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Juridiction du seigneur de Champtoceaux, fonctionnement des cours de justice, intervention de l'évêque d'Angers, Païen [de Montrevault] est seigneur de Champtoceaux
Acte daté de 1118, à l'occasion du règlement d'un procès. L'acte offre une rétrospective des évènements jusqu'au dénouement. Nous numérotons les "temps" pour faciliter la lecture.
Temps 1. Le chevalier Matho, avant son mariage, fait un don aux moines de Saint-Martin de Liré, avec l'assentiment de son frère et de sa soeur, devant de nombreux témoins
Temps 2. Le don a été exécuté comme prévu, une partie du vivant de Matho, un partie après son décès
Temps 3. La veuve de Matho, Ivie, remariée à Gillaume Pautonario, intente un procès pour contester le don.
Temps 4. Jugement à la cour de Païen, seigneur de Champtoceaux, qui renvoie au jugement de l'évêque d'Angers. Rolland [de Liré?] est défenseur des moines.
Temps 5. Les protagonistes se rendent à Chemillé, où se trouve l'évêque d'Angers. Guillaume Pautonario demande un report du procès au lendemain en présence de sa femme, à Liré, car il espère arriver à un accord pécuniaire avec les moines;
Temps 6. à Liré. Guillaume Pautonario et sa femme Ivie n'obtiennent pas d'accord financier avec les moines et confirment finalement les dons faits par Matho. Repas en commun et chacun repart en paix.
Datation : 1118 (texte)
Angers, Archives départementales du Maine-et-Loire 41 H 13
[Temps 1]
Que les fils de la Sainte Église catholique sachent, tant pour le présent que pour le futur, que : un certain chevalier nommé Matho, avant de se marier, a donné pour Dieu, à Sainte-Marie et aux moines mourants de Saint-Martin de Liré, trois dîmes venant des terres de borderies, qu'il possédait par droit héréditaire.
Cependant à condition que, de son vivant, les moines en aient un tiers de dîme et qu'après son décès, tout reviendrait en possession des moines.
Ensuite, les moines ont donné, par charité, 30 sols à Matho. [A condition aussi] qu'en leur concédant et en affirmant fermement cela, il n'envisagerait nullement de leur arracher la dîme [dont on vient de parler], par vengeance, au cas où un jour il chercherait à reprendre quelque chose aux moines de Liré qu'ils refuseraient de lui donner.
Ont concédé cela : Guillaume, le frère de Matho, qui était alors clerc et qui sera nommé prêtre ensuite ; Dometa, leur sœur, pour son salut et celui de ses parents.
Ont été témoins de ces événements : Aldemannus, prêtre et Guillaume, diacre fils de Rengard
Des laïcs aussi : Umbaldus et Alderius et Judicalis de Liré, Rolland aussi, Mauricius, plus Gestinus et Geoffroy ses fils, qui furent garants de ce don pour Matho auprès des moines, à savoir : si, un jour, Matho tentait d'arracher violemment cette dîme aux moines, ceux-ci assureraient la défense des moines et les aideraient de toutes les manières contre Matho.
[Temps 2]
Alors, les moines ont reçu le tiers de la dîme du vivant de Matho, et la totalité lorsqu'il fut décédé, comme cela avait été concédé, sans qu'ils reçoivent de contestation pendant longtemps.
[Temps 3]
Mais par la suite une femme du nom de Ivia, qui était la femme de Matho déjà décédé, mais qui était liée [depuis], par le mariage à un autre homme, nommé Guillaume Pautonerio, fit un procès tant pour elle que pour son homme Guillaume, à propos de la dîme susdite, que son homme Matho avait donnée aux moines avant que celle-ci ne devienne sa femme.
[Temps 4]
C'est pourquoi les moines ne pouvant se dérober à cette [réclamation], à la fin, se rassemblèrent avec le seigneur Rolland leur défenseur. Païen de Castrum Celsum, qui était alors suzerain de Castrum Celsum, les convoqua devant sa cour de justice.
