2017-12 : Visite de la "Collection de l'Aventure Automobile de Poissy"

Un petit coup d’œil chez les autres...


La Collection de l’Aventure Automobile de Poissy

RENAULT HISTOIRE s’est rendu en masse à Poissy (22 personnes - les 12 et 15 décembre 2017)… Nos collègues de là-bas possèdent un musée de 70 véhicules, retraçant le parcours de ce prestigieux site industriel, qui fut à une époque un des fleurons de l’industrie automobile française, voire européenne.
Cette visite est le résultat d’un curieux concours de circonstances… Jugez plutôt.
Bernard Chrétien, membre de Renault Histoire, a fait sa carrière chez Renault. Il a un frère, Pierre, qui a fait toute sa carrière à Poissy… Ce qui aurait pu être une irrémédiable cause de brouille familiale est devenu un bel exemple de ce que la passion pour l’automobile et de son industrie veut dire…
Bernard et son frère donc, nous ont proposé de visiter ce Musée, géré par l’Association “CAAPY“, qui signifie “Collection de l’Aventure Automobile à Poissy“. Ce fut passionnant.

Poissy, une histoire tumultueuse, qui a deux origines

Ford

Tout commence en 1938, lorsque Ford décide de s’implanter “sérieusement“ en France (donc en Europe), et quitte son usine Mathis de Strasbourg pour créer celle de Poissy, avec l’intention d’y construire des véhicules particuliers. Ford y construira des… camions jusqu’en 1954, date à laquelle SIMCA rachète l’usine et continuera à les fabriquer sous sa marque, puis UNIC, qui lui appartenait. La première auto particulière Ford n’y sera construite qu’à partir de 1947.

Fiat

SIMCA (Société Industrielle de Mécanique et Carrosserie Automobile) est créée en 1934 par FIAT, pour pouvoir vendre ses modèles en France sans payer de droits de douane, SIMCA étant une entreprise française. A l'époque, le marché commun n’existait pas encore… Après bien des péripéties, SIMCA, sous l’impulsion de Henri Théodore Pigozzi , rachète l’usine Donnet à Nanterre, très moderne à l’époque, mais au bord de la faillite. Elle entre en production en juillet 1935, avec sur les voitures, le nom Simca en diagonale sur le logo Fiat. Ces autos sont des versions françaises des modèles de FIAT. SIMCA, bénéficiant du savoir-faire de FIAT, devient le 4eme constructeur de France. En 1938, apparaît le nouveau logo de SIMCA, une hirondelle, symbolisant “l’appétit d’oiseau“ de ses véhicules, allusion à leurs faibles consommations. En même temps, le nom de FIAT disparaît, symbolisant trop, lui, l’Italie fasciste de cette époque…

Après la guerre et une période particulièrement agité au plan politique, Th. Pigozzi reprend la direction de l’entreprise qui échappa finalement à la nationalisation… La production reprend, avec les SIMCA 5 et 8.

En 1954, SIMCA, fort de ses succès, en particulier avec les premières “Aronde“, a besoin de s’agrandir et acquiert Ford et son usine de Poissy qui à du mal à redémarrer. A cette époque, SIMCA est le deuxième producteur français, juste derrière Renault…

A partir de 1963 et progressivement jusqu’en 1978, SIMCA tombe sous la coupe de Chrysler et malgré les grands succès que seront les SIMCA 1100 et 1300/1500, faute d’investissement dans tous les sens du terme de la part de Chrysler, SIMCA disparaît en 1978, reprise par PSA.

Ce “Quatrième constructeur Français“, par ordre d’apparition sur la scène de l’industrie automobile française, après Peugeot, Renault et Citroën a donc quelque part une double origine, Ford et Fiat. Un génome pour le moins peu ordinaire…

Une chronologie simplifiée :

  • Période 1 : 1938 - 1954 => Ford (Poissy)

  • Période 1 bis : 1934 – 1954 => Fiat-SIMCA (installé à Suresnes puis à Nanterre)

  • Période 2 : 1954 – 1963 => SIMCA (Poissy)

  • Période 3 : 1963 – 1978 => SIMCA Chrysler (Poissy)

  • Période 4 : 1979 – 1986 => PSA (Poissy) qui produira des Talbot (marque appartenant à SIMCA), à partir de véhicules d’origine Peugeot ou Citroën.

