Introduction
L’imminente présidence française du Conseil est l’occasion de réfléchir sur les problématiques clés qui animent le débat politique français, à la fois quant à la direction de la société française à l’intérieur de l’hexagone et de ses territoires ultra-marins, et quant à l’action de la France et l’image qu’elle véhicule auprès de ses interlocuteurs européens.
Parmi ces problématiques, la laïcité est certainement parmi celles qui, aujourd’hui, suscitent le plus de débat en France et le plus de consternation à l’étranger.
En France, il peut parfois sembler que la définition de la laïcité est bien le premier sujet de société qui anime la sphère publique – c’est un prisme à-travers lequel est débattu des questions aussi distendues que les parents-accompagnateurs scolaires, les habits de bain, la composition des menus en cantines collectives, l’aménagement urbain, mais aussi (bien sûr) l’encadrement des associations cultuelles, l’enseignement confessionnelle, les aumôneries dans certains établissements publics, et la liberté de religion ou de conviction.
Vu de l’étranger, la laïcité peut paraitre comme un tropisme français ; le signe du désamour historique entre la France et la chose religieuse, qui se traduit par une culture anticléricale (voir diffamatoire envers les personnes et communautés religieuses) et par un régime étatique historiquement hostile aux cultes (et dont aujourd’hui la minorité musulmane en patie tout particulièrement).
Cette manière de parler de la laïcité, que ce soit en France ou à l’étranger, comme d’un sujet sulfureux (ce « mot qui sent la poudre » pour reprendre l’expression de Jean Rivero) ; cette manière de l’aborder comme un concept fleuve qui entraine une multiplicité confuse d’enjeux sociétaux (mineurs et majeurs, souvent mis à pied d’égalité) – tout cela a pour effet néfaste de troubler le regard analytique que nous devons porter sur cette idée majeur de notre époque et aussi d’envenimer le débat que nous pouvons avoir sur la manière dont nous voulons vivre la laïcité dans la société française contemporaine.
A-partir de ce diagnostic quelque peu désolant, ce que je voudrais faire aujourd’hui c’est apporter des éléments de réponses à trois questions :
· Qu’est-ce que la laïcité ?
· Pourquoi peinons-nous à structurer le débat public autour d’une idée partagée de la laïcité ?
· Comment pouvons-nous mieux penser et débattre de la laïcité ?
Qu’est-ce que la laïcité ?
Le consensus autour de 1905
A prime abord, la réponse à cette question devrait être facile à formuler car il existe un corpus législatif et juridique qui a force de loi et dont la validité fait presque l’unanimité parmi les belligérants de la laïcité, qu’ils soient de gauche ou de droite, de tendance universaliste ou particulariste. De plus, quasiment tous les commentaires s’accordent pour débuter le travail de définition de la laïcité à partir d’un même point : la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat.
Mais pourquoi débuter là ? En effet, cette loi se déploie sur 44 articles et dans aucun n’est-il écrit le mot « laïcité ». Mais cette loi codifie et institutionnalise en France un modèle de rapport entre le politique et le religieux qui se distingue par un :
« aménagement du politique en vertu duquel la liberté de conscience et de religion se trouve garantie aux citoyens par un Etat neutre à l’égard des différentes conceptions de la vie qui coexistent dans la société, et ce, conformément à une volonté d’égale justice pour tous ».[1]
Ce modèle, dont l’origine est difficile à situer mais qui est intimement lié à la modernité occidentale, n’est pas exclusif à la France. Il caractérise, à degré divers et sous différentes formes, la majorité des régimes occidentaux modernes, qui reposent sur une légitimité anthropocentrique et non pas théocentrique, et qui reconnaissent le principe de la liberté de conscience et de religion. Cette caractérisation s’applique tout aussi bien à des régime formellement séparatistes, tels que la France et les Etats-Unis, qu’à des régimes ayant retenus une religion d’état, tels que le Royaume-Uni et le Danemark.
Non seulement ce régime n’est pas exclusif à la France, mais sa théorisation française, puis sa codification dans le droit français, s’inspire très fortement d’expériences étrangères. Jean Baubérot a souvent rappelé que « lors de la préparation de la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905, la Commission parlementaire, et son rapporteur Aristide Briand, se soucient des législations étrangères » et que Briand citait l’Irlande, le Canada, les États-Unis, le Mexique, Cuba, et le Brésil sont cités comme des exemples de régimes « réellement neutre et laïque [où] l’égalité et l’indépendance des cultes sont reconnues [et] les Églises sont séparées de l’État ».[2]
En France, ce modèle s’impose progressivement (et non sans contre-temps) à partir de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 et son article 10 :
« Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »
Dans le sillon de 1789, et en continuation des lois Ferry (1882) sur l’instruction laïc, 1905 est l’année de basculement lorsque la France passe d’un régime concordataire (1801-1905), marqué par la reconnaissance et la surveillance étatique de la religion, vers un régime laïc, marqué par la liberté et la séparation.
Car ce sont là les deux mots clés de loi du 9 décembre autours desquels sont rédigés les articles 1 et 2 de cette loi.
Art 1 : La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public.
Art 2 : La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. [...]
Alors, même si le mot « laïcité » n’apparait pas dans le texte de cette loi charnière, il est claire que ces deux articles reprennent le modèle décrit jusque-là par ce mot, notamment par Ferdinand Buisson dans son Dictionnaire de la pédagogie de 1882. Il faudra encore attendre l’adoption de la Constitution de 1946 (et son article 1) pour que « le principe de laïcité figure au nombre des droits et libertés » garantis par l’Etat.[3] Mais, pour reprendre une formule répandue, c’est bien 1905 qui représente la clé de voute de la laïcité dans le droit français.
Les discordances : applications, interprétations
Donc, nous avons là certains éléments à partir desquels nous pouvons formuler une définition substantive de la laïcité. C’est un modèle politique dans lequel la liberté de conscience et de religion se trouve garantie aux citoyens par un Etat neutre à l’égard des différentes conceptions de la vie qui coexistent dans la société. Plus particulièrement en France, ce modèle prend la forme d’un régime de séparation dans lequel l’Etat ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. Mais alors, si nous arrivons si facilement à identifier cette définition et ces principes (qui sont à la fois claires et qui font l’objet d’un large consensus) pourquoi est-ce que la laïcité suscitent-elle tant de discorde et d’effroi ?
Pourquoi peinons-nous à structurer le débat public autour d’une idée partagée de la laïcité ?
La raison tient au fait que c’est une chose que d’énoncer un principe sur papier, c’en est une autre que de l’interpréter et de l’appliquer en pratique. Si 1905 représente un point de départ commun dans notre conception collective de la laïcité, très vite les chemins divergent quant à la juste manière de mettre en œuvre le modèle de la laïcité.
En effet, cette mise en œuvre soulève des problèmes conceptuels et philosophiques :
· Qu’entendons-nous par le libre exercice des cultes ?
· Comment faut-il définir l'intérêt de l'ordre public ?
· Si la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte, comment peut-elle assurer la liberté de conscience et garantir le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels que les prisons, les hôpitaux, et les armées ?
