Docs 4 Nuke
(misc docs for nuclear design)
Auteur : Alexis Nuttin
Documents sur les principaux types de réacteurs
Voici une très bonne synthèse de ce qu'il faut connaître sur les standard power reactors (from Stacey, Nuclear Reactor Physics, Wiley, 2007).
These are the slides (in 4 chapters) used in class about the main reactor types :
Les deux sites PRIS (on existing Power Reactors) et ARIS (on Advanced Reactors) de l'IAEA Information System : voir par exemple sur PRIS les infos détaillées sur le parc français et sur ARIS la multitude de concepts de type SMR (sans oublier les documents très intéressants de l'onglet Publications). Ces deux sites sont bien complétés par ce rapport récent du MIT : The Future of Nuclear Energy in a Carbon-Constrained World (et en particulier son chapitre 3).
The website nuclear-power.com, made by nuclear engineers, provides a complete overview of all necessary notions in useful fields in reactor physics (like nuclear physics, neutronics, thermal-hydraulics and material science). Some more political statements are made too, like these on the future of nuclear energy (emphasizing the decrease of nuclear share in primary energy and the ageing of the installed nuclear reactors, calling for the building of new ones).
Un autre site web intéressant, en anglais : energyencyclopedia.com (en particulier pour ses "3D models" du REP et de SPX).
Pour les collectionneurs (ou ceux ayant besoin d'informations détaillées et illustrées) : ce site de l'Université du Nouveau Mexique regroupe une bonne centaine de posters de réacteurs existants ou ayant existé (parus dans la revue Nuclear Engineering International, voir par exemple les regrettés "Creys-Malville Super Phenix" à la lettre C et "Fessenheim PWR" à la lettre F).
Vidéos pédagogiques sur le nucléaire et ses enjeux
Le cours Energie et changement climatique complet (playlist sur YouTube, cf. les chapitres 1 et 6 en particulier avec dans chaque description un résumé du cours, les slides et leur contenu détaillé) de J.-M. Jancovici (voir aussi son blog https://jancovici.com, ainsi que Le Réveilleur sur YouTube ou encore Maxence Cordiez sur Twitter par exemple).
Le documentaire Nucléaire : une énergie qui dérange (à diffuser, contre les fausses informations et pour l'acceptabilité sociale). Voir aussi les vidéos de l'IRSN, en particulier celle expliquant le déroulement de l'accident de Fukushima.
Il faut savoir que ces sources d'informations techniques sont en compétition auprès du grand public avec des contenus plus accessibles et plus efficaces en termes d'acceptation (ou non) de l'énergie nucléaire. Voir par exemple la bande-annonce du film The China Syndrome, tourné juste avant et sorti juste après l'accident de TMI en 1979. Bien sûr, on peut toujours parler de "lobbying nucléaire". Mais dans ce cas, surtout ne pas oublier le lobbying pétrolier (bien plus puissant et insidieux, comme le montre par exemple cette étude scientifique récente). Comme bien expliqué dans cette interview (pour une autre discipline mais avec le même problème), il faut être conscient de l'extrême simplification du contenu technique opérée par les réseaux sociaux : l'information fournie (et effectivement retenue en définitive) par le grand public est toujours caricaturale (et assez souvent erronée), et cela devrait changer.
Ce petit cours d'un "EnergyProf" sur YouTube, qui donne les bases de l'économie des réacteurs nucléaires et explique ses difficultés face au gaz ainsi que la principale justification, discutable, des SMR pour lesquels l'investissement initial est réduit et donc le retour sur investissement plus rapide. Ceci devant permettre une meilleure compétitivité face au gaz notamment, mais dans un contexte économique supposé inchangé (on parle d'approche "BAU", pour "Business As Usual") par rapport aux décennies précédentes (ce qui n'est pas réaliste du tout). Voir aussi cette vidéo de (bonne) vulgarisation sur les SMR, bien illustrée et qui soulève deux questions importantes à la fin : celle de la rentabilité (dans l'approche BAU, elle-même largement discutable et forcément condamnée à plus ou moins court terme) et surtout celle de l'acceptabilité (très fluctuante, au gré des peurs du grand public et aussi de ses besoins).
Documents annexes sur des sujets divers et variés
Un résumé-analyse très intéressant du rapport Meadows (d'un groupe de chercheurs du MIT sur les systèmes dynamiques), dit "pour le club de Rome" (donnant dès 1972 une mise en garde scientifique solide, annonçant la crise énergie-climat). Voir cette vidéo (d'époque) sur le sujet (très actuel). Le rapport original de 1972 a eu une "suite" (un retour sur prédictions, 30 ans plus tard, par les mêmes auteurs) : Limits to Growth, Updated (que je vous conseille également, en ciblant les aspects qui vous intéressent le plus).