Évidemment, dans cette cour, chacun des deux voulait alors livrer combat pour défendre sa cause et les témoins des moines se présentaient au milieu , c'est-à-dire :
le prêtre Aldemannus et le diacre Guillaume, mais aussi des laïcs , Umbaldus et Alderius, qui étaient tous prêts à apporter la preuve qu'ils avaient entendu et vu que Matho avait concédé à perpétuité aux moines de Saint-Martin cette dîme à propos de laquelle il y avait eu plainte.
A la fin, les barons qui avaient débattu décidèrent que le prêtre et le diacre qui avaient été témoins de ces choses devraient aller à la cour de l'évêque d'Angers, et selon ce que l'évêque jugerait, ils prouveraient que ce qu'ils affirmaient en avait été ainsi.
[Temps 5]
Ce qui fut fait : le moine Guillaume qui était alors le prieur de Liré, le prêtre Guillaume, frère de Matho, Aldemannus aussi prêtre et Guillaume le diacre et aussi de l'autre partie Guillaume Pautonerius et ses assistants se rendirent au château de Chemillé, où l'évêque était alors par hasard.
Alors, la cour épiscopale décida que deux des prêtres prouvent [témoignent] par une démonstration claire ce qu'ils avaient vu au sujet de cette dîme susdite. Alors, le diacre confirma par un serment prononcé sur le texte des Évangiles. Ensuite, deux des laïcs de ceux qui avaient témoigné firent un serment sur les psaumes.
Ainsi, la sentence fut donnée par l'évêque, tous ceux que nous avons nommés auparavant sur Castrum Celsum sont venus pour la seconde fois au jugement.
Et comme le diacre Guillaume était prêt de jurer sur le texte [de l'Évangile], les laïcs Umbaldus et Alderius sur les psaumes, à l'approche de la sentence de l'évêque, alors qu'ils étaient prêts à jurer et que déjà deux pièces d'argent étaient déposées devant les reliques, Guillaume Pautonerius, espérant qu'une somme d'argent serait bien reçue [finirait par être acceptée] par les moines, interrogea le seigneur Rolland, défenseur des moines, afin qu'il reporte les serments au jour suivant ; et que les serments soient prononcés alors à Liré , en présence de sa femme.
[Temps 6]
Dans ces circonstances, comme tous ceux dont nous avons parlé étaient réunis à Liré le lendemain et que les témoins des moines voulaient prêter leurs serments une nouvelle fois sans rétractation, à la fin, Guillaume Pauloterius, et Iva sa femme, voyant qu'il ne pouvaient rien obtenir des moines par l'argent, ont abandonné, aux yeux de tous ceux qui étaient présents, toute réclamation de la dîme ; [contestation que les moines avaient opposé par tous les moyens] et ont concédé une bonne fois pour toutes cette dîme aux moines de Saint-Martin, à perpétuité, comme ce qu'avait donné Matho.
Alors le moine Guillaume, prieur de Liré, fut investi très scrupuleusement de ce bénéfice par le Grand Monastère. Ils ont tous pris un repas ensemble avec le moine et ainsi, sont repartis dans la paix.
Nous notons ci-dessous les témoins de ces événements : -Guillaume, moine, prieur de Liré -Alaric, chapelain de son église -Rolland et Olivier son frère -Radulfe d'Oudon -Seserium d'Ancenis -Ivon Asinum de Montrevault (Monte Rebelli) -Umbald, Alderius, le diacre Guillaume fils de Rengard
Et d'autres du parti adverse : -Guillaume Pautonerius et sa femme -Radulfe fils d'Hugon -Rainald Porchet et beaucoup d'autres.
Cet acte fut fait en l'année de l'Incarnation du Seigneur 1118, sous le règne de Louis roi des Francs, de Foulques, comte des Angevins et Rainald, évêque, sous la loi du Dieu tout-puissant, qui est trois en une personne, pour des siècles des siècles. Amen.
