LA GRANDIOSE ET MEURTRIÈRE COURSE
PARIS – MADRID 1903

par Jean-Robert Dulier (1)

Éditions Couty, 188 pages, 1966

Notes de lecture : Charles-Louis Hamelle


En deux années les progrès techniques furent très rapides, les grosses voitures virent leur poids passer de 1 300 à 1 000 kg, mais la puissance de 60 à 100/110 ch, les voitures légères atteignent maintenant 40 ch et les petites voitures dépassent 20 ch. Du côté des moteurs, nombreux sont ceux à soupapes commandées par culbuteurs, c’est la fin des brûleurs remplacés par un allumage à haute tension batterie/bobine ; le refroidissement par radiateur tubulaire et pompe à eau se généralise. La vitesse des voitures devient impressionnante, comme l’écrivait un journaliste du Courrier de Paris quelques jours avant le départ « Tous ces gaillards vont faire au moins du 90 ou du 100 à l’heure… en moyenne, mais certains marcheront plus vite, ils feront du 110 ou du 120, peut-être du 140. »

L’Automobile Club de France, avec l’appui du Roi d’Espagne Alphonse XIII, fervent amateur du sport automobile, décide d’organiser la plus grande course

de l’année : de Paris à Madrid en plusieurs étapes, dont la première serait Bordeaux. L’engouement fut exceptionnel : 37 marques dont 5 étrangères, 275 inscrits, 221 partants. Certains furent écartés pour des raisons bizarres : un jeune et brillant technicien de 22 ans se vit refuser le départ, car sa voiture fut jugée trop basse, avec une colonne de direction trop inclinée. Ce jeune homme s’appelait Ettore Bugatti.

Le départ fut donné devant 300 000 personnes. Louis Renault partit troisième, prit rapidement la tête de la course ; son frère Marcel en soixantième position eut beaucoup de difficultés pour progresser, car il avait de nombreux concurrents à dépasser. En rattrapant la voiture qui le précédait, la poussière lui cacha un virage et ce fut la catastrophe. Les accidents graves vont se succéder, si bien qu’au bout de quelques heures 6 conducteurs ou mécaniciens étaient morts ou très gravement blessés. Dès que les instances de direction en eurent connaissance, la course fut arrêtée.

C’est ainsi que se termina la dernière grande course de ville à ville du début du siècle, et qu’il fallu inventer de nouvelles formes de compétition pour cette industrie naissante.

Cet ouvrage, comme le précédent, Paris Berlin, nous font revivre ces grandes compétitions de l’intérieur, mais ce qui est le plus remarquable, le plus savoureux, c’est que ces événements sont évoqués à partir d’articles de presse ou de revues spécialisées de l’époque. Il est très réjouissant de lire la prose des journalistes et des écrivains qui s’émerveillent devant les progrès de la technique ou le courage des conducteurs. Une fois que l’on a mis le nez, il est difficile d’en sortir.


Ces livres ont retrouvé leur place dans les rayons de notre bibliothèque, si vous souhaitez partager le même bonheur ils sont à votre disposition.

1 - LES COURSES AUTOMOBILES DES ANNÉES 1900
      PARIS BERLIN & PARIS MADRID : Ces deux ouvrages de Jean-Robert Dulier des années 60, avaient peut-être honoré notre bibliothèque, mais avaient disparu depuis bien longtemps. Deux exemplaires ont été retrouvés chez un bouquiniste, ce qui m’a permis de connaître ces deux aventures qui ont grandement marqué Renault.