Elle soulève aussi des problèmes circonstanciels liés au profil religieux et sociétal de la France au moment de la promulgation de la loi :
· Comment entretenir le vaste patrimoine religieux (et majoritairement catholique) à-travers le pays ?
· Comment faire pour que les Eglises et les personnes religieuses respectent et adhérent à ce régime laïque ?
· Faut-il appliquer ce régime à tous les territoires sous gouvernance française ?
Des problèmes tels que ceux susmentionnés ne sont pas irrésolvables. Dans beaucoup de cas, le corpus législatif et juridique français apporte des solutions. Cependant, même si ces solutions apportent des résolutions d’application, elles signalent aussi les points de tensions interprétatifs qui font obstacle à une idée partagée de la laïcité.
Interprétations libérales
Ainsi, par exemple, l’alinéa 2 de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 prévoit que des services d'aumônerie peuvent être inscrits aux budgets de l’Etat afin d’assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics – alors même que l’alinéa 1 ce même article exclut le financement public des cultes !
Ou alors, lorsque le clergé catholique, sous l’impulsion du Saint Siège, refuse de constituer des associations cultuelles et de coopérer aux inventaires des biens dans les églises, tel qu’il était prévu dans le régime de séparation, l’Etat adopte une nouvelle loi le 7 janvier 1907, dont l’article 5 stipule qu’à
« défaut d'associations cultuelles, les édifices affectés à l'exercice du culte, ainsi que les meubles les garnissant, continueront [...] à être laissés à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion ».
Plus tard, en 1924, les accords Poincaré-Cerretti entre la France et le Saint-Siège permettent la création d’associations diocésaines contrôlés par les évêques français nommés par Rome – un accord qui encadre l'organisation du culte catholique en France jusqu’à ce jour.
Dernier exemple : En 1958 (31 décembre), la loi Debré instaure un système de contrats que les écoles privés (dont les écoles confessionnelles) peuvent signer avec l’Etat. Ce système d’enseignement privé sous contrat prévoit que l’Etat rémunère les enseignants dans ces écoles en échange de quoi ces écoles doivent appliquer le programme de l’Education nationale et sont interdits de sélectionner leurs élèves sur des critères confessionnels. A l’époque cette loi suscita une grande controverse puisque, selon ses critiques, elle constitue une forme de subvention aux cultes.
Ces quelques cas illustrent des interprétations (ou des accommodements) libérales au sein du régime de la laïcité – interprétations qui, selon certains, sont en tension avec le principe de séparation.
Interprétations restrictives
Mais, bien sûr, plus récemment, nous avons vue des interprétations législatives plutôt restrictives, contredisant, selon certains, le principe de liberté. La plus importante fut sans aucun doute la loi du 15 mars 2004 encadrant le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics. De nombreux auteurs, dont Philippe Portier et Stéphanie HENNETTE VAUCHEZ, signalent cette loi comme un point de rupture dans l’histoire de la laïcité française. Rupture, car elle marque « la première fois qu'un texte prescrit clairement une obligation de neutralité religieuse pesant sur des personnes privées au nom du principe de laïcité ».[4] Rupture aussi parce qu’elle annonce une transition entre une interprétation dominante de la laïcité organisé autour du principe de la neutralité de l’Etat vers une interprétation dominante de la laïcité organisé autour du principe de l’adhésion des personnes privées aux valeurs de la République.
Depuis 2004, ce principe de l’adhésion aux valeurs de la République progresse dans le débat public et dans les priorités politiques de gouvernements successifs, notamment à-travers la circulation d’une charte de la laïcité dans les établissements scolaires depuis 2013.
Dernière pierre législative apporté à cet édifice : La loi confortant le respect des principes de la République (dite loi contre le séparatisme) adoptée le 24 aout 2021. Cette loi est présentée comme un élément clé de la stratégie sécuritaire du Président Emmanuel Macron, afin de contrer « l’entrisme communautariste, insidieux mais puissant [qui] gangrène lentement les fondements de (la) société (française) dans certains territoires ».
Cette loi introduit de nombreuses mesures ; dont la modification de plusieurs aspects du cadre de 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État :
Renforcement des peines prévus par la police des cultes :La peine en cas de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence commise par un ministre des cultes est portée à cinq ans de prison.
o La tenue de réunions politiques dans des lieux de culte est plus sévèrement sanctionnée.
o L’organisation d’opérations de vote pour des élections politiques françaises ou étrangères y est clairement prohibée.
o Le juge pourra, par ailleurs, interdire à une personne coupable d'un délit à la police des cultes de paraître dans les lieux de cultes.
o Le préfet pourra fermer provisoirement les lieux de culte en cas d'agissements provoquant à la haine ou à la violence.
Révision des conditions de création et de gouvernance des associations gérant un lieu de culte afin de protéger contre des prises de contrôle malveillantes par des groupes radicaux (Clause dite anti-putsch)
Obligation pour les associations cultuelles de se déclarer auprès du préfet tous les cinq ans.
Renforcement des obligations comptables des associations cultuelles, ainsi que la possibilité accordée au préfet de s’opposer aux dons étrangers de plus de 10 000 euros et à la cession de lieux de culte à un État étranger lorsqu’un intérêt fondamental de la société est en jeu.
Autorisation octroyée à ces associations de détenir et exploiter des immeubles de rapport acquis par legs ou don.
Pour les associations dites mixtes, qui relèvent de la loi du 1er juillet 1901 et qui exercent un culte, leurs obligations, notamment administratives et comptables, sont alignées sur celles des associations cultuelles : certification dans certains cas de leurs comptes, distinction comptable de leurs activités cultuelles du reste de leurs activités, déclaration de l'argent provenant de l'étranger...
2 tendances clés : renforcement sécuritaire et alourdissement bureaucratique.
Comment pouvons-nous mieux penser et débattre de la laïcité ?
A-travers ces exemples, j’espère avoir illustré, que malgré un point de départ commun, la difficulté à structurer le débat public autour d’une idée partagée de la laïcité tient au fait des divergences d’interprétation que soulève son application au cours de l’histoire dans le complexe environnement qu’est une société moderne.
Finalement, un regard historique sur la laïcité peut nous inciter à revoir la manière dont nous pensons et débattons de ce sujet . Trop souvent, nous parlons de la laïcité comme d’un objet pleinement formé, dont la définition pourrait être fixé dans le temps, de manière définitive, selon nos priorités idéologiques. Or, au contraire, la laïcité est une idée sociale et politique qui évolue, nécessairement, avec le cours de l’histoire. Même s’il est légitime dans une société plurielle de souhaiter que la laïcité évolue dans un courant de pensée plutôt qu’un autre, il est important de garder à l’esprit que l’histoire de cette idée s’alimente de pensées multiples et donne lieu à de nombreuses tensions internes.
C’est seulement après avoir effectué un travail d’enquête historique sur ce qu’à été la laïcité (travail qui favorise un sentiment d’humilité épistémologique) que nous pouvons alors nous tourner sereinement vers la question normative : Que voulons-nous que soit la laïcité pour notre temps et pour notre forme de vie actuelle ?
