Quelques décisions de justice

Christophe BUFFET Avocat

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La loi s'applique à une vente de chalets en kit installés par le vendeur

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 19 octobre 1998), que, par un contrat intitulé contrat de vente du 23 mars 1992, M. X... a chargé la société Etablissements Léon Cuny (société Cuny) de la construction d'un chalet en bois massif d'un certain modèle sur un terrain lui appartenant ; qu'alléguant que cette convention était un contrat de construction de maison individuelle et que la société Cuny devait assurer le montage des éléments en bois qu'elle avait livrés, M. X... a, après expertise, assigné cette société en exécution du contrat ;

Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que l'article 1er du contrat précise que la nature et la consistance des travaux sont définis dans le devis descriptif qui lui est joint, que ce devis et le devis estimatif qui y est également annexé, portent, réserve faite de certains travaux de gros oeuvre et de second oeuvre, sur un chalet " en prêt à monter, les différents éléments étant rendus sur le terrain " de M. X... et qu'il ressort tant des courriers échangés entre les parties postérieurement à la conclusion du contrat que du rapport d'expertise que, lors de la signature de ce contrat, les parties se sont entendues non sur un contrat de construction classique mais sur un contrat de vente prévoyant la livraison " en kit " des éléments nécessaires à la construction d'un chalet et que la société Cuny, si elle a vendu un tel chalet, fourni les plans d'assemblage et assisté le client dans ses démarches administratives, n'a pas pour autant entendu assurer la construction de celui-ci ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté, par motifs adoptés, que la société Cuny s'était contractuellement engagée à procéder à la construction d'un chalet pour un certain prix aux termes d'un document correspondant à un contrat de construction de maison individuelle et que le contrat prévoyait dans son article 2.2 que ses indications et stipulations devaient prévaloir sur toute autre pièce contractuelle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 octobre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar.

Un exemple de fraude par un contrat de maîtrise d'oeuvre

Attendu que la société Home 67 fait grief à l'arrêt attaqué (Colmar, 1er mars 1989) d'avoir annulé le contrat qu'elle avait conclu le 21 janvier 1985 avec les époux X... et rejeté la demande en paiement des indemnités convenues, alors, selon le moyen, " 1°) que le contrat litigieux signé par les parties contenait des dispositions claires caractéristiques du contrat de maître d'oeuvre ; qu'en décidant néanmoins de requalifier ce contrat en contrat de construction de maison individuelle pour le soumettre au régime des articles L. 231-1 et L. 261-1 du Code de la construction et de l'habitation afin de l'annuler, la cour d'appel a dénaturé le contrat litigieux et violé l'article 1134 du Code civil ; 2°) que la cour d'appel a constaté, d'une part, que l'adaptation du plan projeté conformément aux desiderata exprimés par les époux X... avait été réalisée ; qu'il s'en suivait que, même si cette adaptation pouvait être estimée insignifiante aux yeux des juges, elle n'en était pas moins réelle et admise dans son principe ; que, d'autre part, la cour d'appel a constaté, par motifs adoptés du jugement confirmé, " qu'il n'est pas établi des liens systématiques et étroits entre la société Home 67 et la société Franck ", vendeur potentiel de terrains ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 231-1 et suivants du Code de la construction et de l'habitation et subsidiairement l'article L. 261 du même Code, et, en toute hypothèse, par refus d'application, l'article 1779 du Code civil ; 3°) que la cour d'appel ne pouvait considérer que le prix proposé par le contrat imposait aux époux X... de recourir aux seules entreprises avec lesquelles la société Home 67 avait l'habitude de traiter sans rechercher si, en fait, ce recours avait été effectivement impossible ; qu'en négligeant d'effectuer cette recherche, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 231-1 et suivants du Code de la construction et de l'habitation " ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'adaptation du plan fourni par la société Home 67 n'était pas de nature à faire perdre à ce plan son caractère préétabli et que cette fourniture du plan permettait de considérer la clause du contrat accordant au maître de l'ouvrage le choix des entrepreneurs comme purement formelle, le prix proposé par cette société imposant aux époux X... de recourir aux seules entreprises avec lesquelles elle avait l'habitude de traiter et les conditions qui ont entouré la conclusion du contrat démontrant que les époux X... ne connaissaient que la société Home 67, la cour d'appel, qui a, à bon droit, retenu la qualification de contrat de construction d'une maison individuelle, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

