UNE COURTE HISTOIRE DE LA COMMUNE DE PARIS

( 18 MARS - 28 MAI 1871 ).

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Les causes, les acteurs et le déroulement des événements de la Commune de Paris de 1871.

Les causes

Le peuple de Paris épuisé par le siège des Prussiens est sous alimenté depuis cinq mois, par contre la misère pousse les assiégés à une consommation d'alcool record. La consommation d'absinthe sera quintuplée pendant cette période.

Jules Favres, le ministre des Affaires étrangères, veut à tout prix mettre fin à la guerre franco-prussienne afin d'éviter, dans la capitale, une prise de pouvoir qu'il craint.

La garde nationale ne veut pas accepter la capitulation et entend garder ses armes. Cette même garde nationale voit sa solde supprimée. Tous les hommes du prolétariat les "trente sous" (montant journalier de leur solde) qui sont membres de la garde nationale se trouvent privés de leur unique ressource.

Les ouvriers sans ressource, à cause de l'annulation du moratoire des effets de commerces et des loyers, doivent immédiatement payer leurs dettes et leurs loyers.

Thiers se dit "décidé à gagner la bataille contre le peuple de Paris" qu'il a perdu en 1848. L'ennemi e et assiégeant Bismarck approuve la politique de Thiers, offrant même son aide, si nécessaire, et pousse à l'écrasement d'un mouvement "populaire républicain à prétention socialiste".

La grande liberté de presse et de réunion instaurée sous l'empire règne toujours et favorise la propagation de la révolte et des idées révolutionnaires.

Les acteurs

Les insurgés fédérés sont environ 80 000 pour la garde active et 113 000 pour la garde sédentaire.

Les chefs "délégués à la guerre" sont :

Gustave Cluseret ; ministre de la guerre.

Louis Rossel, ancien capitaine de l'armée française qui refuse la capitulation et veut continuer le combat en intégrant la Commune. Il sera fait prisonnier, jugé et fusillé par les Versaillais le 28 novembre 1871.

Charles Delescluze, qui se fera tuer sur la barricade du Château d’Eau le 25 mai 1871.


Les chefs militaires de la Commune sont :

Jaroslaw Dombrowski, le seul officier de valeur et héros de l'indépendance polonaise évadé des prisons de Sibérie. Il sera tué au combat sur la barricade de la rue Myrrha le 23 mai 1871.

Gustave Flourens, professeur, membre de la Commune et commandant de la XXème légion. Le 3 avril 1870 il est fait prisonnier par les Versaillais et est, sans autre forme de procès, sauvagement sabré par un gendarme.

Charles Lullier, qui sera destitué par la Commune le 25 avril 1871.

Gustave Cluseret Louis Rossel Charles Delescluze

Jaroslaw Dombrowski Gustave Flourens Charles Lullier

Les autres personnages remarquables, entre autres, sont :

Eugène Varlin, commissaire aux subsistances de la Commune, une des plus pures et des plus nobles figures des révolutionnaires de 1871. Juste et généreux, il tentera en vain de sauver du massacre les otages de la rue Haxo. Livré aux soldats de Versailles par un prêtre, il sera fusillé sans jugement, après un calvaire de plusieurs heures.

Raoul Rigault, délégué à la préfecture de Paris et procureur rigide de la Commune. Arrêté par les Versaillais, il sera condamné à mort et exécuté.

Félix Pyat, homme de lettres et journaliste élu à la Commission des Finances, la Commission exécutive puis à celle du Salut public. Il échappera aux Versaillais, se réfugiera en Angleterre et sera amnistié en 1880.

Jules Vallès, écrivain, i

l relancera le journal " Le Cri du peuple", le plus lu pendant la Commune. Il échappera aux Versaillais et se réfugiera en Angleterre. Condamné à mort par contumace, il sera amnistié en 1880.