[Temps 1]
Noverint sanctae catholicae ecclesiae filii, tam presentes quam postmodum futuri, quod quidam miles nomine Matho, antequam uxorem duceret, dedit Deo et sanctae Mariae monaschisque beati Martini apud Lireium morantibus decimam trium borderiatarum terrae quam jure heriditario possidebat ;
ita tamen ut eo vivente terciam partem decimae monachi haberent, post decessum vero ejus tota in dominio monachorum devineret.
Dederunt igitur monachi, pro caritate, XXX. Solidos Mathoni ; ipso etiam eis concedente et firmiter affirmante ut, si ipse aliquando a monachis Lireii aliquid peteret quod ipsi ei dare tenuerent, decimam quam prediximus pro vindicta eis auferre nunquam presumeret .
Hoc autem concesserunt Willelmus frater Mathonis, tunc clericus qui postea presbiter factus est, et Dometa soror eorum, ob salutem suam et parentum suorum.
Hujus rei testes sunt : Aldemannus presbiter et Willelmus diaconus filius Rengardis ;
de laicis autem : Umbaldus et Alderius et Judicalis de Lireio, Rollandus etiam, Mauricius et Gestinus et Goffridus illius filii ; qui et ipsi pro Mathone fidejussores monachis fuerunt de hoc scilicet quod, si aliquando Matho ipse decimam monachis violenter auferre machinaretur, ipsi ad opus monachorum eam, defenderent et eos omnomodis contra Mathonem adjuverent.
[Temps 2]
Igitur Mathone vivente terciam partem decimae monachi habuerunt, eo autem defuncto totam, sicut ipse concesserat, absque calumnia multo tempore possiderunt.
[Temps 3]
Postea vero quaedam mulier nomine Ivia, quae uxor Mathonis extiterat sed eo obeunte jam alii viro, Willelmo scilicet Pautonerio, in conjugio capulata erat, de supradicta decima, quam Matho vir suus antequam eam duvisset uxorem monachis dederat, tam per se quam per virum suum Willelmum calumpniam fecit.
[Temps 4]
Monachi itaque tandem aliquando, judicium subterfugere non valentes, cum domno Rollando defensore eorum. Castrum Celsum in curia Pagani, qui tunc Castri Celsi princeps erat, convenerunt ;
In qua videlicet curia cum utruique de causa sua decertarent et monachi testes suos in medium producerent :
Aldemannum videlicet presbiterum et Willelmum diaconum, de laicis vero : Umbaldum et Alderium, qui omnes probare parati erant se vidisse et audisse quod Matho decimam illam de qua querela habebatur monachis sancti Martini in perpetuum concessisset ;
ad ultimum barones qui aderant decreverunt quod presbiter et diaconus, qui hujus reitestes erant, in curia episcopi Andegavensis ire deberent et, sicut episcopus judicaret, rem quam affirmabant ita esse probarent.
[Temps 5]
Quod et factum est, nam Willelmus monachus, qui tunc apud Lireium prepositus erat, et Willelmus presbiter, frater Mathonis, Aldemannus etiam presbiter et Willelmus diaconus, ex altera vero parte Willelmus Pautonerius et coadjutores sui Chimiliacum castrum, sibi tunc forte erat episcopus, perrexerunt.
Decrevit igitur curia episcopalis quod duo presbiteri plano sermone quae ipsi viderant de predicta decima testificarentur, diaconus autem super textum evangeliorum sacramento firmaret ; de laicis vero duo, super psalterium, de his quae testificabantur jusjurandum facerent.
Data itaque ab episcopo sententia, hii omnes quos supra nominavimus apud Castrum Celsum iterum ad judicium convenerunt
Cumque Willelmus diaconus super textum, laici vero Umbaldus et Alderiius super psalterium, juxta sententiam episcopi, jurare parati essent et duos etiam nummos jam ad reliquias posuissent, Guillelmus Pautonerius, sperans se a monachis aliquam pecuniam accepturum, domnum Rollannum defensorem monachorum, rogavit ut in diem erastimum sacramenta respectaret et tunc, uxore sua presente, apud Lireium fierent.