Interdiction des paliers intermédiaires

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 24 mai 1993), que Mme X..., ayant conclu, le 10 février 1990, avec la société Archibat construction, un contrat de construction de maison individuelle au prix de 2 490 600 francs, et ayant effectué, à la date où les travaux ont été interrompus, des versements successifs d'un montant total de 1 345 509 francs qu'elle estimait supérieur au plafond légalement prévu, a obtenu, par ordonnance sur requête, l'autorisation de pratiquer à concurrence d'une certaine somme une saisie-arrêt sur un compte bancaire de ce constructeur ; que la société Archibat construction a assigné le maître de l'ouvrage en rétractation de cette ordonnance ;

Attendu que la société Archibat construction fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande, alors, selon le moyen, 1° qu'en se décidant, par référence à l'intention du législateur, résultant de la prescription de l'article R. 231-15 du Code de la construction, que serait proscrit le règlement de paiements intermédiaires et que devrait être tenu en échec le plan des paiements stipulé par le contrat de construction d'une maison individuelle régissant les parties, lequel fixait à 40 % le montant cumulé au stade du plancher bas et du rez-de-chaussée et à 45 % à la mise hors d'eau, soit 1 120 770 francs, la cour d'appel a tranché une difficulté sérieuse et méconnu les limites de sa compétence en violation de l'article 808 du nouveau Code de procédure civile ; 2° qu'aux termes de l'article R. 231-15 du Code de la construction, qui a été violé, le règlement de paiements intermédiaires, conformément au plan de paiements du contrat de construction intermédiaires, est licite, à la condition de ne pas excéder les plafonds fixés par ce texte ; 3° que l'arrêt attaqué, qui a confirmé une ordonnance de référé prescrivant une expertise à l'effet, notamment, de déterminer l'état d'avancement des travaux, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article R. 231-15 du Code de la construction ;

Mais attendu qu'ayant relevé, à bon droit, qu'en l'absence de garantie extrinsèque l'article R. 231-15 du Code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable au contrat, ne permettait pas de versements intermédiaires contractuels autres que ceux légalement prévus, même s'ils ne dépassaient pas le plafond des paiements autorisés, la cour d'appel qui, dans les limites de sa saisine, devait statuer sur l'existence d'un principe certain de créance sans être tenue par les conditions prévues à l'article 808 du nouveau Code de procédure civile, et qui a souverainement apprécié l'opportunité d'ordonner une mesure d'instruction, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

Responsabilité de la banque qui n'a pas vérifié l'existence de l'attestation de garantie de livraison

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en 1994, les époux X... ont conclu, avec la Société foncière et immobilière méditerranéenne "Sofim" (la société SOFIM), un contrat portant sur la construction d'une maison individuelle dont le financement était assuré par un prêt de 400 000 francs qu'ils avaient obtenu auprès de la Caisse d'aide sociale de l'Education nationale "CASDEN Banque Populaire" (la CASDEN) et dont la bonne fin devait être assurée au moyen d'une garantie de livraison à fournir par la Compagnie européenne de garantie immobilière ; que le constructeur, depuis lors en procédure collective, qui s'était fait remettre une grande partie des fonds sur présentation de fausses situations de travaux et qui n'avait pas contracté la garantie de livraison prévue, ayant abandonné le chantier en cours d'exécution, les époux X..., qui se voyaient dans l'obligation de supporter le coût d'achèvement de la construction, ont engagé une action en responsabilité contre la Casden et la Compagnie européenne de garantie immobilière, reprochant à la première d'avoir failli aux obligations découlant de l'article L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation en débloquant les fonds sans vérifier l'existence d'une garantie de livraison et à la deuxième d'avoir délivré un document dont l'intitulé pouvait laisser supposer qu'il constituait bien l'attestation de garantie exigée par la loi ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté les demandes qu'ils formaient contre la Compagnie européenne de garantie immobilière, alors, selon le moyen, que l'appellation même "d'attestation de garantie" retenue par la cour d'appel démontre l'ambiguïté du document litigieux ; qu'en l'état de cette affirmation dénuée de toute portée, l'arrêt est entaché 1 ) d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile 2 ) d'une violation par refus d'application de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que, sous couvert de griefs non fondés de défaut de motifs et de violation de la loi, le pourvoi ne tend qu'à remettre en cause devant la Cour de Cassation les éléments de preuve qui ont été souverainement appréciés par les juges du fond ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 1142 et 1147 du Code civil ;