  • Période 5 : 1986 – à nos jours => Poissy est une unité de production de PSA-Citroën (capacité de production proche de 2000 véhicules / jour)

Le Musée

La Collection de l’Aventure Automobile de Poissy, avec ses 70 véhicules exposés, retrace admirablement ce parcours original d’un pan important de l’Industrie automobile française, qui se poursuit aujourd’hui sous la houlette de PSA.

On y découvre cette diversité culturelle, à la fois technique (produit et industrielle) et humaine ; mais aussi les relations politiques entre les états, les oppositions des hommes avec leurs visions parfois très divergentes, voire opposées, générées par des intérêts très différents à des instants donnés.

Au delà de belles images ou de merveilleux films, rien ne peut remplacer et être plus démonstratif que la réalité physique, celle de ces objets que l’on peut toucher (avec les yeux…), sentir et ainsi attiser les souvenirs ; mais aussi comprendre un passé complexe, qui n’est pas sans rappeler le présent et surtout le futur, qui sera fait, sans doute, d’épisodes non linéaires qu’il faudra assimiler et vivre, un peu comme “ceux de Poissy“, à leur manière, l’on fait. Le discours de nos guides a été remarquable de ce point de vue, une belle leçon.

Un parcours en image (photos prises sur place par certains des bénévoles qui assistaient à la visite)

Nous vous présentons en images, un parcours dans cette Collection de l’Aventure Automobile de Poissy à travers un choix parmi les 70 véhicules, subjectif bien sûr, mais qui nous a semblé être celui des plus marquants suivant les 3 grandes périodes de son histoire (parcours de haut en bas ci-dessous).

La Période Ford (1938-1954)

La Ford 472 A, premier modèle de voiture particulière fabriquée à Poissy (1947), équipée d’un V8

La Ford Vedette V8 de 1953

et son châssis

Le moteur Ford V8 de 2,2 litres de cylindrée, 66cv

La Période FIAT-SIMCA (1934-1954)

La Fiat “6cv“ de 1935

et le logo “Fiat-Simca“ sur le radiateur

La SIMCA 5 de 1936

et son châssis

La SIMCA 8 de 1938-51

La SIMCA 6 de 1948-50 (16cv, 570 cm3)

La Période SIMCA (1954-1963) – SIMCA Chrysler (1963-1978)

En 1954, à Poissy, Ford laisse la place à SIMCA…

La série des Arondes

L’Aronde est considérée comme la première SIMCA, mais cependant très proche de la conception FIAT. C’est la première monocoque de la marque, mais dont la caisse a été en réalité étudiée par Budd aux USA, conjointement à celle de la 1400 FIAT.

Les premières Arondes sont équipées d’un moteur FIAT et fabriquées à Nanterre.

Elles seront construites à plus de 1.200.000 exemplaires entre 1951 et 1964. Elles seront équipées de plusieurs moteurs successifs (1221 cm3 d’origine Fiat, 1089 et 1290 cm3) de puissances allant de 45 à 62cv. Vitesse 120-130 km/h

Aronde 9 série 1 de1952

Aronde 9 série 2 de 1954

Aronde Elysée 1957

Aronde P60 de 1959-64

Des modèles dérivés, comme des breaks et des coupés d’une élégance certaine seront extrapolés de ces Arondes.

Aronde Plein Ciel de 1957-61 (60cv, 140 km/h)

SIMCA SPORT de 1953-56, sur une base d’Aronde

La série des 1300/1500

Cette série, de taille un peu supérieure, remplace en partie celle des Arondes à partir de 1963. Elle sera suivie de la série des 1301/1501 en 1967, puis par les 1307/1308 en 1975. En 1979 ces dernières sont remplacées par les 1510 et Solara (tricorps), qui porteront le nom de Talbot jusqu’à l’arrêt de leur production en 1986, date de la (deuxième) disparition de la célèbre marque.

SIMCA 1300 de 1963-66 (1300cm3 62cv)

SIMCA 1301/1501 de 1966- 75

SIMCA 1307/1308 de 1975-79. Ce sont désormais des tractions Av, à l’instar des 1100 (voir juste après) auxquelles elles reprennent l’architecture mécanique.