[Temps 6]
Cum igitur die erastina omnes hiis quis prediximus apus Lireium convenissent et testes monachorum iterum sacramenta jurare absque retractione vellent, tandem aliquando Willelmus Pautonerius et Iva uxor ejus, videntes se a monachis nichil pecuniae posse extorquere, coram omnibus qui aderant totam calumpniam decimae quam monachis facerant omnomodis finierunt, et eadem decimam, sicut Matho dederat, beato Martino monachisque ejus in perpetuum habendam concesserunt.
Willelmus autem monachus, Lireii prepositus, de beneficio majoris monasterii eos diligentissime revistivit : quo facto simul omnes eum monacho manducaverunt, et sic ad propria in pace recesserunt.
Hujus rei testes subnotavimus : Willelmum monachum Lireii prepositum, Alaricum ejusdem ecclesiae capellanum, Rollannum et Oliverium fratrem ejus, Radulfum d’Oldon, Selserium de Anceniso, Ivonem Asenum de Monte Rebelli, Umbaldum, Alderium, Willelmum diaconum filium Rengardis ;
ex altera vero parte : ipse Willelmus Pautonerius et uxor ejus, Radulfue filius Hugonis, Rainaldus Porchet et alii multi.
Haec igitur facta sunt anno ab incarnatione Domini MCXVIII, regnante Ludevico Francorum rege, Fulcone Andegevensium comite et Rainaldo episcopo, disponente omnia Deo omnipotente, qui est trinus et unus per infinita secula seculorum. Amen.
Temps 1
Matho
Guillaume, le frère de Matho, clerc puis prêtre
Dometa, leur sœur
Les moines de Saint-Martin de Liré
Témoins religieux
Aldemannus, prêtre
Guillaume, diacre fils de Rengard
Témoins laîcs
Umbaldus
Alderius
Judicalis de Liré
Rolland
Mauricius
Gestinus et Geoffroy, fils de Mauricius
Temps 3
Ivia, veuve de Matho
Guillaume Pautonerio, mari de Ivia
Temps 4
le seigneur Rolland, défenseur des moines (est-ce le même que Temps 1 n°10?)
Païen ou Péan (Paganus), seigneur Castrum Celsum (Champtoceaux)
Les mêmes témoins religieux et les deux des témoins laïcs du Temps 1 n° 5 à 8: Ademannus prêtre, Guillaume diacre, Umbaldus et Alderius
Temps 5
L'évêque d'Angers (Rainald ou Renaud)
Le frère de Matho (Guillaume, prêtre, cf Temps 1 n°2)
Aldemannus, prêtre et Guillaume, diacre (cf Temps 1 n° 5 et 6)
Guillaume Pontonerio (Temps 3 n°2)
Les laïcs Umbaldus et Alderius (Temps 1 n° 7 et 8)
le seigneur Rolland (cf Temps 4 n°1)
Temps 6
Ivia et Guillaume Pautonerio (cf Temps 3)
Témoins du côté des moines
Guillaume, moine, prieur de Liré
Alaric, chapelain de l'église de Liré
Rolland et son frère Olivier
Radulfe d'Oudon
Seserium d'Ancenis
Ivon Asinum de Montrevault
Umbald, Aldarius, le diacre Guillaume fils de Rengard (cf Temps 1 n° 7, 8, 6)
Témoins du parti adverse
Guillaume Pautonerius et sa femme (cf Temps 3)
Radulfe fils d'Hugon
Rainald Porchet et beaucoup d'autres.
Personnes régnantes
Louis roi des Francs
de Foulques, comte des Angevins e
Rainald, évêque, d'Angers (ou Renaud)
Liré
Castrum Celsum (Champtoceaux)
Angers
Château de Chemillé
Oudon, Ancenis, Montrevault (dans les noms des personnes)
Traduction française : Jean-Luc Delalande. Basé sur la transcription de Marchegay. Merci de demander l'autorisation à l'auteur pour toute réutilisation.