Louise Michel, institutrice elle devient révolutionnaire. Elle participe à la Commune, est arrêtée, emprisonnée puis déportée en Nouvelle-Calédonie. Elle y restera sept ans et sera amnistiée en 1880. Figure légendaire de la Commune cette femme extraordinaire sera surnommée" la vierge rouge". Victor Hugo, son ami, composera un poème dédié à Louise Michel : "Viro Major".

Prosper Olivier Lissagaray, journaliste il combattra sur les barricades. Il réussira à échapper aux soldats de l'armée de Versailles pour se réfugier à l'étranger. Il sera amnistié en 1880. Il est l'auteur d'une très célèbre "Histoire de la Commune de Paris".

Charles Billioray, peintre de profession il est élu au Conseil de la Commune délégué à la Commission des Services publics et à la Commission des finances. C'est un ardent défenseur des lois sociales et populaires. Arrêté par les Versaillais il est déporté en Nouvelle-Calédonie où il meurt après avoir été repris suite à une évasion.

Zéphirin Camélinat, ouvrier ciseleur de profession, il adhère à 'l'Internationale ouvrière", est nomme par la Commune directeur des postes puis directeur de la monnaie. Sa gestion de l'argent est un exemple de rigueur et d'honnêteté. Pendant la "Semaine sanglante" il combat sur les barricades, échappe aux Versaillais, se réfugie en Angleterre et est amnistié en 1810.

Jean-Baptiste Clément, ouvrier, chansonnier, il est élu au Conseil de la Commune, il se bat sur les barricades lors de la "Semaine sanglante, échappe aux Versaillais et se réfugie à Londres. Il revient à Paris après l'armnistie de 1880. Il est l'auteur de l'immortel "Temps des cerises et de bien d'autres chansons comme, par exemple "Dansons la Capucine".

Gustave Courbet, artiste peintre de grande renommée, il est nommé par la Commune membre de la Commission fédérale des artistes. Il est accusé par Versailles d'être l'instigateur de la destruction de la colonne Vendôme. Malgré son attitude plutôt libérale et non violente le gouvernement de Versailles ne lui pardonne pas le "déboulonnage" (nom inventé par Courbet lui-même pour l'occasion et qui à l'époque fit sensation) de la colonne dont la commission des artistes déclara à l'unanimité la "non-valeur artistique". Le peintre, condamné à payer les frais de la reconstruction du monument, s'exile en Suisse et y meurt ruiné.

Théophile Ferré, militant blanquiste, orateur au club des "Défenseurs de la République", membre du comité de vigilance de Montmartre, il coordonne l'insurrection lors de la journée du 18 mars 1871. Il est élus au Conseil de la Commune et nommé à la Commission de Sûreté générale comme "Substitut du procureur de la Commune", Raoul Rigault. C'est Ferré qui donne l'ordre de faire fusiller les otages, dont Mgr Darbois l'archevêque de Paris, le 24 mai 1871. Arrêté par les Versaillais le 28 mai, il est jugé, condamné à mort le 2 septembre, et fusillé le 18 novembre 1871. Il est le seul membre de la Commune de Paris condamné à mort et effectivement exécuté.

Jean-Baptiste Millière, avocat et militant socialiste il est directeur du journal d'opposition "La Marseillaise". Il est élu à l'Assemblée nationale et n'est pas partie prenante dans la Commune mais tente plutôt d'établir un compromis entre celle-ci et le gouvernement de Versailles. Arrêté il est, malgré son appartenance à l'Assemblée et sa modération, fusillé le 26 mai 1871 sur les marches du Panthéon. Il meurt en criant "vive le Peuple, vive l'Humanité !"

Jules Vallès Louise Michel P.O. Lissagaray Zéphirin Camélinat Théophile Ferré

Le déroulement des événements de la Commune de Paris



2 au 9 mars : Les fédérés enlèvent 26 canons aux Gobelins et les emmènent à l'école des frères à la Maison-Blanche.

15 mars : La loi sur les échéances, promulguée à Bordeaux, rapproche les commerçants de la Commune.

