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Ce qu'en dit la recherche...

La différenciation pédagogique est un objet de recherche théorique et pratique foissonnant depuis plusieurs années. Cet intérêt va de pair avec l’intérêt des professionnels de l’éducation qui la décrivent souvent comme “faire ce qu’il faut” pour que les élèves réussissent. D’excellents textes en font un bon historique pour les intéressés à la recherche de précisions. Pour la majorité d’entre nous, l’important demeure de savoir quelles pratiques de différenciation pédagogique sont les plus susceptibles de conduire à un meilleur engagement, à l’apprentissage et à la réussite des élèves. Nous présentons ici quelques résultats de recherches qui guident l’accompagnement des enseignants.

Caractéristiques des pratiques différenciées :

Tomlinson (1995) propose ces 4 caractéristiques :

  1. conduire tous les élèves à explorer et à comprendre les concepts clés de la matière jusqu’à la réussite;

  1. permettre de connaître la progression de chaque élève à partir des rétroactions formatives fréquentes;

  1. proposer des groupements flexibles et appropriés pour tirer profit des différences, mais aussi des points communs;

  1. engager les élèves en les incitants à connaître et à atteindre les critères de réussite (Tomlinson, 2005);

Hattie (2012) ajoute cette 5e caractéristique :

  1. permettre de savoir qui sont les élèves qui n'ont pas fait de progrès avec les activités offertes en classe.

La différenciation est-elle une pratique efficace d'enseignement ?

Beaucoup d’enseignants souhaiteraient qu’un expert, un collègue ou un conseiller pédagogique leur donne la recette exacte des gestes à poser en classe pour différencier l'enseignement. Des chercheurs souhaiteraient aussi qu’on soit en mesure de valider un protocole exact des gestes à poser pour s’assurer que la pratique de différenciation pédagogique soit efficace. Cela est impossible puisque la différenciation pédagogique n’est pas une pratique. C’est un ensemble de pratiques choisies par un enseignant pour un groupe d’élèves en particulier avec une intention particulière. Lorsque des enseignants mettent en place des pratiques d’enseignement qui engagent et s’adaptent à tous leurs élèves, alors la différenciation pédagogique peut être qualifiée d’efficace.

En résumé, la recherche identifie des pratiques différenciées, mais également des conditions qui permettent de soutenir les équipes enseignantes et les équipes écoles dans leurs efforts pour développer des pratiques d’enseignement équitables et efficaces. Les pratiques différenciées peuvent être partagées, mais doivent toujours être ajustées par l’enseignant aux besoins de ses élèves.

Des exemples de recherches sur la différenciation ?

  • Le coenseignement avec l’orthopédagogue permet de mettre en place des pratiques différenciées efficaces (Dubé, 2016);

  • La différenciation en écriture et en lecture augmenterait les progrès des élèves (Montesinos-Gelet et al., 2011);

  • La différenciation augmente les taux de réussite en lecture et en mathématique (Goddard et al., 2015);

  • La différenciation augmente les taux de réussite au niveau secondaire (Quintana, 2015) et au niveau collégial (Chen & Chen, 2017);

  • La différenciation pédagogique d’un enseignant s’appuie sur les normes de pratiques partagées avec les autres enseignants du même établissement. Le sentiment d’efficacité collectif de ces enseignants est associé à la réussite aux examens dans ces écoles (Goddard et al., 2015);

  • La différenciation pédagogique effectuée par les enseignants et ouvertement encouragée et soutenue par les administrateurs scolaires a un effet direct sur les taux de réussite des étudiants (Quintana, 2015).


Résultats de recherche sur la différenciation en français

La différenciation en lecture

  • Les enseignantes organisent la classe en ateliers, ce qui leur permet de mettre en place des sous-groupes de besoins dans lesquels elles offrent un étayage de qualité qui permet aux élèves d’améliorer leur compréhension en lecture. Par ailleurs, ce guidage permet d’améliorer la lexicalisation en production d’écrits. Les élèves peuvent faire des choix et le contenu des ateliers est adapté à leurs besoins (Montesinos-Gelet, Saulnier-Beaupré et Morin, 2011).

