Octobre Rose, ses origines et ses controverses

article par Salomé Cadon

Le mois d’octobre a commencé, et en plus d’être synonyme d’automne, de feuilles orangées qui tombent, de pumpkin ice latte et d’Halloween, il est aussi le symbole d’une lutte, celle contre le cancer du sein. En effet, tout comme il existe le Dry January pour lutter contre l’alcoolisme ou le Movember pour lutter contre le cancer de la prostate, le mois d’octobre devient Octobre Rose. En cette année 2023, nous avons débuté la 29ème édition française, et cette opération a, depuis son origine, récolté plus de 4 millions d’euros. Cet évènement durant du 1er au 31 octobre se constitue de campagnes de sensibilisation, de dépistage contre le cancer du sein, d’évènements comme des marches et des courses caritatives, ou encore des monuments comme la tour Eiffel qui se pare de rose pour une soirée. Certaines marques, comme Naf Naf, Kusmi Tea, Aubade ou encore Nuxe mettent également à la vente des éditions exclusives de certains produits, dont une partie ou la totalité des bénéfices vont à la lutte contre le cancer du sein. Il est en effet utile de rappeler que ce cancer est la première cause de cancer avec décès chez la femme. Une femme sur deux risque d’être atteinte du cancer du sein dans sa vie, on compte environ 58 000 cas par an, dont 12 000 mortels, alors même que lorsque la maladie est détectée à temps, on compte 90% de chance de guérison après 5 ans.

Alors que la majorité d’entre nous connaissons, ou du moins avons entendu parler de ce mois de lutte, qu’en est-il de son origine ? On peut en effet se demander qui a eu l’idée, si la lutte contre le cancer du sein a été sa première motivation et comment le mouvement a pu prendre autant d’ampleur. Pour cela, remontons un peu dans le temps : il est d’abord important de noter que la prévention a été pendant longtemps secondaire, et ce depuis le début du développement de la médecine conventionnelle.  La Notion de prévention apparait dans la législation, dans le code de la Sécurité Sociale le 5 janvier 1988, et en 1998 dans le code de la Santé Publique. Ce n’est donc pas étonnant de voir que ce mouvement n’a pas commencé en France, mais aux Etats-Unis. En 1985, the American Cancer Society, en partenariat avec Imperial Chemical Industries (aujourd’hui AstraZeneca), organise une campagne pour sensibiliser au sujet du cancer du sein et proposer des dépistages, et ce durant le mois d’octobre, qui est alors nommé « Breast Cancer Awarness Month ». Cette opération était à la base surtout basée sur la communication, mais au fil du temps, différentes actions se sont développées.

Le symbole de la lutte, le ruban rose, va être inventé en 1991 par la marque de cosmétiques Esther Lauder, dont la vice-présidente Evelyne Lauder avait survécu à un cancer du sein quelques années auparavant, et par le magazine Self, et en 1992. Alexandra Renney, rédactrice en chef de Self, et E.Lauder fondent la Breast Cancer Research Foundation, qui a pour vocation de récolter des fonds pour la lutte contre le cancer du sein. En 1993, la marque Esther Lauder commercialise un rouge à lèvre dont la couleur est celle du ruban rose, et reverse les bénéfices à la fondation. Cette opération ramènera 120 000 $ à la fondation, auxquels il faut rajouter 780 000 $ de dons cette année-là. Il faudra attendre 1994 pour qu’Octobre Rose arrive en France : Esther Lauder s’allie au magazine Marie-Claire pour lancer l’association « Cancer du sein, parlons-en », devenu « Ruban Rose » depuis 2020. Cette association lève des fonds et les redistribue via des prix. Elle s’allie aussi avec différents organismes, comme la Ligue contre le cancer, pour organiser des évènements partout sur le territoire.

Malgré son image de bienfaisance, Octobre Rose connait certaines controverses. Certain.e.s accusent parfois l’évènement de se détourner de son objet, et d’être devenu seulement une opportunité de communications, certaines marques étant suspectées de faire du pink-washing. D’autres accusent l’évènement d’être instrumentalisée par l’industrie agro-alimentaire, pharmaceutique ou cosmétique, on se servirait d’Octobre Rose pour la vente de certains produits. Beaucoup avertissent que ce genre d’opérations de communications risquent d’anéantir l’efficacité du message. En effet, on constate une baisse des dépistages chaque année, la banalisation de ce genre d’opérations commerciales à l’occasion d’Octobre est suspectée d’en être en partie responsable. Certain.e.s militant.e.s demandent une vraie campagne d’information plutôt qu’une campagne de publicité, qui devrait être proposée toute l’année, et de façon réitérée. D’autres dénoncent la forme que prennent la majorité des campagnes, parlant de messages culpabilisants, infantilisants, visant le domaine de l’émotionnel, sous prétexte que la campagne serait destinée aux femmes.

Malgré ces petites controverses, il est tout de même important pour nous de vous rappeler de surveiller régulièrement l’apparence de votre poitrine, hommes comme femmes, tout le monde peut être concerné. Sous la douche ou en vous habillant n’hésitez pas à vérifier qu’il n’y a pas de petites boules dans le sein ou sous le bras, d’écoulement au niveau du téton, une asymétrie importante, ou une plaie quelconque. Au moindre doute, n’hésitez pas à consulter, ça sauve littéralement des vies !