18 mars : Affaire des canons de Montmartre qui provoque un soulèvement à Paris. 40 000 hommes de l'armée de Paris sont chargés de reprendre les canons détenus par la Garde nationale. La manœuvre, très mal préparée, ne peut aboutir et les hommes du général Lecompte fraternisent avec la population accourue sur les lieux pour les empêcher de reprendre aux Parisiens "leurs canons". Lecompte menace de faire tirer sur la foule mais il est saisi par les fédérés et fusillé. Le général Clément Thomas qui passait malencontreusement par là est fait prisonnier à son tour. Malgré les efforts des modérés, la foule n'entend pas raison et Clément Thomas nommé depuis 1848 "le massacreur de juin" est fusillé à son tour.

20 mars : Thiers abandonne Paris et gagne Versailles ; le Comité central siège à l'Hôtel de ville de Paris.

26 mars : 90 membres sont élus au Conseil municipal de Paris qui prend en s'installant à l'Hôtel de ville le nom de Commune de Paris.

27 mars : Le Comité central remet solennellement ses pouvoirs à la Commune en présence de 200 000 Parisiens.

28 mars : La Commune constitue une Commission exécutive de 7 membres et vote les lois attendues ; report des loyers, abolition de la conscription et remise des objets mis au mont de piété valant moins de 10 francs.

1er avril : Thiers déclare : "L'Assemblée siège à Versailles où s'achève de s'organiser une des plus belle armée que la France ait possédée, les bons citoyens peuvent se rassurer et espérer la fin d'une lutte qui aura été douloureuse mais courte";

2 avril : Premiers combats à Courbevoie avec l'armée de Versailles commandée par le général Vinoy. Les obus commencent à tomber sur Paris.

3 avril : Tentative par les fédérés d'une marche sur Versailles stoppée par le tir des canons du Mont Valérien. Emile Duval, général de la Commune est fait prisonnier et est immédiatement fusillé ainsi que son état major. Gustave Flourens est arrêté par un gendarme qui lui fracasse le crâne d'un coup de sabre sans autre forme de procès.

4 avril : Les Versaillais attaquent Neuilly et prennent Courbevoie et Châtillon.

5 avril : Arrestation, par les communards, de 74 otages dont monseigneur Darboy l'archevêque de Paris. Louis Rossel, déserteur de l'armée de Versailles pour rejoindre la Commune est nommé chef d'état-major de Cluseret.

9 avril : Le général Dombrowski, héros de l'indépendance polonaise, est nommé commandant de la place de Paris. Ce sera le seul chef militaire de valeur de la Commune de Paris.

14 avril : Félix Pyat fait voter la destruction de la colonne Vendôme.

1er mai : Institution d'un Comité de Salut public auquel la Commune abandonne ses pouvoirs.

16 mai : La colonne Vendôme est abattue.

21 mai : 70 000 Versaillais entrent dans Paris par le bastion mal surveillé du Point du Jour et par la porte de Saint-Cloud. Dernier numéro du "Cri du Peuple" de Jules Vallès.

22 au 28 mai : C'est la "Semaine sanglante", Paris est reconquis rue par rue, barricade par barricade, la répression Versaillaise est féroce et impitoyable.

23 mai : Pour retarder l'avance des Versaillais les communards allument de vastes incendies. L'Hôtel de ville, le Palais de la Légion d'Honneur, le Palais des Tuileries, le Palais de Justice, la Cour des comptes, la bibliothèque du Louvre et de nombreuses rues de la capitale sont la proie des flammes. Ce même jour, la butte Montmartre d'où était partie la "Révolution du 18 mars" est prise par l'armée de Versailles.

24 mai : En application du "décret sur les otages" promulgué par la Commune, l'archevêque de Paris est fusillé avec d'autres otages.

25 mai : 424 prisonniers fédérés sont fusillés au parc Monceau et à Montmartre par l'armée Versaillaise. 52 otages sont fusillés, en représailles, par les insurgés. Charles Delescluze gravit la barricade du Château d’Eau abandonnée par ses défenseurs jusqu'à ce qu'une balle le tue.

