Articles / Port de Bouc
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L'échouage du "Port de Bouc".
Pendant plusieurs années, au milieu du 20e siècle, le port du Légué accueille des pétroliers et/ou bitumiers (le Port Gentil, Gers, Port de Bouc, Fleurus…).
Le gazole et l’essence sont déchargés après le déversoir côté Plérin. Le bitume est déchargé près l’écluse dans une citerne de l’équipement.
Le "Port de Bouc" est l’un des plus connus, malheureusement. Ce bateau lancé en 1950 aux Pays Bas pour la Société d'Armement Fluvial & Maritime / Soflumar (1953-1979) et d’une longueur de 78 mètres a navigué en Manche pour alimenter les ports comme Caen, Cherbourg… en pétrole. Trop long pour le Légué, il est, en 1964, raccourci de 10 mètres et vient à partir de cette date, ravitailler le dépôt Shell du Légué.
Pour naviguer sur ce type de bateau, l’équipage devait être bien amariné ! En effet le bateau possède plusieurs cuves toutes équipées d’évents pour éviter les surpressions ; le pont est donc en permanence sous les effluves de gazole…
Le 17 novembre 1975 après plus d’une dizaine d’années à venir régulièrement au Légué, lors d’une entrée par mauvais temps (« vent de NO force 7, mer forte, houle déferlante avec creux importants) le bateau talonne avant la première bouée dite « bouée du Légué ». Ce talonnement provoque des avaries d’hélice et de gouvernail. Le Port de Bouc s’échoue à 5h30 hors des limites du chenal.
Il est à ce moment chargé de 1800 t de fuel. Le lendemain, la météo ne s’étant pas améliorée, le bateau casse ses mouillages et s’échoue, toujours hors du chenal mais plus sud. Une fissure s'est produite et le fuel commence à se répandre autour du navire. Le mardi, toujours échoué et plus ou moins secoué par la mer, le "Port de Bouc" voit ses fuites de cargaison augmenter. Un remorqueur, arrivé vers 17h, ne peut rien entreprendre du fait des conditions, et malgré les 80 tonnes de fuel pompées par des camions-citernes, la cargaison continue à se déverser lentement à la mer. Dans la nuit du mardi 18 au mercredi 19 novembre, 300 t de fuel sont à nouveau évacuées par les camions. Le "Port de Bouc" est déséchoué. Mercredi matin il regagne le port du Légué traîné par un remorqueur. Il est cependant trop tard pour éviter que ce qui s'est échappé à la mer ne vienne s'étaler sur le fond de l'Anse. Les filières sont touchées d'abord dès lundi soir ; puis mardi, mercredi, jeudi, le coefficient de marée augmentant, la nappe de gas-oil se répand et imprègne toute la végétation, la brûlant totalement par endroits. Les oiseaux qui hivernent par centaines en ce mois de novembre dans l'Anse, sont atteints à leur tour, soit par contact direct soit par empoisonnement alimentaire, car toute la faune marine des vasières est touchée.
Ramené au Havre en remorque, le bateau est déconstruit en décembre 1975
Année de lancement : 1950; L : 78 m raccourci à 68 m; Tanker de 1481 Tx; Lancé à Deest (Hollande); Société d’Armement Fluvial et Maritime (Soflumar); 1964 – Raccourci de 10 m pour pouvoir entrer au Légué
Le "Port Gentil", un sistership du "Port de Bouc", se retrouve échoué près de l'écluse sans doute dû à une arrivée tardive.
Lancé le 31 mars 1953 au chantier néerlandais Scheeps v.d.Werf (Deest, Pays-Bas) comme son prédécesseur, le citernier "Port Gentil" est livré le 25 juin1953 à l'armement havrais. Vendu en 1979 à la compagnie grecque Agroil One Shipping, il devient le "Mazal". Racheté en 1987 par Achilles Nav. Co (Sri Lanka), il prend le nom de "Lacerta", pas pour longtemps d'ailleurs car il est revendu dès l'année suivante à Petromar International (Saint Vincent & Grenadines) qui le renomme "Sun Shield".
Il arrive à Limassol en août 1988 et est plus ou moins abandonné, en avarie de machine. A priori promis à la démolition, il renavigue finalement sous pavillon VCT, repris par Elias Boulis Tayed (Liban). Alors qu'il cherche à gagner un port chrétien au nord de Jounieh (Liban), il est arraisonné le 29 août1989 par les forces syriennes qui lui tirent dessus, y mettant le feu et tuant dix des douze membres d'équipage.
Jean-Luc HUET