Car, en effet, nous ne sommes pas que des observateurs passifs de l’histoire des idées, mais des acteurs de notre propre histoire. En tant que tels, il nous incombe de travailler à infléchir la direction de l’histoire selon notre sens du bien et de la vérité. En ce faisant, nous devons assoir notre action historique (tournée vers l’avenir) sur notre savoir historique (tournée vers le passé). Ce savoir nous apprend que la laïcité n’est pas l’apanage exclusif d’un camp politico-philosophique ou d’un autre. Elle n’est en soi ni séparatiste ni inclusiviste, ni de combat ni de gestion, ni ouverte ni fermé – mais elle englobe toutes ces positions dans son sillon.
Tout en œuvrant à orienter le sens de la laïcité vers tel ou tel horizon du bien qui nous habite respectivement – qui de gauche, qui de droite – il est primordiale de garder à l’esprit cette leçon d’humilité épistémologique qui nous est léguée par l’histoire : Nous ne pouvons pas prendre possession de la laïcité ; nous ne pouvons pas fixer ou arrêter son « vrai sens » de manière définitive.
Mais ce que nous pouvons faire c’est dialoguer les uns avec les autres, en veillant à rester à l’écoute les uns des autres, afin de contribuer à mieux définir cette idée pour notre temps et à l’infléchir à la forme de vie que nous partageons avec nos contemporains.
Quelles sont les contours de cette forme de vie contemporaine que nous partageons ?
D’abord elle se caractérise par une grande diversité en termes de convictions religieuses et areligieuses parmi les citoyens français et les résidents étrangers en France. Cette diversité ne tient pas d’un récit idéologique, mais d’un état de fait. Certains s’en réjouissent car ils tiennent la diversité comme valeur en soi, d’autres le déplorent car ils s’inquiètent d’un manque de cohésion sociale et culturelle. Cela ne change rien quant à la situation au sol.
Cette diversité est en fluctuation, mais elle se définit selon des tendances constantes depuis plusieurs décennies.
D’abord, elle est constituée par une part grandissante de personnes qui ne s’affilient à aucune tradition religieuse.[5] Comme l’a constaté Guillaume Cuchet, ces personnes, pour beaucoup, ont reçu la rupture confessionnelle en héritage ; ils constituent la deuxième, voir la troisième génération de non affiliés dans leurs familles. Certains se définissent comme athées, d’autres comme spirituels mais non religieux. Mais ils ont cela ont commun qu’ils se perçoivent comme autonomes par rapport aux Eglises et aux doctrines de morale et de métaphysiques transcendantales. Ainsi, ils incarnent pleinement ce « secular age » que Charles Taylor identifie comme étant la marque de notre époque moderne, où la non-croyance est devenue l’option préféré de la majorité, non par réflexion approfondie mais par défaut.
Cette diversité est aussi constituée par la croissance d’une constellation de religions minoritaires. Cela concerne l’Islam en premier lieu (12-13%), mais aussi, dans une moindre mesure, divers courants du christianisme protestant, le Bouddhisme, et les Nouveaux Mouvements Religieux.
A côté de la diversité, notre forme de vie contemporaine est aussi caractérisée par un héritage historique, qui n’est pas lettre morte mais qui continue d’habiter les imaginaires et d’influencer les pratiques des Français. Elément central de cet héritage, le catholicisme, autrefois dominant de par sa puissance institutionnelle et sa pénétration démographique. Aujourd’hui, le Catholicisme constitue une tendance minoritaire au sein de la population (39%, dont 13% de pratiquants) mais elle retient néanmoins une influence patrimoniale non-négligeable, notamment à-travers l’attachement identitaire chez beaucoup de français à un sentiment d’appartenance culturelle au catholicisme et aux traditions sociales qui lui sont liés.
Diversité croissante et persistance d’un héritage traditionnel ; ce sont là deux données clés lorsqu’on s’intéresse à la manière dont la religion se manifeste en France aujourd’hui et dont elle continue de peser sur notre forme de vie commune. Et ce sont là certainement les données les plus importantes avec lesquelles nous devons bricoler afin de mieux définir la laïcité pour notre temps.
Conclusion
Pour conclure, la laïcité dans le débat public en France tend à paraitre comme un « champ de bataille sémantique »,[6] à la fois ambiguë et envenimé. Pourtant, dans l’histoire des idées et le droit, la laïcité exprime une idée aux contours relativement circonscrits, qui n’est nullement exclusive à la France.
Cette idée est celui d’un modèle politique qui garantit la liberté de conscience et de religion par un Etat neutre à l’égard des différentes conceptions de la vie qui coexistent dans la société. En France, la laïcité a été institutionnalisé à-travers un régime de séparation entre les Eglises et l’Etat. Pour autant, si l’énonciation de ce cadre principiel ne suscite pas de polémique, l’interprétation des principes qui en découlent et son application dans la société n’en finissent pas d’embraser les passions politiques.
[1] Millot, La Laïcité, 2008, p. 34.
[2] Baubérot, Jean. « Transferts culturels et identité nationale dans la laïcité française », Diogène, vol. 218, no. 2, 2007, pp. 18-27. On peut s’interroger quant au jugement que portait Briand sur certains de ces régimes.
[3] https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2013/2012297QPC.htm
[4] https://www.conseil-constitutionnel.fr/nouveaux-cahiers-du-conseil-constitutionnel/separation-garantie-neutralite-les-multiples-grammaires-de-la-laicite
[5] Ces données peuvent être récoltées avec une dérogation de la CNIL
[6] Koussens, Mercier et Amiraux, Nouveaux vocabulaires de la laïcité
The view from the balcony of the Palazzo Re Enzo.
Mural in the garden behind the Fondazione per le Scienze Religiose Giovanni XXIII. A bit worrying actually...
The panel for the FoRB working group.
Bartholomew, Archbishop of Constantinople and Ecumenical Patriarch (the "Green Pope"), delivers a speech on the environment. Bad photo.
Piazza Maggiore and the Basilica San Petronio.
Germaine TILLION (1907-2008) entre au Panthéon le 27 mai 2015, marque de reconnaissance pour une femme qui, tout au long du XXème siècle, a pris le parti de la justice et de la vérité dans ses engagements: lutte contre le nazisme, contre l'univers concentrationnaire et contre l'oppression de femmes, choix de la décolonisation. Et qui a analysé magistralement ces phénomènes dans des ouvrages de fond.
L'association germaine Tillion, fondée en 2004 avec Germaine Tillion elle-même et sous sa présidence d'honneur, est titulaire du droit moral sur son œuvre, son nom et ses archives.
Madame,
Nous avons écouté avec attention l’entretien de Perrine Kervran avec Pierre Nora diffusé le 11 août 2021 sur France Culture dans le cadre de la série d’émissions « Avoir raison avec…Germaine Tillion » , épisode 3, « Une ethnologue dans la guerre d’Algérie ».