Transcription (latin)
Marchegay, Paul, « Recherches sur les cartulaires d'Anjou », dans Archives d'Anjou. Recueil de documents et mémoires inédits sur cette province, t. 2, Angers, 1853, p. 21-23
Egalement Acte n°3579 dans chartes originales antérieures à 1121 conservées en France. Cédric GIRAUD, Jean-Baptiste RENAUD et Benoît -Michel TOCK, édit. ,Nancy ; Centre de Médiévistique Jean Schneider, éds électronique : Orléans : Institut de Recherches et d’Histoire des Textes.2010 (Telma). Charte Artem/CMJS n+359. Date de mise à jour : 29/03/12. En ligne : http://telma.irht.cnrs.fr/outils/originaux/charte3579/
Vue numérisé de la copie du 15è-16ème s.: Cartulaire du prieuré Notre-Dame de Liré, dépendant de l'abbaye de Marmoutier (vers 1090-1478, rédigé fin XVe siècle-début XVIe siècle). Archives départementales du Maine-et-Loire, 41 H 13. images sous licence ouverte 2.0 ETALAB. Il ne s'agit pas des chartes originales mais de reproductions ultérieures. A consulter sur le site de l'IRHT https://arca.irht.cnrs.fr/ark:/63955/md440r969b4q vues 19 à 23
Eléments de contexte : Amis du vieux Châteauceaux
Datation : texte
En date de 1118
Louis VI le Gros est roi de France,
Foulques V est comte d’Anjou
Païen (ou Péan) de Montrevault est suzerain de Rolland de Liré. Il dirige la seigneurie de Castrum Celsum
Renaud de Martigné est évêque d’Angers de 1102 à 1125. Sa présence est ici exceptionnelle car la seigneurie dépendait du diocèse de Nantes.
Pourquoi est-ce l'évêque d'Angers ? Sur la juridiction des évêques de Nantes et d'Angers
Renaud de Martigné est évêque d’Angers de 1102 à 1125. Sa présence est ici exceptionnelle car la seigneurie de Champtoceaux dépendait du diocèse de Nantes. Alors pourquoi PaÏen, seigneur de Champtoceaux, l’a-t-il sollicité en 1118 ?
"par hasard"
Le texte latin utilise le terme « forte », c’est à dire : « par hasard ».
[ils]... se rendirent au château de Chemillé, où l'évêque était alors par hasard.
... Chimiliacum castrum, sibi tunc forte erat episcopus, perrexerunt.
[carte]
la seigneurie de Champtoceaux dépendait de l'évêque de Nantes
Teddy Veron (2007) précise :
« L’important recul du diocèse de Nantes ne s’arrêta qu’aux limites des seigneuries de Champtoceaux et de Montfaucon, situées à l’ouest des Mauges. Celles-ci restèrent intégralement dans la juridiction des évêques de Nantes en dépit de leur intégration politique à l’Anjou. Certes, l’épiscopat angevin avait étendu quelque temps ses droits à Champtoceaux, comme le montre un jugement de l’évêque Renaud de Martigné, en 1118, à propos d’un litige qui opposaient les moines du prieuré de Liré [...] à des particuliers [...]. Cependant, cette intégration ne s’est pas pérennisée : dès 1125/1126 environ, l’évêque de Nantes manifeste son autorité dans cette zone. »
Pour obtenir une réponse plus satisfaisante, nous nous appuyons sur des éléments de la thèse de Brunterc’h (1984) concernant la régression de périmètre du diocèse de Nantes au XIe siècle :
« En 1118, un litige opposant les moines de Marmoutier établis à Liré et des particuliers est porté devant la curia de Païen de Montrevault, princeps de Champtoceaux. Les barons décidèrent que l’affaire serait soumise au jugement de l’évêque d’Angers, qui rendit effectivement la sentence. (Arch. Dép.Du Maine-et-Loire , 41H1).
Ce fait tend à prouver que l’autorité du prélat était reconnue dans toute l’étendue de la châtellenie de Champtoceaux.
Une bulle d’Innocent II [pape], datée du 8 janvier 1135 et inspirée de documents plus anciens, situe formellement dans le diocèse d’Angers Notre-Dame de Liré et Saint-Jean de Champtoceaux (Arch. Dép. Du Maine-et-Loire, cartulaire de Chemillé, 39H 11 fol. 62t°-66r° et plus spécialement fol. 64 v°).