La 1100

C’est probablement le véhicule de grande série le plus innovant de son époque produit par SIMCA. Mais sa naissance ne fut pas de tout repos. Suite à l’éviction de Th. Pigozzi par Chrysler, SIMCA devra défendre le projet de la nouvelle 1100, ébauchée par Pigozzi à partir d'une étude Fiat (le cordon n’est pas vraiment coupé…). Chrysler ne veut pas investir dans ce nouveau modèle, pensant pouvoir adapter pour la France (l’Europe) certains de ses modèles de la gamme US. Finalement la 1100 (hayon arrière et traction avant à moteur transversal avec la boite en bout du moteur, (une première mondiale) est lancée en 1967 : c'est un nouveau succès avec plus de 2 millions d'exemplaires vendus jusqu'en 1981.

SIMCA 1100 de 1967- 81

Le haut de gamme de SIMCA

La SIMCA Comète Monte-Carlo de 1955 (V8 Ford 4 litres, 105cv). Une auto très marginale. Ford lance en 1951 la Ford Comète, sur le Châssis de sa Vedette, que SIMCA reprendra en 1954 en l’animant avec un moteur plus puissant et la produira pendant 1 an.

De Ford, SIMCA hérite donc de la Vedette. Elle sera redessinée, modernisée et restylée en profondeur, tout en conservant le fameux V8 d’origine Ford. Le châssis disparaît et la caisse devient autoporteuse. Plusieurs versions se différenciant par les niveaux d’équipement et accessoires carrosserie seront proposées. La Versailles, la Trianon, le break Marly.

La Versailles de 1954-57

Une version “économique“ sera extrapolée de la Versailles : l’Ariane. Equipement réduit, grand volume, (trop) petit moteur, le quatre cylindres des Arondes remplace le V8 Ford sous le capot…

L’Ariane de 1957-63

La Chambord remplacera la Versailles en reprenant la même mécanique mais avec une carrosserie assez profondément remaniée (on dirait aujourd’hui un “reskin“…). Un Break “Marly “, comme pour la Versailles, en sera également extrapolé.

La Chambord de 1957-61

La Marly (cette auto a appartenu à JP. Beltoise)

SIMCA cesse de produire son haut de gamme fait à base de Ford en 1961 et ne le remplace pas…

L’entreprise reste concentrée sur le milieu de gamme et le bas de gamme renaissant, avec la SIMCA 1000 (voire plus loin).

Le temps passe et Chrysler prend de plus en plus le pouvoir à Poissy. En 1970, SIMCA devient Chrysler France, à la suite du rachat par le constructeur américain des actions encore détenues par Fiat. La marque SIMCA demeurera malgré tout sur les modèles produits jusqu'en 1980.

Fin des années 1960, SIMCA d’un coté et Chrysler d’un autre, par le truchement de Rootes , qui lui appartient, étudient un projet “haut de gamme“. Chrysler tranchera en faveur du projet anglais, mais en retenant la motorisation développé par SIMCA. C’est la naissance des séries Chrysler (et non pas SIMCA) 160/180, ce qui jettera une confusion dommageable dans l’esprit des clients potentiels hexagonaux.

Cette auto sera fabriquée en 275 000 exemplaires.

La Chrysler 160/180 de 1970-80 (à Poissy, la production s’arrêtera en 1975)

Les voitures populaires ou bas de gamme

SIMCA, nous l’avons vu, construira des “petites voitures“ dans sa période “Fiat SIMCA“, dérivées des Fiat, jusqu’au tout début des années 1950.

Il faudra ensuite attendre 1961 pour assister à la naissance d’une auto, de la même veine que les 4CV-Dauphine, voire R8, chez le constructeur de Poissy : la SIMCA 1000, autre best seller de la marque, puisque près de 2000 000 d’exemplaires seront produits.

Même architecture que la R8 (moteur en porte-à faux arrière), elle sera sa principale concurrente. L’étude fut lancée en 1957 par Th. Pigozzi. Elle est, encore une fois d’inspiration Fiat (Fiat 850) et reprendra certains éléments de la marque italienne.