Nous avions immédiatement réagi, ainsi que de nombreux auditeurs, auprès de Perrine Kervran, puis de Sandrine Treiner via le site internet de la radio, mais il semble que nos mises au point n’ont pas encore été portées à la connaissance des auditeurs de France Culture dans la rubrique « courrier des auditeurs »
À nouveau nous tenons à vous faire part de notre indignation face au point de vue et aux propos de Pierre Nora qui reposent surtout sur des erreurs qu’il convient de rectifier. C’est le sens de notre démarche et nous nous adressons à la direction de France Culture afin que la vérité soit rétablie.
Tout d’abord, il nous semble que Pierre Nora fait un fâcheux anachronisme quand il tire des leçons générales des propos liminaires de Germaine Tillion sur le fait colonial.
Germaine Tillion se réfère alors à ses premières missions dans l’Aurès et non à la situation en 1958. Lors de ses missions ethnographiques de 1934 à 1940, elle menait son enquête sur le « terrain » dans une zone « où personne ne parlait français à 70 kilomètres à la ronde et (où) l’Européen le plus proche était à treize ou quatorze heures de cheval de mon campement ».
Quant aux Ultras qui auraient apporté leur soutien à "L’Algérie en 1957", de qui s'agit-il ? D’Albert Camus ? Lequel a effectivement écrit une présentation louangeuse de l'édition américaine. Ou bien de ceux qui en 1958 menaçaient Germaine Tillion de mort lorsqu’elle était courageusement venue à Alger témoigner à décharge pour un chef FLN ?
Comparer par ailleurs « les Centres sociaux » aux « Restaurants du cœur », comme le fait Pierre Nora, témoigne d’une méconnaissance des deux institutions. Les « Restaurants du cœur » délivrent de la nourriture auxplus nécessiteux ; les « Centres sociaux » créés par Germaine Tillion avait pour fonction de former à un métier, de préparer les Algériens à trouver leur place dans une Algérie moderne. Parmi les éducateurs de ce service, aux côtés de Français d'Algérie et de métropole, de nombreux Algériens et Algériennes, engagés dans la lutte pour l’indépendance, avaient la conviction de préparer l'avenir de leur nation. Le service créé par Germaine Tillion était si peu anodin que, dès sa création il fut la cible des persécutions de la police et de l'armée françaises, puis de l'OAS qui en 1962, assassina ses principaux dirigeants.
Que Germaine Tillion et Claude Lévi-Strauss n’aient pas eu la même conception de l’ethnologie, Germaine Tillion ayant une conception plus impliquée et engagée que Claude Lévi-Strauss, sans doute mais cela n’allait pas sans une profonde admiration de Claude Lévi-Strauss pour Germaine Tillion comme en témoignent les extraits de la lettre suivante : « Chère Mademoiselle, Depuis longtemps – en fait depuis Les structures (élémentaires de la parenté) -, j’avais formé le projet d’écrire un jour ce livre sur la « flaque » endogamique qui s’est étendue à un moment de l’histoire depuis l’Extrême Orient jusqu’à la Méditerranée. M’en voici dispensé, Dieu merci, puisque ce livre, vous venez de le faire, et fort bien… J’ai lu le Harem et les cousins avec un extrême plaisir, car il est rare dans notre profession de rencontrer un style aussi alerte et gracieux que le vôtre et qui n’exclut ni la rigueur de l’érudition ni la richesse et la fraîcheur de l’observation… ». Peut-être aurait-il été bon de tenir compte de cet hommage et de ne pas se contenter d’une opinion qui semblait définitive.
Une remarque enfin sur la réponse de Pierre Nora à votre intervention : « Mais Germaine Tillion était contre la torture ! », « Mais tout le monde était contre la torture "! Peu exprimaient publiquement cette condamnation si on en juge par les saisies et les procès à l'encontre des publications qui ont osé dévoiler cette pratique.
Pour Germaine Tillion, être contre la torture et contre les exécutions capitales ne se limitait pas à une opinion. Durant toute la guerre, elle a consacré son temps et ses forces - souvent au détriment de sa santé- à lutter contre ces pratiques par les moyens qui lui semblaient appropriés : démarches incessantes auprès des autorités, enquêtes dans les lieux de détention, développement de l'enseignement dans les prisons, témoignages devant les tribunaux militaires...Les condamnés à mort de la prison de Barberousse, entre autres, lui ont marqué leur reconnaissance.
Il convient donc, Madame, de porter ces mises au point à la connaissance des auditeurs de France Culture, soucieux de la rectitude des informations délivrées par la chaîne.
Dans l’attente de votre réponse, veuillez trouver ici l’expression de nos salutations distinguées.
L'Association Germaine Tillion, fondée en 2004 avec Germaine Tillion et sous sa présidence d'honneur," a pour objet de prendre toutes dispositions nécessaires …au respect du droit moral de l'œuvre, du nom et des archives de Germaine Tillion." (article 1 des statuts).
Rappel :
L'Association Germaine Tillion, fondée en 2004 avec Germaine Tillion et sous sa présidence d'honneur," a pour objet de prendre toutes dispositions nécessaires à la conservation, à la divulgation, à la mise en valeur et en général au respect du droit moral de l'œuvre, du nom et des archives de Germaine Tillion." (article 1 des statuts). Centre de ressources, elle met à disposition des personnes ou des institutions, des photos, des documents, deux expositions, "Germaine Tillion, sage, savante, combattante", (sa version anglaise "Germaine Tillion, Scholar, Militant, Sage Woman"), et "Germaine Tillion dans l'Aurès, 1934-1939", un film, "Germaine Tillion par elle-même", et sa version anglaise «Germaine Tillion in her own words», des intervenants et apporte sa contribution directe par des articles et des conférences. Réalisée par le Munaé de Rouen à l’initiative de Saadia Dahmani du Munaé en collaboration avec Nelly FORGET, présidente d’honneur de l’association, une exposition, « Le service des centres sociaux éducatifs en Algérie, 1955-1962. Une initiative de Germaine TILLION », est aussi proposée.
L’Association Germaine Tillion produit, pour les Editions Frémeaux & Associés, l’œuvre de Germaine Tillion sous forme de livres-audio dont le premier « Il était une fois l’ethnographie », sorti en octobre 2020. Le deuxième « Ravensbrück » en juillet 2021
Cette journée d’étude vise à réunir les chercheur.e.s de tout horizon travaillant autour du thème des congrégations féminines dans les contextes coloniaux et assimilationnistes. Dimension trop souvent négligée par la recherche en sciences sociales, l’histoire et l’anthropologie des missions catholiques féminines seront ici abordées dans leurs rapports aux mondes autochtones au XXe siècle. En situation coloniale, les congrégations de religieuses sont présentes non seulement pour soutenir l’effort d’animation pastorale permettant la progressive conversion des populations colonisées, mais elles sont également enrôlées, plus ou moins volontairement, dans les politiques sociales, éducatives et sanitaires alors imposées aux populations autochtones. Éducations et soins, prérogatives traditionnellement associées au féminin dans la culture occidentale, caractérisent la présence féminine en territoires missionnaires. Mais leurs rôles ne peuvent se réduire à ces seules activités ainsi décrites en des termes si généralistes. Focalisée sur le second élan des missions catholiques – tout particulièrement sur le XXe siècle, mais prenant en compte les prémices de la seconde moitié du XIXe siècle et n’omettant pas la période contemporaine – cette journée souhaite ouvrir autant que possible le champ de la comparaison à divers contextes géographiques (Amériques, Afrique, Asie, Océanie). Par cette mise en comparaison d’aires culturelles, il s’agira d’établir les convergences et les points communs pour tenter de dresser un portrait général des femmes missionnaires dans les contextes coloniaux où il est question d’assimilation des populations autochtones. Mais également, l’ambition de cette journée sera de mettre en lumière et de constater les divergences (natures, causes, conséquences), les nuances et les spécificités contextuelles locales, et ce à partir d’études de cas géographiquement et temporellement situées.
