Didier Jacques — Parcours, gestes et figures
Autodidacte, Didier Jacques découvre la création en expérimentant. Ses premières approches passent par la gravure et l’aquarelle, mais c’est dans la liberté du faire qu’il apprend vraiment. Avant de se consacrer pleinement à la peinture, il travaille plusieurs années en ébénisterie, puis dans le médico-social. Ce long parcours professionnel, marqué par le partage de pratiques artistiques, nourrit profondément sa vision de la création : un espace d’équilibre, d’expression et de rencontre.
Depuis toujours, Didier Jacques ressent le besoin de produire des formes, d’inventer, d’adapter, de chercher des solutions plastiques. Il y a une vingtaine d’années, il décide d’assumer cette nécessité comme un engagement artistique à part entière. Son rapport à la peinture évolue depuis par cycles et métamorphoses, porté par les lieux qu’il habite et les outils qu’il découvre. L’installation dans un véritable atelier lui permet de passer au très grand format, d’explorer la verticalité et d’affirmer un langage visuel singulier : des personnages colorés, aux contours noirs épais, où la couleur, la matière et le trait s’équilibrent dans une tension vibrante.
Ses influences sont multiples et souvent indirectes. Enfant, c'est une culture visuelle issue du quotidien, populaire, qui l’a d’abord nourri. Adolescent dans les années 1970, il découvre l’art urbain et la bande dessinée : une esthétique accessible, directe, énergique. Keith Haring, Jean-Michel Basquiat. Plus tard la Figuration libre, Robert Combas, Hervé Di Rosa, mais aussi l’art moderne et l’expressionnisme abstrait, jalonnent son parcours de regard. Plus récemment, il s’intéresse au travail d’Ernest Pignon-Ernest, de Pierre Soulages, ou de Sylvain Corentin, qui accompagnent son imaginaire. Pourtant, Didier JACQUES reste un artiste d’atelier, un explorateur solitaire, qui fabrique son univers à distance des courants et des réseaux et des galeries.
Aujourd’hui, il peint et découpe de grandes planches de bois massif. Le bois est pour lui un matériau vivant, accessible, qui garde la mémoire de la main et des fibres. Chaque planche devient une figure debout, un être à échelle humaine qui dialogue avec le spectateur. Le dessin, la découpe et la peinture s’y enchaînent : d’abord la craie, puis le trait noir, la couleur, le blanc, et enfin ces lignes de points lumineux qui rythment la surface. Ces points évoquent à la fois la couture, le lien, la vibration, le mouvement musical.
La couleur vient de la vie quotidienne autant que de la mémoire des gestes populaires — comme ces marins qui peignaient les volets de leur maison avec la peinture de leurs bateaux. Didier utilise de la peinture à bâtiment, dense, couvrante, directe. Les teintes sont franches, les contrastes forts, la lumière omniprésente. Les aplats se combinent à la texture du bois, et l’ensemble respire une énergie à la fois simple et profonde, ancrée dans le réel.
Ses œuvres dialoguent entre elles, se répondent dans la maison-atelier qu’il habite maintenant à L’Orbrie, en lisière de forêt. Là, dans un lieu à la fois intime et ouvert sur la nature, il peint, découpe, observe, reprend des visages anciens pour les réinscrire dans de nouveaux corps. Son travail n’est pas figé : il avance lentement, librement, au rythme du quotidien, comme une suite de présences en transformation.
« Peut-être qu’aujourd’hui, dit-il, la peinture est simplement un moyen de faire exister ces personnages. »
Des présences debout, lumineuses, à taille humaine — des visages qui nous regardent et continuent de nous parler, longtemps après.
contact: didierjacques6@gmail.com