Le meilleur article (court) à ma connaissance sur l'utilisation industrielle du thorium en réacteur (à la fois passée et possible, à venir) est celui-ci, co-écrit par D. Grenèche (à l'époque responsable du cycle du combustible au sein d'AREVA NC, pour Nuclear Cycle, qui s'appelle aujourd'hui Orano) : il décrit bien les expériences à moyenne puissance réalisées surtout dans des réacteurs à eau et des réacteurs à haute température (HTR). Du fait de la communication à outrance parfois menée, le même auteur a ressenti le besoin de clarifier à nouveau les choses dans cet autre article sur le thorium, plus récent et "grand public" (dans lequel il rappelle que thorium ne signifie pas forcément sels fondus). Son dernier livre (Histoire et techniques des réacteurs nucléaires) est disponible à la bibliothèque de PHELMA. En voici les conclusions (à la fois lucides et actuelles) dont je vous recommande la lecture.
Souvent donné comme lecture annexe dans les cours de gestion de projet outre-atlantique, cette nouvelle d'A.C. Clarke (Superiority, 1951) illustre bien les dangers d'une confiance aveugle dans la rupture technologique (qui n'est pas toujours la meilleure solution dans un contexte donné, aussi séduisant que soit le concept innovant envisagé). C'est la même idée que développe (via une illustration spatiale également, mais historique et plus compacte) le sociologue des sciences Y. Gingras dans cet article sur "le culte de l'innovation" paru récemment dans Pour La Science. Sans pour autant prôner la décroissance ni renier la notion de progrès, méfions-nous du "techno-solutionnisme" (à la mode en ce moment) qui consiste à croire (et surtout à faire croire au public) qu'un peu d'innovation (réchauffée la plupart du temps) peut suffire à résoudre tous les problèmes.
Pour faire le tri entre "engineering" et "marketing"
Il est important de bien identifier les deux domaines distincts (bien qu'en interaction étroite) d'innovation en physique des réacteurs : la recherche "fondamentale" d'une part (qui consiste en l'étude académique de concepts innovants, destinée à booster la formation et la motivation des futurs ingénieurs, la mise au point de nouvelles méthodes de calcul ainsi que l'émergence de nouvelles solutions technologiques pour le long terme) et la réalisation industrielle d'autre part (qui, bénéficiant des retombées de la recherche fondamentale, consiste en la construction et l'exploitation de réacteurs électrogènes soumis à des contraintes économiques et matérielles très fortes).
Et lorsqu'on parle d'un projet de réacteur industriel, il faut donc savoir faire le tri entre les véritables projets ayant une chance d'être menés à bien (le plus souvent par des organismes d'état et des grandes entreprises) d'une part et les simples effets d'annonce autour de concepts papier d'autre part (le plus souvent propagés par des start-ups et des fonds d'investissement, avec une recherche de profit à court terme et sans volonté réelle d'apporter une solution durable). Dans ce dernier cas, il y a un mélange des genres qui consiste à faire passer une recherche fondamentale pour une réalisation industrielle. Le meilleur critère pour repérer cela : aller au-delà de la simple communication (brochures, sites web, images de synthèse, ...) et consulter la documentation scientifique disponible sur le projet. Une autre indication utile est le Technology Readiness Level (TRL) ou "niveau de maturité technologique" (souvent élevé pour les premiers et très bas pour les autres). Exemple type d'un projet de la première catégorie : NuScale (et, avec une autre approche et un peu de retard, le projet NUWARD développé par EDF, le CEA et TechnicAtome avec d'autres partenaires). Outre les spécifications techniques relativement détaillées qu'on peut trouver sur les sites web de tels projets, des articles scientifiques sont publiés sur tous les aspects pratiques de construction et de fonctionnement.
Les exemples de "start-up projects" à but uniquement lucratif (i.e. de seconde catégorie) sont (malheureusement) beaucoup plus nombreux. Un exemple local (la start-up Renaissance Fusion) propose ainsi de produire de l'électricité en une dizaine d'années seulement, illustrant que des publications scientifiques (fournies par leur site web sur quelques sujets précis) ne suffisent pas à prouver la faisabilité d'un projet dans son ensemble. Passons aux projets de fission, a priori plus réalistes ... sauf quand ils ne cherchent de même qu'à valoriser au maximum les études de conception d'un système dont ils savent déjà qu'il ne sera jamais construit. Sans recul, on peut facilement prendre chacun de ces projets au pied de la lettre, comme le fait ironiquement remarquer ce site d'information sur le nucléaire via son "random innovative project generator" (cf. le bouton "Start Company" ainsi que l'explication fournie : "Innovations and advances in reactor design process, reactor construction, and reactor operation are needed vastly more than new reactor concepts. We hope people will focus most efforts there rather than on patenting replicas or minor twists to old concepts." sur la page "Learn more"). De plus en plus d'ingénieurs du nucléaire expriment leur agacement face à ces exagérations de pure communication (qui se font au détriment d'une véritable information du grand public).