La journée se déroulera dans un format hybride. Pour suivre la journée en ligne et obtenir le lien de connexion merci de vous inscrire à l’adresse suivante :
religieuses.mondesautochtones@gmail.com
Programme :
8h30 café d’accueil / mise en place technique
9h - 9h15 : introduction (Marion Robinaud)
Panel 1 : Ancrages (modération : Bruno Dumons, LARHRA-MSH Lyon / St-Etienne)
9h15-9h45 : Annalaura Turiano (École française de Rome) : Les Franciscaines Missionnaires de Marie en Égypte entre assimilation et distinction. Reconfigurations d’un apostolat féminin à l’heure des transitions impériales (1920-1970)
9h45-10h15 : Mélina Joyeux (Aix-Marseille Université) : Assimiler par l’enseignement technique et le travail féminin : les ouvroirs des Sœurs blanches en Algérie coloniale (fin XIXe siècle – entre-deux-guerres)
10h15-10h45 : Clélia Lacam (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) : Sœurs bleues et femmes gabonaises : une assimilation féminine en contexte colonial ? (Gabon, 1911-1955)
10h45 – 11h15 : discussion
11h15-11h30 : pause
Panel 2 : Raconter l’altérité (modération : Pierre-Antoine Fabre, CéSor, EHESS)
11h30 - 12h : Catherine Larochelle (Université de Montréal) : Femmes missionnaires, femmes auteures : la production épistolaire des missionnaires de l’Ouest canadien et leur rôle dans le projet d’assimilation des populations autochtones, 1850-1890
12h - 12h30 : Marie de Rugy (Sciences Po/Université de Strasbourg) : Assimilationnistes ? Les sœurs missionnaires dans les léproseries du sud-est asiatique, Birmanie britannique, Indochine française, XXe siècle
12h30 -13h : discussion
13h-14h30 : pause déjeuner
Panel 3 : Persistances (modération : Valérie Aubourg, université catholique de Lyon)
14h30 -15h : Ikram Kridene (Université Centrale de Tunis) : Les œuvres missionnaires catholiques féminines à Carthage : soigner, éduquer, assimiler
15h-15h30 : Alexis Artaud de la ferrière (Royal Holloway, University of London) : Femmes religieuses catholiques en Tunisie post-coloniale : les transformations contemporaines de la question de l’assimilation
15h30 - 16h : Solenne Couppé (EPHE/Musée du quai Branly - Jacques Chirac) : Des religieuses papoues nostalgiques du catholicisme missionnaire de l’époque coloniale ? Assimilation, inculturation et malentendu entre perspectives cosmologiques distinctes
16h - 16h30 : discussion.
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Résumés des interventions :
Panel 1 : Ancrages (modération : Bruno Dumons, LARHRA-MSH Lyon / St-Etienne)
Annalaura Turiano (École française de Rome) : Les Franciscaines Missionnaires de Marie en Égypte entre assimilation et distinction. Reconfigurations d’un apostolat féminin à l’heure des transitions impériales (1920-1970)
L’action des Franciscaines Missionnaires de Marie en Égypte au XXe siècle s’inscrit dans un contexte de mobilités missionnaires trans-impériales. Sous occupation (1882), puis sous-protectorat britannique depuis 1914, le pays voit affluer, au tournant du siècle, un grand nombre d’instituts et de congrégations féminines de langue française travaillant aussi bien en milieu cosmopolite (dans les grandes villes du Delta du Nil et du Canal de Suez) qu’en milieu « indigène » (auprès des Coptes des villes et des villages de Haute-Égypte notamment). La recherche sur le phénomène missionnaire en Égypte a surtout porté sur les missions protestantes (Baron, 2016; Sharkey, 2009). À partir du cas d’étude des FMM, cette communication vise à « dévoiler » (Curtis, 2016) l’histoire peu connue des missions catholiques féminines dans le cadre égyptien.
Dans les années 1920, les FMM sont appelées à travailler au service des sucreries franco-belges implantées dans la vallée du Nil (Nag Hammadi, Kom Ombo et Armant). Elles gèrent des écoles et des dispensaires destinés prioritairement aux personnels européens des sucreries. Les politiques de nationalisation de l’ère nassérienne (1954-1970) débouchent sur la fermeture des écoles gérées par les FMM. Les religieuses sont alors amenées à repenser leur mission dans la vallée du Nil.
En croisant archives missionnaires (fonds des FMM conservés à Rome) et diplomatiques (archives des ministères des Affaires étrangères français et belge), j’interrogerai, d’une part, l’adhésion des religieuses à la politique de la direction des sucreries, visant à la fois au maintien d’une distinction entre personnel européen et personnel « indigène » et à la clientélisation d’une élite égyptienne restreinte. La mise en place d’un double cursus scolaire (école ‘européenne’ en langue française et école ‘indigène’ en langue arabe), sera analysée tout comme les tentatives des FMM de déployer une action apostolique au-delà des colonies sucrières. Il s’agira, dans un second temps, d’analyser le redéploiement missionnaire à l’heure des politiques de nationalisation. Je me pencherai en particulier sur les multiples formes d’apostolat (tournées dans les villages, catéchèse, travail social auprès des femmes) que les religieuses mettent en œuvre dans le but de maintenir une « distinction catholique » parmi les Coptes.
En partant du cas d’étude des FMM, cette communication propose une réflexion sur l’articulation entre genre, religion et empire qui reste encore peu étudiée dans le cadre égyptien. Elle se veut plus généralement une contribution à une histoire transnationale du catholicisme au féminin à l’heure des transitions impériales.
