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HISTOIRE
Classique par sa ligne tricorps,
la R18 était néanmoins
plus moderne que ses rivales,
et son lancement commercial
connut un grand succès.
Il y a juste quarante ans,
la R18 prenait le relais
d’une R12 arrivée en fin
de carrière après dix ans
de brillants services.
Pas assez novatrice au
goût d’une frange des
ingénieurs maison,
la 18 rencontra pourtant
sa clientèle dès son
lancement commercial,
particulièrement réussi.
RENAULT 18
Quand le classique
fait mouche
S
on lancement relève de la plus
haute importance pour Renault,
car le projet s’insère sur le segment
de marché M2, gamme
moyenne supérieure, qui, à
cette époque, est le plus important
en Europe avec une part de
marché de 28 %. Les concurrents les mieux placés
sont tous allemands ou germano-américains
: Ford avec la Taunus, Opel avec l’Ascona,
Volkswagen
avec la Passat et Audi avec la 80. On
trouve ensuite les italiens avec la Fiat 131 et Alfa
Romeo l’Alfasud. Et enfin Peugeot avec la 305.
Le lancement se fait avec la seule carrosserie tricorps,
mais un break est prévu l’année suivante
et un coupé dès 1980. Conçu sur la même base
roulante, ce coupé remplaçant les R15/17 bénéficie
d’une caisse entièrement spécifique, c’est la
Fuego. Avec une longueur de 4,37 m pour la
berline et 4,49 m pour le break, une largeur de
1,68 m et un poids de 920 kg, la R18 est parfaitement
centrée sur son segment. Signé Gaston
Juchet, le style de l’auto a été bien jugé en test.
La R18 est perçue plus dynamique que ses
concurrentes. Les motorisations de départ,
Cléon fonte de 64 ch et Cléon alu de 78 ch, sont
dans le haut de la fourchette de l’offre concurrente.
La hausse du prix des carburants suite au
choc pétrolier de 1973 a bien été prise en
compte dans le cahier des charges. L’aérodynamique
est soignée, avec un Cx record dans la
gamme Renault de l’époque. L’augmentation de
la masse est contenue à une vingtaine de kilos
malgré une inflation sensible des dimensions par
rapport à la R12 (+ 7 cm en longueur et + 8 cm
en largeur). En outre, elle peut revendiquer
l’avantage par rapport à ses deux principales
concurrentes d’être une « traction avant », gage
d’une tenue de route plus sûre. Enfin, pour assurer
un meilleur niveau de qualité, la tôlerie de
l’usine de Flins a été largement automatisée.
Tous les atouts pour réussir
Le programme s’est déroulé sans problème majeur
selon un planning court (30 mois), à savoir
gel du style en juillet 1975 et début d’industrialisation
en décembre 1977. Elle a donc tous les
atouts pour réussir. Et pourtant on sent que c’est
un peu la « mal-aimée » au sein de l’entreprise.
Elle souffrirait de deux maux rédhibitoires aux
yeux des fans de la R16, proclamée voiture « intelligente
» : c’est un tricorps banal affublé d’un
train arrière rigide ! Ces réserves sont complètement
injustifiées, car les deux autos qui ont le
plus de succès dans la catégorie, la Taunus et
l’Ascona, sont aussi des tricorps bien ordinaires,
et leur technologie est encore plus rustique : propulsion,
pont arrière archi-rigide et tenue de route
objectivement limite dangereuse. Ce malaise latent
est assez difficile à vivre pour les équipes qui
travaillent sur le projet, notamment celles chargées
du lancement, car une rumeur se développe
en interne : « La R18 ne tient pas la route ! » Cette
tension aura au moins une conséquence positive
sur le développement de l’auto : des évolutions
techniques profondes vont animer le cycle de vie
du produit, dont les investissements seront accordés
rapidement sans les tergiversations habituelles.
Il faut d’ailleurs noter que, pour la plupart,
elles ont été étudiées et développées pour le coupé
La R18 bénéficia
d’importantes
évolutions
techniques durant
sa vie commerciale.
.
Fuego, puis transposées sur la R18 facilement
et à moindres frais puisqu’elle est construite sur la
même base roulante.
C’est le cas en particulier des développements
apportés au train avant.