Attendu que pour rejeter les demandes formées par les époux X... contre la CASDEN, l'arrêt relève que la responsabilité du banquier ne peut être recherchée que sur le fondement des articles L. 231-10 et suivants du Code de la construction et de l'habitation lequel ne prévoit de sanction contre le prêteur, en cas de défaillance du constructeur, que lorsque les versements excèdent les seuils légaux si ces derniers sont fondés sur l'exécution d'une clause irrégulière du contrat, ce qui n'était pas le cas en l'espèce ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que toute obligation de faire se résout en dommages-intérêts et que l'article L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation, n'exclut dans aucune de ses dispositions de sanctionner, sur le fondement des règles du droit commun de la responsabilité civile, le manquement imputé à la CASDEN, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1147 du Code civil, ensemble l'article L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ;

Attendu que pour statuer comme elle a fait, la cour d'appel a encore retenu que compte tenu du caractère formel de l'intervention du prêteur, sa responsabilité ne saurait être recherchée dans le cadre d'une vérification de l'attestation de garantie de livraison qui lui avait été communiquée ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors qu'aux termes de l'article L. 231-10 précité le prêteur a l'obligation de ne débloquer les fonds qu'après avoir vérifié que le document remis constitue l'attestation de garantie dont la communication est prévue par ce texte, la cour d'appel a encore violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief ;

CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes formées par les époux X... contre la Caisse d'aide sociale de l'Education nationale "CASDEN Banque populaire", l'arrêt rendu le 11 mai 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne la Caisse d'aide sociale de l'Education nationale "CASDEN Banque populaire" aux dépens à l'exception de ceux afférents à la mise en cause de la Compagnie européenne de garantie immobilière qui resteront à la charge des époux X... ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande présentée par la Caisse d'aide sociale de l'Education nationale "CASDEN Banque Populaire" ; condamne les époux X... à payer à la Compagnie européenne de garantie immobilière la somme de 1 800 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre deux mille trois.

Pas de réduction des pénalités de retard

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles 15 mai 2006), que les époux X... ont conclu avec la société ML conception et réalisation (la société ML) un contrat de construction d'une maison individuelle, avec garantie de livraison à prix et délais convenus souscrite auprès de la société AIOI Insurance company of Europe (le garant) ; que la société ML ayant été placée en liquidation judiciaire, la maison a été achevée avec retard par le garant qui a assigné les époux X... en paiement d'un solde du prix ; que ceux-ci ont contesté le montant des pénalités de retard retenu à la charge du garant ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 231-2, L. 231-6 et R. 231-14 du code de la construction et de l'habitation ;

Attendu qu'en cas de retard de livraison, les pénalités prévues au I de l'article L. 231-2 ne peuvent être fixées à un montant inférieur à 1/3000° du prix convenu par jour de retard ;

Attendu que pour condamner les époux X... à payer au garant de livraison à prix et délais convenus une certaine somme au titre d'un solde dû sur le prix de construction de leur maison individuelle, l'arrêt retient que, si l'article L. 231-2 impose un montant journalier minimum des pénalités de retard, il n'interdit pas aux parties de convenir que les pénalités seront dues par jour ouvrable de retard et que les stipulations contractuelles, prévoyant que la pénalité contractuelle de 1/3000° par jour ouvrable de retard sera due par le constructeur à compter de l'expiration du délai de livraison, doivent s'appliquer ;

Qu'en limitant l'indemnisation des époux X... pour le retard subi alors qu'en matière de pénalités de retard, les contrats de construction de maisons individuelles sur plan proposé ne peuvent prévoir une indemnisation du maître de l'ouvrage inférieure au minimum prévu par la loi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mai 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société AIOI Motor And General Insurance company of Europe limited, venant aux droits de la société AIOI Insurance Company of Europe Limited, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société AIOI Motor And General Insurance company of Europe limited, venant aux droits de la société AIOI Insurance company of Europe limited à payer aux époux X... la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du sept novembre deux mille sept par M. Cachelot, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, conformément à l'article 452 du nouveau code de procédure civile.