Mélina Joyeux (Aix-Marseille Université) : Assimiler par l’enseignement technique et le travail féminin : les ouvroirs des Sœurs blanches en Algérie coloniale (fin XIXe siècle – entre-deux-guerres)
Cette communication entend étudier l’une des principales œuvres de la congrégation féminine catholique des Sœurs missionnaires de Notre-Dame d’Afrique (plus connues sous le nom de « Sœurs blanches ») en Algérie coloniale : les ouvroirs, institutions hybrides entre ateliers de production artisanale et centres de formation technique et ménagère pour filles et femmes autochtones. Si l’histoire de la congrégation des Sœurs blanches commence à être connue – toutefois moins bien que celle des Pères blancs –, les travaux se sont davantage concentrés sur l’Afrique subsaharienne (Langewiesche 2014), en particulier pour ce qui concerne les ouvroirs (Bobin 2003 ; Bondaz 2019) ; tandis que les études relatives aux Sœurs blanches en Algérie ont plutôt mis en avant les stratégies missionnaires d’évangélisation (Saaïdia 2009), de transformation du statut juridique des femmes colonisées (Ghabrial 2013) ou les activités sanitaires (Fredj 2012). Or, c’est bien en Algérie que se met en place dès les années 1870 ce système des ouvroirs, qui sera ensuite exporté vers d’autres territoires de mission. La stratégie missionnaire définie par Charles Lavigerie vise alors tout particulièrement les régions et populations amazighophones (Kabylie, Aurès, Sahara notamment Mzab), considérées comme plus facilement assimilables - c’est le « mythe berbère » (Abrous 2007) – et les femmes, perçues comme les portes d’entrée dans les foyers musulmans. Il s’agira alors d’interroger la place des ouvroirs dans cette stratégie d’évangélisation et d’assimilation entre la fin du XIXe siècle et l’entre-deux-guerres.
Pour ce faire, ce travail se fondera principalement sur les archives des Sœurs blanches (Rome), en particulier les diaires et rapports trimestriels, qui nous plongent dans le quotidien de la mission ; mais également les registres statistiques et les corpus photographiques apportant des regards complémentaires sur les aspects matériels souvent occultés dans les sources (Abrous, Claudot-Hawad 2017). L’enjeu est aussi d’interroger les apports et les limites des archives missionnaires comme sources pour une histoire des quotidiens féminins en situation coloniale.
L’assimilation, souvent abordée dans sa dimension politique, culturelle ou religieuse, sera ici envisagée d’abord dans ses aspects techniques et économiques. Il s’agira de réfléchir à la manière dont les cours de couture, de broderie, de tissage dispensés par les Sœurs blanches et le travail féminin artisanal dans et autour des ouvroirs participent à la diffusion de nouvelles techniques et savoir-faire européens (machine à coudre par exemple), pensés comme modernes, qui supplantent des techniques traditionnelles jugées archaïques. On tâchera alors de mesurer – dans les limites de la documentation disponible – la manière dont cet enseignement technique participe à la transformation de la place socio-économique des femmes dans les sociétés autochtones, en dessinant de nouvelles façons de travailler, de nouvelles pratiques domestiques et de nouvelles opportunités économiques.
Il s’agira dans un second temps d’interroger la place que ces activités profanes occupent dans la stratégie missionnaire dont l’objectif demeure, à terme, la conversion des populations autochtones. Les ouvroirs apparaissent comme des moyens de vaincre les réticences voire l’hermétisme de ces populations à l’égard des missionnaires chrétiennes et de gagner leur confiance en mettant l’accent sur des activités pratiques dont les femmes peuvent tirer des compétences domestiques ainsi qu’un petit revenu. Les interactions entre femmes missionnaires et femmes autochtones sont alors pensées comme une forme d’apostolat indirect : les ouvroirs apparaissent comme des lieux privilégiés de transmission de normes et de valeurs, qui témoignent de la volonté des Sœurs blanches de faire du travail un instrument d’élévation morale. À travers lui, l’enjeu est de discipliner les corps et les activités féminines pour les conformer à un idéal bourgeois et chrétien de la bonne ménagère, mère et épouse, tout en s’adaptant aux réalités socio-culturelles du terrain ; des adaptations qui inviteront à questionner la nature même du projet assimilationniste missionnaire, entre acculturation et hybridations.
Clélia Lacam (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) : Sœurs bleues et femmes gabonaises : une assimilation féminine en contexte colonial ? (Gabon, 1911-1955)
En 1936, Sœur Marie-Germaine Godar glorifie en ces termes l’apostolat féminin au Gabon :
« Relever la femme indigène de l’abjection où l’ont réduite des siècles d’esclavage et de polygamie ; la régénérer au point d’en faire une épouse et une mère respectée […] ; rêver de la hisser au faîte de l’échelle morale et sociale en la rendant apte à la vie religieuse, n’était-ce pas une chimère ? […] Cette folie, les Sœurs bleues la commirent ». (Godard 1936, p. 8)
Présentes au Gabon depuis 1849, les Sœurs bleues françaises s’érigent en libératrices des Gabonaises, éradiquant des pratiques africaines « asservissantes ». Outre leurs activités de conversion, les religieuses se font le relais des politiques coloniales et de la « mission civilisatrice » de la Troisième République. Plus encore, elles fondent en 1911 une congrégation autochtone, succès religieux à l’évidence, mais aussi pierre angulaire d’un processus d’assimilation qui vise à modeler les femmes africaines à leur image.
Cette communication abordera les logiques d’assimilation des Gabonaises par les Sœurs bleues entre 1911 et 1955, date d’indépendance de la congrégation « indigène ». Les missionnaires tentent de construire une nouvelle féminité africaine fondée sur des normes occidentales. Elles suivent en cela les politiques d’assimilation coloniales, visant à « limiter au maximum les différences entre la métropole et les colonies, dans le but d’en faire des petites France » (Taraud 2018, p. 159). Un corpus diversifié forme le socle de cette étude, rassemblant manuscrits (correspondance, documents administratifs conservés par les Sœurs bleues à Castres et Rome, par les Spiritains à Chevilly et par les Œuvres Pontificales Missionnaires à Lyon), imprimés (revues, ouvrages de propagande) et de nombreuses photographies.
Par leurs activités éducatives ou sanitaires, les Sœurs bleues prétendent « civiliser » les Gabonaises jusqu’à faire d’elles des répliques des Françaises de métropole (réussite exhibée à l’exposition coloniale de Vincennes en 1931). Il s’agit d’extraire les Gabonaises de leur « esclavage conjugal » (polygynie, compensation matrimoniale) et de recomposer la répartition sexuée des tâches afin de leur inculquer des normes européennes (famille nucléaire, mères dévouées). Confrontées à ces injonctions normatives, les Gabonaises envisagent-elles ce nouveau modèle comme une libération féminine ? N’élaborent-elles pas des stratégies pour affirmer leur agency face à ces religieuses très prescriptives ? La fondation d’une congrégation gabonaise est par ailleurs présentée comme l’aboutissement religieux des logiques d’assimilation. Non seulement les Gabonaises mènent une vie religieuse à l’occidentale, mais prennent encore part aux œuvres éducatives et sanitaires, devenant des relais autochtones de la « mission civilisatrice ». Leur célibat consacré parachève l’assimilation aux Sœurs bleues – état singulier dans une société africaine fondée sur le mariage et la maternité. Pour autant, cette implication des Gabonaises dans une vie religieuse à la française est-elle synonyme d’égalité ? Ces dernières se distinguent en effet des sœurs occidentales par leur costume (noir et non bleu) ou leurs conditions de vie (habitation et nourriture locales, pieds nus). Les Sœurs bleues n’imposent-elles pas finalement une subalternité toute coloniale à des religieuses jugées résolument inférieures ?
Panel 2 : Raconter l’altérité (modération : Pierre-Antoine Fabre, CéSor, EHESS)
Catherine Larochelle (Université de Montréal) : Femmes missionnaires, femmes auteures : la production épistolaire des missionnaires de l’Ouest canadien et leur rôle dans le projet d’assimilation des populations autochtones, 1850-1890.