On peut d’ailleurs constater a contrario que dans la charte du 31 mars 1115 par laquelle, Brice, évêque de Nantes, confirme aux moines de Marmoutier les biens qu’ils possèdent dans son diocèse, il n’est question ni de Liré, ni de Champtoceaux... Or, dès 1125/1126, Brice et son archidiacre Tiso, assistent à Champtoceaux à la confirmation d’un don en faveur de Marmoutier ... C’est le début d’une nouvelle pénétration des évêques de Nantes dans ce secteur.. »
Sur les procédures judiciaires
On pourra consulter les ouvrages de Bruno Lemesle et Claire Lamy sur les procédures judiciaires du Moyen Age. Ainsi Claire Lamy a mentionné un autre acte (ADML 41H1-5), de 1221, entre Liré et Chemillé au sujet de litiges. L’évêque d’Angers intervient pour débloquer ce litige même si cela devrait revenir à l’évêque de Nantes.
Cet article détaille les procédures mises en œuvre à cette époque
in LAMY C. « Genèse et enjeux d’un accord seigneurial à Chemillé en Anjou au temps de la reconquête capétienne (juillet 1204) » in « Martin Aurell, F. Boutoulle, « Les seigneurs dans l’espace Plantagenêt (1150-1250) (en ligne)», Ausonius éditions. Université de Bordeaux, CNRS,2009, disponible sur internet : <http://books.openédition.org/ausonius.1964> ISBN : 978-2-35613-280-2. DOI : https//doi.org/10.4000/books.ausonius.1964
Ajouter? "Les assemblées de justice et les peines au XIè et XIè s. " et "l'avènement du jugement par la preuve". Delalande
avant l'avènement du jugement par la preuve
On a longtemps affirmé que l'ordalie était le mode résolution des conflits le plus fréquemment utilisé au XI° siècle. Bruno Lemesle produit un document de 1056 pour prouver que « l’ordalie était la preuve par excellence des moines tandis que le duel était celle des laïcs...L’Église répugne à la violence, au combat brutal, au sang versé. Sûrement ne souhaite-t-elle pas s’en remettre, pour les conflits où elle est impliquée, à l’incertitude d’un combat dans lequel la force et l’habileté des champions paraissent compter davantage que l’intervention divine. »
le jugement par la preuve
Progressivement, on va donner de l’importance davantage au serment prononcé solennellement devant l’assemblée. La fonction des témoins oculaires va être de plus en plus importante pour établir des preuves :
“La preuve est nécessaire dans un plaid car elle permet de justifier l'attribution du droit et du tort” mais “lorsqu'une partie défie l'autre en brandissant ses preuves, souvent en apportant ses témoins qui se disent prêts à subir l'épreuve du serment, voire l'ordalie, la preuve est dépendante de la partie. Ses éléments ne sont pas des preuves au sens moderne...mais elles sont reconnues comme telles par la société, à commencer par la partie adverse.: c'est par tout un jeu social que celle-ci choisit d'abandonner sa prétention ou, au contraire, à relever le défi. Mais les juges ne sont pas de purs arbitres"
Dans ce jugement, la réputation des témoins est importante (ce sont des « prud’hommes). Ils témoignent sous serment en touchant l’Évangile, livre sacré. La rédaction de ces procès dans des « notices » a été initiée par les moines et les clercs, familiers de la preuve écrite qui se conserve dans le temps. Cette mémoire écrite est conservées dans un cartulaire : elle n’est pas neutre et relève les arguments de la partie gagnante. Sa rédaction soignée, conservée, réutilisée en cas de non respect de la partie adverse a revêtu une grande importance car elle était une « mémoire vive », toujours réactualisée, permettant en procès d’apporter des preuves écrites du bon droit des moines - JL. Delalande
Pourquoi un seigneur du Petit- Montrevault dirige-t-il la seigneurie de Castrum Celsum ?
voir la partie "Pour aller plus loin" de la charte 9 de Champtoceaux