; peut-être ce rapport absolu vient-il de ce que son essence implique l’existence ».
Dans cette phrase, le philosophe se réfère à Spinoza !
Il nous dit ; « Dieu ne pense pas, il est éternel ».
« L’homme pense et existe, et l’existence sépare la pensée de l’être ; elle les tient séparés l’un de l’autre dans la succession ».
L’idée centrale de Kierkegaard est qu’on ne peut construire un système de l’existence : l’existence peut être un système pour Dieu qui comprend parce qu’il la pose, mais il ne saurait en être de même pour un penseur existant qui, étant lui-même dans l’existence, ne saurait se placer en même temps hors d’elle afin de pouvoir la dominer.
La doctrine de Kierkegaard jette les bases d’un nouveau dans l’ontologie qui trouvera son aboutissement dans l’existentialisme de Heidegger et Sartre.
Kierkegaard dit ; « Le principe du mal dans le monde, c’est pourtant la foule et les bavardages creux… ».
« Ma thèse c’est que la subjectivité, intériorité est la vérité. Elle a été pour moi capitale pour résoudre le problème du christianisme, et c’est aussi pour cela que j’ai cru devoir rechercher une certaine tendance dans mes ouvrages… ».
Kierkegaard mit en garde ses contemporains sur la route dans laquelle ils s’engagent fascinés par les chimères d’une prétendue puissance de la pensée objective, qui s’exerce dans l’histoire de la philosophie ou théologie.
D’après Knud Ferlov, jusqu’à sa mort, le philosophe tiendra ainsi à voir clair en lui-même, à scruter ses énigmes, à se comprendre en grandissant et héroïsant, en rabaissant et avilissant les multiples traits du Moi le plus épars qu’aient connu les littératures protestants du Nord.
Le Post-Scriptum présente un intérêt exceptionnel pour l’étude de la pensée de Kierkegaard ; parce qu’il constitue son œuvre le plus explicite, et aussi le reconnaissant qu’il est l’auteur de livres publiés sous des pseudonymes.
Kierkegaard a influence Martin Heidegger et une partie de la doctrine de Ludwig Wittgenstein.
Gilles Deleuze présente Kierkegaard comme un philosophe de la différence et de la répétition.