Les historiens qui ont composé l’histoire de la colonisation catholique du « Nord-Ouest » canadien au 19e siècle se fondent principalement sur les écrits des Oblats de Marie-Immaculée, écrits qui mettent de l’avant leurs actions et dégagent parmi eux des figures héroïques, toutes masculines par conséquent (Choquette 1995, Huel 1996, Foran 2017). Ce sont les mêmes personnages que les synthèses historiques en histoire religieuse présentent lorsqu’elles survolent l’activité missionnaire dans cette région (Sylvain et Voisine 1991, Fay 2002). L’examen approfondi de la construction des savoirs et récits historiques révèle pourtant l’existence de plusieurs autrices importantes : les sœurs missionnaires. Je montrerai que, par leurs récits de fondation et leurs correspondances détaillées, tous deux publiés dans des périodiques généralistes et spécialisés dès le milieu du 19e siècle, les sœurs missionnaires documentent le processus d’assimilation des populations autochtones.
Par ailleurs, les archives des congrégations sont riches des correspondances non publiées des sœurs missionnaires. L’objectif de la communication sera de contraster les écrits publiés (et édités) des sœurs missionnaires avec les correspondances non destinées à la publication. Le corpus utilisé sera constitué des écrits de missionnaires féminines canadiennes-françaises dans le Nord-Ouest américain (1850-1890) publiés dans des revues missionnaires et d’autres périodiques (au Canada et en Europe) à cette époque. Un cas précis sera étudié : celui de sœur Célina Allard des Sœurs Grises de Montréal. Son journal de mission (Fort Totten, Dakota du Nord, 1874-1881) et sa correspondance avec son frère et d’autres proches seront examinés en complément de ses écrits publiés.
Quelle vérité trouve-t-on dans cet examen comparatif ? Y a-t-il une différence entre le récit “littéraire” de la fondation et de la rencontre avec les populations autochtones et le récit “intime” fait aux proches ? Quel est le discours de cette sœur par rapport à son travail de missionnaire auprès des populations autochtones à évangéliser et à assimiler ? Ces réflexions permettront de réévaluer le rôle des femmes dans l’histoire coloniale canadienne à partir de leur point de vue de la politique assimilationniste.
Marie de Rugy (Sciences Po/Université de Strasbourg) : Assimilationnistes ? Les sœurs missionnaires dans les léproseries du sud-est asiatique, Birmanie britannique, Indochine française, XXe siècle.
À partir de 1898, les Franciscaines Missionnaires de Marie (FMM) sont présentes dans deux léproseries de Birmanie, à Rangoun et à Mandalay, avant d’accepter en 1932 la léproserie de Qui-Hoa, en Indochine française. De leur côté, les Filles de la Charité prennent en charge les léproseries de Djiring (1937), Dakkia (1938), et finalement Ben San (1959) en Indochine française, puis Vietnam à partir de 1954.
En analysant les archives générales des Filles de la Charité et des FMM, croisées avec les archives coloniales, on s’interrogera sur le rôle de ces congrégations féminines dans les léproseries – activités de soin, enjeux spirituels – et sur leur positionnement par rapport à la politique d’enfermement prônée par les gouvernements coloniaux. On verra notamment si les contextes birman et vietnamien sont comparables, si la volonté assimilationniste est la même, et si le rapport des congrégations féminines aux autorités est semblable. On se demandera enfin quel regard les sœurs portent sur les populations autochtones, quelles représentations elles en donnent en métropole, via leurs publications à l’attention des donateurs – et comment leurs descriptions nous permettent d’appréhender ces populations autochtones et de remettre en cause cette catégorie, devant la diversité des acteurs qui se trouvent à la léproserie et réagissent diversement à la présence des sœurs.
Panel 3 : Persistances (modération : Valérie Aubourg, université catholique de Lyon)
Ikram Kridene (Université Centrale de Tunis) : Les œuvres missionnaires catholiques féminines à Carthage : soigner, éduquer, assimiler.
À l’époque contemporaine, Carthage a accueilli plusieurs congrégations féminines : les Sœurs de Saint-Joseph de l’Apparition, les Sœurs missionnaires de Notre-Dame d’Afrique, les carmélites et les Sœurs Franciscaines Missionnaires de Marie. Le cardinal Charles-Allemand Lavigerie, qui rêvait de repeupler Carthage et d’en faire le point de départ d’un vaste projet d’évangélisation de l’Afrique, avait fait appel à ces différentes congrégations, et leur avait confié des tâches spécifiques, en rapport avec son projet missionnaire, mais également avec le projet colonial. Les Sœurs étaient entre autres chargées d’instruire et de soigner les populations autochtones, ce qui leur permettait de s’en rapprocher, de pénétrer dans l’intimité des familles, de créer des liens forts avec les femmes et les enfants en particulier, et, ce faisant, de présenter la France et le catholicisme sous leur meilleur jour.
Nous nous proposons dans cette communication, qui s’inscrit dans le premier axe de la journée d’étude, de présenter les résultats de notre recherche doctorale sur les œuvres éducatives et sanitaires de ces congrégations. Il s’agira de montrer comment l’histoire de Carthage antique, les choix architecturaux et décoratifs des bâtiments congréganistes, les instructions données aux Sœurs, l’organisation de leurs activités et leurs relations avec les autochtones étaient orientés vers la « colonisation pacifique », dont le but avoué était l’assimilation des indigènes. Nous analyserons pour cela les oeuvres congréganistes et les choix stylistiques des bâtiments (églises, couvents et écoles), en se référant à notre travail de terrain ainsi qu’aux documents d’archives, issus des archives nationales de Tunis, des Archives de la prélature de Tunis, et des archives congréganistes (celles des Sœurs Missionnaires d’Afrique et celles des Sœurs Franciscaines Missionnaires de Marie). Ainsi, nous verrons l’importance particulière de ces congrégations féminines dans un projet d’assimilation voulu et mis en place par des assemblées exclusivement masculines.
Alexis Artaud de la ferrière (Royal Holloway, University of London) : Femmes religieuses catholiques en Tunisie post-coloniale : les transformations contemporaines de la question de l’assimilation.
L’indépendance nationale de la Tunisie en 1956, puis la nationalisation des terres agricoles détenues par les colons européens en 1964, entrainèrent un effondrement démographique de la présence catholique en ce pays. Alors qu’en 1956 environ 250,000 catholiques résidaient en Tunisie, il n’en restait plus que 7,000 en 1964 (Cugusi, 2014). Or, malgré cela, l’Église s’est maintenue sur le territoire tunisien, notamment à travers la présence continue de congrégations féminines. Aujourd’hui, douze congrégations y sont présentes, réparties en 22 communautés (Archdiocèse de Tunis 2020). Celles-ci se trouvent non seulement dans la capitale, mais aussi en milieu rural à l’ouest et au sud du pays. La présence contemporaine des congrégations féminines en Tunisie représente une continuité historique avec l’action d’enseignement (Arnoulet, 1994), médicale (Dornier, 2000) et missionnaire que les femmes religieuses y menaient durant la période coloniale. Cependant, le strict encadrement juridique auquel sont soumises les activités de l’Église depuis la signature du Modus vivendi entre le Saint-Siège et la République Tunisienne en 1964, ainsi que la réorientation de la doctrine sociale de l’Église et de ses relations inter-religieuses consacrée par les constitutions issues du Conseil Vatican II, marquent une rupture dans le sens que les femmes religieuses attribuent à leur présence en Tunisie (Artaud de La Ferrière, 2018). Autre élément important : la disparition de la génération de femmes européennes qui ont vécu la décolonisation, remplacée progressivement par des religieuses plus jeunes, souvent originaires de pays du Sud.