Le succès commercial est au rendez-vous. Pour
sa première année pleine, 1979, la production de
la R18 se situe 25 % au-dessus des prévisions.
La direction du produit attribue ce succès au
« style attrayant et homogène, ainsi qu’au degré
de qualité convenable ».
Développements tardifs
Sa clientèle est plus jeune que la moyenne du
segment. Le taux de conquête atteint de 30 à
35 % en France. Selon les enquêtes « Courants
commerciaux » 1979-1980 au niveau européen,
il ressort que les points forts de l’auto par rapport
à sa concurrence, tels que perçus par les clients,
sont la consommation et le confort général (dont
les sièges), les points moins bien jugés étant l’habitabilité
dont le volume du coffre, la tenue de
route et le freinage. D’où la pression de la direction
du produit pour animer le cycle de vie par
des relances dans le domaine des qualités routières
; motorisations dynamiques tant en diesel
(atmosphérique de 66 ch en 1980, puis turbodiesel
de 88 ch en 1983) qu’en essence (Turbo
110 en 1980, poussé plus tard à 125 ch) ; améliorations
du train avant. Malheureusement, la
majorité de ces développements ont été appliqués
à partir de juillet 1983 alors que le programme
était déjà dans sa sixième année de vie,
c’est-à-dire beaucoup trop tard. Les constructeurs
européens étaient habitués sur leurs produits
à des durées de vie longues de plus de dix
ans, et c’est précisément à cette époque que les
américains, qui étaient chez eux sur des durées
de vie beaucoup plus courtes — moins de 6 ans
— ont décidé une offensive sur le marché européen
en imposant ce rythme express à leurs filiales
européennes.
On voit clairement que la R18 a fait jeu égal avec
Ford et Opel durant trois ans sur le marché européen.
Cette performance est d’autant plus remarquable
que ces concurrents ont l’avantage,
sur ce segment, de pouvoir passer pour des
constructeurs nationaux sur deux très importants
marchés que sont la Grande Bretagne et
l’Allemagne. Elle a commencé à chuter en 1982
suite au remplacement de l’Opel Ascona par une
auto moderne à traction avant et au succès en
interne de la gamme R9. La chute s’est accentuée
en 1983 avec le remplacement de la Taunus
par la Sierra chez Ford, puis elle s’est effondrée
en 1984 quand s’est ajouté le lancement de la
R25 ! Sa fabrication à Flins a cessé en 1986
après 2 028 964 exemplaires produits mais s’est
poursuivie jusqu’à la fin de la décennie dans certains
pays, notamment en Argentine.
JACQUES CHEINISSE, POUR RENAULT HISTOIRE
Jacques Cheinisse
observe Guy
Fréquelin interviewé
par Gérard Klein.
Un lancement
spectaculaire
Pour le lancement, les 600 concessionnaires
français sont conviés à Strasbourg. Les plus
anciens se rappelleront que Philippe Lamirault,
DCF de l’époque, avait pour l’occasion joué
les chefs de gare, képi vissé sur la tête ! Le
directeur du marketing, Hubert d’Artemare, et
l’acteur Gérard Klein animent la séance au
Palais des congrès. La R18 y est présentée
comme le contrepoint statutaire de l’offre
fonctionnelle qu’est la R14 à ce niveau de
gamme. À la surprise générale, l’un des
concessionnaires, M. Courtois, président de
commission au GCR, est invité à quitter la salle
pour retrouver un hélicoptère de la gendarmerie,
qui l’amène dans des vignobles. Guy Fréquelin
l’y attend pour tester la R18 sous les caméras et
l’oeil attentif de Jacques Cheinisse, chef produit
R18 (auteur du papier ci-contre). Après avoir
vécu ce premier essai sur écran géant, chaque
concessionnaire repart au volant de sa R18
flambant neuve. Clin d’oeil aux ambitions
internationales, différents drapeaux flottent sur
les ailes avant, façon voiture officielle. Y.D.
Très épuré à
son lancement,
le poste de conduite
s’étoffera au fil
des évolutions.
Les clients appréciaient son confort général et
sa consommation maîtrisée
Développée en même temps que la R14, la R18 voulait constituer une
offre plus classique avec son coffre et ses pare-chocs métalliques.
SYNCHRO
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