27 mai : Le cimetière du Père-Lachaise est pris par les Versaillais après une lutte acharnée entre les tombes.

28 mai : La dernière barricade des fédérés tombe rue Ramponeau. A 15 heures toute résistance a cessé.

29 mai : La garnison désarmée du fort de Vincennes se rend, les officiers sont immédiatement passés par les armes par les Versaillais. Thiers télégraphiera ce même jour aux préfets à propos des Parisiens insurgés : "Le sol est jonché de leurs cadavres ; ce spectacle affreux servira de leçon.

Épilogue

30 000 insurgés seront tués dont 3 500 fusillés dans Paris sans jugement, 1900 le seront cour de la Roquette et plusieurs centaines au "Mur des fédérés" du Père-Lachaise.

40 000 prisonniers seront internés, dans les pires conditions, sur des pontons flottants et dans des places et enceintes fortifiées.

10 137 personnes dont 657 enfants, 47 de 13 ans et 26 de 12 ans et moins, seront condamnées aux travaux forcés, à la déportation dans une enceinte fortifiée, à un emprisonnement de moins d'un an ou de plus d'un an et, pour les mineurs, à la détention en "maison de correction".

35 conseils de guerre improvisés siégeront encore pendant deux ans pour "juger" toutes les personnes arrêtées.

"20 000 hommes, femmes, enfants tués pendant la bataille ou après la résistance à Paris et en province ; 3000 au moins morts dans les dépôts, les pontons, les forts, les prisons, la Nouvelle-Calédonie, par l'exil ou les maladies contractées pendant la captivité ; 13 700 condamnés à des peines qui, pour beaucoup, ont duré neuf ans ; 70 000 femmes, enfants, vieillards privés de leur soutien naturel ou jetés hors de France ; 107 000 victimes environ, voilà le bilan des vengeances de la haute bourgeoisie". (P.O. Lissagaray "Histoire de la Commune de Paris")

"Dimanche matin, sur plus de 2000 fédérés, 111 d'entres eux ont été fusillés et ce, dans des conditions qui démontrent que la victoire était entrée dans toute la maturité de la situation". (G. Gallifet, général Versaillais).

"Quand les hommes rendent leurs armes, on ne doit pas les fusiller...cela était admis. Malheureusement, sur certains points on a oublié les instructions que j'avais données". ( Mac-Mahon, maréchal nommé par Thiers commandant de l'armée de Versailles).

"On tuait partout, on tuait sans trêve. C'était le délire du massacre, et ces sanglantes saturnales allaient se prolonger pendant quatre jours à la lueur des maisons enflammées. C'est par milliers que les cadavres des "fusillés en masse" s'entassaient dans les rues des Abbesses, Lepic, des Poissonniers, au Moulin de la Galette, au Château-Rouge. Le 28 mai on vidait l'immense fosse commune creusée au milieu de la place. Les cadavres, à moitié décomposés, étaient chargés dans des tapissières. Tous les spectateurs étaient pleins d'effroi. Une jeune fille qui assistait à ce spectacle dit : j'en ai vu bien d'autres, dans un trou on a fourré 150 gardes nationaux". (Récit d'un témoin)

"Le cadavre est à terre mais l'idée est debout". (Victor Hugo, parlant de la Commune).

Le 26 mai, le général Vinoy s'emparait du faubourg Saint-Antoine et parvenait au pied du cimetière du Père-Lachaise, où se tenait "la vieille garde" des fédérés, ceux qui préféraient la mort à la fuite. Ceux qui ne s'étaient pas fait tuer sur leurs canons encloués furent adossés à un mur de ce cimetière, qui devait acquérir une si lugubre célébrité, et impitoyablement massacrés.

Le 28 mai cette proclamation était affichée sur les murs de Paris : "République française. Habitants de Paris L'armée de la France est venue vous sauver. Paris est délivré. Nos soldats ont enlevé, à quatre heures, les dernières positions occupées par les insurgés. Aujourd'hui la lutte est terminée ; l'ordre, le travail et la sécurité vont renaître.

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