  • Pour développer leur autonomie en lecture, les enseignants installent des routines. Ils peuvent alors apprendre aux élèves à choisir des lectures qui correspondent à leur niveau d’habileté. Les enseignants les accompagnent à chaque étape de leur progrès. Les élèves apprennent à identifier leurs forces et faiblesses et commencent à s’autoréguler (Turcotte, 2009).

La différenciation en écriture

  • Des enseignants reconnus efficaces dans leurs milieux rapportent utiliser du travail par ateliers, par sous-groupes ou dyades en fonction des tâches planifiées ou des compétences des élèves pour mieux soutenir les élèves et diversifier l'enseignement. Un soutien accru, dont un enseignement explicite, est souvent proposé aux lecteurs-scripteurs plus faibles. Les enseignants tentent de maintenir des attentes minimales communes envers tous les élèves (Nootens, Morin et Montesinos-Gelet, 2012).​

  • L'enseignement explicite de l'écriture et le travail en sous-groupe de besoin, composés d'un enseignant ou orthopédagogue pour 6 élèves, ont permis aux élèves en grande difficulté de faire moins d'erreurs et d'écrire des textes plus longs (Dubé, Dorval et Bessette, 2011).

La différenciation en oral

  • Le dispositif Itinéraire est un dispositif belge qui a été mis en place pour permettre aux enseignants d’enseigner l’oral. Il s’agit d’utiliser les tablettes numériques sur lesquelles les élèves peuvent s’enregistrer (ce qui enlève l’aspect émotif de la présentation devant les pairs). Chaque genre de communication est enseigné (le documentaire, le slam, le conte) par étayage et les élèves apprennent en sous-groupes à donner des rétroactions sur les vidéos à l’aide d’une liste de questions métacognitives (Colognesi et Hanin, 2020).

La différenciation en mathématique

  • Quand on travaille les problèmes de mathématiques, les discussions en classe peuvent s’avérer inefficaces pour aider tous les élèves. De plus, si on organise des groupes homogènes selon le niveau des élèves, cela peut creuser les écarts. Ce que ces chercheurs suggèrent, c’est d'utiliser le même problème pour tous les élèves, mais en fournissant du matériel concret et des consignes qui s'ajustent aux besoins des élèves. Le dispositif a été testé dans une classe pour élèves ayant une déficience motrice à effectif réduit (Barry et Matray, 2011).


Le ministère de l'éducation propose deux documents récents sur la différenciation :

Exemples disciplinaires de flexibilité pédagogique

http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/education/jeunes/pfeq/differenciation-pedago_outil-complementaire2.pdf

Références bibliographiques

Dube, F., Bessette, L., & Dorval, C. (2011). Differentiation and Explicit Teaching: Integration of Students With Learning Difficulties. Education Review B, 2, 167-184.

Goddard, Y., Goddard, R., & Kim, M. (2015). School Instructional Climate and Student Achievement: An Examination of Group Norms for Differentiated Instruction. American Journal of Education, 122(1), 111-131. doi:http://dx.doi.org/10.1086/683293

Hattie, J. (2012). Visible Learning for teachers: Maximizing impact on leartning. Routledge.

Montésinos-Gelet, I., Saulnier-Beaupré, K., Morin, M.-F. (2011). La relation entre l'importance de la différenciation en lecture et en écriture dans les pratiques effectives de huit enseignantes et la progression de leurs élèves au début du primaire en contexte montréalais [en ligne] Lettrure 1, 43-59.

Quintana, E. R. (2015). Relationship between Instructional Strategies and Students' Performance in the New York State Regents Examination in Integrated Algebra in High Performing Suburban Districts.

Tomlinson, C. A. (1995). How to differentiate instruction in mixed-ability classrooms. ASCD.