La SIMCA 1000 de 1961-78

Un certain nombre de modèles dérivés verront le jour et en particulier le très réussi coupé Bertone

Le Coupé Bertone de 1962-67

La Période PSA-Talbot (1979-1986)

PSA est désormais propriétaire de SIMCA, donc de Poissy. Cela dit, au niveau des appellations des marques vis à vis des clients, les choses sont un peu confuses, entre SIMCA et Chrysler. PSA va introduire un élément supplémentaire en faisant resurgir la marque Talbot, qui appartenait à SIMCA depuis 1958.

L’Horizon est présenté en 1977 sous le nom de SIMCA Chrysler Horizon. Elle sera ensuite nommée SIMCA Chrysler Talbot Horizon, puis Talbot Horizon…

Elle prend la suite de la célèbre « 1100 ». Elle a été étudiée à Poissy. Les motorisations iront de 1200 à 1500 cm3. Elle recevra le moteur diesel XUD de PSA. Elle sera produite à près de 900 000 exemplaires. Elle sera produite également en Espagne.

La Talbot Horizon de 1977-87

La Talbot 1510 (c’est une 1307/1308 restylée) de 1979-82

La Solara (version tricorps de la 1510) de 1980-86

La Tagora. Chrysler décide de lancer un véhicule haut de gamme en 1976. L’étude se fait en Angleterre. Il est prévu que l’auto soit équipée d’un antique moteur Chrysler 4 cylindres. Quand PSA reprend l’affaire, cette auto est entièrement revue. Elle utilise un nombre important d’éléments de 604, et reçoit une motorisation Diesel efficace de Peugeot et également le V6 PRV … Mais l’auto arrive tard, le marché du haut de gamme s’est encore rétréci et elle fait de l’ombre à la 604. 20 000 exemplaires seront produits à Poissy.

La Tagora de 1980-83

Le bas de gamme Talbot est assuré en catastrophe par la création de la Samba. Elle est issue d’une plateforme Peugeot 104, qui a déjà fourni la Citroën LNA. C’est la plateforme de la version Coupé 104, mais rallongée… qui sera utilisée pour la dernière auto de la marque Talbot, équipé du moteur “X“ de Peugeot.

Talbot Samba de 1981-86

Les Constructeurs “associés“

Matra est à l’origine une entreprise créée en 1937, (baptisée Matra en 1941) et qui avait à l’origine ses activités plutôt dans l’aéronautique et l’armement. En 1962 elle se diversifie dans l’automobile en reprenant la société René Bonnet. En 1973 Matra s’associe avec SIMCA et lancera successivement :

La Bagheera de 1973-80 équipée d’une mécanique SIMCA, de 1300cm3

La Murena de 1980-84 équipé du moteur des Chrysler 160/180 de 2200cm3

En 1977, face aux crises pétrolières ce type d’auto n’a plus la cote. Matra lance alors un produit original, la Rancho, sans doute précurseur et première auto dite de loisir. Elle est construite sur une base de SIMCA 1100, version camionnette, habillée d’une caisse en plastique.

Toutes ces autos seront fabriquées à Romorantin.

La Rancho de 1977-83

Et puis n’oublions pas que Matra proposera son projet P18, le concept de l’Espace, que PSA ne voudra pas et que finalement Renault prendra sous sa houlette avec le succès que l’on connaît…

CG (Chappe et Gessalin). Ce petit constructeur, à l’image des René Bonnet, Alpine et bien d’autres encore à cette époque, se lance dans la conception et la commercialisation de véhicules de sport à carrosserie Polyester. Différents modèles seront créés à base de mécanique SIMCA tel que par exemple :

La CG de 1967-73

Les Talbot primordiales à Poissy.

Charles Talbot, un anglais, s’associe en 1903 avec Adolphe Clément-Bayard pour assembler en Angleterre les automobiles Clément-Bayard françaises. En 1934, Anthony Lago rachète l’entreprise qui devient Talbot Lago. Sans jamais sortir de l’artisanat, et malgré des succès spectaculaires en compétition, la firme, en grande difficulté, est reprise par SIMCA en 1958 : Les belles Talbot disparaissent. La marque renaîtra, pour un temps limité, nous l’avons vu, en 1979, sous la houlette de PSA…

Pour ces raisons historiques on peut donc admirer quelques unes de ces prestigieuses voitures parmi la collection de Poissy.

L’agonie des Talbot

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Talbot DC de 1921-23

Talbot Lago Spécial T 150C de 1939

Talbot Lago Grand Sport T26 de 1946-55

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