Citons, exploitant le concept de réacteur à sels fondus (étudié depuis longtemps par la recherche au long cours), Transatomic Power (2011-2018 : projet abandonné après récolte des investissements, sous le prétexte que "l'utilisation de déchets nucléaires avait été mal évaluée"). Transmutex, valorisant le concept d'ADS (Accelerator-Driven System), promet une production durable d'électricité à court terme basée sur ce genre de systèmes très sophistiqués et spécialisés dans l'incinération des actinides mineurs. Un petit dernier, français : Jimmy, proposant de miniaturiser un HTR (Réacteur à Haute Température, nombreuses réalisations dans les 70's et 80's) pour produire de la chaleur sur un site industriel, ce qui est un peu plus réaliste ... mais avec un premier démarrage annoncé dès 2026 ! ... tout en laissant en suspens la question de la fabrication du combustible TRISO (et en évoquant même la possibilité, irréaliste, de le recycler). La dérive communicante consistant à annoncer des délais de construction fantaisistes s'impose même aux projets les plus sérieux : de dérive, l'exagération est devenue obligation économique (nécessaire à la survie même de la start-up associée, ce qui montre bien que ce modèle est discutable et pourrait même se révéler contre-productif). Voir par exemple comment Kairos Power joue ce jeu (dangereux) à partir d'un (bon) concept de type FHR (HTR de type pebble bed et refroidi par fluorures, reposant sur de nombreuses études académiques américaines - menées par le MIT, Berkeley, GE, ... - très complètes).
En France, la CNE (Commission Nationale d'Evaluation) a mis en garde contre cette dérive (retardant la mise en oeuvre de véritables solutions) dans le chapitre 2 de son dernier rapport (juin 2022), dont voici un extrait (page 19) : "La Commission considère que le niveau de maturité technologique très modeste des projets de microréacteurs (...) rend peu crédibles les calendriers ambitieux qui sont annoncés (...) et estime que la crédibilité des nombreux projets de nouveaux réacteurs ne sera satisfaisante que lorsque la gestion du cycle associé aura été étudiée et décrite de manière convaincante, ce qui n’a pas encore été entrepris." Ce constat ne peut que nous rendre sévères vis-à-vis de la malhonnêteté de ces start-ups quant au réalisme de leurs objectifs (indépendamment de la validité du concept envisagé), et ce d'autant plus que l'électronucléaire français rencontre des difficultés très concrètes de relance (dues à la perte prévisible de certaines compétences, après plus de vingt ans sans aucune construction). Voir à ce sujet un documentaire diffusé sur LCP récemment (le 01/10/2022, si vous le retrouvez) ainsi que le débat qui a suivi et dont voici l'intégralité (les points de vue se complètent bien, sans trop de polémiques stériles). Il faut également rappeler que tout projet pour le "nucléaire du futur" doit dès maintenant être compatible avec une récession structurelle qu'on sait inévitable. Il est indispensable d'inclure cette régression programmée (cette nouvelle ère de contrôle plus ou moins bien accepté de la consommation énergétique) et les limitations associées dans le cahier des charges de l'électronucléaire de demain, qui ne pourra servir d'amortisseur que s'il reste accepté par la société (acceptabilité) et faisable sous contraintes (pragmatisme).
Classement récent par l'ASN de quelques projets de PRM (Petits Réacteurs Modulaires) en fonction de leur maturité technologique : bien plus objectif et pragmatique que les "publi-reportages" parfois diffusés par certaines start-up (et surtout destinés à leurs investisseurs et subventionneurs).
Quand on discute de la dérive techno-solutionniste de certaines start-up du "new nuke" avec des ingénieurs de l'industrie nucléaire traditionnelle, on se rend compte qu'ils partagent cette analyse. Mais qu'ils ne cherchent pas forcément à la combattre (encore) ouvertement, ce qui peut très bien se comprendre. Très longtemps, depuis le début des années 1960 jusqu'au début des années 2020, il y a eu en France un fond discret mais solide de défiance contre l'électronucléaire. Surtout en réaction contre le centralisme d'état, contrairement au sentiment antinucléaire allemand qui s'est construit pendant la guerre froide dans ce pays traumatisé par la menace des armes nucléaires (coupé en deux et servant des deux côtés de base aux missiles à longue portée). Ce fond antinucléaire, après un regain en 2011 du fait de l'accident de Fukushima, s'est dissipé et a même été remplacé par une sorte de "retour en grâce" du nucléaire au début des années 2020. La tension sur le gaz après l'invasion russe de l'Ukraine début 2022 et les arrêts simultanés de réacteurs pour l'inspection des problèmes de corrosion sous contrainte ont fortement contribué à ce retour en grâce. Cela a grandement profité aux start-up, qui ont pu communiquer de façon décomplexée (comme elles n'auraient pas pu le faire auparavant). Dans ce contexte, il est difficile pour les ingénieurs (à la fois au fait des limites inhérentes à l'industrie nucléaire et sensibles au retour en grâce du nucléaire dans l'opinion publique) de critiquer ouvertement les excès de communication du "new nuke". Mais beaucoup admettent qu'il faudra, tôt ou tard, le faire malgré tout.