En abordant l’histoire des missions catholiques féminines à travers la période contemporaine en Tunisie, l’objet de notre communication sera d’interroger, à partir de sources archivistiques et d’entretiens d’histoire orale, la question de l’assimilation par sa persistance mémorielle et par ses manifestations multiples. En effet, si la majorité des femmes religieuses présentes en Tunisie aujourd’hui ne conçoivent pas leur mission comme celle d’une annonce explicite de l’évangile tendant vers la conversion des musulmans, l’héritage des missions et le positionnement des congrégations par rapport à cet héritage fait débat -notamment entre groupes nationaux et générationnels. En interrogeant ce débat, nous pouvons aussi observer que l’assimilation n’est pas qu’un phénomène uni-dimensionnel cantonné au passé lointain. Cette question continue de resurgir sous d’autres formes. Les femmes religieuses ayant vécu la majorité de leur vie en Tunisie, qui se voient souvent mourir en ce pays, s’y sentent-elles assimilées ? Il est rare qu’elles accèdent à la naturalisation et, même lorsqu’elles exercent des activités parmi la population autochtone, leurs relations sociales sont majoritairement ancrées au sein de communautés catholiques allogènes. La question de l’assimilation se pose aussi au sein des congrégations elles-mêmes. Alors que celles-ci sont en cours de renouvellement, comment se situent les nouvelles femmes religieuses, arrivant souvent des pays du Sud, par rapport à leurs aînées européennes et les priorités missionnaires préexistantes ? Finalement, la question de l’assimilation se pose par rapport au petit nombre de Tunisiens qui se présentent aux religieuses catholiques dans une volonté de conversion. Comment répondre à cette demande et accompagner les catéchumènes alors que ce choix implique souvent une importante rupture sociale ?
Solenne Couppé (EPHE/Musée du quai Branly - Jacques Chirac) : Des religieuses papoues nostalgiques du catholicisme missionnaire de l’époque coloniale ? Assimilation, inculturation et malentendu entre perspectives cosmologiques distinctes.
Cette intervention est un exposé de la situation contemporaine d’une communauté de religieuses mélanésiennes nostalgiques de l’époque du catholicisme colonial en Papouasie Nouvelle-Guinée. Ceci nous amènera à relativiser la capacité de transformation d’une politique missionnaire assimilationniste pour le cas du clergé autochtone dans cette région du monde.Cette communication se base sur des matériaux ethnographiques et historiques recueillis au cours de quinze mois de terrain effectués dans le bourg catholique de Vunapope entre 2013 et 2017. Vunapope est installé sur les rives du nord-est de l’île de la Nouvelle-Bretagne. Les missionnaires du Sacré-Cœur l’ont construit à leur arrivée en Papouasie Nouvelle-Guinée à la fin du 19e siècle. Pendant un siècle, Vunapope leur servit de quartier général dans l’archipel Bismarck, la région insulaire du pays, où ils privilégièrent d’abord une politique d’assimilation courtermiste et agressive envers les conceptions culturelles locales(rachat d’esclaves et d’enfants mis en pensionnats à Vunapope, association avec le pouvoir colonial allemand, répression de la sorcellerie, entre autres).
Au cours du 20e siècle, la Mission du Sacré-Cœur s’écarta progressivement de cette idéologie de la conversion, notamment après avoir essuyé en 1904 les meurtres de dix missionnaires supposément orchestrés par l’une de ses pupilles en réponse à la violence de la transformation qu’elle exigeait. Après le Concile Vatican II (1962-1965), les missionnaires ont globalement abandonné l’idéal assimilationniste dans leur relation au laïcat mélanésien, afin d’embrasser la théologie de l’inculturation qui donne de l’importance aux pratiques culturelles locales dans la mesure où elles témoignent de la présence de valeurs chrétiennes. J’argumenterai toutefois que dans le cas du clergé autochtone en Papouasie Nouvelle-Guinée, l’Église catholique n’est pas en mesure de relativiser l’idéologie assimilationniste eurocentrique. Commencée au début du 20e siècle avec la création de la congrégation des nonnes autochtones de Vunapope, l’indigénisation du clergé s’est intensifiée en Papouasie Nouvelle- Guinée après l’indépendance du pays en 1975, jusqu’à remplacer la quasi-totalité des missionnaires à l’orée du 21e siècle. C’est à ce moment-là que Vunapope est devenu le centre administratif de l’archidiocèse de la Province Orientale de Nouvelle-Bretagne. Habités par deux cents personnes, la moitié de ses habitants sont aujourd’hui des membres du clergé autochtone, pour la plupart des nonnes papoues, et l’autre moitié rassemble des familles des laïcs travaillant pour l’archidiocèse.
Pour les nonnes papoues de Vunapope, la démissionnarisation de l’Église catholique a cependant été suivie, à l’époque postcoloniale, du retour des Mélanésiens à une situation prémissionnaire anomique et dominée par une mentalité païenne antinomique avec les valeurs chrétiennes. Dans les temps actuels troublés, les missionnaires continuent de représenter pour elles le modèle que les membres du clergé autochtone doivent s’évertuer à suivre. Ces Européens d’antan apparaissent ainsi comme des individus aux vertus exceptionnelles et incorruptibles, par contraste avec les Mélanésiens dont les qualités ontologiques les empêchent d’égaler ces allochtones sur le plan éthique. Ces religieuses mélanésiennes font donc le constat inverse de celui des inculturalistes, en continuant de poursuivre, à leur manière, le projet supposé des premiers missionnaires ethnocentriques assimilant le christianisme à l’Occident. Il apparaitra toutefois que cet idéal des moniales pour l’époque missionnaire doit être compris depuis leur point de vue, soit celui de Mélanésiennes situées à la croisée entre d’un côté, le mode d’existence clérical centré sur le modèle romain, et de l’autre, celui du laïcat inculturé. Mon propos sera de montrer que tout en pratiquant le catholicisme dans une stricte orthodoxie, ces religieuses papoues continuent de s’exprimer dans le cadre de conceptions cosmologiques mélanésiennes. Pour le montrer, je m’appuierai notamment sur la récente controverse entre Joel Robbins et Mark Mosko sur la nature individualiste ou dividualiste du christianisme mélanésien.
La journée se déroulera dans un format hybride. Pour suivre la journée en ligne et obtenir le lien de connexion merci de vous inscrire à l’adresse suivante : religieuses.mondesautochtones@gmail.com